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L’ours boulimique et sa portée, par David Bensoussan

L’ours boulimique et sa portée, par David Bensoussan

 

En ces temps difficiles, rimer sur la tragédie peut paraître indécent.
Néanmoins, l’écriture est une arme au service des innocents

Il était un grand méchant ours boulimique
Qui ambitionnait une adulation totémique.
Des ruches, il se réservait les meilleures
Avec ses acolytes gaspilleurs.
Il régnait en maître dans la forêt,
S’en appropriant capital et intérêt.

Il s’attaqua aux petits mammifères
Cela fit bien son affaire.
Il avala des parties de la Géorgie,
S’acoquina aux canidés iraniens
Et aux potentats africains.
State of Jerusalem: The Maqdasyin

Ses victimes étaient lointaines il est vrai.
De riposte il n’y eut guère quand il goba la Crimée.
On prit conscience de sa voracité proverbiale
Quand il s’attaqua à l’Ukraine orientale.

Il s’en prit à la brebis ukrainienne
Alléguant qu’elle était mitoyenne.
La crainte s’empara des ovins de l’Est
Et un frisson secoua les bovins de l’Ouest.

Tous en Europe comprirent sans détour
Que ce serait bientôt leur tour !
Il en alla de même outre-Manche :
Point d’illusion quant à sa patte blanche.

C’est en ne monnayant pas sa bourse
Qu’ils cherchèrent à restreindre de l’ours,
Sa goinfrerie gargantuesque
Et son ambition ubuesque.

L’ours montra grands ses crocs ivoirins
Pour intimider les bovidés et les caprins.
Or, leur confiance était maintenant brisée.
Et ils avitaillèrent la brebis épuisée.

Dans sa forêt, l’ours combinait hubris et balourdise.
Cherchant à convaincre par roublardise
En interdisant le gazouillis libre des oiseaux,
N’admettant autre son que son grognement mafioso.

Il comptait sur le panda aux yeux bridés
Pour contourner les obstacles des ovidés et bovidés.
Il dominait le bois de chauffage de la futaie
Et le panda fut ravi de s’en offrir au rabais.

Tous se tournèrent vers le condor d’Amérique
Et son voisin lapin blanc des neiges nordiques.
Car le condor était connu pour sa superpuissance,
Bien que beaucoup trouvaient à redire à sa toute-puissance.

Le condor planait partout sans démordre
Et maintenait en place un certain ordre.
Il était préoccupé par la concupiscence du panda
Autrefois insignifiant et maintenant tout tagada.

Il avait pris de l’embonpoint et avait accumulé moult réserves
Qu’il prêtait à intérêt en s’imposant sans réserve.
Il convoitait l’île de l’écureuil formosan
En guise d’entrée, car c’était loin d’être suffisant.

Le condor alerta la brebis vulnérable si pauvre en ressources
Des agissements prochains et des mouvements de l’ours.
L’ours bedonnant détruisait tout sur son passage
Et la brebis inébranlable résistait avec courage.

La brebis n’était pas dans l’enclos des ovins et bovins
Lesquels ne purent qu’offrir refuge à ses agnelets.
Les bovins se mirent à aiguiser fébrilement leurs cornes
Qu’ils avaient négligées des années durant tant ils étaient atones.

De son siège à Manhattan, le roi de la forêt onusien fut alerté.
Or, il ne pouvait rien faire sans de l’ours avoir concerté.
Il était maintenant édenté et incapable de rugir
S’offrant en théâtre aux meutes de pacotille et sans réagir.

Enragé par sa propre impuissance, l’ours se fit plus menaçant.
Il voulait suppléer le condor ou du moins s’en sentir aussi important.
Il s’était convaincu que le condor avait perdu sa dissuasion d’antan.
N’avait-il pas abandonné à leur sort deux gibiers asiates importants ?

L’ours rêvait de devenir des lieux l’absolu pandore
Aussi conspira-t-il pour démotiver le condor :
Il émit des grognements subliminaux en sourdine
Pour faire dévier les orientations du condor dans sa ligne

Pour l’ours, la brebis faisait partie d’un vaste menu jusque-là :
Carnassiers de Syrie, de Biélorussie, du Kazakhstan et du Venezuela.
Suivront les antilopes africaines et des tyrans sanguinaires,
Car il a à sa disposition mercenaires et légionnaires.

Où va-t-on ainsi se demandèrent les animaux de la forêt ?

Le panda aux airs innocents ambitionnait également la stature du condor.
Il avait une emprise grandissante sur ceux à qui il prêtait à ras bord.
Il convoitait les perspectives de gisements et de pâturages
Qui constituaient de l’ours l‘apanage.

Il projetait de faire sur l’ours main basse
Sitôt maîtrisées ses manœuvres de chasse.
Il enverra ses troupes prolifiques subjuguer l’ours puissant
Pour le réduire à l’état de nounours en peluche impuissant.

En attendant, il suivait de près de la brebis les destinées
Afin de s’en inspirer pour sa conquête de l’écureuil non résigné.
Bien qu’il comptât sur le condor aux serres redoutables,
L’écureuil formosan épiait les alentours en éclaireur véritable.

L’ours s’en donnait à cœur joie.
Allait-il se suffire d’un quartier de sa proie ?
Combien de temps encore la brebis allait-elle tenir?
Et la faune observer ce massacre sans intervenir ?

Pourquoi la douce brebis était-elle vouée au trépas ?
Dans son antre, la famille de l’ours ne comprenait pas
Elle redoutait de le contredire
Tant elle craignait son ire.

La détresse de la faune fut abyssale
Et elle se rendit à l’évidence morale :
Pour juguler de l’ours l’impérialisme,
Elle se devait d’enrayer son mécanisme.

Auparavant fragmentée et divisée,
La faune a retrouvé son unité
Et exprime sa détermination
Avec fermeté et résolution.

Que faire encore, interrogèrent les animaux de la forêt ?

L’enclos des bovidés s’était agrandi
Et l’ours y voyait un complot ourdi.
Il revient au condor de le rassurer
Et ce faire sans plus tarder.

Chez les créatures sylvaines, l’utopie de paix semblait lointaine,
mais il demeurait un refrain d’espoir chez les âmes en peine :
« Génisse et ourse paîtront ensemble avec leur descendance;
Pour le lion tout comme pour le bœuf, de paille sera leur subsistance. »

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