ISRAËL-PALESTINE : Rien de tel qu'un vote à l'ONU pour connaître ses vrais amis
Le Conseil de sécurité de l'ONU a rejeté ce 30 décembre une motion qui exigeait la fin de la colonisation et la création d'un Etat palestinien. Israël se frotte les mains, les Palestiniens poursuivent leur offensive diplomatique et, surtout, chacun réévalue ses relations.
COURRIER INTERNATIONAL - CAROLE LYON
Le verdict est tombé : mardi 30 décembre, le Conseil de sécurité a rejeté la proposition de résolution palestinienne. Déposé le 18 décembre par la Jordanie, et faisant suite à l'échec des pourparlers sous l'égide des Etats-Unis, le projet appelait à une fin de l'occupation fin 2017 afin de permettre la création d'un Etat palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale.
En effet, les territoires palestiniens ne sont pas contigus et le plus vaste des deux, la Cisjordanie, est pour l'essentiel sous contrôle israélien. Les accords d'Oslo, en 1993, ont institué une division des territoires palestiniens en zones A, B et C pour permettre l'instauration progressive d'un Etat. Cette division n'a, dans les faits, jamais pris fin et a été aggravée par la multiplication des colonies israéliennes. En l'état actuel des choses, un Etat palestinien n'est pas viable.
C'est à cette situation qu'entendait répondre la résolution S/2014/916. Mais, pour le camp adverse, elle fixe des objectifs trop exigeants, fait l'impasse sur les négociations et ne tient pas compte des besoins sécuritaires d'Israël.
Un cuisant échec
C'est ainsi que, "après plusieurs mois et malgré les innombrables gros titres en préparation, la proposition des Palestiniens d'imposer à Israël ses conditions d'accession à un Etat en passant par les Nations unies, s'est soldée mardi soir par un échec embarrassant", rapporte, amusé, leTimes of Israel. Sur les 15 membres du Conseil, les Palestiniens escomptaient 9 votes favorables, qui auraient assuré une approbation du projet. Ils n'en ont obtenu que 8, auxquels s'ajoutent deux votes contre – l'Australie et les Etats-Unis – et 5 abstentions.
"Les Etats-Unis n'ont même pas eu à dégainer leur veto", note encore le journal israélien. Une solution extrême à laquelle ils n'avaient vraiment pas l'intention d'arriver, explique de son côté le Los Angeles Times, car elle les aurait opposés aux pays arabes. "Or les Etats-Unis ont besoin de leur soutien dans plusieurs dossiers clés, dont la lutte contre l'organisation de l'Etat islamique en Irak et en Syrie."
Alors à quoi imputer cet échec ? A l'habileté d'Israël, qui est parvenu à convaincre à la dernière minute le Nigeria de s'abstenir, mais aussi aux mauvais calculs des Palestiniens, assure The Times of Israel, car "s'ils avaient attendu deux jours de plus, la Malaisie aurait remplacé la Corée du Sud [parmi les membre non permanents] et ils n'auraient pas échoué". Enfin, certains observateurs estiment que ce refus était au contraire prévu par l'Autorité palestinienne, car il lui sert de justification pour renforcer ses recours diplomatiques.
Le négociateur palestinien, Saeb Erekat, a en tout cas rapidement annoncé que les responsables palestiniens se réuniraient dès ce mercredi matin afin de décider de la suite à donner à leur offensive diplomatique,relate Yediot Aharonot. "Il n'y aura plus d'attente, plus d'hésitation, plus de ralentissement", a-t-il prévenu.
Compter les points
Au-delà de son objet premier, ce vote est surtout l'occasion, dans un camp comme dans l'autre, d'un bon bilan de fin d'année : qui sont mes ennemis et quels sont mes amis – ceux sur lesquels je peux vraiment compter ?
Côté arabe, il est évident que "cette humiliation ne passera pas inaperçue dans une région qui en vient à espérer une intervention divine à chaque fois qu'elle appelle, sans succès, à une intervention internationale pour mettre fin à un bain de sang", avertit, amer, Marwan Bishara,éditorialiste d'Al-Jazira. Rigueur en sera tenue à Barack Obama qui, "malgré tous ses appels à mettre fin aux colonies illégales, malgré son aversion évidente pour [le Premier ministre israélien] Nétanyahou [...], n'est toujours pas capable (ou désireux) de faire ce qui est juste, ce qu'il sait être juste, ou ce qui est dans l'intérêt de l'Amérique".
Sans doute, avance Marwan Bishara, l'explication tient-elle dans une "répartition des zones d'influence" entre Israël et les Etats-Unis : "Le premier a le dernier mot quant à la Palestine, le second en ce qui concerne l'Iran."
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