Je suis Charly, par Sandrine Roux
A la veille de l’ouverture du 18ème Festival du Film Israélien, un hommage à Charles Zrihen, son créateur, s’impose.
C’est en 1997 que Charles Zrihen, dit « Charly » débarque de Los Angeles avec pour seul bagage, l’envie de créer un festival du film Israélien à Paris. C’était une belle idée. Personne ne connaissait ce cinéma à l’époque, à part les festivaliers du cinéma méditerranéen de Montpellier, où la même année, entre un film italien, roumain ou slovène, on pouvait tomber sur une pépite israélienne (« Afula Express » par exemple). Mais ces films n’étaient jamais distribués en France et ravissaient seulement les happy few qui avaient eu le privilège de les voir.
Charly n’avait pas un rond, mais il avait la foi en son projet, une foi joyeuse qui emporte tout sur son passage et qui donne envie aux autres de l’aider. Il lui aura fallu 4 ans pour que le premier festival de cinéma israélien voit le jour à Paris en 2001, juste après les attentats de New York. Pas le meilleur timing, et pourtant…
Ce fut Olivier Taïeb, le premier à lui offrir une aide concrète : ses parents, imprimeurs s’occuperont des affiches et du programme, et Olivier, en bon metteur en scène, filmera l’événement comme en témoigne ce joli montage vidéo :
Comme l’écrit le photographe Richard Darmon dans un post Facebook lu et partagé par ses nombreux abonnés :
« C’est ainsi que pendant 16 ans, nous avons pu voir au Cinéma des Cinéastes, Place de Clichy, les meilleurs documentaires, les meilleurs films de fiction, et que nous avons pu être en prise directe avec la société israélienne. Si vous avez pu connaître le talent stupéfiant de la regrettée Ronit Elkabetz en France, c’est grâce à lui. Si vous avez pu connaître le cinéma d’art et d’essai de l’excellent producteur David Zilberg, c’est grâce à lui. Si la créativité libre, considérable, du cinéma israélien a été reconnue en France, si vous avez pu voir quelques uns de ces films sur Arte, c’est grâce à lui. »
Comment expliquer alors que le nom de Charles Zrihen ne figurait pas dans le discours de la nouvelle présidente, lors de la soirée d’ouverture du Festival du cinéma israélien l’an dernier ? Car la santé fragile de Charly l’a obligé à passer la main et à démissionner temporairement du festival qu’il a créé. Comment expliquer que pas un mot de prompt rétablissement et de remerciement pour tout le travail fourni n’ait été prononcé ? Est-ce un oubli ou de l’ingratitude de la part de celle qui a repris les commandes de ce festival l’an dernier ?
Demain s’ouvrira donc, sans Charles Zrihen, la 18ème édition du Festival du Cinéma Israélien au Majestic Passy à Paris. Au programme, « Foxtrot », Lion d’argent à Venise, de Samuel Maoz, un réalisateur que Charly avait programmé lors de son premier film « Lebanon ». Ce film qui déplaît à Miri Regev, la ministre de la culture israélienne, a soulevé une polémique concernant la présence ou non de l’ambassadrice d’Israël à la soirée d’ouverture. Finalement, Aliza Bin-Noun se fera représenter par son attachée culturelle. L’honneur est sauf : pas de boycott en vue donc. On espère cependant que le nom de Charles Zrihen ne sera pas non plus boycotté.
Un festival n’appartient à personne, si ce n’est au public, mais il est toutefois juste et légitime de rendre à Charly ce qu’on doit à Charly.
Alexandrine COHEN-ROUX
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