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La question juive ne se pose pas au Maroc

  

La question juive ne se pose pas au Maroc

 

 

Moulay Abdellah Belghiti

L’antisémitisme au Maroc n’existe pas et n’existera jamais. C’est une réalité tellement vraie que, historiquement parlant, il est difficile de prouver le contraire. En effet, depuis que l’Etat Marocain existe, aucun gouvernement n’a organisé, encouragé ou incité quiconque à porter un quelconque préjudice à l’encontre des juifs du Maroc, même s’il faut reconnaitre des tentatives d’instabilités à l’époque des Almohades (1147-1269). Les juifs existaient au Maroc avant l’arrivée en masse de ceux d’Espagne. Ils s’étaient installés dans les grandes et les petites villes. A Fès, comme à Meknès, Marrakech, Essaouira, Rissani,…, ils ont vécu tranquillement, leur présence était naturelle et leurs affaires marchaient à merveille. Au vingtième siècle, Mohamed V les a défendus contre la loi antijuive de VICHY et Hassan II a regretté leur départ en Israël, dans les années 80. Ici au Maroc, il n’y a jamais eu aucune loi ni aucune politique discriminatoire contre les juifs. Au contraire, la cohabitation entre les Marocains de confession juive et musulmane est tellement évidente que nos voisins algériens, quand ils veulent nous insulter, ils nous reprochent d’être les amis et alliés des juifs . Quant à ces derniers, résidants dans le royaume ou ailleurs, ils affirment avoir toujours été acceptés et respectés par les Marocains. Mieux, ils ont transmis cette vérité à leurs enfants et les ont encouragés à visiter la terre qui a vu naître leurs ancêtres. 

Aujourd’hui, en se rendant au Maroc pour voir la famille et/ou se recueillir sur leurs lieux de culte, les générations de jeunes juifs font eux-mêmes ce constat et ne ménagent aucun effort ni ne ratent l’occasion pour témoigner de la bonté et de l’humanisme des musulmans du Maroc. Aussi les juifs, résidants ou touristes, se déplacent-ils en toute sécurité à travers le pays et pratiquent sereinement leurs rituels, presque dans l’indifférence totale de la population musulmane. L’indifférence est à comprendre ici dans le sens d’une attitude pacifique, d’un comportement tolérant qui ne remet pas en cause le droit à la différence, de l’Autre. Les synagogues et les cimetières des juifs marocains sont respectés et protégés comme n’importe quel autre site religieux. Ce n’est pas au Maroc qu’on enregistre des actes de vandalisme contre les juifs ou leurs lieux saints. Cela se produit ailleurs. 

Les juifs du Maroc ont donc toujours vécu comme chez eux, dans le respect et la quiétude aux côtés des arabes et amazighs marocains. Et quand un jour ils ont choisi de partir, ils l’ont fait librement et sans aucune contrainte. Au contraire, leur départ a suscité une triste émotion pour ne pas dire un sentiment de trahison, auprès des musulmans qui les ont côtoyés de très près. Je me souviens encore des trois dernières familles juives de la ville d’Erfoud. Ils habitaient trois quartiers différents. Ils n’avaient pas besoin d’habiter en groupe pour se protéger. Ils n’avaient pas peur. Ils avaient aménagé une quatrième maison pour les prières, loin de leurs foyers. Ils étaient sereins et tranquilles. Quand un jour ils ont décidé de quitter le TAFILALET, l’oasis où ils étaient nombreux à vivre durant des siècles, la nouvelle à rapidement fait le tour de la ville, selon un vieux dicton de chez nous qui dit : ‘’Un riel d’encens suffit pour parfumer tout Erfoud’’, tellement la ville était petite et tellement tout le monde se connaissait. Durant des jours entiers, femmes, hommes et adolescents passaient alors à leurs domiciles et boutiques pour leur adresser un dernier adieu. Avant de partir, nos voisins hébreux avaient vendu, liquidé ou passé une partie de leurs biens à des musulmans et ce, le plus naturellement possible, exactement comme l’aurait fait n’importe quel autre citoyen vivant dans un Etat de droits. 

Toutefois, le respect que les Marocains vouent aux juifs n’est ni une adoration ni une admiration. Il ne faut pas se leurrer. Il s’agit tout simplement d’une coexistence sereine, faites à la fois de fusion et de prise de distance. On était d’accord pour vivre ensemble mais on était aussi d’accord pour vivre différemment sa religion. C’est exactement le type de comportement interconfessionnel idéal que l’islam enseigne aux musulmans, le type de conduites exemplaires que les sultans du Maroc ont toujours fait respecter. Ainsi on ne peut pas dire que les Marocains sont antisémites ou racistes. Juifs et Marocains habitaient les mêmes ruelles, échangeaient des visites, se partageaient leurs mets, se mariaient entre eux, faisaient ensemble du commerce et, quand ils se disputaient il y avait toujours un tribunal ou des amis qui les départageaient, dans le cas où ils ne pouvaient pas les réconcilier. C’est de cette manière, la plus civilisée qui soit, que le Maroc et les Marocains ont prouvé et prouvent encore que l’islam dans notre pays n’est un danger ni pour les juifs ni pour les chrétiens ni personne . 

Donc l’antisémitisme ne peut pas exister au Maroc. Prétendre le contraire, C’est faire preuve d’ignorance des faits historiques. Les Marocains ignorent complètement quelque chose qui s’appelle la question juive. Ce débat ne peut pas avoir lieu chez nous. Nous autres musulmans du Maroc avons trois bonnes raisons pour nous épargner ce débat inutile : la première est que les juifs marocains ont toujours vécu dans la paix et dans l’entente avec les arabes et les amazighs. Nous n’avons chassé personne. Ceux qui ont décidé de partir l’avaient fait de plein gré. La deuxième raison est que la majorité musulmane au Maroc ne pense pas que la religion hébraïque soit un danger pour l’islam. Ceci qui n’est pas le cas en Occident où les laïques craignent la religion et s’en méfient ostensiblement. Là-bas, la question juive relève du racisme et de la haine envers tout ce qui est religieux. C’est malheureux de voir que là-bas, les médias font des musulmans des terroristes et des antisémites par définition. Or, - et c’est là, notre troisième bonne raison -, les enseignements de l’islam mettent en garde contre toute attitude discriminatoire, et rappellent que tous les individus sont égaux et que chacun est libre de pratiquer la religion de ses ancêtres . Et de ce fait, nous n’avons pas de leçon à recevoir ni d’attitude à copier de qui que se soit. 

La question juive ne se pose donc pas pour les Marocains. Et pourtant, de plus en plus fréquemment, les internautes marocains tombent sur des textes et des vidéos pour le moins suspects. Des individus, parfois intellectuels mais ignorant la sensibilité marocaine, imposent des idées et des convictions pas très sages. Ils parlent d’antisémitisme au Maroc. Or nous venons de démontrer que cette haine n’a jamais existé. Ils appellent à la normalisation immédiate avec Israël à un moment où, ce pays ne donne pas de signes encourageants. Ils encouragent le voyage dans ce pays alors que d’autres destinations sont plus sûres. Ils revendiquent le droit de se convertir au judaïsme et d’aller à Tel-Aviv, or aucune loi ne l’interdit puisque les Marocains n’en ont pas besoin. Il y en a même ceux qui dénoncent les trois derniers versets coraniques d’« EL-FATIHA », la sourate prologue du saint Coran, où il est dit « [...](5)Dirige-nous dans le sentier droit, (6)Dans le sentier de ceux que tu as comblés de tes bienfaits, (7) De ceux qui n'ont point encouru ta colère et qui ne s'égarent point . Ces gens nous font savoir que par « ceux qui n'ont point encouru ta colère » et « qui ne s'égarent point », il faut comprendre respectivement les juifs et les chrétiens. Ils présentent ainsi le Coran et les musulmans comme les ennemis proclamés de ceux-là. Or les paroles d’ALLAH sont aussi claires que l’eau de roche. Très explicite, ces paroles n’ont qu’un seul sens. 

Mais ce n’est pas tout. Ces gens vont plus loin dans leurs revendications. Voici un autre exemple. Il n’y a pas très longtemps, Hespress a rapporté une nouvelle selon laquelle un observatoire dénommé ‘’observatoire marocain de lutte contre l’antisémitisme’’ a publié un communiqué où il fait savoir qu’« on poursuivra toute organisation ou toute personne antisémite au Maroc, et ce en dépit de l’absence de lois sur l’antisémitisme, qu’on fera tout pour renforcer les liens entre les juifs du Maroc et ceux d’Israël et qu’on tâchera d’organiser des voyages en Israël pour les Marocains qui souhaiteraient découvrir ce pays. » 

En lisant l’article de Driss AZAM publié sur Hespress sous le titre ‘’Un observatoire marocain encourage le voyage en Israël et appelle à la poursuite des antisémites’’, on se demande si cette organisation est sérieuse. Ces gens demandent la normalisation rapide avec Israël, réclament la laïcité, revendiquent le libre choix de la religion, veulent promouvoir la culture juive, souhaitent mettre en place un commerce touristique à sens unique et brandissent des menaces à l’encontre des groupes et des individus qui ne les suivront pas. Dictature ou hystérie ? Voilà comment on peut en arriver à se semer le doute et diviser la nation. Ennemis de la paix et de la stabilité dont jouit notre pays, leur voix sonne faux dans la mesure où elle provoque chez les Marocains des réactions et des attitudes très controversées. Il suffit de jeter un regard sur les commentaires qu’a suscité ledit article. Révoltes et indignations en vrac. 

Ces gens offensent les Marocains et faussent leur histoire. Faut-ils leur rappeler quelques vérités ? Le Maroc est une terre d’accueil et l’a toujours été. Les juifs sont chez eux quand ils sont au Maroc. Le royaume a été le premier pays arabe et musulman à recevoir officiellement un responsable israélien, Simon PEREZ, un geste politique courageux qui n’a pas plu à nos amis Arabes et musulmans. Le règne alaouite a fait des juifs marocains des ministres et des conseillers. Le Maroc est un acteur principal dans le processus de paix entre Israéliens et Palestinien. Le Maroc ne diabolise pas l’Etat d’Israël et encore moins les juifs. 

Mais le Maroc a une identité, une culture et une histoire et réclame qu’on les respecte. Le Maroc a des intérêts et des alliances et ne demande pas plus que de les tenir en compte. Le Maroc entretient des rapports politiques et économiques et souhaitent qu’ils soient bénéfiques. Enfin nous les Marocains, à qui on demande d’aller en Israël, voudrions bien savoir ce que les juifs d’Israël pensent de nous et ce qu’ils peuvent faire dans le conflit du Sahara marocain, par exemple.

  

Commentaires

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Le deni de l'histoire ,la volonté de ne pas accepter les periodes courtes de persecutions et permanentes de discriminations deviennent pathétiques de la part des marocains.

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