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Pour stopper le coronavirus, il faut diviser par quatre nos interactions sociales

Pour stopper le coronavirus, il faut diviser par quatre nos interactions sociales

Quand chaque personne touchée contamine moins d’une personne en moyenne, la propagation du virus ne peut que ralentir Avec 2500 cas d’infection au coronavirus identifiés en France et 48 morts, il peut paraître surprenant de prime abord de voir tant de spécialistes s’alarmer d’une épidémie «inéluctable», «inarrêtable», dont on promet déjà qu’elle étranglera le système hospitalier et pourrait représenter une catastrophe sanitaire de très grande ampleur.

Ce serait méconnaître la science épidémiologique. «Lorsqu’on est au stade où nous sommes en France, une épidémie devient très prédictible», rappelle en effet Samuel Alizon, chercheur CNRS au laboratoire Maladies infectieuses et vecteurs: écologie, génétique, évolution et contrôle de Montpellier. En l’occurrence, une propagation exponentielle du virus dans toutes les couches de la population et sur tout le territoire jusqu’à ce qu’une partie suffisamment importante ait été contaminée et soit ainsi immunisée. Les spécialistes estiment que cela arrive lorsque 15 à 20 % des personnes ont été touchées.

Soit 10 millions de personnes infectées pour la France, représentant 50.000 à 100.000 morts potentiels d’après la létalité estimée du virus (0,5 % à 1 %). Et ce dans le cas favorable où les hôpitaux ne sont pas saturés. Dans le cas contraire le taux de mortalité pourrait être bien plus élevé.

Mais les épidémiologistes savent aussi que ce scénario catastrophe peut être évité. Il faut pour cela que des mesures efficaces soient prises pour limiter la propagation du virus. En termes épidémiologiques, il faut réussir à limiter son «taux de reproduction», noté R0 (R zéro). Ce paramètre quantifie le nombre moyen de personnes qui sont infectées par une personne contaminée pendant toute la période où elle est contagieuse. Les spécialistes estiment qu’il est proche de 3 en France aujourd’hui pour le coronavirus. «Pour stopper l’épidémie, il faut ramener ce taux en dessous de 1», décrypte Samuel Alizon. Quand chaque personne touchée contamine moins d’une personne en moyenne, la propagation du virus ne peut que ralentir. «De manière intuitive, on comprend que si tout le monde sans exception divise par quatre son nombre d’interactions sociales, on peut franchir ce seuil, et faire descendre R0 en dessous de 1.» C’est exactement ce que la Chine a fait, plaçant en quarantaine forcée des millions de personnes.

Faire baisser le R0 Une mesure impensable en France. Il faut donc en appeler au civisme de chacun. Raison pour laquelle le gouvernement incite depuis plusieurs jours les Français à limiter leurs déplacements, à favoriser le télétravail et a interdit les rassemblements de plus de 5000 personnes, puis de 1000 personnes, sur tout le territoire, voire 50 dans les zones les plus touchées.

Si chacun faisait l’effort personnel de se confiner au maximum, de réduire ses sorties et ses interactions amicales et familiales, il serait possible de contenir l’épidémie. Que vous soyez malades ou non, que vous ayez ou non été en contact avec des personnes à risques importe peu. C’est l’affaire de tous. «C’est une dynamique de population, un effort collectif à produire», souligne Samuel Alizon. Toutes les mesures «barrières» (ne pas se faire la bise ou se serrer la main, tousser dans son coude, se laver les mains régulièrement, etc.) ont le même objectif: faire baisser ce fameux R0. Le port d’un masque lorsqu’on pense être malade est aussi très efficace.

Comment faire pour que les recommandations soient réellement suivies par l’ensemble des Français? Sans créer de panique? Cette équation-là est bien plus difficile à résoudre. Il est pourtant urgent d’agir. Une étude parue le 11 mars dans The Lancet montre qu’il a fallu deux semaines en Chine pour que le taux de reproduction du virus soit réduit de moitié après les mesures drastiques de confinement.

D’autre part, les 2500 cas identifiés en France ne représentent que la partie émergée de l’iceberg. Comme le virus provoque peu ou pas de symptômes chez 80 % des personnes infectées (qui sont pourtant contagieuses) des dizaines de milliers de Français sont déjà en train de transmettre le virus, le plus souvent sans s’en rendre compte, sur tout le territoire. La course contre la montre est déjà lancée.

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