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À la recherche du jardin d’Éden: un jardin d’Éden au mont Ararat, par David Bensoussan

À la recherche du jardin d’Éden: un jardin d’Éden au mont Ararat, par David Bensoussan

Le mythe des montagnes jumelles semble avoir fasciné les imaginations dans l’Antiquité.

 

Le mythe des montagnes jumelles

L'épopée sumérienne de Gilgamesh a été retranscrite dans de nombreux écrits épigraphiques de l'Orient Ancien. Elle décrit le périple de Gilgamesh en quête d'immortalité pour aboutir à un jardin de pierres précieuses. Le chemin que Gilgamesh avait emprunté était celui que le soleil prend dans son voyage quotidien, celui du Levant et du Ponant longeant probablement l'un des deux fleuves : le Tigre ou l'Euphrate. L'emplacement de ce jardin de pierres précieuses serait à l'Ouest dans les montagnes du Mâghu. Lorsque Gilgamesh atteint la mer, il pourrait être arrivé au lac de Van en Turquie orientale. Prenons enfin en considération le fait que Gilgamesh était arrivé près des montagnes jumelles avant de pénétrer dans la montagne à l'intérieur de laquelle il aurait trouvé un jardin de pierres précieuses.

En outre, dans la généalogie de la Genèse, les enfants de Yoqtan se seraient établis « entre mêshâ et sephârâh dans les hauteurs de Qédém (Genèse 10-30). » Or, la montagne de Maghu est parfois retranscrite comme étant montagne de Mashu dans des traductions de l'épopée de Gilgamesh. Il est fort possible que différentes versions du même mythe expliquent la différence entre ces deux transcriptions. Mêshâ pourrait être synonyme de Mashu et ceci porterait à localiser le Jardin d'Éden dans les hauteurs de Qédém pour autant que l'on trouvât à proximité des montagnes jumelles.

Retenons également ce détail de la mythologie cananéo-phénicienne : lors de sa lutte saisonnière avec Mot, dieu de la Sécheresse et la Stérilité, le dieu cananéen Baal envoie deux messagers à ce dernier. Ceux-ci s'orientent vers la montagne de Targhizizi, puis celle de Thourmagi - laquelle semble coïncider avec la montagne de Maghu mentionnée plus haut - et jusques aux montagnes jumelles qui bordent la terre.

Mésha et Séfarah

Selon la Genèse, les hauteurs de Qédém se situent entre Mésha et Sephara (Genèse 10-30). Qu'en est-il de l'identification de Sephara ? En nous référant à une carte d'Anatolie orientale, nous remarquons les localités de Mus et de Savur, noms qui n'ont apparemment pas de signification ni en turc ni en grec byzantin. Vu le phénomène de survivance des noms géographiques originaux aux invasions par d'autres civilisations, il se pourrait que ces deux noms de Mus et de Savur remontent à une très Haute Antiquité : Mésha et Sephara.

L'on attribue le nom de Mus à l'ancien peuple Mushki qui vivait dans cette région (il est attesté dans les annales assyriennes au XIIe siècle avant l'ère courante) , ou au nom d'un roi arménien du IXe siècle du nom de Mouchel, ou encore à une légende arménienne selon laquelle la déesse Astghik (version arménienne d'Ishtar?) prenait des bains le matin au lac Van, soulevant un épais brouillard – signifiant Meshoush en arménien - qui cachait sa nudité.

Le sommet de Mus à une hauteur de mille cinq cents mètres est bordé d'une chaîne de montagnes désignée Musguneyi Daglari, c'est-à-dire les montagnes au Sud de Mus. À partir de l'un de ses sommets, l'on peut observer à l'horizon des cimes voisines aux neiges éternelles d'une hauteur supérieure à trois mille mètres et auxquelles on aura attribué dans l'épopée de Gilgamesh la propriété de border la terre : « Les cimes des montagnes jumelles atteignent d'ailleurs la voûte du ciel. ».

L'hypothèse du mont Arrarat

Il se pourrait donc que les deux cônes du Mont Ararat dont les hauteurs respectives sont de 5 137 mètres et 3896 mètres tranchent nettement par rapport à l'ensemble des montagnes situées dans un rayon de plusieurs centaines de kilomètres, soient les montagnes jumelles du récit de Gilgamesh.

La région entre Mus et Savur foisonne d'une pléthore de sources d'eau qui sont des affluents du Tigre et de l'Euphrate. Ceci en fait un candidat à la localisation du Jardin d'Éden. Encore faudrait-il reconstituer la topographie originale de cette région que l'action plusieurs fois millénaire de l'érosion et de la sédimentation dues aux nombreux affluents a probablement modifié le niveau original. L'un des cônes du mont Ararat et la région avoisinante portaient également le nom de Masis (nom arménien du mont Ararat), et il ne serait pas improbable que ce nom soit rattaché au nom biblique de Mésha.

Dans l'épopée de Gilgamesh, celui-ci s'engageait dans un tunnel gardé par un homme-scorpion avant d'aboutir au jardin de pierres précieuses. Durant son voyage dans le tunnel, il passe par une zone extrêmement chaude. S'agirait-il d'une source d'eau chaude ou geyser et le bout du tunnel éclairé ne serait-il que le centre d'un cône volcanique relié par un trou de lave à la paroi montagneuse? Ceci impliquerait alors que le Jardin d'Éden se trouve au cœur d'un volcan situé dans la région de l'imposant Mont Ararat.

Ararat signifierait terres des dieux ou terre des Créateurs en arménien; les écrits cunéiformes désignent l'Arménie par Urate ou Ararti; au quatrième siècle de l'ère courante, le chroniqueur chaldéen Bérose dénomme Arrarat de terre de Dieux; le mont Arrarat est appelé Aghur Dagh (la lourde montagne) ou Agri Dagi(montagne de la souffrance) en turcNotons que le nom kurde du mont Ararat est Çiyayê Alavhat, signifiant la montagne ardente renvoie à la caractéristique volcanique du mont Ararat. Ce mont serait celui où l'Arche de Noé aurait échoué (Genèse, 9-) et est rendu par Kuh-e-Nuh (montagne de Noé) en persan et par Kardou (que l'on peut associer à l'ethnonyme des Kurdes) dans la traduction aranéenne de la Bible.*

L'hypothèse d'un emplacement du jardin d'Éden au mont Ararat pourrait être étayée par l'invocation d'Ézéchiel au roi de Tyr : Le Jardin d'Élohim se trouverait sur une montagne sainte; et les arbres d'Éden seraient dans les régions souterraines.

Lemythe des montagnes jumelles semble avoir fasciné les imaginations dans l'Antiquité. L'hypothèse de mont Ararat pourrait être consistante. (L'étude plus poussée se trouve dans l'ouvrage La Bible prise au berceau et une version romancée dans l'ouvrage La rosace du roi Salomon, les Éditions du Lys).

En guise de conclusion : la plupart des mythes naissent à partir de certaines expériences du vécu et dont il ne reste que de puissants symboles. Le mythe du Jardin d'Éden en est un qui a fasciné l'Humanité et il se pourrait qu'il soit fondé sur un lieu géographique et une époque donnés.

*Le mont Kardou également dénommé mont Djoudi ou mont Coudi (Cudi Dagh en kurde) est situé à 300 kilomètres au Sud du mont Ararat. C'est, selon une hypothèse plus tardive reprise par des traditions des premiers chrétiens et du Coran (11-44) le lieu ou aurait échoué l'arche de Noé.

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