Véronique Lévy: Dieu a donné la foi à la soeur de BHL
RÉCIT D'UNE CONVERSION
En 2012, elle a demandé le baptême. Sous les yeux de son frère aîné, célèbre philosophe qui l'accompagne désormais dans cette nouvelle vie. Témoignage.
Elle n’a pas eu peur de prendre le téléphone et dire sa vérité à celui qui l’avait pourtant si souvent impressionnée. Elle a parlé, il y eut un blanc de l’autre côté du combiné. « Le frère aîné », comme elle l’écrit pudiquement dans son premier livre Montre-moi ton visage (éd. du Cerf), est resté muet quelques secondes, mais, contre toute attente, n’a pas riposté. « A l'assurance et à l'intensité avec laquelle elle parlait, j'ai compris que ce n'était pas un enfantillage, mais une authentique expérience intérieure », témoigne Bernard-Henri Lévy.
Véronique Lévy, la brindille ultrasensible et émotive, la petite sœur d’une vingtaine d’années sa cadette, qui n’avait jusqu’alors connu qu’instabilité et dérives, avait trouvé sa voie. Celle de l’adoration du Christ pour parler avec ses mots à elle, ses mots décomplexés qui appellent un chat un chat, le Seigneur son sauveur. Adoration (éd. Du Cerf), c’est d’ailleurs le titre de son récent ouvrage dans lequel elle s’adonne à un long chant d’amour, une sorte de psaume contemporain habité d’incandescence où, « sans plus se soucier de la bienséance de l’époque, est-il résumé sur la quatrième de couverture, elle nous donne une parole de résistance sur l’urgence qu’il y a, pour chacun d’entre nous, d’enfin trouver l’Amour. »
Résistante, c’est le mot. La brindille ne rompt pas. Avec ses tresses blondes, elle fait penser à une Fifi Brindacier capable de fougue et de fermeté. Ardeur des convertis, vite tempérée d’une douceur qui lui ressemble également, avec excuses tout aussi spontanées. Nous lui donnons l’absolution. Ce ne sont pas les tièdes qui font des saints. Ni les conformistes. Elle aurait pu, fille de juifs athées, vivre confortablement dans l’admiration de son frère, continuant à créer ses bijoux de fines perles somptueuses, qui lui ont valu, un temps, la reconnaissance des médias et du monde de la mode. Seulement, comme elle le dirait, « le Seigneur en a voulu autrement. »Le fait est que, facétieux, Il a parsemé son chemin, souvent douloureux et solitaire, de signes comme autant de clins d’œil qui l’ont menée au baptême le 7 avril 2012. Le plus beau jour de sa vie. Même « Bernard », réprimant sa colère, a accepté d’y assister.
Il y a eu, alors qu’elle avait trois ans, Coralie, du même âge qu’elle, qui, sur la plage d’Antibes, lui a lancé: « Si tu ne crois pas en Jésus-Christ, les robots t’emporteront. » Coralie, qui l’évangélisera chaque été et lui offrira un crucifix. Cela aurait pu être une photo de Johnny Depp, mais voilà : « Je tombe amoureuse de ce Dieu aux bras grand ouverts comme pour me bercer, nous explique-t-elle. Je chuchote en cachette le Pater Noster et l’Ave Maria. C’est mon jardin secret, mes jeux interdits. En cachette surtout de mon frère qui, lui, parle de judaïsme, de la Shoah. Or moi, je veux aller vers la lumière. »
Adolescence « d’une grande violence », confirme-t-elle de sa voix fluette. Produits illicites, comportement excessif. On la met en pension, avec des « gens aussi perdus que moi. » Qu’importe, c’est là qu’on lui projette le film de Franco Zeffirelli, Jésus de Nazareth. Coup de foudre. Qui nidifie à l’intérieur d’elle. Mais le moyen d’exprimer cet élan quand on s’appelle Lévy, le nom d’une des plus célèbres tribus d’Israël ? Et quand on veut capter l’attention de ce frère aîné, juif emblématique, trop brillant, trop absent ?
Alors qu’elle mène « une vie d’errance », passant de bras en bras, traînant avec des paumés dans un bar de la Bastille, un songe l’assaille une nuit après le décès de son père : dans une cathédrale retentissent des battements de cœur, ceux d’un gigantesque Christ en croix dont, des mains ensanglantées, fusent deux épées qui transpercent son cœur d’amoureuse. Au réveil, bouleversée, elle s’interroge…
Il faudra la passion avec un homme de chair et d’os, à l’allure christique, Indar, qui l’emmène à l’église Saint-Gervais, pour qu’elle découvre enfin son vrai désir : le baptême. Alors que leur romance prend fin, elle réoriente sa vie : « Suivre le Christ, c’est aller vers la radicalité. »
De fait, elle bazarde les carcans de femme fatale qui furent les siens (porte-jarretelles, talons hauts, etc.), imposés par une société normative (très jolies pages sur la libération de la femme chrétienne). Dans des vêtements fluides qui ne la limitent plus, elle ne s’est jamais sentie si féminine.
Elle resterait bien des heures encore à nous convaincre – comme elle ne désespère pas de convertir son frère– mais elle a soif de prier comme chaque jour dans son « église-berceau ». Elle nous quitte. Elle a rendez-vous avec Lui.
Maryvonne Ollivry
Crédit photo Yann Revol / Hannah Assouline / collection personnelle
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