ibn toumert , mme banon

je suis nouveau sur le forum et mon pseudo a ete choisi , non d'apres l'annee mozart, mais du nom de la rue que j'habitais , en face des arenes
j'habitais en face de mme banon , qui organisait des spectacles au cinema opera le dimanche matin et aux arenes de casablanca
de ma fenetre , je pouvais admirer richard anthony ou autres vedettes qui regagnaient sa villa apres le spectacle
je me souviens de dalida , qui avait osé chante "ava naguila"
s'ensuivit une charge de la police , consecutive al'enthousiasme dela jeunesse juive et l'interdiction , signifiée a dalida , de revenir dans notre beau royaume cherifien , elle avait du courage ou etait naive , je ne sais
mme banon , aux filles si belles , merite un hommage evident
elle differait de nos meres , toutes aussi marquantes a leur maniere
elle a incontestablement marqué une jeunesse


je me souviens egalement de mme accere , prof d'anglais , au college ibn toumert , petit bout de femme , decharnée et au visage anguleux
je la croyais severe , car, j avais de mauvaises notes des le premier trimestre

mon tableau d'honneur avait eté "rrrrefusé" , annoncé par le directeur
en personne ,- je ne me souviens plus son nom-,individuellement a chaque eleve , car il faisait le tour des classes
il m' devisagé un instant , et m'a dit , reprobateur :
armand p... , "tableau d'honneur rrrrrefusé"
il etait corse , je crois et l'oncle de mme nicolai , une charmante prof de francais


pour revenir amme accere , j'avais annon,cé a mon pere mes mauvaises notes et il entreprit de rendre visite a ma prof

il etait comme tous nos peres , respectueux de l'education , des profs , de la connaissance , de la science



il-zal - avait perdu son pere a l age de 12 ans et avait travaille tres tot comme porte faix -talb mmachou en arabe -donc pas cultivé en matieres laiques si j ose dire


pas de probleme
en rendant visite a mme accere , il lui offrit simplement une caisse de whisky pour l amadouer
le whisky, geste gentil de sa part , ca partait d un bon sentiment
le whisky , monnaie d echange au maroc


j etais confus , l'origine anglo saxonne sdu produit n etait pas un rappel culturel mais bel et bien un tentative de mettre du malt dans les rouages

elle reagit comme dans le sketch de gad elmaleh a propos de l'artiste debutant qui recita a sa prof , la chevre de mr siguin , a la sauce bled

mr abdelzrak!!!!!!!!!!quelle horreur .....etc etc



je suis fier de mon pere et reste attendri des annees apres
il voulait me donner des cours de tout
et j aime mme accere , par sa gentillesse et son professionnalisme

plus aucun n 'est de ce monde
je pense a l'un souvent et a l 'une parfois

armand

Trés touchant ton témoignage et caractéristique d'une frange importante de la population juive marocaine qui malheureusement n'est pas beaucoup représentée dans ce forum, peut-être par pudeur.

Dans le même ordre d'idée, mon père, qui ne différait pas beaucoup du tien, a toujours eu des problèmes avec l'utilisation à bon escient du tutoiement et du vouvoiement.

Un jour qu'il allait montrer sa réprobation à la directrice de l'école de ma soeur ainée, suite à son renvoi, cette même directrice lui fait croire qu'elle n'a plus de place pour ma frangine, que la classe est au complet, qu'elle ne peut plus la reprendre.

Il essaie de l'amadouer avec des paroles puis pour finir, très péremptoire, lui dit :
"toi, va lui chercher un banc"
et se tournant vers ma soeur :
"et vous, rentrez "

N'importe qui d'autre aurait chercher un trou pour s'enterrer, ma soeur, elle, a attrapé le plus gros fou-rire de sa vie.

Bien des années après, elle a toujours le fou-rire en racontant cette anecdote.

Et mon père, bien des années après, a toujours autant de mal avec le tu et le vous !

merci pour ta reponse .

nous, jeunes juifs du maroc,ne revions que de nous integrer , en rejetant nos parents , retrogrades de notre point de vue .
nous nous sommes integres , nous avons je crois reussi notre integration ,sans etat d 'ame et reconnaissants , plus cultives que les francais qui nous accueillaient dans leurs universités

je me souviens avoir integré l'enseignement superieur en france en pensant que les autochtones allaient nous "en remontrer"
quelle deception , nous en avions tant lu , tant participé a des debats que j 'avais l'impression de regresser en frequentant la fac

en verité la france nous avait reservé ses meilleures ecoles -lyautey notamment - et nous l'ignorions , moi du moins
quant a nos parents ,ils etaient moins cultivés que nous certes , mais tellement authentiques, se posant peu de questions,conscients de leurs responsabilites et peu comptables de leur amour
ils etaient en fait notre meilleur lycee , et de ce coté , je ne sais si on a fait mieux .

ruemozart a écrit:
-------------------------------------------------------
> merci pour ta reponse .
>
> nous, jeunes juifs du maroc,ne revions que de nous
> integrer , en rejetant nos parents , retrogrades
> de notre point de vue .
> nous nous sommes integres , nous avons je crois
> reussi notre integration ,sans etat d 'ame et
> reconnaissants , plus cultives que les francais
> qui nous accueillaient dans leurs universités
>
> je me souviens avoir integré l'enseignement
> superieur en france en pensant que les
> autochtones allaient nous "en remontrer"
> quelle deception , nous en avions tant lu , tant
> participé a des debats que j 'avais l'impression
> de regresser en frequentant la fac
>
> en verité la france nous avait reservé ses
> meilleures ecoles -lyautey notamment - et nous
> l'ignorions , moi du moins
> quant a nos parents ,ils etaient moins cultivés
> que nous certes , mais tellement authentiques, se
> posant peu de questions,conscients de leurs
> responsabilites et peu comptables de leur amour
> ils etaient en fait notre meilleur lycee , et de
> ce coté , je ne sais si on a fait mieux .
>
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quelles merveilles de vous lire.
c'est extraordinaire. Une simplicité et une vérité au sujet des parents. je crois que nous avons tous eu ce genre d'histoire.
je venais d'une école, ce qu'on appelait mission française, vers le cours complémentaire et je n'avais jamais appris l'hébreu.
Au cours complémentaire c'était obligatoire et Monsieur messas qui dispensait ce cours m'avait prise en grippe à cause de ca. Il m'avait fait une réflexion pas très agréable au sujet de la voiture de mon père. Quand j'en avais parlé, mon père m'avait dit ton professeur a raison, si tu n'en avais pas parlé, il ne l'aurait pas su. Mais je n'en avais pas parlé, il l'avait vu tout simplement. Je n'avais pas le droit d'aller à lécole toute seule, donc il m'accompagnait tous les jours, mais pour lui le professeur ne pouvait pas le savoir. nos parents étaient tellement vrais et simples, nos professeurs avaient toujours raison.
en ce qui concerne maguy banon et sa maman, je me souviens des matinées à l'opéra où des radio crochet étaient donnés; mon frère avait même participé. c'était génial

En évoquant cette simplicité de nos parents, je réalise à quel point elle a eu un impact certain sur nous.

En définitive, je crois pouvoir identifier la raison pourlaquelle il m'a toujours été viscéralement indispensable d'être la meilleure en tout.

Prouver aux autres qu'en dépit de la condition de nos parents, nous méritions de la considération.
C'est ton intervention ruemozart qui m'en a fait prendre conscience.

je pourrai raconter beaucoup sur mme banon.Quel monde entre sa propre mere et ses filles .3 generations de maroc se cotoyaient
la grand mere marrakchi , son foulard sur la tete , assise en tailleur dans sa cuisine , occupée a ecosser les petits pois , un verre de nahna a la main et ne s'exprimant qu en judeo arabe ,puis la mere moderne ,mme banon , s'exprimant dans un excellent francais, femme de caractere , productrice de spectacles , a l aise dans le monde de la publicite et des relations publiques , et puis ses filles 4 quasi mannequins .
elles ne parlaient que le parisien avec quelques mots charmants en arabe , quelques insultes pour faire couleur locale , mais qui dans leur bouche , etaient des babillages

elles frequentaient un autre monde- et je me souviens la perseverance de mme banon , pour propulser sa fille magui dans le monde du show biz a paris

je n entendais parler que de johnny , sylvie , et autres vedettes qu elle cotoyait

apres s etre appelee malika et s etre rendue a l'evidence que ce nom de scene etait plutot rastaqouere en france , elle est revenue a son nom d'origine , magui banon , tout simplement
gad elmaleh l a compris lui

bref sa carriere fut courte , dommage , nous avions tous reve avec elle en sachant toutefois qu elle nous oublierait une fois la notorieté acquise
elle n a pas vu ce jour , comme on dit en arabe ,dommage pour elle
Au fait qui a achete LE disque ?

parfois , je me demande ce que seraient devenus ces centaines de milliers de juifs , s ils etaient restes au maroc
ca me donne le vertige , mais c est inimaginable , ca n aurait pas marché
mais que de destins interessants dans cette population si variée
artistes , intellectuels , rabbins ,ingenieurs , medecins ,ou commercants de derb omar comme mon pere

Sulamith a écrit:
-------------------------------------------------------
> > En évoquant cette simplicité de nos parents, je
> réalise à quel point elle a eu un impact certain
> sur nous.
>
> En définitive, je crois pouvoir identifier la
> raison pourlaquelle il m'a toujours été
> viscéralement indispensable d'être la meilleure en
> tout.
>
> Prouver aux autres qu'en dépit de la condition de
> nos parents, nous méritions de la considération.
> C'est ton intervention ruemozart qui m'en a fait
> prendre conscience.


on s est fait un peu "contre" nos parents pour prouver qu on etait mieux qu eux , grace a l ecole , qu ils n avaient pas la chance d avoir frequente , pour les miens du moins
mais encore une fois , ils nous surpassaient dans d autres domaines

par rapport aux autres , effectivement , c etait un autre defi ,
la condition de nos parents nous stimulait

en realité tout etait a faire et on se positionnait toujours contre

les parents en faisant mieux
les francais ou les musulmans en etant meilleurs
les copains qui avaient de meilleures notes


on avait toujours des frontieres a franchir
ca forme , c est clair