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La Saint-Valentin version juive

La Saint-Valentin version juive

Apprendre à s’aimer pour apprendre à aimer…

par le rabbin Benjamin Blech

 

L'amour est dans l'air...

A l’approche de la Saint-Valentin, un milliard de cartes remplies de déclarations d'amour sont envoyées dans le monde entier, selon l’estimation de l’Association des Cartes de Vœux américaine. Et ce chiffre n’inclut pas les envois de fleurs, de chocolats, de bijoux et de cadeaux qui font désormais partie du rituel de cette journée dédiée à exprimer l’émotion que Shakespeare appelait « le langage de l'âme. »

Nous autres Juifs, émettons certaines réserves quant au respect de cette tradition. Après tout, le nom de cette fête évoque le lien légendaire avec l’histoire apocryphe de l'un des premiers saints chrétiens. Et les académiciens ne sont pas les seuls à reconnaître la fragile crédibilité de ce lien historique. Le Concile Vatican II, l qui fut à l’origine de nombreuses réformes adoptées par l'Église Catholique en 1969, retira la Saint-Valentin de son calendrier. Motif invoqué : «  Bien que le mémorial de Saint Valentin figure parmi les plus anciens … nous ne savons rien à son propos, à l’exception de son nom… et de la date de son inhumation sur la Via Flaminia, le 14 février. »

Seul reste alors, comme le déclarent les partisans de cette célébration universelle, un jour au cours duquel nous reconnaissons le pouvoir de l’amour et sa capacité à nous redonner notre humanité, ce qui ne devrait gêner aucun fidèle, quelque puisse être sa religion.

Lorsque l’on me demande, en tant que rabbin, si les Juifs devraient célébrer la Saint-Valentin, ma réponse classique est la suivante : « Oui, nous devrions célébrer l'amour ... 365 jours sur 365. »

Mais puisqu’un jour du calendrier a été particulièrement désigné pour souligner la signification de l’amour, nous autres Juifs pourrions le mettre à profit pour nous remémorer le sens profond de ce commandement — un sens trop souvent ignoré par les créateurs de cartes de vœux.

L’Amour, d’après l'un des grands Sages du Talmud, représente la Mitsva par excellence. Quand un non-Juif demanda à Hillel de lui « enseigner toute la Torah sur un pied », c'est-à-dire de lui résumer son essence, sa réponse ne fut autre que : « Aime ton prochain comme toi-même. »

Ce qui laisserait entendre que l’amour porté à autrui serait le summum bonum du Judaïsme.

L'amour de soi

Et pourtant, la Saint-Valentin, telle qu’elle est observée à travers le monde, fait fi d’une personne qui serait en réalité la plus digne d’amour. Certes, je vous l’accorde, l’amour porté à autrui est un sentiment des plus louables. Mais un examen plus attentif du verset biblique qui fait de « l'amour » un commandement nous révèle qu’une certaine personne doit être aimée avant même que ne puisse être aimé l’objet de notre passion le jour de la Saint-Valentin.

Le verset du Lévitique (19:18) affirme « tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Deux instructions nous sont données dans un ordre bien précis. Le verset est généralement employé pour nous rappeler d’aimer les autres, mais nous négligeons, à nos risques et périls, la première étape nécessaire dont nous devons tenir compte pour atteindre cet objectif qui est celui d'aimer les autres. Tu aimeras ton prochain, nous enseigne la Bible, comme toi-même.

C’est là une vérité psychologique des plus profondes : la haine violente, solidement enracinée, que l’on constate chez les tyrans ou les criminels est en réalité une haine de soi tournée vers l'extérieur. Il faut, pour être vraiment humain, commencer par l'acceptation de soi et l'estime de soi. C'est seulement alors que devient possible la progression de développer également un sentiment d'affection pour les autres.

Le Rabbin Hassidique de Kotzk avait raison lorsqu’il dit à ses disciples, après avoir vu un homme qui en battait un autre: « Voyez comment, même en accomplissant un acte mauvais, ce Juif applique les paroles de notre sainte Bible. Il démontre qu'il aime son prochain de la manière dont il s'aime lui-même. Nous ne pouvons que prier pour qu'il parvienne enfin à véritablement s'aimer lui-même, de sorte qu'il puisse modifier la façon dont il traite les autres. »

Barbara De Angelis, une chercheuse américaine sur les relations humaines et le développement personnel, a trouvé les mots justes pour l’exprimer: « Si vous n'êtes pas doué pour vous aimer vous-même, il vous sera difficile d’aimer qui que ce soit, car vous vivrez mal le fait de consacrer du temps et de l’énergie à un autre sans pouvoir le faire aussi pour vous. »

L’inverse est aussi vrai, bien sûr : si vous ne savez pas vous aimez, comment pouvez-vous espérer que quelqu'un d'autre puisse le faire?

Le Pacte de Faust

Il ne s’agit en rien de suggérer un amour narcissique, mais plutôt une sorte d'amour-propre rendu possible par le respect de soi. Un amour-propre tel qu’en témoigne la remarquable histoire de Gil Meche, qui fit la manchette du New York Times:

« Un joueur de baseball renonce à 12 millions de dollars pour préserver son amour-propre. »

Gil Meche est un joueur de baseball de 32 ans, d’une équipe de Kansas City, les « Royals ». Son contrat pour la prochaine saison s’élevait à 12 millions de dollars. Les contrats des ligues majeures une fois signés, ne peuvent être remis en question. Ainsi un joueur devra être payé, quelque soit la qualité de son jeu ou son empêchement de jouer à la suite de blessures. Ce fut le cas de Meche qui ne pouvait plus jouer du fait d’une épaule douloureuse. Il n’aurait eu qu’à se présenter au prochain entraînement ayant lieu au printemps pour toucher son salaire. Mais Meche annonça qu’il prenait sa retraite, renonçant ainsi à être payé.

« Quand j'ai signé mon contrat, mon principal objectif était de le mériter, expliqua t-il à la presse. Quand j’ai réalisé que je ne méritais pas mon salaire, je me suis senti très mal à l’aise. Je me faisais un argent fou sans même jouer. Honnêtement, je n'ai pas eu l'impression de le mériter. Je ne voulais plus ressentir de tels sentiments. »

Je ne veux pas prendre ce que je ne mérite pas.

Pour Gil Meche, le fait de pouvoir se regarder dans une glace et se dire : « Je suis fidèle à mes valeurs, je veux conserver ma dignité et mon amour-propre. Je ne veux pas prendre ce que je ne mérite pas. » est plus important que l’argent. En prenant cette décision, il enseigna à chacun de nous ce qui constitue la condition sine qua non pour l’amour véritable.

En effet, dans de nombreux domaines de la vie, nous sommes confrontés à des choix dans lesquels le respect de soi semble contredire le prétendu besoin de la réussite. Le Pacte de Faust nous séduit et nous incite à vendre nos âmes. Seuls ceux qui sont assez intelligents pour choisir l'amour, se révèlent être assez forts pour prendre la bonne décision.

Il n'est pas égoïste de s’assurer notre sympathie à nos propres yeux. Selon la Torah, c'est la première étape par laquelle nous devons tous passer avant de poursuivre sur le chemin de l’amour envers autrui, celui qui nous fera nous épanouir le plus.

Alors, voici ce que je vous suggère pour la Saint-Valentin et d’ailleurs pour les autres 364 jours de l'année. Non, vous n'avez pas besoin de vous adresser une carte de vœux proclamant votre amour. Mais vous pouvez en revanche consacrer un moment de votre journée pour accomplir un geste qui vous assurera votre propre respect et admiration.

Une fois parvenu à ce stade, vous serez alors à même d’aimer vos prochains comme vous-même. Et à leur tour, vos prochains vous voueront un amour sincère et authentique. Un amour qui dépasse de loin une passion éphémère programmée par un calendrier ou résumée par une simple déclaration prononcée sans trop y croire.

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Considérations juives

Un certain nombre de décisions halakhiques ont été écrites en réponse aux questions de savoir si oui ou non la loi juive permet la célébration des fêtes non-juives telles que la Saint-Valentin. La plus pertinente vient du Rama (Rabbi Moshe Isserles, Pologne, 1520-1572) qui explique qu'il y a quatre critères qui doivent être remplis afin de permettre la célébration juive des rituels initiés par les Gentils (Rama YD 178: 1 tel qu'interprété par Rabbi Michael Broyde).

L'activité débattue a-t-elle une origine ou une valeur laïque?

Peut-on rationnellement expliquer le comportement ou le rituel en dehors de la fête ou de l'événement des non-juifs?

S'il y a des origines idolâtres, ont-elles disparu?

Les activités sont-elles réellement conformes à la tradition juive?

Dans le cas de la Saint-Valentin, on peut certainement soutenir que les rituels pratiqués aujourd'hui répondent à ces critères. L’envoi de cartes, de chocolats et de cadeaux peut être expliqué comme une expression rationnelle d'amour et d'appréciation indépendante des racines chrétiennes possibles. En outre, ces racines chrétiennes ont été contestées par des érudits, ainsi que par l'église catholique.

Le travail académique d'Oruch et d'autres érudits prouve encore que la Saint-Valentin n'est pas dérivée de la fête païenne Lupercalia. Enfin, le désir d'exprimer l'amour et d'offrir des cadeaux en tant que symbole de ces sentiments est certainement conforme à la tradition et aux valeurs juives. L'idée d'une journée spéciale pour encourager la vie en couple est également bien enracinée dans la tradition juive: Tu B'Av, le 15ème jour du mois juif de Av, qui était autrefois une journée durant laquelle les jeunes étaient encouragés à nouer des relations et à se marier, a connu une sorte de renouveau dans les temps modernes.

Bien qu'il ne représente pas toutes les opinions dans la littérature juive, la source du Rama fournit les critères les plus saillants pour prendre cette décision selon la loi juive et c'est la base sur laquelle de nombreux rabbins permettent la participation juive aux rituels de la Saint-Valentin.

Le blanchiment des perversions.

En 494 ap. J.-C., le pape Gélase a rebaptisé la fête de Junon Februata en l’appelant la fête de la purification de la vierge Marie. Elle est aussi connue sous le nom de Chandeleur, de fête de la présentation, de purification de la Sainte Vierge et de fête de la présentation du Christ au Temple.
Après que Constantin eut fait de l’Église romaine la religion chrétienne officielle de l’empire romain (325 ap. J.-C), ses dirigeants voulurent se débarrasser des fêtes païennes observées par le peuple. Parmi elles, les lupercales étaient prioritaires. Toutefois, les citoyens romains voyaient cela d’un autre oeil.
Ce ne fut pas avant 496 ap. J.-C. que l’Église de Rome put agir sur les lupercales. Ne pouvant s’en débarrasser, le pape Gélase la changea plutôt du 15 au 14 février et l’appela la Saint-Valentin. La date de célébration fut plus tard changée du 14 au 2 février. Elle tire son nom d’un des saints de l’Église qui, en 270, fut exécuté par l’empereur à cause de ses croyances.

L’Origine,

À l’origine une coutume païenne, cette fête a finalement été assimilée par l’Eglise catholique romaine par la désignation de Saint Valentin comme Saint Patron des amoureux. Le jour de la Saint-Valentin n’aurait pas été associé avec l’amour romantique avant le haut Moyen âge mais avec l’amour physique.

savez vous que la Saint-Valentin n’est pas seulement d’un mortel ennui ? Elle est aussi un jour de triste mémoire, de plusieurs massacres, et en particulier du plus grand pogrom du moyen-âge : massacre de 2000 juifs de Strasbourg, brûlé-es vif-ves au cimetière ?

« Le samedi 14 février 1349, jour de la Saint-Valentin, on cerna le quartier juif. Tous ses habitants furent traînés par la foule au cimetière de la communauté, où on les entassa sur un immense bûcher. Deux mille Juifs furent brûlés vifs. Seuls échappèrent un certain nombre d’enfants et quelques adultes qui abjurèrent leur foi. Les biens des suppliciés furent partagés entre les bourgeois, l’évêque et la municipalité. Les créances furent détruites et certains gages rendus à leurs propriétaires qui habitaient hors de Strasbourg ».

« l’histoire des juifs de Strasbourg » par le rabbin Max Warschawski

Vos Paroles sont pleines de Sagesse.
Merci.

Lola Martínez

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