De Meknès à Tel-Aviv. Histoire familiale. La Cuisine.
Un article de Dan Assayah.
Cet été, nous publions l’histoire d’une famille qui a traversé les années dans des villes très différentes. Meknès, Bel Abbès, Marseille, Lyon, Annecy, Villeurbanne, Grenoble, Paris, Toronto, Tel-Aviv, Ness Ziona, Beersheva, Omer,…
TRADITIONS & CUISINE. Les familles juives ballotées entre différentes villes et pays tentent de se raccrocher le plus fort possible à des traditions qui se veulent immuables. Dans cet article j’ai fait appel à ma mémoire, à des témoignages, et aux nombreux blogs qui parlent merveilleusement bien des traditions séfarades.
Dans les années 60, pour manger casher à Annecy il fallait être déterminé et courageux. Très peu de restaurants et points cashers existaient en France. Une fois par semaine, au petit matin (dès 6 heures), le boucher arrivait à Annecy de Lyon où Grenoble avec sa camionnette réfrigérée et ouvrait sa petite boutique. Il fallait parfois des heures pour se faire servir. Ma mère en profitait pour discuter avec chacun. Elle parlait souvent de la santé des uns et des autres.
La place des traditions culinaires étaient essentielle dans la vie familiale. Le royaume de notre mère était sa cuisine. Son frigo était un coffre-fort culinaire. Elle était une cuisinière hors pair et cuisinait avec des ingrédients simples. Voici différentes spécialités qui ont bercé notre enfance.
Tout d’abord, la harira, soupe traditionnelle (d’origine andalouse). Elle est constituée de tomates, de légumes secs, de viande et d’oignon. Selon un livre de cuisine : « Au Maghreb, la harira est traditionnellement servie accompagnée de dattes, d’œufs durs, de crêpes au miel, de pâtisseries … Elle est consommée tout au long de l’année, particulièrement pendant l’hiver ». Dans ma famille la Harira était « pure » et livrée sans aucun ingrédients superflus.
Le Couscous est le plat de la semaine le plus courant : « Un des plats le plus populaire au monde est le Couscous. Il en existe une multitude de versions et de façons culturelles et régionales de le cuisiner selon les recettes familiales de chacun. La clé de la préparation d’un couscous authentique, c’est la patience et le soin de suivre sa recette de base est de cuire la semoule du couscous à la vapeur deux ou trois fois selon ses préférences et l’expérience se révélera le meilleur guide ». La patience de notre mère dans la préparation du couscous était légendaire. Le jour du couscous était sacré.
Le vendredi a toujours été une journée spéciale. Dès le matin ma mère était mobilisée pour la préparation du repas. La veille elle avait sillonné les arcades du marché du vieil Annecy pour acheter des produits frais. Elle choisissait ses produits un à un. Sur son vélo, même en hiver, des sacs énormes pendaient sur les cotés. A sa disparition brutale en 1984 beaucoup de Savoyards ont eu les larmes aux yeux. Avec les années elle avait tissé des liens très forts avec des paysans de la région. Elle utilisait très souvent des mots comme « mon chéri », « ma chérie » qui résonnaient étrangement dans cette petite ville de Haute-Savoie…
A table l’ordre des choses du repas du vendredi soir était immuable. Une prière balancée à la volée par mon père, assis toujours à la même place « en tête de gondole ». Il récitait son texte de prière à grande vitesse. La pain était béni en mode express, sans perte de temps. Ensuite lavage de main ultra-rapide. L’Objectif numéro 1 c’était de … manger. Composition du repas : une soupe de poulet, du poisson, du pain de Chabbat fabriqué à la maison sous forme de tresses. Le tout entouré d’amour maternel. La table était parée d’une nappe blanche. Des petites salades « à la marocaine » étaient posées sur la table.
J’ai retrouvé une description assez courante du repas du vendredi soir, un peu différente de notre coutume familiale : « Faire bonne chère lors des repas est une vertu. Boire du bon vin et manger de la viande tendre. Le repas traditionnel comporte plusieurs plats, et inclut du poisson, des salades ou de la soupe, de la viande ou de la volaille, avec leurs accompagnements. On sert le poisson et la viande/volaille comme des plats distincts, avec des couverts et des assiettes différents. Pour le repas du samedi midi, il est de coutume de consommer un plat ayant mijoté toute la nuit sur la plaque chauffante ».
Dans ma famille le repas du samedi était la Tafina cuisinée toute la nuit sur une « plata ». La maison sentait l’odeur de ce plat. Pour des raisons religieuses, on ne cuisine pas le jour le samedi. Selon un témoignage : « Il est prescrit de manger un plat de viande chaud. Ce problème est résolu en cuisinant la Tafina dès le vendredi soir, avant la tombée de la nuit, et de la laisser mijoter sur un petit feu pendant près de quinze heures, ce qui lui donne un goût très particulier. Au bout de la cuisson, les ingrédients caramélisent ». La Tafina marocaine est généralement composée de viande de bœuf, de pommes de terre, de pois chiches, d’œufs et de blé. À table, on ajoute du sel, du poivre et du cumin. Plusieurs variétés locales existent.
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