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Charles Benarroch, « le batteur des stars »

Charles Benarroch, « le batteur des stars »

 

 

Les autobiographies de musiciens sont rares en France... et plus encore lorsqu'il s'agit d'un batteur ! Charles Benarroch, qui a vécu « à l'ombre des étoiles », a accompagné, en studio et sur scène, quantité d'artistes depuis le début des années 60. Né au Maroc, il débarque à Paris en juillet 1958 et intègre le milieu des formations yéyés. Batteur au sein des Cyclones puis des Fantômes, groupe instrumental qui s'inspirait des Shadows, Charles Benarroch se lie avec Jacques Dutronc et sa bande et devient un pilier des disques Vogue. L'après-yéyé le voit s'imposer comme musicien recherché auprès des grands de la chanson française et de la variété... Aujourd'hui, revenu au jazz qui l'a toujours séduit, Charles Benarroch raconte son parcours atypique dans un livre passionnant bourré de détails « de première main ». Avec détachement et humour – c'est un excellent caricaturiste ! –, il nous livre aussi un témoignage précieux sur une profession et sur une époque... que les moins de vingt ans auraient sans doute voulu connaître...

 

Tu es l'un de ces fameux « requins de studio » qui ont fait la variété des années 60 et 70 ? D'où vient cette appellation ? Je crois qu'elle vient du fait que, dans les studios d'enregistrement, une énorme vitre nous sépare de la cabine technique, ce qui donne l'impression d'être dans un aquarium... Mais c'est par le volume de travail que tu deviens un « requin » : on t'appelle de plus en plus, tu commences par faire trois séances par semaine, puis quatre... Certains musiciens faisaient trois séances de trois heures chacune par jour ! Moi, je n'ai jamais été un vrai « requin ». J'avais tendance à favoriser la scène plus que le studio. Mais tu as fait énormément de studio. Oui, beaucoup, j'ai enregistré avec pratiquement tout le monde. Parfois, je ne savais même pas qui était l'artiste pour lequel j'allais jouais... À une époque où on ne créditait pas les musiciens sur les pochettes, j'ai notamment joué sur un album de Charles Aznavour arrangé par Christian Gaubert, sur Rockcollection de Voulzy, sur plusieurs titres de Souchon (Y'a d'la rumba dans l'air, Jamais content, Tu vois pas qu'on s'aime pas)... Est-il vrai que Rockcollection a été enregistré pendant toute une nuit ? La rythmique, oui : Voulzy à la guitare, Jean-Bernard Raiteux à la basse et moi à la batterie, puis des percussions en re-recording. Ma femme Lucille a fait quelques chœurs avec la choriste Ann Calvert. Après, Voulzy a mis un mois pour arriver à la version que l'on connaît. Et par rapport à son tempérament, ce n'est pas beaucoup... Mais on le forçait à aller vite parce que l'idée du medley était dans l'air. Rockcollection était bien foutu car c'était vraiment la musique que Voulzy écoutait. Le problème est que Jean-Bernard Raiteux, qui était aussi l'éditeur de la chanson, n'avait pas demandé les autorisations aux éditeurs des morceaux anglo-saxons dont il reprenait un extrait... Pendant un moment, tous les droits de Rockcollection ont été bloqués. Alain Souchon, Laurent Vouly : deux personnalités... C'est Bob Socquet, directeur artistique chez RCA, qui les a fait se rencontrer. Mais l'un sans l'autre, ça ne marchait pas du tout. Souchon était dans une chanson presque rive gauche et Voulzy faisait un tas de choses, même des musiques pour des films X... Le coup de maître a été de les avoir associés. Musicien de scène et musicien de studio, est-ce pareil ? Moi, j'ai été un peu des deux, mais certains musiciens ne faisaient que de la scène et on ne les prenait pas pour les séances. Les tournées, c'était magnifique, mais quand tu revenais de tournées, tu n'avais plus de boulot pour les séances, on t'avait oublié... Est-il vrai que beaucoup de musiciens yéyés ne jouaient pas sur les disques ? Des « requins » le faisaient à leur place... Pour certains groupes, ça pouvait arriver... Mais pas Les Cyclones et pas Les Fantômes, en tout cas. Dans ta période yéyé, tu prenais plaisir à jouer cette musique ? J'en prends plus aujourd'hui en jouant du jazz, c'est sûr ! Mais à l'époque j'avais l'énergie pour faire ça. En fait, j'aimais particulièrement le rhythm and blues et c'est ce qui m'a amené au jazz. Il y avait aussi Vigon à cette époque où le rhythm and blues était très à la mode. J'ai surtout joué dans les boîtes avec Jacky Gordon, un très bon chanteur et un excellent organiste. J'ai remplacé le batteur du groupe Zoo, j'ai fait un disque avec Davy Jones... Beaucoup de batteurs de jazz ont fait du rhythm and blues.

Quelle a été ta réaction à l'arrivée des machines, des premières boîtes à rythmes ? Ça m'a fait sourire... Je me suis dit que c'était du gadget. Puis peu à peu, c'est devenu autre chose que des gadgets...

••• La suite dans JE CHANTE MAGAZINE n° 16

 

Propos recueillis par Raoul Bellaïche

 

• Charles Benarroch : À l'ombre des étoiles, 393 p. 19,90 €, éditions LEN, 126, rue du Landy, 93400 Saint-Ouen.

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