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David Bensoussan

 

Le matin, après avoir avalé la fameuse cuillerée d'huile de foie de morue ou encore après l'avoir mélangée avec du miel, bu son verre de thé bouillant accompagné de tartines beurrées, il est temps de prendre le chemin de l'école. Sac de cuir au dos, nous devisons avec des amis en allant de la Tour d'horloge puis en longeant la plage. Nous ramassons parfois des jujubes au pied des arbres qui bordent la route. Par journées de beau temps, nous nous regroupons par affinités et nous nous interpellons les uns les autres. Par temps gris, nous portons nos capes à capuchons ou nos duffle-coats et parfois des bottes de caoutchouc qui nous donnent le grand avantage d'avoir le plaisir de patauger dans les flaques d'eau. Nous virons à gauche et passons devant l'église puis devant l'école arabe où les enfants sont le plus souvent assis par terre sur le coup de midi, puis nous bifurquons à droite pour entrer à l'école de l'Alliance, l'école des filles en premier, celle des garçons de l'autre.

Il y avait toujours un groupe réuni autour d'acrobates grimpés sur l'arbre à réglisse au milieu de la cour. D'autres faisaient des paris devant la longue corde à grimper. Les cris de "À déééélivrer!" fusaient de partout. Nos récréations étaient extrêmement bruyantes. Les jeux ralentissaient au coup de sifflet et nous nous mettions en rang deux par deux. Tôt le matin, ou peu avant la reprise des classes à deux heures de l'après-midi,  beaucoup se rassemblaient le long du mur qui bordait le cimetière arabe à l'arrière de l'école. Là, les enfants creusaient la terre glaise et modelaient du mobilier, des fruits ou des personnages qu'ils exposaient fièrement. Certains y excellaient particulièrement. Parfois, nous nous aventurions de l'autre côté de l'école où deux avions minuscules de couleur sable semblaient être collés au sol. Plus loin, les dunes de sable que l'on dévalait aux cris de Tchitcha la fava ! (je n'en ai jamais connu la signification). Après avoir pris notre élan, nous sautions et nous roulions en cabrioles de haut en bas dans un nuage de sable pour recommencer encore et encore.

 

Mr Bitton était partout à la fois. Il était le directeur de l'école de l'Alliance qui porte le nom du célèbre consul de France Auguste Beaumier qui dès 1866 milita en faveur de l'instruction française de l'Alliance plutôt que celle anglaise de l'Anglo Jewish School.  Les blagues relatives à sa petite taille se muaient en admiration et quelle admiration, lorsqu'il ouvrait la bouche. Il nous clouait littéralement sur le siège lorsqu'il nous donnait des cours de mythologie grecque en classe de sixième. Tous se disputaient alors les exemplaires de l'Iliade et l'Odyssée de la bibliothèque de l'école.

Monsieur Cohen dit Kéna n'était pas conventionnel. Il ne supportait pas les manières ou les facéties. Il nous organisait des sorties dans la nature et certains en revenaient avec des couleuvres en cravate car il fallait surmonter l'aversion ridicule. Il faisait l'élevage de souris blanches en classe que nous appelions du nom des héros de bandes dessinées : Pipo, Concombre, Élastoc, Mickey, Minnie, Donald, Daisy, Riri, Fifi, Lulu, Nif Nif, Naf Naf, Nuf Nuf et ainsi de suite. Il nous faisait tenir un journal des souris.  J'aimais le taquiner par mes questions qui venaient justement remettre en question certaines de ses affirmations ou analogies volontairement simplifiées à des fins pédagogiques. Il m'appelait la barre sur le T et le point sur le i.

Le professeur Léon Benarosch était légendaire. Tout en lui était élégance : son discours comme son parler. Son tabac Amsterdamer parfumait la classe et il nous étonnait par ses pipes toujours différentes. Je me demande pourquoi on s'en étonnait puisque toute la classe lui offrait pour le nouvel an…une pipe ! Sa voix était claire et son discours parfaitement ponctué. Il nous faisait lire des volumes que nous devions résumer et j'avais l'habitude le jeudi soir de dicter des résumés à ceux qui voulaient bien prendre pour moi un livre supplémentaire à la bibliothèque car j'étais un lecteur avide. Il avait d'ailleurs le don de démasquer facilement ceux qui se contentaient de la seule remise de résumés sans même avoir ouvert le volume et qui avaient en plus le don de récidiver. Nous tenions des cahiers de synonymes bien fournis, des cahiers de biographies et ses tests nous maintenaient en forme. Il nous faisait ingurgiter de la culture et encore de la culture…

Il y avait le couple Ohayon. Lui grand et svelte, elle courte et rondelette. Messieurs Mouryoussef, Mouyal, Cohen, Danan, Madame Ohayon et tant d'autres encore dont le dévouement à la carrière d'enseignant était des plus admirables.

Le chemin du retour de l'école se faisait généralement par petits groupes et de façon ordonnée. Il y avait un vieux gendarme que les enfants aimaient rendre fou en utilisant un sifflet identique au sien ce qui le mettait dans une rage de lèse-majesté car il se voulait seul à avoir cette prérogative. Le plus souvent bonhomme, il nous permettait de toucher parfois la crosse de son pistolet en bandoulière.

Vers la fin de l'année, une fièvre incontrôlable s'emparait des élèves qui braillaient à l'unisson durant les derniers jours devant l'administration qui savait alors se montrer étonnement clémente :

"Gai Gai l'écolier, c'est demain les vacances…

Adieu ma p'tite maîtresse qui m'a donné le prix

Et quand je suis en classe qui m'a fait temps pleurer !

Passons par la fenêtre cassons tous les carreaux,

Cassons la gueule du maître avec des coups de belghat (babouches) !"

Ou encore :

"Iya pas de coméra (Il n'y a pas du pain) ya sardina (il y a de la sardine) !

Iya pas de sardina ya lcoméra !"

Ou même :

"Éteindez (Éteignez) la lumière, commencez l'cinima (le cinéma) !"      

Au programme musical s'ajoutaient d'autres refrains tels : "Je monte sur un pommier, qui est plein de cerises, j'entends signaler…" ou encore "Ahia Mimouna, mimouna ya mimouna !" Cette dernière chanson tirée du répertoire pied noir, avait une saveur particulière car l'on y singeait avec humour la langue française. Les meneurs parmi les enfants faisaient alors état ouvertement de leurs couleurs en scandant les chansons en tête des frondeurs d'un jour. Les réjouissances de fin d'année se terminaient au cinéma La Scala où nous donnions des représentations. Les représentations musicales incluaient de la musique andalouse chantée par des cœurs et les spectacles humoristiques avaient des sketches hilares en judéo-arabe. Nous étions parfois invités à l'école française pour assister aux spectacles de fin d'année qui incluaient des danses des provinces françaises et l'inévitable : "Si tous les gars du monde décidaient d'être copains…" qui prônait l'égalité de chaque enfant "même s'il n'est pas né en France !".

 

Alors que nos amis français batifolaient à la plage, nous devions passer nos dimanches et nos vacances estivales au Talmud Thora pour y compléter notre formation hébraïque et biblique. La discipline y était stricte et les punitions moyenâgeuses : nerf de bœuf sur la main ou sur la plante des pieds, ces derniers ligotés au moyen d'une falaqa turque. Cette éducation était alors réservée aux garçons. Je parlais français à la maison et dus m'exposer à l'apprentissage de l'hébreu traduit et commenté en judéo-arabe. Il me souvient que le directeur Rbi Haïm Azencot me promenait les matins et me faisait réciter les leçons de chacune des classes en répétant :  « Vous voyez le petit Dody, Prenez exemple ! C'est comme ça qu'il faut apprendre ! » On me trouva brillant et me plaça dans la Yeshiva, avec des adolescents mûrs. Là, les lectures talmudiques en araméen étaient traduites en judéo-arabe. Je planais. Tout me semblait embrouillé. Seules quelques réponses maladroites de quelques étudiants me réconfortaient en regard de ma compréhension des textes. La pédagogie éducative consistait alors à pousser en avant ceux qui manifestaient une certaine prédisposition à l'étude. On leur apprenait à nager en les jetant à la mer. Et puis, il y avait le cauchemar des récréations. À la sonnerie, tous se ruaient dans l'escalier pour aller jouer au foot sur le toit. Je voyais autour de moi des grandes jambes qui me semblaient appartenir à un troupeau de pachydermes en furie. Il arrivait que l'on m'écrasât et que je saignasse. Monsieur Azincot venait alors sermonner les étudiants de monter l'escalier lentement et sans se presser. Cette consigne tenait bon pendant vingt-quatre heures tout au plus. La récréation était le moment où tous se défoulaient où les paris étaient engagés sur les combats de lutte en cours. C'était pour beaucoup de personnes la seule récréation estivale.

 

Deux éducateurs me forgèrent au Talmud Thora de Mogador au Maroc et surent tout autant retenir et captiver mon imaginaire d'enfant : Rbi Yitshaq Haroche et  Rbi Ms'eud Elkabas. Rbi Yitshaq Haroche avait pour habitude de nous enseigner tantôt le livre des Juges et tantôt le livre des Rois tout en tenant ouvert devant lui le quotidien de l'époque, Le Petit Marocain. Tout en nous informant de l'actualité, il faisait des connections et des rapprochements avec tel ou tel autre épisode de la Bible, le tout avec un grand sens de l'humour très apprécié de ses élèves. À quelqu'un qui jetait son chewing gum par la fenêtre en prétendant n'en avoir pas mastiqué, il élaborait des scénarios complexes relativement à des fourmis innocentes écrasées et collées ou des personnes non prédestinées qui se retrouvaient à partager une intimité indécente. Il vainquait par l'humour. Pour sa part, Rbi Ms'eud Elkabas nous enseignait le Talmud la semaine durant. Cela était ardu. J'avais alors 8 ans et il nous fallait saisir au vol les subtilités talmudiques exprimées en araméen, en hébreu et en judéo-arabe. Rbi Ms'eud Elkabas parvenait à nous tenir en haleine jusqu'au vendredi matin. Ce jour là, les livres étaient fermés, et il nous contait des ma'asiyoth, c'est-à-dire  des faits de l'histoire juive. Sa voix douce et sereine voguait dans un grand silence alors qu'il relatait des épisodes du judaïsme marocain où intervenaient rabbins, sultans et rois d'Espagne. Ces deux éducateurs ont réussi à me présenter la Bible sous un visage humain et à me faire sentir que le passé, que ce soit celui de l'Esclavage en Égypte, celui de la royauté glorieuse d'Israël, celui des affres de l'Exil ou celles des horreurs de l'Inquisition constituait un passé bien vivant en moi. Alors, qu'il se soit agi d'un passé historique et  lointain, sa réalité n'en était pas moins des plus présentes dans ma chair. Tous les rêveurs et les persécutés de l'histoire juive revêtaient le visage de mes grand-parents et, tel un chevalier du Moyen Âge, je me promettais déjà de les protéger avec vaillance.

 

À l’âge de dix ans, nous déménageâmes à Casablanca. Je continuais mes études au Cours complémentaire de l’Alliance israélite universelle. Quelle famille ! Nous rêvions, nous nous amusions, nous passions des billets doux laissant éclater l'imagination de nos fantasmes. C'était l'époque des blousons de cuir, des motocyclettes et du cran à l'Elvis Presley. Jerry Lewis faisait notre bonheur. Ray Charles, Johnny Holiday, Richard Anthony et les Chaussettes noires étaient à la mode. Nous nous passionnions sur le sort de Caryl Chessman qui encourait une peine de mort repoussée moult fois. Pour nous repêcher, nos professeurs usaient de morale, d'humour, de compassion, voire de menace. Ils avaient tant envie de nous voir réussir que cela en crevait les yeux.

 

Il y avait le couple rassurant des Altun, tous deux profs de français : le mari guilleret et sa femme posée ; les profs de maths Bréart aux interjections brusques et  Gomel, qui se voulait charmeur ; Madame Lévy aussi charmante que stricte ; les professeurs d'arabe Lévy - le syndicaliste et communiste déclaré - et Cohen - spécialiste des punitions écrites ; la prof de musique Madame Obadia à la voix enchanteresse ; Marelli aux compétences littéraires exceptionnelles ; les professeurs d'hébreu Nahon aux adjectifs grandiloquents et Claude Sultan qui savait mater les plus durs par le contenu de son cours ; le couple Benaroya qui enseignait l'anglais et l'histoire : Lui petit de taille et jovial  et elle langoureuse mais stricte ; la belle et envoûtante madame Zrihen professeur de sciences naturelles qui octroya une gifle cinglante à mon ami Jacky Pinto qui, en leçon d'anatomie, l'avait scrutée attentivement en répondant que le corps humain était… harmonieux ! Madame Ohayon prof de géographie qui avait en sainte horreur les courants d'air et l'ineffable professeur de physique-chimie, Monsieur Wazana, haltérophile et démonstrateur. Il s'engageait dans des trépieds interminables, plaçait ça et là quelques expressions d'arabe dialectal qui nous familiarisaient avec la matière. Comment s'y prenait-elle ? Madame Guéron arrivait à nous faire réciter des chapitres d'histoire entiers de Jules Isaac ! Elle était la motivation même. Et son mari, courtois et fascinant, dirigeait l'école avec un doigté rare. Madame Ifrah, toujours en survêtement, haranguait les classes de gymnastique avec autorité et un humour mordant.

 

Nous étions entourés, cajolés mais le rendions bien à nos professeurs. Le désordre qui régnait dans les récréations laissait place à un envoûtement engageant sitôt nos bancs rejoints. C'était l'époque des crises d'adolescence difficiles et il n'en fallait pas beaucoup pour prendre la tangente en dehors des sillons de l'étude. L'orchestration de l'école était telle que tout un chacun avait droit à une attention personnelle malgré les gaffes ou les mauvaises farces.

 

À l'âge de 15 ans, je passais de l'école du Cours Complémentaire de l'Alliance au Lycée Lyautey. Les ondes radiophoniques vibraient alors avec Françoise Hardy et Marie Laforêt et les Beatles commençaient tout juste à percer. C'était l'époque des yéyé. Quel choc ! Autant l'atmosphère familiale était présente à l'Alliance israélite, autant elle était impersonnelle au lycée. Les professeurs y cultivaient leur légende. Tout celui qui s'aventurait à poser une question s'exposait aux sarcasmes narquois du prof. Autant donc ne pas se mouiller et cultiver ses incertitudes à moins de rouler la question de telle sorte que le prof dans sa grande mansuétude et son éminente condescendance sourcille des yeux et prenne un temps de réflexion avant de répondre. La terreur était ambiante et palpable. Les questions orales trouvaient devant elles des élèves rongés par le trac. La menace d'être envoyé chez le proviseur haut juché et sentencieux était la quintessence de la mauvaise augure.

Et pourtant, nous arrivions à nous y faire et même de temps en temps à en rire. Les récréations surtout. Les plus macho des français racontaient leurs week-ends débauchés en traitant tout celui qui en doutait de puceau. Bien des fils à papa ne s'en faisaient pas pour leurs études - ou du moins le décriaient-ils - et comptaient qui sur leur fortune, qui sur leur particule pour se frayer un chemin dans la vie. Certaines séances de bizutage des classes supérieures en début d'année étaient drôles comme tout, d'autres étaient particulièrement odieuses. Juifs dans une école française en pays musulman, nous avions droit aux congés des trois religions et cela était fortement jalousé par nos camarades français qui n'avaient droit qu'aux fêtes fériées chrétiennes et musulmanes. Certains de nous refusaient de venir en classe le samedi, d'autres se permettaient de venir mais pour écouter seulement, d'autres encore participaient normalement. Il y avait peu d'Arabes en classe. Ils étaient généralement discrets et une proportion importante proférait un marxisme salutaire. La douce cruauté des Français qui attendaient la période du jeûne du Ramadan pour entrer en classe avec des sandwiches au jambon odorants !

Il y avait des professeurs brillants par leur clarté d'esprit et leur démarche intellectuelle cartésienne. D'autres moins sûrs d'eux-mêmes, se renfermaient dans leur carapace disciplinaire. Chacun avait un cachet, des manies, des expressions récurrentes ou encore des colères prévisibles. Ils nous offraient l'excellence et nous devions évoluer tel des équilibristes au sein du créneau exigu de liberté surveillée pour atteindre les cimes auxquelles on nous prédestinait. La recette de la réussite résidait dans le labeur et l'assiduité sans équivoque. À de rares exceptions près, les profs étaient inabordables.


Alliance et Talmud Thora à Mogador, Cours complémentaire et Lycée Lyautey à Casablanca. Ce cheminement fut celui de nombreux de mes amis. Tout ce monde est maintenant dispersé aux quatre vents. Il m'a rarement été donné de rencontrer mes meilleurs amis de classe. Parfois, j'entends parler de certains. Les grands flux d'écoliers avec leurs héros, leurs champions ou leurs meneurs ont dû interrompre leur cours pour dériver vers de nouveaux océans et horizons. Il ne reste plus que les bâtiments témoins de notre passage et de nos grivoiseries et, les échos des bruits familiers qui surgissent du fond de la mémoire comme s'il ne s'agissait que d'un événement encore tout frais. Certains épisodes brefs résonnent encore en moi tel un film projeté au ralenti. D'autres épisodes s'étalant sur de longues périodes me reviennent fulgurants et fugaces tout à la fois. La mémoire relativise les événements et leur durée et ne conserve d'eux que certains points de repère, retenus selon des critères qui lui sont propres, et qui jalonnent le cours de toute une vie. Et, tel un phare dans un océan en furie, l'exemple donné par les professeurs compétents et dévoués continue de guider nos pas dans la course de la vie. Qu’il me soit permis de rendre hommage à une kyrielle de professeurs et de formateurs de l’esprit et de l’intellect qui sont toujours présents en moi, à l’ensemble des professeurs extraordinaires, dévoués à leur mission d’enseignants et à la transmission fidèle des Lettres, des Arts, des Sciences et de l’Éthique. J'émets le souhait que l'on puisse transmettre à son tour avec la même ferveur et la même dévotion le goût de l'étude et celui de la transmission du goût de l'étude.

 

Extrait de l’ouvrage «Témoignages. Souvenirs et réflexions des anciens de l’Alliance israélite universelle», les Éditions Du Lys, 2002

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Repas traditionel du chabbat, ce mets a base de ble, pois chiches et viande etait cuit toute la nuit dans un four ferme a basse temperature. Le mot vient de l'Arabe dafina/adafina qui veut dire "couvert, etouffe".

 

 

 


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