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Les problemes de la conversion au Judaisme

Les problemes de la conversion au Judaisme

 

 

par le rav Refaël Cohen-Arazi
 

Sil est un dossier brûlant, qui occupe une place de choix sur la scène publique juive et dont l'issue a des implications considérables pour le sort de nombreux individus, c'est bien celui de la conversion! La seule expression qui nous semble convenir pour décrire l'atmosphère qui entoure ce débat pourtant tellement crucial, est celle de la folie. Nous sommes sur le point de perdre pied, de sombrer dans une situation tragique, aux répercussions désastreuses pour le peuple juif...

 D'une part, il y a l'incompréhension souvent doublée d'une ignorance de ceux qui se servent du tremplin conversion pour attaquer les autorités rabbiniques; de l'autre, la douleur et le chagrin de ceux qui attendent devant la porte, plaçant tous leurs espoirs pour un avenir meilleur dans ce certificat de judéité tant désiré mais dont, hélas, la teneur et la complexité leur échappent totalement.

Dans un tel climat, les autorités rabbiniques réagissent en raidissant leurs positions, soucieux de préserver l'intégrité tant de la Loi que du peuple juif lui-même, ce qui est interprété invariablement comme une manifestation d'inflexibilité et un refus de considérer la détresse humaine des candidats à la conversion. Mais même cette attitude n'est pas forcément efficace : sous certains cieux, la barrière est complètement défoncée, et le torrent de conversions effectuées à tour de bras est en train de submerger le peuple juif d'individus qui se soucient comme d'une guigne des préceptes élémentaires du judaïsme...

Alors que faire? Un souci dans le coeur de l'homme? Qu'il en fasse part aux autres, conseille le plus sage des hommes, le roi Chélomo. Peut-être réussirons-nous, dans le cadre de cet article, à faire part à tous les groupes concernés, d'une manière claire et systématique, des diverses facettes de ce problème épineux. Et à combattre le vent de folie qui souffle sur notre société.

Pauvres candidats

Disons-le d'emblée, il n'y a rien de plus louable qu'une personne qui souhaite sincèrement se convertir au judaïsme et adhérer à notre peuple. 
 Il est vrai que nous ne cherchons pas à susciter des conversions, n'ayant jamais pratiqué le prosélytisme doctrinal caractéristique du christianisme. Mais le judaïsme accueille volontiers ceux qui, parmi les membres des nations du monde, désirent en toute bonne foi embrasser la religion de Mochè. 
Et lorsque le candidat à la conversion est devenu Juif, le Choul'hane Âroukh insiste clairement sur le fait que nous devons faire la maximum d'efforts afin d'accorder au converti l'accueil le plus favorable, la Tora ordonne à trente reprises des obligations spécifiques envers le converti, toutes impliquant un amour et une aide en faveur de celui qui a fait l'effort de se joindre à notre peuple. Et il nous semble que dans la réalité, le public orthodoxe fait de son mieux pour accueillir intégralement dans ses rangs les personnes qui se sont converties en toute sincérité.

 Nous craignons cependant qu'aux côtés de candidats motivés et sérieux, dont l'amour pour la Tora est sans failles, d'autres personnes tentent de rejoindre notre peuple, gênant les personnes qui désirent effectivement devenir juives, et surtout nous amenant à prendre distances et précautions.

 Certains candidats sont sincères, tandis que l'engagement d'autres laisse à désirer. Le problème est de savoir comment établir en dernier recours que le candidat à la conversion qui se présente au Bèt Dine est effectivement sérieux. Quels sont les critères à notre disposition pour pénétrer l'âme du candidat, pour sonder les secrets de son coeur? La plupart des gens semblent d'ailleurs complètement ignorer la difficulté, ou alors font semblant de ne pas la connaître.

 Il est plutôt présomptueux d'exiger de la part des rabbanim de convertir au moins les candidats sincères et cette demande réitérée dans les débats publics relève soit de la démagogie, soit d'une surestimation flagrante du pouvoir des rabbins!

Le pourquoi de la conversion

Mais, demandera-t-on, pourquoi se convertirait-on, si ce n'est pour adhérer à la foi juive? Erreur! Les motivations qui peuvent susciter un intérêt pour le judaïsme sont aussi nombreuses que diverses et poussent parfois l'individu à formuler une demande de conversion suivant un tracé parfaitement absurde; il s'avère, souvent trop tard hélas, que les sentiments qui l'animent sont plus que douteux et n'ont absolument rien à voir avec la foi juive. En fin de compte, on peut estimer que les cas idéaux, ou du moins ceux qui répondent aux critères établis, forment un groupe, certes respectable, mais tout à fait minoritaire. 

Le cas classique
Un non-Juif ou une non-Juive vit avec un conjoint juif. Il entame alors cette formalité qui consiste à embrasser la religion juive, pour des raisons de pure convenance, sans avoir le moindre intérêt pour la Tora et le judaïsme. Une fois l'amour éteint, rien ne subsiste en général d'une telle démarche. (Dans une affaire où nous avons eu l'occasion d'intervenir, voici ce que le mari nous a confié : Et en plus, ma belle-mère m'a traité de sale Juif!. Devant notre étonnement, il nous a expliqué que cette dame s'était convertie autrefois, sans trop s'identifier au peuple juif, visiblement. Quelques années plus tard, donc, on en était là...

Les enfants issus de mariages mixtes

Certains vivent mal d'avoir épousé un non-Juif et reportent leurs remords sur leurs enfants qu'ils poussent, plus ou moins consciemment, à la conversion. Ils les encouragent à se mêler à la communauté, à fréquenter ses membres, etc... Parfois ces enfants vont même au Talmoud Tora, participent aux activités de mouvements de jeunesse juive, font comme si jusqu'au bout. Ainsi, nous avons déjà rencontré des couples non-Juifs de seconde génération qui avaient exigé, sans rire, un mariage avec orchestre hassidique, et qui, comble de l'aberration, avaient fait ensuite une bérit mila à leur fils, gentil de troisième génération!

Se considérant bien entendu comme juifs, ils finissent par entreprendre une démarche de conversion, fondée la plupart du temps sur un tragique malentendu : ils se sentent juifs, ont été en somme éduqués comme tels, et estiment que la conversion n'est plus qu'une simple formalité apposant le sceau de l'authenticité à leur judaïsme. Mais l'enthousiasme des débuts garantit rarement une foi durable et, en l'absence d'une pratique régulière fondée sur une solide connaissance, ces personnes n'arrivent pas à assumer leur engagement.  

Le Judaïsme salvateur

Certains découvrent soudain dans le Judaïsme le baume qui pansera tous leurs maux, la panacée. Isolés, malheureux, supportant mal l'insécurité de la société moderne, ils attendent de leur conversion une solution à tous leurs problèmes. Il est clair que ce sont généralement des êtres en détresse qui ont plutôt besoin d'une assistante sociale que d'une religion et se font une idée complètement fausse du Judaïsme. Ils reculent ensuite devant les difficultés que la Tora leur impose, s'attendent à recevoir et non à donner; ils sont incapables de faire preuve de la persévérance nécessaire pour supporter les classes et la période d'adaptation, de quelques années, que la communauté juive finit par exiger, vu le nombre d'échecs qui va en grandissant, avant de les accueillir pour de bon. Ils seront d'autant plus surpris de voir que le mariage n'est pas un passeport valable, bien au contraire. Peu résistent donc aux obstacles, très peu persévèrent dans la voie choisie.  

Les vagues d'immigration
Venues de l'ex-URSS, voire de pays d'Extrême-Orient, tels ces prétendus descendants des tribus perdues découverts par le rav Avihaïl quelque part en Malaisie, en Inde ou au Pérou, ces immigrants subissent une conversion en bloc, instruits dans la religion par des institutions fort contestées. Pour sa part, le Comité international pour la régularisation des conversions, dirigé par le rav Haïm Kreizwirth d'Anvers, mène une campagne vigoureuse contre ce genre de conversions superficielles. Car quel est le réel intérêt de ces Malaysiens ou de ces Russes pour la Tora et les mitswot?

Les relations
Il existe des cas plus courants qu'on ne le pense, de convertis qui ont la chance d'avoir des relations dans la communauté juive, qui un oncle bien placé, qui un cousin qui siège au conseil de la communauté. Parfois il s'agit même d'un rabbin : nous connaissons le cas d'un proche parent du candidat, rabbin dans une communauté importante, qui a usé de l'influence dont il jouit par ses fonctions pour faire convertir un jeune homme par une instance rabbinique des plus respectables; ce dernier ne possédait pas les notions élémentaires en Tora et ne manifestait pas la moindre velléité d'observer les mitswot. Il va sans dire que ce converti n'est jamais rentré dans la communauté juive.

L'étendue du désastre

Cette liste énumérant les cas de conversions effectuées dans la mauvaise foi est loin d'être exhaustive. Il semble que seul un pourcentage limité entreprend une démarche de conversion réellement motivée, parvenant au terme d'un itinéraire parfois ardu à un judaïsme authentique et devenant dignes de l'appellation de guér tsédeq; quant aux autres, la plupart quittent la communauté juive à plus ou moins brève échéance. Le secrétaire du Comité pour la régularisation des conversions, rav Nahoum Eisenstein, affirme que seul un pour cent des conversions seraient sincères, 99% ne le seraient pas!

La Rabbinat en Israël a mené une enquête pour vérifier le mode de vie de ceux qu'elle avait convertis. Les chiffres étaient affolants dix ans plus tard : la quasi-totalité de ces convertis ont abandonné toute pratique juive!

En Israël, il y aurait un millier de conversions par an. Aux Etats-Unis, la situation est encore plus inquiétante : en l'absence d'un Rabbinat central, n'importe qui préside aux conversions, et l'on parle de 3,000 procédures par an, dont, toujours selon le rav Eisenstein, une centaine seulement est valable.

Du côté du Judaïsme libéral en France, on traite, à notre connaissance, dans les 150 demandes par an; la moitié de ces convertis disparaissent totalement de la circulation, deux ou trois individus demeurent finalement dans les rangs de la communauté libérale, sans bien sûr correspondre aux critères de la Halakha. Le Consistoire semble s'occuper également d'une centaine de demandes par an; par ailleurs, le rav Eisenstein nous a signalé l'existence en France d'un service privé de conversion, cher mais efficace. Nous n'avons pour l'instant pas pu vérifier l'exactitude de ce renseignement.

En fin de compte, avant même d'avoir abordé les problèmes de Halakha et répondu à ceux qui exigent des rabbanim une position ouverte et permissive, on découvre que lorsqu'elles sont libéralement octroyées, ces conversions ne durent pas!  

Les conversions laïques
On peut comprendre à présent pourquoi l'idée même d'une conversion laïque, ou selon la mouvance libérale, ne peut être raisonnablement admise. Ne fût-ce que pour des raisons de rentabilité, pour emprunter un terme au monde de l'économie, il est clair qu'elles ne sont pas productives. Si ce n'est pour embrasser la foi juive et respecter la Tora, pensons-nous avoir démontré, une conversion est peu durable et le caractère éphémère de la procédure n'est à l'honneur ni de celui qui y a présidé ni de celui qui s'y est soumis. Pertes donc pour tout le monde et en premier lieu bien sûr, désacralisation des lois de la Halakha, comme on le verra ci-dessous.

La Halakha

Ici, pas d'ambiguïté : la Halakha considère qu'une conversion effectuée dans un but autre que l'adhésion à la foi juive et la volonté d'accomplir ses obligations est nulle et non avenue. C'est là le fait de prendre sur soi le joug de la Tora et des mitswot la quintessence même de la conversion expliquent les commentaires du Choul'hane Âroukh Yoré Déâ Taz 268,9.. Ceci est la conclusion de la plupart des autorités.

C'est pourquoi deux peuplades, qui ont perpétué dans le temps une démarche déficiente de conversion tout en refusant les mitswot, ont été repoussées par nos Maîtres (il s'agit des guivônim et des koutim - bien que la problématique les concernant fait l'objet d'une discussion, et notre argument n'est valable que si le problème avec eux était qu'ils ont fait semblant de se convertir).

Par contre, il est possible qu'une personne se convertissant pour des raisons intéressées, mais acceptant avec sérieux les mitswot, soit a posteriori (bedihavad) admissible.

Revenons donc à la question préliminaire. Comment faire de nos jours pour déterminer la sincérité et l'honnêteté de celui qui formule une demande de conversion : peut-être désire-t-il vraiment accepter le joug des mitswot, mais ne les connaît pas toutes? Peut-être faut-il lui concéder une intention louable et positive au bénéfice du doute?

Malheureusement, dans la situation actuelle, il est plutôt vraisemblable que même le candidat sincère cède à l'atmosphère ambiante et renonce à faire mieux que les autres, au spectacle de tant d'hypocrisie, de tous ces gens qui font montre de respect uniquement pour faire plaisir au rabbin, mais laissent tout tomber dès que la cérémonie est terminée cf. Brith Yitshaq de Rav Yitshaq Brand, p.24.. Il est probable que même les rabbins, sachant dans certains cas que le candidat ne se conduit pas tout à fait comme il le faudrait, renoncent à exiger plus, puisque les autres se conduisent vraiment mal!

Or, il va sans dire qu'une conversion doit être effectuée dans la bonne foi la plus totale! Contrairement à la situation qui prévaut dans l'accomplissement des mitswot, où l'intention claire d'accomplir une mitswa uniquement pour les raisons pour lesquelles la Tora nous les a ordonnées (en hébreu : lichma) n'est pas une condition absolue et où l'acte a sa valeur intrinsèque même en l'absence d'une intention louable - dans le cadre de la conversion, la sincérité est une condition sine qua non. Expliquons-nous : celui qui accomplit une mitswa pour impressionner son entourage, qui donne plus d'argent au pauvre parce qu'il est en public, qui arbore un plus bel étrog afin que les membres de la communauté l'estiment, est crédité d'une mitswa, même si elle est faite de manière imparfaite. En revanche, celui qui joue, dans un film par exemple, à mettre des téfilines ou à manger de la matsa, sans intention aucune de remplir une obligation religieuse, n'est en aucun cas crédité de la mitswa. C'est précisément ce qui se passe lorsqu'une personne joue devant le Bèt Dine : son immersion dans les eaux du miqwé est aussi valable qu'un plongeon dans la piscine municipale!

Une lettre signée par le rav Chakh, le rav Eliyachiv, le rav Auerbach, et d'autres personnalités rabbiniques contemporaines de tout premier rang, souligne une fois de plus qu'une conversion sans l'acceptation des mitswot est nulle et non avenue.

Cependant, il est rare que le candidat soit totalement dénué de bons sentiments : il y croit un peu, malgré tout. À suivre cette logique, ce converti serait donc tout de même plus ou moins juif... Absurde : c'est comme de dire d'une femme qu'elle est plus ou moins enceinte! Il n'y a pas de demi-mesure.

En conséquence, la question se pose si tel converti peut être compté parmi les dix personnes d'un minyane, ou si l'on peut accomplir par son intermédiaire une quelconque mitswa : par contre, pour lui-même, et c'est tragique, on ne peut plus simplement renvoyer ce converti à son peuple. Somme toute, il s'est quelque peu engagé et ne peut plus se libérer des mitswot. S'il prend plus tard conscience de son erreur, et qu'il déplore l'esprit de légèreté qui a régi la procédure de conversion, il peut repasser au miqwé devant trois rabbanim pour arranger son statut.

Les grandes âliyot et leurs problèmes

En France, nous avons encore le temps de nous pencher sur des détails : sur 1,200 dossiers en attente, une centaine par an seulement aboutissent finalement. Le problème prend des dimensions plus catastrophiques en Israël : 30 à 45% des Russes arrivés en Israël ne sont pas juifs, c'est le chiffre admis en général par les responsables officiels. Dès qu'ils s'installent dans la vie quotidienne, la question de leur judéité surgit à brève échéance pour ces 300 à 400,000 nouveaux immigrants. Le désir d'être comme tout le monde et de s'intégrer dans la société les pousse donc tôt ou tard à faire le siège des diverses instances rabbiniques en Israël. Par dizaines, par centaines, par milliers... Certainsdayanim tiennent bon et persévèrent dans l'examen minutieux de chaque cas, même si le dossier doit rester en souffrance pendant des années; d'autres, ne résistant pas à la pression publique, lâchent du lest. Parmi les dossiers qu'il traite, chaque Tribunal Rabbinique trouve quotidiennement une ou deux demandes de conversion.

La situation se complique du fait de l'existence d'Oulpané giour qui organisent des cours accélérés pour les candidats, leur garantissant une conversion rapide; des journaux comme Yated Nééman, ou des organismes comme le Comité international pour la régularisation des conversions n'ont de cesse de dénoncer ce genre de classes préparatoires fonctionnant en-dehors des instances rabbiniques officielles.

De plus, le ministre de l'intégration, Yaïr Tsaban (membre du groupe Mérets, dirigé par Choulamith Aloni, Tsaban est moins connu du public, mais ses idées antireligieuses et radicalistes ne sont pas moins redoutables) a demandé et obtenu récemment une réunion avec le Grand Rabbin Séfarade d'Israël, le rav Baqchi Doron, afin de discuter des moyens susceptibles d'alléger encore la procédure des conversions. La rencontre, qui s'est faite discrètement, a été révélée au public, provoquant une vague de protestations.

Les résultats

Les innombrables cas de conversions basées sur des malentendus, la pression exercée sur les Tribunaux Rabbiniques et, ne l'oublions pas, les nombreux non-Juifs qui s'infiltrent dans le peuple juif actuellement en exploitant le mouvement d'émigration de l'ex-URSS vers Israël (sans parler des Éthiopiens qui refusent de se convertir et de lever ainsi le doute qui plane sur leur judéité), tout cela suscite de grandes inquiétudes pour l'avenir. Devrons-nous bientôt exiger, chaque fois qu'un inconnu désire se marier ou se joindre à une communauté orthodoxe, qu'il exhibe ses lettres de créances, sous la forme d'une filiation attestant la judéité de toutes ses ascendances (cela suffit, puisque les femmes, et elles seules, transmettent la judéité aux enfants)? Et à défaut, serons-nous obligés d'exiger une conversion lé-houmra par rigorisme de toute personne incapable de le faire?

Il semble que l'époque où l'on pouvait appeler un Juif dans la rue pour compléter un minyane sera bientôt révolue!

Pour les kohanim qui vivent parmi nous, le problème est décuplé par le fait que la halakha leur interdit de prendre pour épouse une convertie. Alors qu'un simple Juif israël ou qu'un modeste Lévi pourra, le cas échéant, demander à sa future compagne de passer une conversion lé-houmra, afin d'éliminer le doute, le Kohène n'aura pas cette alternative! En conséquence, s'il se trouve que deux générations auparavant, une grand-mère s'est convertie dans des conditions douteuses (manque de sérieux dans l'acceptation des mitswot, etc..) la petite-fille sera obligée de se reconvertir pour régulariser sa situation, tout en restant interdite au Kohène. Ce dernier sera réduit à chercher la perle rare qui n'a aucun problème de conversion dans sa famille...

Est-ce donc là le sombre avenir qui nous attend? Non, inutile de parler d'avenir, nous y sommes déjà! Nous pouvons affirmer qu'en France, où les mariages mixtes atteignent un taux de 50%, un jeune sur trois ne peut présenter une filiation correcte, quand bien même il se nomme Bitton, Dahan ou Fitoussi (les Rosenberg, Weill, même les Kahn et autres familles achkénazes ont depuis longtemps plongé dans l'assimilation). Et comble d'ironie, le fait que ces gens souffrent de l'ambiguïté de leur statut et cherchent précisément à se forger une identité, les amène à fréquenter les cours de Tora ou des séminaires d'études juives. Or on connaît le résultat de ces démarches...

Des solutions ?

Nous croyons que dans cette situation folle, il faudrait prendre au moins les dispositions suivantes afin de préserver ce qui peut l'être.

L'instruction des candidats
Nous pensons qu'il est du devoir des rabbanim de mettre mille fois en garde les aspirants à la conversion; il faut qu'ils soient parfaitement conscients du danger inhérent à une démarche qui ne serait pas fondée sur une compréhension claire et univoque des obligations de la Tora; les rabbanim devront également leur brosser un tableau sans complaisance des difficultés et obstacles qui se dresseront sur la longue route du converti, en particulier dans le domaine de l'application des mitswot. La conversion est une voie ardue.

Du côté des Baté Dinim (Tribunaux Rabbiniques)

À notre humble avis, il nous semble que la seule solution raisonnable dans ce domaine, comme dans tant d'autres (la Kacheroute, les structures des communautés ou des institutions communautaires, l'organisation de grandes manifestations, etc..) est le professionnalisme!

Nous croyons, en effet, que la communauté française aurait énormément à gagner si elle réussissait à gérer les conversions à l'aide d'une équipe préposée à cet effet. Une telle équipe comprendrait un dayane, un rabbin de communauté, un responsable d'institution éducative, un médecin, etc.. On garantirait ainsi l'objectivité et l'indépendance des instances préposées aux conversions, évitant du même coup d'accueillir des personnes qui n'ont pas leur place parmi nous.

Quant à la situation en Erets Israël, nous redoutons d'une manière inévitable un avenir lourd de conflits et de drames familiaux.

Il nous est interdit, cependant, d'oublier l'apport au judaïsme de convertis tels que Yitro, le beau-père de Mochè, ou que Ruth, par laquelle passe la filiation du roi David et du Messie.. Il faut reconnaître la valeur de grands maîtres tels que Chémaya et Abtaliyon, dont les noms apparaissent dans les Maximes de nos Pères à titre de personnalités marquantes de notre transmission.

Il faut enfin rappeler que nous mêlons dans la même foulée, dans nos prières, les tsadiqim, les hassidim aux guérè tsédeq, les convertis sincères.

Glossaire

Âmida : du verbe âmad, les 18 bénédictions qu'on récite debout pendant les 3 prières qotidiennes. 
Batè Dinim : Tribunal Rabbinique 
Bénè Yisraèl : enfants d'Israël. 
Bérakha : bénédiction au sens religieux, souhait. 
Choul'hane Âroukh : litt. La Table Préparée, ouvrage de compilation de Rabbi Yossèf Qaro (Marane), vaste codification de la jurisprudence talmudique complétée par les notes et additions de la Mappa (litt. La Nappe Dressée) par Rabbi Mosès Isserlès (Rama)contemporain du premier. 
Évèn ha-Êzèr : L'une des quatre parties du Tour et du Choul'hane Âroukh, traitant essentiellement des halakhot relatives au mariage et au divorce. 
Guémara : litt. complément. Procès-verbaux des discussions du Talmoud, commentaires accumulés autour de la Michena et exposé par les Amoraïm. 
Guèr : prosélyte, converti au judaïsme. 
Hakhame : sage autorisé à exprimer le point de vue de la Tora. 
Halakha : litt. marche. Ensemble des lois et jurisprudences de la législation civile et pénale régissant la vie pratique, rituelle, spirituelle. 
Kohène, kohanim : prêtre(s), descendant de Aharone. 
Kolel : Institut des Hautes Études rabbiniques. 
Machiah : messie.Michena, michenayot : litt. répétition, de chana (répéter), enseignement, rédaction des préceptes de la Tora orale, base de la législation civile et religieuse, réalisée à la fin du 2ème siècle par Rabbi Yéhouda ha-Nassi. Elle est subdivisée en six ordres avec de nombreux sous-traités. 
Mila : circoncision. 
Miqwé : bassin d'immersion rituelle. 
Mitswot âssè : prescriptions religieuses, devoirs positifs. 
Mitswot lo ta-âssè : interdits, commandements négatifs. 
Qorbane : sacrifice au Temple 
Sanhèdrine : institution qui a dirigé Israël avant la destruction du Temple. 
Talmoud : litt. étude, le Talmud est formé par la Michena et la Guémara, le Talmoud Babli, le plus volumineux, contient de la Halakha et de la Haggada (récits narratifs et spéculatifs), le Talmoud Yérouchalmi contient peu de Haggada. 
Tévila : ablution, immersion dans le bain rituel. 
Tora : les cinq livres de Moïse, Pentateuque. 
Tsaddiq, tsaddiqim : juste(s), homme pieux. 
Tsédaqa : litt. justice, charité. 
Tsèdèq : justice. 
Yètsèr : instinct naturel de l'homme. 
Yètsèr ha-râ : le mauvais penchant, instinct du mal. 
Yètsèr ha-tov : le penchant vers le bien.

 

Extrait de Kountrass, revue de pensée juive et d'information conçue et publiée à Jérusalem.

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Admirablement bien écrit mais ne peut cacher la xénophobie évidente de l'auteur qui maquille d'un fond de teint, un masque qui commencera à se défaire et à couler au moindre défi! Pourquoi demander une telle foi à un converti, qu'un juif lui même ne pourrait soutenir et confirmer. Dieu sait combien de juifs sont athées par croyance et participent à des services, non par hypocrisie mais par sens d'appartenance à une famille pas particulièrement religieuse. Si convertir veut dire faire rejoindre une foi ultra-orthodoxe, autant garder sa foi d'origine. Etre Juif, pour beaucoup, ne veut pas dire mettre ses phylactères et prier tous les jours! Moi qui suis né Juif avec un grand père Rabbin, je n'ai jamais mis mes tephilim! Suis-je moins juif?! Pourtant mes mitzvot ont dépassé largement ceux des plus religieux parmi nous. D'ailleurs c'est en côtoyant les religieux que je suis devenu athée! Je sais que j'ai plus de coeur! Allez comprendre!

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