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Festivals d'Essaouira 2008

Envoyé par Dafouineuse 
Festivals d'Essaouira 2008
20 juillet 2008, 11:55
DE LA PART DE CLAUDE SENOUF POUR DAFINA

FESTIVAL GNAOUA D'ESSAOUIRA 2008


L'importance du Festival Gnaoua à Essaouira n'est certainement plus à démontrer. Cet évènement a maintenant acquis une notoriété mondiale. Il était fascinant de rencontrer pendant cette édition 2008 des gens venant de toutes latitudes, de milieux, d'origines et de professions tellement diverses. La liste en est fascinante . Peut-on imaginer que ce couple venu de Nouvelle-Zélande soit devenu des passionnes du Festival au point d'y assister pour la troisième fois ?

Jeudi en fin de journée le cortège inaugural se mettait en route, traversant sereinement la haie d'honneur constituée par la foule et les différentes formations de musiciens, aux costumes bigarrées ; Les poignées de main chaleureuse succédaient aux accolades d'une ville pleine d'une reconnaissance et d'une émotion qui pouvait se lire sur tous les visages.

Car depuis une douzaine d'années la constance et le travail ont payé. La petite graine a germé, un arbrisseau puis est sortie de terre constituée de ces petites pousses d'un vert tendre et fragile, tellement fragile.
Poursuivant sa croissance, la plante est montée vers le ciel en ouvrant ses bras, donnant les premières années une belle floraison puis une moisson dont les fruits n'ont pas fini de murir. Ce travail gigantesque s'est mis au service d'une imagination et d'une créativité remarquables. La ville d'Essaouira a constitué l'avant-poste d'une réflexion sur un lieu virtuel de la pensée plurielle. Il y a quarante ans un groupe d'universitaires et amis contemplaient la signification culturelle, littéraire et politique de cette configuration prémonitoire de l'alliance des métissages et de leur relecture par la sociologie contemporaine. Le regard rassis des intellectuels français trouva dans un deuxième souffle un espace où se conjuguaient des valeurs de liberté, de justice et d'amour. C'est en ces termes naïfs mais authentiques que naissaient certains contours du Printemps de Mai 68. Car ce sont bel et bien ici au regard de mon témoignage vécu , que les courants de pensée perçu comme un exotisme africain ont parcouru le chemin de la révolution culturelle des années 60 culminant par ce qu'il est convenu d'appeler « Les évènements de Mai 68 ».
C'est ici que naquirent un certain nombre d'idées qui furent régurgitées à la Sorbonne, à Jussieu u a la Faculté de lettres de Tours
particulièrement dans la salle Louis XI. Il ne faut pas ignorer cette dimension de l'histoire d'Essaouira et il ne faut pas ignorer aussi que la réflexion était aussi inspirée par un romantisme d'exclusion et de solitude. Le monde fantastique pointait a l'orée de ces digressions ou les chalutiers a sec ressemblaient a des géants endormis. Le sentiment qui prévalait était la remise en cause de l'enseignement dogmatique. La découverte des rites de la transe et de la macumba avec ce qu'elles représentaient de transgression absolue fut un véritable choc : « Nos fantasmes de liberté retrouvée se confondaient avec celle de l'affranchissement de la négritude disait le sociologue Georges Lapassade.» La pensée monolithique des maitres de conférence avec leur discours théorique qui ne souffraient aucune contradiction avait fait son temps.

C'est dans ce creuset que ces divers éléments vont se bonifier en en passant a travers le chinois de la raison. De transgression il n'est plus question:
la construction méticuleuse s'est substituée aux désordres du corps et de l'âme. Il reste la restitution d'un espace de vie a une jeunesse qui en est trop souvent privée. C'est l'espoir que l'on peut donner a des dizaines de milliers d'adolescents qui regardent passer le train du confort et du progrès sans que jamais ils puissent même rêver d'y accéder . Voilà, me semble-t-il une démarche a même de constituer un rempart contre l'extrémisme. Il serait souhaitable que le modèle d'Essaouira puisse essaimer dans le Royaume et constituer périodiquement un ensemble de rendez-vous pour la jeunesse de ce pays. Il ne s'agit pas d'être des donneurs de leçon mais au contraire de répondre avec justesse à certaines attentes. Au delà de cette signification pédagogique il y a toutes celles que l'on peut décoder dans les choix musicaux. En premier lieu le questionnement déterminée par ce que l'on appelle un peu pompeusement la fusion. « Ah la fusion par ci et la fusion par la » . Plus simplement ce sont des genres musicaux distincts, qui ont souvent par ailleurs une similarité rythmique et qui se livrent a l'exercice de jouer ensemble.
Cela donne souvent une cacophonie sympathique ! Mais lorsque les échanges, par une forme de magie se complètent se prolongent et créent une émulation on arrive a des sommets de l'émotion. La démarche est audacieuse et courageuse et elle illustre ce que les hommes et les femmes issus de culture différentes peuvent conjuguer ensemble.

Il s'agit d'un débat qui est au cœur de la réflexion contemporaine sur « L'Alliance des civilisations ». il est temps de citer l'homme qui par sa réflexion et sa sagesse est le véritable mentor de ce projet et par la suite celui de l'ensembles des autres activités culturelles liées a la Ville . « Dans l'environnement qui est le notre , disait André Azoulay, qui est parfois fait de sang et de tragédie parce que l'on ne serait pas de la même région du même pays ou de la même spiritualité Essaouira est une démonstration éclatante que l'on peut en Pays Arabe en Terre Musulmane en Afrique du Nord et dans la mouvance du Monde Arabe réunir des centaines de millier de personne pour un festival de musique qui est aujourd'hui l'un des plus grands a la fois dans la région et dans le monde et qui ne cache pas ses choix idéologiques . Nous sommes ici pour apporter une réponse, la plus déterminée, à tous ceux qui prêchent la haine. »

Cet apport est inestimable et il s'inscrit dans un échiquier de plus grande dimension qui est le rapport que les divers courants spirituels ou politique entretiennent, soit qu'ils choisissent de s'affronter, soit qu'il choisissent d'unir leur différence par la complémentarité Le public lui a souvent une lecture, au premier degré et s'enthousiasme dans ce qui transparait comme une virtuosité. La diversité des programmes proposes est remarquable et fait preuve d'un véritable éclectisme.

C'est en osant présenter un musicien comme Wayne Shorter à un public qui n'est pas nécessairement constitué de puriste du Jazz que l'on tire les masses vers le haut. Saluons l'audace de la démarche. Il faut dire que Wayne Shorter même pour ceux qui connaissent bien sa musique nous a lui même déconcerté en explorant un phrasé qu'il a d'emblé déterminé comme une locution inachevée. Le sens de cette démarche est là aussi, la
contemplation d'un langage intérieur désarticulé. En ce sens il y avait une adéquation fortuite mais harmonieuse avec les objectifs du Festival. Wayne Shorter a joué avec miles Davis et Herbie Hancock et l'expression de ses recherches est le fruit d'une vie entière et donc pour ceux qui en douterait un travail d'une grande maturité. La qualité de la musique présentée s'améliore incontestablement d'année en année. Hormis la notoriété de Wayne Shorter qui constituait l'attente la plus soutenue des mélomanes certains musiciens ont suscité un enthousiasme unanime. Le duo argentin constitué de Fermin et Nelson ainsi que la troupe coréenne Samulnori Molgae se sont partagés la vedette et furent les plus appréciés de cette onzième édition du Festival.

Certains exercices sont plus sereins et déclinent les atouts de mélodie plus familière comme le Trio Joubran qui se produisait a Dar Souiri avec un invite surprise en la personne de Ibrahim Maalouf , jeune trompettiste libanais virtuose dont le nouveau CD Diasporas a remporté un vrai succès en Europe .

Les différents Festivals de musique qui se déroulent à Essaouira, que ce soit les Andalousies Atlantiques, les Alizes ou les Gnaouas ont tous en commun cette dimension centrale de pluralisme. La ville change et se développe tout en restant de dimension humaine. Elle sait gérer son développement sans débordement. Contrairement à l'hystérie anarchique qui touche le développement d'autres viles du Royaume, Essaouira progresse à un rythme mesuré. Le groupe Accor est très présent et il faut saluer la réalisation d'un Hôtel Ibis qui conjugue agréablement modernité et petits prix. La Royal Air Maroc n'est pas de reste avec la réalisation d'un Hôtel Atlas situé en bord de mer. Le Festival s'est terminé dimanche avec L'Orchestre National de Barbes toujours avec ce sentiment que l'on aurait voulu encore un peu prolonger ces moments . Comme la solitude du coureur de fond !..

Claude Senouf





Modifié 2 fois. Dernière modification le 08/08/2008 08:55 par Dafouineuse.
Re: Festival Gnawa d'Essaouira 2008
08 août 2008, 08:49

FESTIVAL DES JEUNES TALENTS GNAOUA
18-19-20-21 Août 2008
CONCERTS



* Samedi 18 ................................................................................................................................................................

Scène (place Moulay Hassan)

19 h 50 : Ouverture Officielle

20 h 00 : Création musicale présentée par 25 jeunes talents accompagnés par Tyour gnaoua sous la direction de Maalam Abdesslam Alikane

20 h 30 : Concert présenté par les quatre gagnants de l'édition 2006 : El houssin Mhidi, Abdellah Stitou, Dris El Hadi et Said Boulhimas.

21 h 05 : Gnaoua Jeunes Talents : Khalid Amarhouch (Essaouira)

21 h 45 : Gnaoua Jeunes Talents : Youssef Oughassan (Casablanca)

22 h 25 : Gnaoua Jeunes Talents : Fouad Loubane (Essaouira)

23 h 10 : Ganga Fusion


* Dimanche 19 ...........................................................................................................................................................

Scène (place Moulay Hassan)

20 h 00 : Radio Essaouira

20 h 50 : Gnaoua Jeunes Talents : Said El Wassifi (Rabat)

21 h 35 : Gnaoua Jeunes Talents : Abdel Malek Kadiri (Essaouira )

22 h 20 : Gnaoua Jeunes Talents : Ait Hmitti Tarik (Marrakech)

23 h 05 : Amarg Fusion

Dar Souiri*

23 h 00 : Maa Lam Abdesslam Alikane et Tyour Gnaoua + Maalem Mustafa Bakbou (Invité d'honneur).


* Lundi 20 .................................................................................................................................................................

Scène (place Moulay Hassan)

20 h 00 : Bleu Mogador

20 h 50 : Gnaoua Jeunes Talents : El Houssin El Bziz (Agadir)

21 h 35 : Gnaoua Jeunes Talents : Arafa Chaara (Tetouan)

22 h 20 : Gnaoua Jeunes Talents : Brahim El Houari/Bssi (Essaouira)

23 h 05 : Mazagan

Dar Souiri *

17 h 00 : Concert gratuit pour les enfants/réservé aux moins de 12 ans.

Gnaoua jeunes talents : groupe Bambara

23 h 00 : Maalam Chrif Ragragui + Paco Ghioaun


* Mardi 21 .................................................................................................................................................................

Cérémonie de clôture .

Scène (place Moulay Hassan)

20 h 30 : Majda et Maalam Aziz Bakbou.

21 h 35 : Remise des quatre prix attribués aux jeunes Talents Gnaoua.

22 h 00 : Groupe Lmchaheb

22 h 45 : Maalam Mahmoud Guinéa

Dar Souiri*

23 h 00 : Hommage aux Mkadma khadouj Benyahya et Mkadma Aicha Kabrane (concert officiel)

Groupe Khadmanen et Haddarate d'Essaouira (Femme gnaoui) + Maalam Mokhtar Guinéa

Pour en savoir plus cliquez ici :[www.festivaljeunestalents-essaouira.com]






Modifié 1 fois. Dernière modification le 10/10/2008 05:29 par Dafouineuse.
Re: Festivals d'Essaouira 2008
10 octobre 2008, 05:34
Du 30 octobre au 01 novembre 2008 aura lieu le Festival des Andalousies Atlantiques a Essaouira

Le festival des Andalousies Atlantiques d'Essaouira, initié par l'association Essaouira-Mogador et organisé conjointement par la Fondation des Trois cultures de la Méditerranée et de la Fondation d'Essaouira Mogador pour les Arts, la Culture et le patrimoine, revient cette année pour sa 5eme edition.

A cette occasion un hommage exceptionnel sera rendu à Samy El Maghribi
Re: Festivals d'Essaouira 2008
27 octobre 2008, 08:38
Festival des Andalousies Atlantiques
Essaouira du 30 octobre au 1er novembre 2008
PROGRAMME


Jeudi 30 octobre 2008

17h30 - Bab Manzah
Abdelkrim L’AMARTI et Yolande AMZALLAG
Musique Gharnatie et Hawzi
21h30 - Bab Manzah
Mohamed ALI Mouwachahat et classiques arabes
22h30 - Bab Manzah
Ensemble Maxime KAROUTCHI avec Yolande AMZALLAG
Répertoire populaire de Samy Elmaghribi

Vendredi 31 octobre 2008

10h00 - Dar Souiri
Forum : Identités multiples et musiques métisses
17h30 - Bab Manzah
Paco IBANEZ
Poésie en musique
21h00 - Bab Manzah
Marina HEREDIA
Meligrana, Flamenco et chansons populaires de Grenade
22h30 – Bab Manzah
Mohamed BRIOUEL et l’orchestre Abdelkrim Raiss
Avec Abdelkrim L’AMARTI
Musique andalouse

Samedi 1er novembre 2008

10h00 – Dar Souiri
Forum : Identités multiples et musiques métisses
17h30 – Bab Manzah
Ensemble EL GUSTO
Répertoire Chaâbi algérien
21h00 – Bab Manzah
Pasion VEGA
Pasion en vivo
23h00 – Bab Manzah
Jil JILALA
Malhoune
Re: Festivals d'Essaouira 2008
27 octobre 2008, 08:40
Festival des Andalousies Atlantiques à Essaouira
Hommage à Samy Al Maghrebi
PAR CLAUDE SENOUF


Ceux qui ont assisté l’année dernière au Festival des Andalousies Atlantiques restent encore sous la magie de cet événement au charme envoûtant et particulier. Cette année, le programme est consacré au regrette Samy Al Maghrebi.
Comme pour souligner la proximité de l’artiste avec son public ce sera sa propre fille Yolande, qui interprétera son répertoire. Il est courant de considérer Samy comme quelqu’un de lié au milieu familial. Il y a été associée dans la célébration des fêtes et des mariages. Ce sera aussi vraisemblablement la dernière fois que Yolande Amzalag se produira dans un contexte de cette importance.Qui pourrait mieux que sa fille restituer toute la dimension emotionelle de Samy El Maghrebi : elle a recueilli en héritage la sensibilité festive, nostalgique et fragile de son père .
Yolande Amzalag ne cherche pas à paraître. L’authenticité de ses chants a traversé les décennies au mépris des modes. Aujourd’hui on peut lire dans ses yeux un peu d’amusement à voir toute cette fébrilité autour de son père Y a t il vraiment création sans cette fragilité et ce doute qui accompagne l’artiste ?
Sami alliait à la fois la puissance puisée dans le tissu populaire et une délicatesse qui donnait une réelle intimité a ses concerts. À la liesse et l’enthousiasme se mêlait une intense sensation de proximité.
Et comme si nous ici nous avions besoin de distinguer entre les hommes ?
Quoi de plus naturel que cette joie qui prend le cœur de tous les Marocains ?
Et pourtant l’imbécillité de l’exclusion et de l’intolérance fait que le message de la communion et de l’amour doit être rappelé sans relâche. Epargnez-moi de distinguer, j’en perdrais un peu de ma dignité. Essaouira en est le témoin inextinguible.
À côté de Yolande Amzalag, d’autres artistes de talent vont se produire. Maria Heredia exprimera la quintessence du Flamenco Classico.
Samedi a 17.00 les musiciens du groupe de Chaabi « El Gusto » à la recherche d’amour et de pureté vous prennent jusqu’au tréfonds de l’émotion dans ces retrouvailles historiques. Où étiez-vous ?
Le temps est passé, mais les enfants courent au rythme des mêmes bandirs et au clairon des mélopées qui se perdent de toits en terrasses chaulées.
Les oliviers et l’odeur de la terre mouillée par les premières pluies d’automne exhalent cette sensation de précarité : celle de Camus, le médiateur mélancolique, ou celle de Delacroix aux moissons brûlantes qui scrutent l’infini. Terre de la sensualité et de la cruauté de l’amour, perdu ou impossible, que les baladins chantent au bord du chemin. N’avez-vous jamais rêvé de suivre la caravane d’un cirque ?
Dans un registre plus ludique, l’ensemble Pasion de La Vega célèbre les Noces du Jazz et du Flamenco. Les Ibères rencontrent les Africains, les accords de guitare soulignent et cisèlent le son plaintif du saxophone soprano.
Dans ce registre de l’imagerie, on peut comparer Maxime Karoutchi à un chevalier solitaire, lui qui se produira le Samedi a 22.30 avec Yolande à Bab Manzah. Cette voix d’une exigence implacable, d’une puissance et d’une douceur inégalée dans le registre andalou sonne comme un cristal. Quel duo exceptionnel ! Encore une fois l’émotion va faire chavirer nos petits coeurs fragiles ! Vous n’avez pas connu l’époque où Jil Jilala rivalisait avec Nass Al Ghiwan. c’était un peu comme Les Beatles contre les Stones. Chacun avait leurs fans. quatre décennies plus tard les jeunes, on conquit, ici même, à Essaouira, le droit à un espace de liberté et de parole. Rendez-vous donc à Essaouira sur la place Moulay Hassan pour boire un ristretto ou manger une glace chez l’Italien. Jil Jilala c’est la clôture, le Samedi a 23.00 avec la merveilleuse Majda Yiahiaoui dont nous avions parlé lors du festival de Melhoun.

Claude Senouf
La tribune N°617•16/10/2008
Re: Festivals d'Essaouira 2008
21 novembre 2008, 07:51
“Identité et Dialogue” plane sur le festival des Andalousies atlantiques
PAR CLAUDE SENOUF


Cette année, au cours de ce superbe festival de musique consacré à Samy El Maghribi, ce sont les forums qui avaient lieu en marge des programmes musicaux, qui ont tout particulièrement retenu l’attention. Après plusieurs années d’exercices qui semblent aujourd’hui avoir été le préambule d’une réflexion sur l’alliance des civilisations, un sentiment de maturité primait sur les débats. La personnalité de Yolande Amzallag, fille du légendaire troubadour, est l’illustration de cette dualité qui allie la tradition et une conception moderne et contemporaine des enjeux sociaux et politiques. D’autres voix ont pris le relais du discours dogmatique, mais nécessaire, de ceux qui par leur parcours politique ou leur formation d’universitaire avaient souvent exprimé une forme de rigidité. Quittant l’abstraction, les débats se sont orientés vers une forme de pragmatisme serein, mature et responsable. Il est particulièrement gratifiant de capitaliser, en termes de réflexion, les efforts incessants d’une équipe dirigée et éclairée par cet homme à la silhouette fragile, mais à la détermination d’un acier trempé. Grâce à un travail qui a tout du tour de force, il a su, à travers les instances nationales et internationales, nous faire comprendre que tout est possible. Aujourd’hui, le discours d’André Azoulay est complété par une dimension de liberté retrouvée. Il s’agit de mettre au profit de la société civile le fruit de son travail et de son expérience. Après la faillite des politiques, la société civile doit prendre le relais de cette démarche qui, au regard des propos abordés dans les Forums du Festival, semble être un exercice naturel.

Une réflexion sur la « dhimitude » est nécessaire…
Il s’agit de régénérer et poursuivre la réflexion entamée, il y a un peu plus de trente ans, par un groupe d'intellectuels, originaires pour l’essentiel du Maroc.
Au cours de ces années, chacun d’entre nous, a mûri et affiné ses analyses, pour passer le relais a ceux, dont les convictions renforcées, confluent vers les mêmes rivages et rejoignent aujourd’hui naturellement ce qu’étaient les objectifs du mouvement « Identité et Dialogue ». Il s'agissait alors de s’engager sur la voie de la Paix et tenter par le dialogue de mettre un terme à la situation d’affrontement qui continue de prévaloir en Israël et en Palestine.
Aujourd'hui, cette démarche peut être pro l o n g é e et élargie par la volonté de ceux qui, au Maroc, pensent que ce combat mérite d'être poursuivi. Et, avec l’élection de Barak Obama les choses vont singulièrement changer. Il a indiqué dans sa campagne que le règlement du conflit était l’une de ses priorités. Il a compris que le noeud gordien de l’affrontement se trouve là et que la configuration raisonnée d’une situation pacifiée entre le monde arabo-musulman et l’occident passe par là.
On peut tirer une grande fierté d’avoir été ici au Maroc et à Essaouira les pionniers de cette démarche. L’application concrète de ces échanges, dans un cadre à déterminer, contribuera à ouvrir, en situation, un véritable débat sur les questions identitaires.
Mais, il s’agit de se poser les vraies questions et d’aborder les vrais problèmes. En voici quelques unes que je porte à votre appréciation: « Pourquoi Tzipi Livni n’a-t-elle pas consulté les partis arabes israéliens dans sa quête de former un gouvernement de coalition ? » « Pourquoi le parti Shaas, constitué pour sa majorité de juifs marocains, s’oppose-t-il à ouvrir le débat sur la question de Jérusalem ? » « Peut-on penser que 300.000 juifs marocains aient quitté leur pays sans que cela puisse constituer un trouble profond ? »
Il en découle que les chants qui sont à la fois un cri de joie et de douleur, ne peuvent pas se substituer à une démarche analytique nécessaire. Ceux qui voudront construire un véritable pont entre le Maroc et sa diaspora juive devront surmonter les non dits, parfois douloureux. Pour se reconstruire, il faut affronter la réalité. « Quel était le statut des Juifs du Maroc et pourquoi et comment sont-ils partis ? » Enfant, j’ai assisté à des scènes dont je garde cuisante la mémoire : ces familles qui venaient dans un état de dénuement total passer leur dernière nuit dans notre maison bourgeoise de Mers Sultan, après avoir voyagé 24 heures en car. Refusant de manger autre nourriture que du pain, des oeufs durs ou des fruits car ils craignaient de transgresse r la « cachroute », ils passaient des heures entières dans la salle de bain qu’ils transformaient en aquaparc. Le lendemain, avec une angoisse indéfinissable dans le regard, comme s’ils étaient conduits à l’abattoir, ils s’entassaient dans les cales des paquebots de la Compagnie Paquet qui les conduisaient à Marseille puis vers des paradis illusoires où le miel avait le goût de l’amertume et le lait celui de la saumure. Personne ne peut me le contester : je l’ai vu de mes propres yeux. Les conditions de cette immigration ne sont pas plus glorieuses. Quels en furent les enjeux et les contreparties ? Il ne m’appartient pas de faire le constat de certaines erreurs. Mais, par amour de ce pays qui m’a tellement donné, il est de mon devoir de souligner la nécessité de mettre les mots en face de la réalité.

Claude Senouf
La tribune N°620•06/11/2008



Modifié 1 fois. Dernière modification le 21/11/2008 07:54 par Dafouineuse.
Pièces jointes:
Essaouira.jpg
Re: Festivals d'Essaouira 2008
24 novembre 2008, 04:30
Comment peut-on ecrire des choses pareilles aujourd'hui a propos des immigres juifs-marocains des annees 1950-60: "Comme s'ils etaient conduits a l'abattoir", ces juifs qui priaient depuis 2000 ans "l'an prochain a Jerusalem"?

Et puis ces relents de superiorite petite-bourgeoise d'un "occidental" a l'endroit de ces gens qui "passaient des heures entieres dans la salle de bain qu'ils transformaient en aquaparc".

Quel anti-sionisme honteux, qui n'ose pas dire son nom (on ne sait jamais, Claude Senouf pourrait un jour avoir besoin de l'Etat d'Israel) se cache derriere cette definition de l'Etat juif: " des paradis illusoires ou le miel avait le gout de l'amertume et le lait celui de la saumure". Pietre variation sur l'expression biblique "la terre ou coulent le lait et le miel".

A force de vouloir faire plaisir a ses hotes marocains, Claude Senouf retarde de 50 ans.

Les juifs-marocains installes en Israel ne pensent pas avoir ete envoyes "a l'abbatoir"!!! Demandez son avis a un jeune officier-aviateur de Tzahal specialise dans l'electronique de pointe, ou a une jeune doctoresse d'origine juive-marocaine que fait des recherches sur l'Altzheimer a l'Institut Weizman de Rehovot! Demandez son avis a un agriculteur juif-marocain d'un "mochav" de Galilee: le rendement de ses vaches laitieres depasse celui des meilleures vaches hollandaises!!! Demandez leur avis aux docteurs en philosophie, en nano-technologie, en informatique, en biologie moleculaire qui pullulent dans les universites israeliennes, et dont les parents se baignaient dans la salle de bain des parents de Claude Senouf...
Re: Festivals d'Essaouira 2008
07 décembre 2008, 10:09
J'habite en Israel et je n'ai pas d'Etat d'ame sur mon engagement . Je suis conscient de la violence de l'image et je m'en excuse . Ce que je relate , je l'ai vu de mes propres yeux .
Le fait de decliner les qualifications de la technologie ne va rien changer au traumatisme que represente pour une nation et pour une communaute l'exode de pres de 200.000 de ses concitoyens .
2000 ans de vie pieuse et 1000 ans d'une citoyenneté au rabais avec son lot d'humiliation et de traumatismes .
Les gens que j'ai croises ne savaient pas , pour la pluspart , ce qui leur arrivait .Leur resignation n'avait d'egale que leur angoisse .
Il n'y avait aucun doute sur leur situation sociale . C'etait des gens tres pauvres . Il connaissaient certainement les prieres mieux que moi et ce n'est pas moi qui les jugerais en terme d'humanité , au contraire .
Pour te repondre sur "le petit bourgeois" , nous etions des aristocrates qui continue a l'evidence de susciter une jalousie apres tout bien legitime !
Re: Festivals d'Essaouira 2008
11 février 2009, 11:31
Je relis la réponse de celui qui se cache derriere le pseudo "souiri".
Comment peut-on echapper à l'obscurantisme et la médiocrité et à un savoir qui conduit à devenir sans etats d'ame un serial killer ?
C'est pourtant un sujet bien d'actualité .
Re: Festivals d'Essaouira 2008
21 mars 2009, 07:04
Voici un texte qui m'a ete envoye par Kamal Hachkar sur le festival des Andalousies ( voir sujet dans Maroc en cliquant ici [dafina.net] )


Un rêve à Essaouira ….
….retour d’un festival d’exception


La cinquième édition du festival des Andalousies (30 octobre au 1 novembre 2008) fut un moment magique et hors du temps : un hommage vibrant fut rendu à feu Samy El Maghribi par une pléiade d’artistes venus d’horizons différents dont sa fille Yolande Amzallag. Ce grand artiste, une figure majeure du patrimoine musical marocain, a reçu à titre posthume des mains de Monsieur Azoulay, représentant le Roi, le Wissam du mérite national de l’ordre de commandeur. Messody Amzallag, veuve de l’artiste, Yolande et son fils Michael étaient présents sur scène pour recevoir cette distinction. Ce festival était organisé par la Fondation Essaouira Mogador et la Fondation des trois cultures (juive, chrétienne et musulmane). Ces institutions ont à cœur le dialogue des cultures.
La programmation musicale fut riche et de haute tenue: des moments joyeux où le public était en symbiose avec les artistes. Il fallait voir la présence sur scène de Maxime Karoutchi où les festivaliers reprenaient en chœur les chansons populaires du répertoire marocain. Abdelkrim L’Amarti, surnommé le rossignol andalou, nous a conquis avec sa belle voix et la maîtrise de son art. Le groupe El Gusto, regroupant des musiciens juifs et musulmans d’Algérie que l’histoire avait séparés, a donné son premier concert dans un pays arabe. Marina Heredia, merveille du flamenco, a enflammé la salle. Tous ces artistes et d’autres ont fait de ce festival un hymne à l’ouverture et aux métissages.
Le lendemain des concerts, nous nous retrouvions dans cette belle demeure Dar Souiri afin d’échanger autour d’un forum sur les identités multiples et les musiques métisses, des intermèdes musicaux entrecoupaient les interventions des uns et des autres. Ces échanges furent souvent d’une grande qualité. On se prenait à rêver qu’un même évènement puisse se produire un jour à Ashkelon en Israël où vivent de nombreux compatriotes juifs marocains mais aussi à Ramallah. On pourrait très bien imaginer comme ce fut le cas dans un passé pas si lointain, le Maroc jouer un rôle prépondérant dans le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens. Lors de ces forums, les artistes étaient présents. Yolande Amzallag a exprimé son émotion d’être là et son désir de transmettre cet héritage immatériel que son père lui a légué. Elle a également rendu hommage au travail d’André Azoulay, notamment à cet esprit qui prévaut durant ce festival, à savoir « l’art au service du politique » Elle a estimé que le propre de l’art est d’unifier.
Cet évènement a été une véritable réussite car il demeure un festival intime c'est-à-dire une rencontre culturelle à taille humaine. Absence de tout protocole, on peut aisément discuter avec les artistes, faire connaissance avec des personnalités singulières. Si le but premier est l’échange avec l’autre, c’est un pari gagné. La particularité et l’histoire de la ville d’Essaouira offrent une dimension originale. Cette très belle ville adossée à l’Atlantique nous donne l’impression presque charnelle de revivre cette expérience de coexistence entre les trois cultures, ce qu’a pu être l’âge d’or andalou. Nous voulons croire que la musique adoucit les mœurs. Moment de communion forte où juifs, chrétiens, musulmans et agnostiques se retrouvent autour des musiques métisses. La musique permet sans doute plus que tout autre art le dialogue des cultures, le passage des émotions quelles que soient nos origines culturelles respectives. Ce festival initié par André Azoulay met en valeur ce Maroc pluriel que nous appelons de nos vœux. Il est primordial que nous nous réapproprions notre patrimoine afin d’en faire un lieu d’échange avec les autres. Le Maroc, à ce titre, peut être un exemple en ces temps où le désordre mondial inquiète. De fait, cet évènement est une pierre parmi tant d’autres pour construire un monde plus apaisé et montrer que les oppositions factices sont meurtrières.
La fin du festival a été l’occasion de poursuivre le dialogue avec les personnes rencontrées tout au long de ce beau rendez-vous. Avec Vanessa Paloma, une artiste américano colombienne : nous avons visité la synagogue Haïm Pinto, merveilleusement bien restaurée. Sa grand-mère était originaire de Tétouan. En ce lieu, elle a chanté une très belle prière. Yolande Amzallag et son fils Michael déambulaient dans les rues de la médina. Ils souhaitaient se rendre à la synagogue et au cimetière juif à l’extérieur des remparts de la ville. Lorsque nous étions par ce temps pluvieux à l’intérieur du mausolée donnant face à l’océan, nous avons sympathisé avec des Israéliens d’origine marocaine ; j’ai conversé avec eux avec les quelques notions d’hébreu que je connais. Ils étaient surpris et étonnés. Je leur ai dit que je suis en train de préparer un film documentaire sur la présence juive à Tinghir. Cet après midi dans ce mausolée avec ce temps pluvieux était un moment magique, émouvant et sublime. Dès qu’ils ont su que Yolande était la fille de Samy, ils se sont mis à chanter quelques chansons de son répertoire. Michael a immortalisé ces moments avec sa caméra. En aparté, Yolande me confiait qu’elle avait été très émue de cet hommage rendu à son père « un moment magique et inespéré », elle ne pensait pas qu’elle allait renouer avec ses racines marocaines de cette façon là. D’autant que pour elle, ce fut une double renaissance : renouer avec sa marocanité et sa vocation de chant. Yolande Amzallag s’est aussi souvenu de cette ambiance qui régnait dans l’intimité familiale lorsqu’elle était enfant, écolière parisienne : « à la maison, c’était le Maroc, le salon, les artistes, ma mère qui cuisinait de délicieux mets ». Elle n’a jamais eu aucun mal à affirmer son identité marocaine et juive. Pour son fils, Michaël, son lien avec le Maroc est plus intérieur et imaginaire. C’est son deuxième voyage au pays et pourtant quelque chose de familier est présent, sans doute un lien qui s’est préservé sans langue, sans attache géographique mais par des histoires, des anecdotes transmises par son grand-père.
En ces temps où le fanatisme progresse, les arts et la culture peuvent être le meilleur moyen d’endiguer l’intolérance, la méconnaissance et le repli identitaire. Ce festival assume la dimension identitaire plurielle du Maroc et c’est sans doute sa raison d’être.

Kamal Hachkar
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