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chinatown de casablanca

Envoyé par venid 
venid
chinatown de casablanca
21 septembre 2004, 07:50
Tendance : Chinatown à Derb Omar

La Kissaria chinoise : un fourre-tout
commercial à très bas prix

Ils ne seraient que quelque 500 Chinois au Maroc, dispersés entre Agadir, Marrakech et Casablanca. À Derb Omar, ils ont investi tout un centre commercial. Rien d’alarmant, juste une curiosité qui fait sourire… et pas du tout jaune. Par Maria Daïf


Derb Omar à 16h. C’est l’heure où le quartier commerçant de Casablanca ressemble le plus à une ruche. Voitures, camions, piétons, charrettes, porteurs, marchandises par terre, estafettes de police, poussettes et bébés, tout y est ! Derb Omar, a-t-on besoin de le rappeler, est l’un des poumons économiques de la
ville où se vendent pêle-mêle tissus de luxe et tissus bas de gamme, appareils ménagers achetés au noir à Sebta et Melilia, pyjamas, sous-vêtements féminins, jouets pour enfants, et on en passe. C’est également à Derb Omar que les commerçants de Casablanca et de tout le Maroc viennent acheter en gros leurs marchandises qu’ils revendent à la pièce. C’est dire à quel point le lieu est un vrai fourre-tout… au point d’y trouver des Chinois par dizaines ! Non, pas à acheter, pardi. Mais installés là-bas dans un centre commercial rien que pour eux. Ledit centre commercial, impossible de ne pas le retrouver. Il suffit de demander à n’importe quel passant, acheteur ou vendeur : "Fine L’qissaria dial chinois ?" (ce n’est pas du chinois mais de l’arabe et ça veut dire "où se trouve le centre commercial des Chinois ?"winking smiley et en deux mouvements, on vous indique une petite ruelle qui mène directement à la "Chinatown" de Derb Omar. La bâtisse ressemble à toutes les autres, si ce n’est cette banderole à l’entrée sur laquelle est inscrit en arabe et en français "Vente en gros de marchandises chinoises", en dessous de caractères chinois qui disent probablement la même chose… On dit bien probablement puisqu’à TelQuel, on s’en excuse, personne ne lit le chinois. Bref, trêve de plaisanterie. Dans la galerie commerciale, il y a un Chinois, voire deux, tous les mètres carrés. Comme en Chine, en somme. Et comme en Chine, eh bien, ils ne parlent que le chinois. Enfin, c’est ce qui se devine, parce que les Chinois de Derb Omar ne parlent pas. Ils sont chacun dans leur boutique, assis sur une chaise et surveillant les allers et venues des clients. Et des clients, il y en a beaucoup, allant d’une boutique à l’autre, et scrutant le propriétaire des lieux comme un article mis à la vente. Comprenez-les, des Chinois, ils n’en voient pas beaucoup ailleurs et c’est le cas de beaucoup de Marocains : le seul Chinois qu’on connaisse bien, c’est Bruce Lee. D’ailleurs, les photos de la star de karaté recouvrent les murs de la galerie et ceux des boutiques. Revenons à nos Chinois, qui ne vendent pas uniquement en gros, mais aussi à la pièce. Comment, s’ils ne parlent ni le français, ni l’arabe, ni l’anglais, arrivent-ils à communiquer avec leurs clients ? Simple comme… (bonjour en chinois), ils prennent des intermédiaires marocains qui reçoivent les clients, marchandent, récupèrent l’argent et le leur remettent. Oui, mais comment les employeurs chinois discutent avec les employés marocains ? Ils parlent la langue des mains et se font des signes qu’il n’est pas difficile de déchiffrer. Normal, ils sont loin de se raconter leurs vies mais discutent chiffres et prix. Pour dire oui ou pour dire non, pas besoin non plus de parler, tout le monde comprend le langage du hochement de tête. Un responsable commercial dans une entreprise chinoise de thé confirme : "Presque tous ne parlent que le chinois, même si certains d’entre eux ont appris les chiffres en français. Mais ça s’arrête là. Rares sont ceux par exemple qui ont pris des cours de français". Précisons que ce contact parle parfaitement le français et ce n’est pas au Maroc qu’il l’a appris, mais en Chine. Précisons aussi qu’il est interprète de formation et qu’il s’est installé au Maroc depuis 2001 : "Mon patron ne parle que le chinois et il avait besoin de quelqu’un pour communiquer".

Kissaria version shangaï
À la Kissaria, les Chinois vendent de tout et pas que de la porcelaine et du vermicelle. Des porte-clés, des tables, des réveils, des cartables, des cahiers, des objets de décoration, des chaussures, de la vaisselle, le tout disposé un peu n’importe comment dans leurs boutiques et à très bas prix. Les commerçants marocains sont-ils inquiets pour autant ? Pas vraiment et il n’y a pas de guerre des gangs dans les rues de Derb Omar, juste de la méfiance du côté des Marocains qui ont vu, il y a huit mois, débarquer des hommes et des femmes aux yeux bridés comme ils verraient débarquer des extraterrestres. La preuve, la plupart des commerçants marocains que nous avons questionnés préfèrent en sourire… D’ailleurs, Marocains et Chinois sont en étroite collaboration, les premiers achetant les marchandises des seconds qui arrivent dans des containers directement du pays de Bruce Lee vers le port de Casablanca : "Tout est en règle pour eux, que ce soit à la douane, ou pour ce qui est de leurs papiers de résidents étrangers. Ils ont tous leur pièce d’identité et c’est souvent des Marocains qui les aident pour toutes les démarches administratives", témoigne cet employé dans l’une des boutiques, devant sa patronne chinoise : "C’est son beau-frère qui est propriétaire de la boutique. Il est d’abord venu s’installer, puis il a fini par faire venir sa femme, ses enfants et sa belle-sœur. La plupart des Chinois qui sont ici font la même chose".
18h. Presque l’une après l’autre, les boutiques de la Kissaria ferment : "Ils ne dépassent jamais 18h depuis qu’ils sont là, même s’il y a encore du monde à la Kissaria", témoigne un porteur. Les Chinois quittent la Kissaria par groupes de cinq ou six, s’appellent, se hèlent, discutent à voix haute, et ça ne semble étonner personne. Les commerçants du coin ne lèvent même pas la tête à leur passage, habitués à leurs nouveaux voisins. Où habitent-ils ? Très peu le savent : "Tout ce qu’on sait, c’est qu’il y a un immeuble sur la rue du 11 janvier où ils sont nombreux. Et tout ce qu’on sait, c’est qu’il leur suffit d’un bol de vermicelle plongée dans de l’eau bouillante et ils sont rassasiés, qu’ils sont très économes et qu’ils sortent uniquement entre eux", résument deux commerçants voisins de la Kissaria, pour lesquels comme pour les autres, ils ne sont plus une curiosité.





Perspective. Péril jaune au Maroc ?

Loin s’en faut. Nos quelques centaines de Chinois travaillent dans la pêche à Agadir, dans des entreprises de câbles d’acier à Marrakech ou dans des entreprises qu’ils ont eux-mêmes monté à Casablanca : entreprises de thé, restaurants, etc. Pierre Picquart, professeur de géopolitique à Paris VIII et spécialiste de la diaspora chinoise, précise : "Après les États-Unis, l’Asie et le Canada, les Chinois s’intéressent depuis quelques années à l’Afrique, qui était un continent oublié pour eux. Ils cherchent de nouveaux pôles d’investissement et le Maghreb en fait partie". Pour cet employé chinois d’une entreprise chinoise, "les Chinois se sont implantés depuis une dizaine d’années dans des pays africains comme le Sénégal et ce n’est que depuis deux ou trois ans qu’ils vont vers la Tunisie, l’Algérie et le Maroc, et parfois même à partir du Sénégal". Existerait-il une filière d’immigration chinoise ? Faut-il avoir peur d’une arrivée en masse des Chinois ? "On parle du péril jaune depuis plusieurs années, et pourtant, on n’y est pas. La diaspora chinoise est constituée de 100 millions de personnes dans le monde. Au Maroc, quoiqu’en disent les statistiques officielles, et en minimisant, ils seraient aujourd’hui un millier. Pourquoi pas ? Partout dans le monde, la communauté chinoise est bien assimilée et joue un rôle important économique et culturel". Finalement, pourquoi pas ?

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