La nouba marocaine
La nouba est une suite chantée et instrumentée de différents poèmes, entrecoupées de pièces musicales instrumentales, libres ou mesurées.
La nouba est chantée à l’unisson par les instrumentistes en hétérophonie, c’est à dire par enchevêtrement des voix .
La nouba juxtapose une série de mouvements qui ne sont pas tous forcément interprétés lors d’une même exécution .
La nouba est fondée sur la notion de mode que l’on nomme tab’ , c’est lui qui assure à la nouba sa cohérence et son identité.
Le répertoire actuel des noubas marocaines a été effectué au XVIIIeme siècle par un musicien érudit originaire de Tétouan nommé Muhammed Ibn al-Hasan al-Hayik . Il rassembla en un recueil tous les textes des chants conservés à son époque avec des indications d’interprétations très précises.
Il existe onze noubas marocaines faisant appel à vingt-six modes différents .
Il n’y a pas d’interprétations standard de chaque nouba, elles varient
en fonction des écoles et des praticiens.
Chacune des noubas a une signification précise et doit être jouée à un moment précis de la journée .
Les noubas relèvent de l’ordre suivant :
- Nouba raml al-maya
- Nouba isbahan
- Nouba al-maya
- Nouba rasd al-dhil
- Nouba al-istihlal
- Nouba rasd
- Nouba gharibat al-husayn
- Nouba al-hijaz al-kabir
- Nouba al-hijaz al-mashriqi
- Nouba ‘iraq ‘ajam
- Nouba ‘ushshaq
La première nouba a une connotation religieuse et tient de ce fait une place à part.
Le rythme : Mizan
Chaque nouba comporte cinq mouvements . Chacun d’eux est basé sur un rythme qui lui est propre : le Mizan .
Chacun de ses mouvements va du modéré au rapide :
- basit (léger ou lent)
- qa’im wa-risf ( une battue et demie)
- btayhi ( allongé)
- quddam ( en avant)
- darij ( étape finale)
Ces mouvements s’enchaînent rarement dans leur totalité en raison de leur longueur .
Les instruments
- Le ud’ (luth) : le ud’ utilisé est le ud’ égyptien à six cordes .
- Le rbab (sorte de vielle) : il tient le registre grave dans l’orchestre, il trace la ligne mélodique et joue un rôle efficace lors du silence des autres instruments . C’est un instrument noble qui est souvent tenu par
le chef de l’orchestre .
- Le tar ( tambourin) : il est l’instrument rythmique par excellence . Il diffère de son homologue oriental par sa taille, son poids et sa technique basée sur l’agilité et le jeu du poignet. Ses différentes sonorités, produites par la percussion de la main droite, sont enrichies par la sonorité métallique des cymbalettes effleurées par les doigts de la main gauche ou par les oscillations du tar .
- La darbuka ( tambourin calice) : elle complète les nuances du ton et renforce le rythme .
- La kamanja kbira (alto) et la kamanja cghira (violon) : les deux sont apparus dans l’orchestre seulement au XVIIIème siècle amenant une révolution dans la sonorité. Ces deux instruments sont posés sur le genou gauche de l’instrumentiste en position verticale, ce qui leur permet de pivoter et d’amener les quatre cordes au contact de l’archet .
Le répertoire poétique
Il s’agit de la partie vocale de la nouba . Elle y tient une place essentielle .
La nouba est composée de poèmes que l’on nomme ainsi :
- muwashshah
- zajal
- shugl
- barawal
- Le muwashshah : c’est une forme de poème qui est née en al-Andalus . Au Maroc sa particularité est qu’il se fond dans la nouba, il signifie ornementation, embellissement .
La structure de ce poème est tripartite et on l’apparente souvent à la musique médiévale occidentale et plus particulièrement celle des troubadours. Il se divise en stance, chacune d’elle étant constitué d’un nombre variable d’hémistiches ou de vers courts .
Son interprétation a un esprit responsorial : il est chanté par un choeur de quelques personnes, dirigé par un soliste qui énonce la première phrase chantée qui est ensuite reprise par le choeur .
- Le zajal : c’est un poème chanté en langue dialectale, il est composé de trois volets : matla ( envoi), dawr (tour), qufl (fermeture) . Le terme zajal signifie émouvoir avec la voix, chanter .
- Le shugl : c’est un poème chanté d’obédience populaire de la musique arabo-andalouse .
- Le barawal : c’est un poème chanté de langue populaire, intégré ces derniers siècles à la nouba .
Ces poèmes ont traités tous les sujets sociaux , politiques, religieux ...
Le muwashshah est le plus utilisé de ces formes poétiques. Il nous présente le monde de façon beaucoup plus intense que la réalité . Les andalous avaient un amour profond pour la poésie et la musique tout comme pour l’art en général, ils ont donc fait en sorte que toutes les formes d’art s’épanouissent . En général les thèmes qui reviennent le plus souvent sont la femme et l’amour dans toutes les étapes de son évolution .
Les marocains ont continué de se servir de ces formes de poèmes pour leurs noubas .
Ils ont aussi développé une forme de poème qui leur est propre : Le Malhun
Le Malhun
c’est la plus élaboré des formes de versification en arabe dialectal marocain . Il s’agit d’un vaste corpus de poèmes que perpétue une tradition de chants .
Le texte poétique prédomine sur la musique . Le poète que l’on nomme nadhem al-malhun reproduit l’équilibre entre le populaire et le savant, la dimension populaire est liée principalement à la langue utilisé : l’arabe dialectal marocain, la dimension savante est lié à la dimension thématique, son imagerie poétique et ses liens avec la musique arabo-andalouse .
Le malhun repose sur deux éléments : les ouvertures et les parties alternant un refrain . Les ouvertures se composent d’un prélude instrumental libre de percussion, taqcim exécuté en solo et alternativement par les instruments de l’orchestre ( ud’, violon ) .
Les poèmes sont signés et datés, ce qui signifie que le poète protège ainsi son œuvre .
Il s’inspire beaucoup de la poésie arabe et des muwashshaht .
En ce qui concerne le rythme et la musique du malhun , celui-ci possède ses propres modes et ses propres rythmes .
Le haddari est le rythme omniprésent car c’est lui qui mène le poème jusqu'à la phase finale . Il est binaire : deux temps qui alternent principalement le yamm (centre) et la hashya (bord).
Il a emprunté un bon nombre de tab’ arabo-andalous .
L’orchestre est composé de cordes et de percussions, son rôle est de suivre discrètement les inflexions vocales du chanteur .
Le chanteur soliste est le personnage le plus important de l’orchestre du Malhun , on exige de lui de détenir un répertoire assez larges de poèmes, de savoir moduler, de pouvoir changer de rythme, de savoir expliciter les phrases chantées .
La musique berbère
Introduction
Les berbères sont les premiers habitants du Maroc. Ils habitent essentiellement la partie montagneuse du Maroc : l’Atlas .
L’Atlas forme une dorsale montagneuse qui commence au nord à la hauteur de Fès et se prolonge dans le sud jusqu'à la hauteur de Goulimine .
Il se décompose en trois chaînes de longueurs inégales :
- le haut- Atlas
- le moyen-Atlas
- l’anti-Atlas
Le haut-Atlas est long de 700 kms et forme une chaîne imposante entre l’Atlantique et le Maroc oriental, il forme dans sa partie nord une fourche dont la branche supérieure est le moyen-Atlas .
Au sud il dessine une autre fourche qui enserre la plaine du Sous et donne sur l’Atlantique dont la branche inférieure forme l’anti-Atlas .
L’Atlas est divisé en parlers :
- le tamazight ,il est parlé dans le haut-Atlas oriental et le moyen-Atlas par les berabers .
- le chleuh est parlé dans le haut-Atlas occidental et central et dans l’Anti-Atlas par les chleuhs .
Les berabers et les chleuhs sont deux grands groupes berbères .
La musique berbère est une musique rurale par opposition à la musique arabo-andalouse qui est citadine .
Elle est aussi beaucoup plus fonctionnelle et participe beaucoup à la vie agricole, elle rythme la vie quotidienne des gens . La danse y est très importante , les instruments sont différents .
Il y a aussi des parallèles avec la musique arabo-andalouse pour une prédilection pour des développements que l’on qualifie de suites, pour le rôle important accordé au tambour et aussi pour la proximité de leurs échelles musicales ; la poésie y a une grande place et elle est chantée tout comme dans la musique arabo-andalouse .
Les chants dans la vie agricole : le ddikr
Le ddikr ( au pluriel ladkar ) est un chant d’inspiration religieuse et a une place importante dans toutes les étapes de la vie agricole : les labours, les moissons, le dépiquage mais aussi le travail de la laine .
L’élément essentiel de ce chant est l’invocation de façon répétitive du nom de Dieu, afin de prévenir certains effets néfastes sur les récoltes tels que la grêle, le gel, le vent trop fort .
Ces chants sont aussi bien chantés par les hommes que par les femmes . Ils ou elles se réunissent en séances au cours desquelles les versets font l’objet de répétitions dont le nombre est fixé par la tradition .
Ce sont dans ces ladkar que les femmes puisent leur inspiration pour des chants utilisés à d’autre occasions . En particulier pendant les activités agricoles propres ( seules les femmes s’occupent des activités agricoles ). Ces chants sont un mélange d’arabe et de berbère .
Les musiques de danse
Il y a deux grandes traditions de danses :
- les Ahwash chez les chleuhs
- les Ahidus chez les berabers
Ces deux danses sont associées à des grandes fêtes collectives, forment ainsi tout un spectacle ou sont associés la musique, le rythme, la poésie . La musique est chantée par les choeurs le plus souvent mixtes et accompagnée d’un ensemble de benadir et de claquements de mains.
Les Ahidus et les Ahwash se distinguent au niveau du rythme, des échelles modales , de la chorégraphie et de l’instrumentation . Elles se ressemblent un peu malgré tout, car les divergences ne sont pas très bien définies et surtout elles ont en commun le thème de l’appartenance au village et à la même aire linguistique .
- Les Ahidus :
On différencie le petit ahidu et le grand ahidu .
Le petit ahidu est appelé amezyan . Il est accessible aux jeunes et aux gens qui ont moins d’expérience.
Le grand ahidu est appelé akswath . Il rassemble des gens plus professionnels car le rythme est plus lent, la gestuelle plus complexe, il est la fierté de la tribu, c’est celui-ci que l’on réserve aux grandes occasions .
L’ahidu est composé de cinq mouvements principaux :
- le tamawayt qui est un appel, un chant solo et exécuté par un chanteur ayant une voix forte et aiguë
- la phase lente de rythme quinaire
- la phase modéré avec des rythmes binaires
- la phase rapide avec un rythme binaire
- la phase rapide avec un rythme ternaire
L’ ahidu n’utilise qu’un seul instrument : le bendir, c’est un instrument fait d’un cercle de bois percé d’un trou pour permettre à la main gauche d’introduire le pouce et de saisir l’instrument .
Le bendir est recouvert d’un coté par une peau de chèvre sur un cercle de 75 cm de diamètre environ ; la profondeur de l’instrument est limitée à 15 cm .
Le percussionniste utilise en plus de sa main droite les quatre doigts de la main gauche pour produire les rythmes de l’ahidu avec toutes les nuances de frappes possibles
La constitution de la danse :
Cette danse est constitué par un grand cercle, épaule contre épaule des hommes et des femmes reproduisent des mains, des pieds et du corps entier les mouvements et fluctuations du rythme . Les danseurs et les danseuses résonnent au diapason des chants et de la percussion, ils sont bercés par les pulsations qui décuplent d’intensité en se transmettant d’épaule à épaule .
Chaque tribu combine à sa façon les éléments du gestuel, c’est souvent le percussionniste central qui dirige l’ensemble .
La symbolique de la danse :
L’ahidu reproduit les gestes quotidiens de l’homme et de la femme, symbolise l’union .
Hommes et femmes tiennent à exprimer leur attachement aux valeurs tribales, cela explique pourquoi même les femmes mariées peuvent danser parfois à coté d’hommes de la tribu inconnus d’elles .
-Les Awash :
Les Awash se passent souvent à la tombée de la nuit . La danse se constitue progressivement et les sections se composent .
C’est un spectacle fait de danses, d’improvisations poétiques, de percussion et de chants individuels et collectifs .
L’awash offre aussi l’opportunité de résoudre un conflit à l’intérieur d’une tribu . Les hommes et les femmes participent tous deux à la danse mais ils sont séparés , il y a des awash pour les hommes et des awash pour les femmes .
Le rythme : ils sont nombreux et divers par le genre et la richesse de leurs accentuations . L’awash pratique la division des percussionnistes, tous n’ont pas la même fonction ni le même registre sonore Le rythme est binaire .
Les instruments : Ils sont classés en deux groupes : la percussion et l’instrument mélodique .
Les percussions sont appelées :
- allun : c’est un tambour sur cadre, il fait 40 à 50 cm de diamètre et 8 à 10 cm de profondeur
- ganga : c’est un gros tambour africain à deux peaux joués à l’aide de deux baguettes recourbées, il est très utilisé dans l’awash de l’anti-Atlas
La constitution de la danse :
L’essentiel du gestuel de l’awash est constitué selon les cas par des claquements de main, par des trépignements du corps ; la vigueur des mouvements varient selon qu’il s’agit d’hommes ou de femmes ou de circonstances .
Le concours du poète est essentiel, il assure la qualité des thèmes .
Le chant est antiphonaire, les deux groupes de l’awash chantent chacun une partie en alternance . D’abord sans percussion, le chant est exposé par l’un des deux groupes, repris par l’autre, puis l’élan rythmique intervient .
La Taskiwin :
C’est une forme particulière de l’awash . Cette danse est une danse masculine accompagnée de flûtes et de tambours ; elle a une connotation guerrière .
Elle porte son nom de la corne à poudre richement décorée que porte chaque danseur sur l’épaule gauche : tikst, taskiwin au pluriel .
Cette danse nécessite la participation d’une vingtaine d’hommes, requiert deux ou trois tambours sur cadre, des tallunt et des flûtes, tal’wwatt ; de plus chacun des danseurs tient un petit tambour en forme de gobelet, agwal .
Les danseurs portent des vêtements particuliers : des burnous blancs, un turban blanc, une ceinture brodée et un poignard enfoui dans un fourneau
Les musiciens itinérants
Leur présence s’est développé depuis le début du siècle . Ils parcourent la montagne au printemps et en hiver après les récoltes. Ils ont un rôle de messager en amenant des informations politiques et régionales de village en village.
Les Imdyazn
Ils sont originaires du haut-Atlas oriental ; ce sont des musiciens saisonniers . La troupe se compose de quatre chanteurs et musiciens :
- un poète chanteur, l’amdyaz, il est aussi le chef de la troupe .
- deux irddadn répondants, accompagnateurs, ils répètent les vers du poète chanteur ou chantent en alternance avec lui .
- le bu ughamin « celui du roseau », il chante et joue de la clarinette double (aghamin) ; il est le personnage excentrique de la troupe et est habillé comme une femme .
L’art des imdyazn est un spectacle à part entière et s’inspire des événements locaux : le bu ughamin amuse pendant que l’amdyaz informe et comble les gens de sa poésie .
Ils chantent deux répertoires :
- le tamdyazt : c’est un chant à caractère moral ou politique qui ne comporte pas d’accompagnement instrumental . Il existe trois sortes de tamdyazt :
- tayffrin, traite d’événements passé ou actuel
- tafsut, signifie printemps et traite des femmes et de l ‘amour
- tuhid, traite de la vie religieuse et morale
- les izlan : ils sont chantés par les accompagnateurs et sont composés de deux ou quatre vers . Ils traitent de thèmes légers .
Les Shikkat
On les trouve chez les Berabers . Ce sont des chanteuses et des danseuses, elles sont souvent aussi des prostituées ou des anciennes prostituées . Elles utilisent différents sortes de tambours et se font accompagner au violon, à l’alto ou au luth . Leurs chants ressemblent aux izlan
Les Rways
Cet ensemble de musiciens se produit chez les Chleuhs .
Le poète chanteur, rays s’accompagne à la vielle monocorde, rbab ; il est accompagné de plusieurs joueurs de luth à trois ou quatre cordes (gimbri) et d’un joueur de cloche naqus et parfois de joueurs de tambour sur cadre et de petites cymbalettes en cuivre fixé (nuisqat) .
Aujourd’hui les nuisqat sont l’apanage des danseuses raysat .
Leur spectacle se compose de figures chorégraphiques multiples et complexes. Leur art se distingue par les habits blancs des danseurs, par l’élégance du geste, par la maîtrise de la voix, du jeu instrumental et du rythme exécuté par des trépignements de pieds et les petites cymbalettes .
Leur spectacle se déroule en plusieurs phases :
- astara, c’est le prélude, il est instrumental, donne les notes de base aux autres instruments ; le prélude est joué généralement par le chanteur .
- amarg, cœur essentiel du spectacle, est le poème chanté .
- ammussu, est l’ouverture chorégraphique .
- tamssust, est un chant intercalaire .
- aberdag, est une danse .
- tabbayt, est la phase finale, le rythme s’accélère annonçant la fin .
La musique est presque exclusivement pentatonique. Le poème est soumis à deux impératifs rythmiques : celui de la phrase musicale et celui de la percussion .
Le rythme de la percussion est dominé par un rythme ternaire simple .
La musique de transe
Une tradition dans l’Islam
La tradition musulmane a toujours associé étroitement la musique et la transe, plus particulièrement dans les confréries soufis .
On entend par soufisme la tendance mystique qui dans l’Islam vise à la communion directe entre l’homme et Dieu .
Pour les soufis la transe tient une grande place dans la quête spirituelle et met en communication directe avec Dieu ; la transe s’obtient souvent par la musique .
Les soufis ont développé deux cérémonies associant la musique à leur quête spirituelle :
- le sama
- le dikr
Le Sama
Signifie une audition, c’est une cérémonie faite de prière, de musique et de danses qui fait accéder à l’état de grâce et d’extase .
Sa musique est surtout chantée, la part instrumentale est beaucoup moins importante . Le concert se déroule sous la direction d’un maître spirituel, le cheikh, et le chant solo est exécuté par le qawwal, celui-ci est choisi par la beauté de sa voix .
Les fidèles écoutent ce concert, assis et se laissent peu à peu prendre par la transe .
Les instruments utilisés sont le tambour sur cadre et la flûte oblique . Au cours du temps d’autres instruments ont été employé .
La musique du sama est essentiellement vocale, il s’agit avant tout de chanter les sourates du Coran et des vers de poésie . Le rythme et la mesure de ces vers déclenchent la transe.
Le dikr
C’est une prière qui peut être comparé à une litanie, le nom de Dieu répété est inlassablement jusqu’à prendre le corps puis l’esprit, amenant ainsi à un état de transe et à un anéantissement de la conscience .
La pratique du dikr revêt deux aspects principaux : celui qui est solitaire et celui qui est collectif, ce dernier est lié à la musique et à la danse .
Sa pratique est différente de celle du sama, toute l’assemblé est prise par état de transe . Le dikr est aussi dirigé par un maître spirituel, le cheikh auquel s’adjoignent les chanteurs .
Les prières sont chantées et reprisent en choeur par l’assemblée, elles sont accompagnées très vite d’un mouvement du buste d’avant en arrière, ce mouvement introduit une scansion dans le chant jusqu'à amener l’état de transe .
La transe ici est plus communielle .
La musique de transe au Maroc
Les soufis sont divisés en confréries sur l’ensemble des pays musulmans . Au Maroc deux confréries soufis sont implantées et pratiquent la transe :
- les Gnaouas
- les Aissawas
Les Gnaouas
Ils sont originaires du grand empire occidental qui comprenaient le Ghana, la Guinée et le Mali . Ils ont été amené au XVIIeme siècle au Maroc en tant qu’esclaves . Ils se sont ensuite métissé à la population locale . Leur saint patron est Sidi Bilal, c’est un esclave qui fut libéré par le prophète pour devenir le premier muezzin de l’Islam .
Le fondateur de la confrérie est Mohammed Ibn Allah, qui vécut aux alentours du XVIIeme siècle .Les Gnaouas ont un système de pensée hautement élaboré, les couleurs ont pour eux une signification symbolique précise : aux sept couleurs sont associés sept suites ; le mouvement centrifuge de la danse représente le mouvement des planètes .
La musique a pour eux une fonction thérapeutique, qu’ils jouent entre eux u chez des gens .
La Lila
C’est la grande cérémonie des Gnaouas, elle se déroule durant toute une nuit d’ou elle tire son nom ( lila) . Elle se décompose en trois grandes phases :
- Laada (coutume)
- Koyyou (souvenirs)
- m’louk
La Laada est une procession tout en couleurs et en musique incitant à la danse .
Les Koyyou sont un jeu préliminaire, les souvenirs des anciens sont évoqués, mimés et dansés .
Le M’louk est la phase finale de la lila . C’est le moment ou de l’encens et des bouts de tissus des sept couleurs sont amenées sur un plateau . C’est le moment ou les esprits commencent à « apparaître » amenant la transe .
Les instruments de musique :
- le guembri : c’est un luth à trois cordes, de registre bas ; il joue une musique pentatonique . Il a la forme allongé d’un demi-tronc d’arbre coupé transversalement .
- les qrabeb ( crotales) : le percussionniste gnawi actionne dans chaque main entre le pouce et le médius deux paires de crotales en forme de huit et produit par entrechocs tous les détails du rythme .
- le tbel : c’est un grand tambour .
Le rythme : dans l’exécution de la lila le rythme joue un rôle essentiel . Le gnawi superpose et aligne des formules binaires et ternaires . Le battement des mains et les percussions ont une fonction importante dans le rythme .
Les Aissawas
Ils sont une confrérie et se trouvent principalement dans la région de Fès et de Meknès . Cette confrérie a été fondé au XVIème siècle par Sidi Mohammed Ben Aissa .
Deux pratiques fondamentales sont propres à cette confrérie :
- la hadra, c’est une pratique collective de la transe .
- la frissa, c’est une pratique propre aux Aissawas et consiste à dévorer un animal vivant .
La hadra est exécuté pendant les grandes fêtes aissawas . La grande fête ou moussem a lieu à Meknès prés du sanctuaire du cheikh al Kamel, à l’occasion de la célébration de la naissance du prophète . La hadra fait partie d’un rituel que l’on appelle aussi lila, car il dure toute la nuit . La lila des Aissawas commence par des chants puis est suivi par la hadra .
Dans la hadra, le nom de Dieu, des prières sont invoquées inlassablement jusqu'à prendre le corps puis l’esprit, de cet état découle la transe .
Le rythme : il y a trois rythmes : à deux temps, cinq temps et 6/8 ternaire.
La musique marocaine contemporaine
La musique marocaine actuelle est un cumul de genres très diversifiés . La musique traditionnelle continue à reproduire les formes anciennes modifiées par des interprétations plus modernes .
A coté de la musique traditionnelle d’art, la ville a produit à l’époque contemporaine un nouveau style musical, plus « occidental », une musique faite plus pour divertir et privilégiant les rythmes dansants, l’intellectuel et le spirituel étant exclus .
Les techniques de mixage, les instruments électroniques, la commercialisation de cassettes, la radio ont aidé à la diffusion de cette musique .
La chanson marocaine s’est véritablement développé avec l’indépendance du pays . Deux grandes tendances se sont d’emblée dessinées : l’une adoptant l’arabe classique et l’autre adoptant l’arabe dialectal , la première essaya de rester classique, très conventionnelle alors que la seconde a introduit un répertoire plus léger, plus proches du public populaire .
Mais ce modèle marocain faisait souvent écho à la musique égyptienne ( Oum Kalthoum, Farid al Atrach, Abdelwahab ...) et a entraîné une crise de la chanson marocaine dite moderne .
Au début des années 70, la chanson marocaine est à bout de souffle .
Les années 70
Les années 70 ont vu l’arrivée d’un renouveau dans la musique marocaine avec l’émergence de groupes tels que Nass el Ghiwan, Jil Jilala, Lem Chaheb, les frères Bouchenak .