Un Tune au Maroc, 1, par
Avraham Bar-Shay
Un Tune
au Maroc, 3, par Avraham Bar-Shay
Que vous vous promenez à Acco, dans
l'ancienne ville de Jérusalem, au Caire, à Istanbul ou à Tunis, vous serez
toujours attirés par leurs Souks et leurs Médinas, qui vous saouleront les sens,
par leurs couleurs, leurs bruits et leurs senteurs. Toutes les Médinas ne sont
pas les mêmes. Pour découvrir les nuances, il faut oublier pour quelques
instants, cet instinct possessif du touriste qui cherche à s'accaparer de
souvenirs et de bonnes occasions. Avec un peu d'attention, vous trouverez
sûrement des scènes particulières que chaque pays a gardées, pour vous, depuis
des générations. Laissez vos sens vous guider et ouvrez les bien grands.
Malheureusement le plaisir du moment nous
fait, des fois oublier que nous avons une courte mémoire, alors avant de passer
ailleurs il faut vite fixer ces belles images que l'on voudra déguster, plus
tard et autant de fois qu'on le désire (touriste rime toujours avec camera).
Je regrette des fois de ne pas avoir
enregistré certaines scènes qui m'avaient procuré d'inoubliables sensations,
parce j'étais tellement concentré.
On connaît aussi l'autre genre de touriste
, le Cyclope, le Borgne qui voit tout à travers l'oculaire de son appareil et
qui filme sans cesse, négligeant le plaisir de la scène vécue sur le moment.
Sans elle, les plus belles photos ne réveilleront que de faibles émotions. Non!
Les images peuvent renforcer les effets d'un événement vécu, mais ne sont pas en
mesure de le recréer avec la même intensité. Ainsi, pour transmettre une partie
des plaisirs expérimentés, j'ai essayé d'accompagner les photos, de quelques
anecdotes et récits vivants, teintés de nostalgie d'un monde perdu, celui de
notre jeunesse et de passé là-bas.
Les photos présentées ici, ont été prises
après de longs moments d'observation. Elles parlent des gens et des lieux, ainsi
que des petits métiers, que j'ai vus dans les Médinas, et ailleurs.
Certaines peuvent paraître "déjà-vu" ou
banales, mais elles m'avaient simplement ému, ou m'avaient parues nécessaires
pour tisser la toile de ce document.
= Dans une Médina, on voit un graveur
sur Marbre; assis au seuil de sa boutique. Il prépare des sortes d'épigraphes ou
de stèles, de dimensions moyennes, comme celles qu'on voyait chez nous, collées
aux murs intérieurs des Synagogues.
Dans un dessin de 'portail', encadrant la
surface de la stèle, il grave d'une harmonieuse calligraphie, des citations
coraniques. Exposés autour de lui, il y avait plusieurs exemples à moitié
terminés où le client devrait seulement ajouter le verset de son choix.
- Ailleurs, c'est un artisan courbé sur
son tabouret et qui préparait presque les mêmes dessins sur des pages de papier,
tandis que le client attendait patiemment la fin de l'ouvrage désiré.
= Que de Chapeaux !! Plusieurs Dames
assises l'une près de l'autre vendaient des chapeaux de toutes les formes et
toutes les couleurs, et pourtant je n'ai pas vu beaucoup de gens qui en
portaient.
= J'avais vu la photo de ces Cones
d'Epices, pointus, quelques années auparavant. dans une revue touristique sur
Marrakech, mais je n'ai pu m'empêcher de les photographier, parce que je ne
comprenais pas comment ce marchand arrivait à leur donner les mêmes formes, des
semaines et des mois durant. Est-ce qu'il n'en vend jamais? J'ai voulu vérifier
si c'étaient des noyaux durs couverts de poudre colorée, mais non, c'est du
vrai, les reconstruit-il chaque jour ? Si c'est le cas, alors il mérite une
pensée !
= Il y avait un magasin qui ne vendait
que des pétales de roses à pleins couffins et des fioles d'eau de roses. Non
loin de là on vous vendra, à part les roses, d'autres parfums plus exotiques
= Vous aurez l'embarras du choix entre
les aphrodisiaques "contenus" dans les différents fruits secs étalés devant
vous.
- Pour les plus pressés et les
sceptiques, vous serez conseillés d'ingurgiter quelque potion magique, préparée
par un Marabout célèbre. L'histoire d'une vingtaine de garçons qu'il a
engendrés vous convaincra de l'efficacité de sa recette. Sinon vous pouvez
acheter des remèdes maison contre toutes les maladies imaginables et
imaginaires.
= L'Arganier (ou Argan) est un arbre
épineux qui, parait-il, ne pousse en aucune place ailleurs que dans une certaine
région du Maroc. Ses feuilles et ses fruits sont très appréciés par les chèvres
qui grimpent jusqu'aux cimes les plus hautes pour en déguster les meilleurs.
= On dit que la partie dure du fruit
ne pouvant être digérée par la chèvre se retrouve intacte dans la crotte de
l'animal, nettoyée de son écorce. On casse cette partie dure pour sortir la
"noix" de l'argan dont on extrait une huile d'un goût incomparable et cher.
L'industrie de cette huile se sert rarement du procédé de la chèvre, les fruits
cueillis sont épluchés. Des ouvrières agiles casseront les écorces à l'aide
d'une masse de pierre.
= Si les repas dans les grands hôtels
vous paraissent un peu style "cuisine internationale" et si vous voulez déguster
les mets locaux il faudra chercher dehors.
Comme ce petit restaurant qui vendait des
sandwiches, avec des tranches brunes et luisantes d'aubergines frites.
- Pour les Tajines originaux il faudrait
éviter les restaurant pour touristes où les guides voudront vous emmener,
cherchez plutôt dans les petits villages. C'est là que j'ai dégusté les
meilleurs ragoûts de viande.
= Dans les villes de la cote Atlantique,
le poisson est roi et toujours bien préparé. Etant né dans un port de pêche sur
la Méditerranée, le poisson est un de mes mets préférés. Je trouve qu'un poisson
grillé est d'une grande beauté, quand il s'offre à vos sens tout frais, dans
tous ses parfums et ses couleurs.
= Le thé au Nana (menthe), un peu trop
sucré, est une Institution au Maroc, on vous en offre partout, du lobby des
hôtels jusqu'aux magasins de djellabas. Par contre, je n'ai pas vu le Shiba
(l'absinthe) dont l'infusion est considérée en Israël comme particulièrement
marocaine.
- Le Café le plus piquant que j'ai bu, de
ma vie, est celui que ce serveur ambulant nous a versé de sa cafetière-canoun
aux braises, on dirait qu'il avait mis beaucoup d'harissa et peu du sucre.
= La musique vous accompagnera partout,
de l'arabo-andalouse aux rythmes des Caraïbes et du Lobby de l'hôtel jusque dans
les restaurants de Poissons, en plein air
= Les Saltimbanques accoutrés de toutes
les couleurs, qui jouent, chantent et dansent en s'accompagnant de clochettes ou
de castagnettes, m'avaient rappelé le Boussaa'dia et les gitans qu'on voyait
jadis sur la place de Bab-Carthagène à Tunis.
= Un voyage organisé au Maroc vous offre
au moins deux soirées folkloriques dans une boite de nuit pour touristes. Alors
on ne fait pas le snob pour ne pas abîmer la sortie avec les camarades, vous
trouverez sûrement un moment qui compensera vos efforts.
Vous ne vous sentirez peut être pas à
l'aise au milieu de près de trois milles spectateurs. Vous verrez des dizaines
de cavaliers, qui galopent et qui tirent des coups de feu, essayant d'imiter une
sorte de fantasia-instant.
Ils m'avaient parus moins authentiques que
les groupes folkloriques des petites boites, qui, avec leurs habits du Sud,
avaient un air plus naturel. Ils chantaient, dansaient et tapaient comme des
fous, dans leurs grands tambourins. Instinctivement cela m'avait ramené à la
mémoire un après midi de Stambali (danse d'exorcisme des Djinns) dans la cour
d'une Oukala à la Hara de Tunis.
= L'artisanat en Tunisie était plutôt
pratiqué par des juifs, qui étaient entre autre les meilleurs bijoutiers,
tailleurs, tapissiers, etc.… Durant mon enfance et mon adolescence j'avais
souvent admiré leurs talents.
Le 3e volet de cet article sera
consacré aux artisans marocains ainsi qu'aux émotions et aux souvenirs qu'ils
avaient réussi à me faire revivre.
Texte et photo: Avraham Bar-Shay
(Benattia)
absf@netvision.net.il
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