La société du soupçon
La question vitale de la sécurité donne lieu à des polémiques sans fin où le pire de l’autoritarisme le dispute au pire de l’angélisme. Nous n’avons besoin ni de l’un ni de l’autre. En revanche, nous pouvons trouver dans nos ressources policières et juridiques actuelles de quoi réduire sensiblement, sinon arrêter complètement, le nombre d’actes terroristes.
EN DÉMOCRATIE, l’action politique s’accommode mal des nécessités médiatiques et politiciennes. Depuis qu’a commencé en France cette vague sinistre d’attentats, le pouvoir a cru devoir riposter par des effets d’annonce, peut-être susceptibles de rassurer le public, mais fort peu adaptés à la répression du terrorisme. L’exemple le plus explicite de son comportement, c’est bien sûr la déchéance de nationalité, qui a été applaudie par les deux chambres réunies en congrès, et a donné lieu ensuite à des discussions si compliquées que François Hollande en a abandonné l’idée. Elle n’était pas bonne. Elle plongeait les fraîchement naturalisés ou les Français nés à l’étranger dans un profond malaise. Elle était au demeurant dérisoire dès lors que les djihadistes commettent souvent des attentats-suicides et que, s’ils n’ont pas peur de la mort, ils n’auront pas peur de perdre une nationalité à laquelle ils souhaitent justement de disparaître.
Une législation adaptée au crime terroriste.
La proclamation de l’état d’urgence, pour sa part, a été utile car elle a permis de donner un énorme coup de pied dans la fourmilière terroriste. Mais prolonger l’état d’urgence n’était guère indispensable puisque les interpellations et perquisitions doivent bénéficier de la surprise. À ce jour, la démocratie française est restée intacte. Nous n’avons pas modifié l’état de droit, il est vaillant, et nos pires ennemis font l’objet d’une procédure soigneusement mise en oeuvre et surveillée par les juges. Le problème vient d’une notion simple : nous voulons mettre un terme aux assassinats commis par des islamistes et, en même temps, nous ne voulons pas nous transformer en dictature. Le gouvernement nous a expliqué en long et en large ce que nous savions déjà, à savoir que, si nous adoptons des lois d’exception, si nous nous en prenons aveuglément à la communauté musulmane sans distinguer les bons des mauvais, nous offrons une victoire au prétendu État islamique, qui tient à nous prouver que nous ne valons pas mieux que lui.
Il ne faut pas, pour autant, que cet argument essentiel mette en pièces la cuirasse sécuritaire de la société française. Les médias ont donné la parole à de nombreux juges, des plus intègres et des plus respectables. Ils nous disent que toutes les règles prévues par la loi ont été appliquées dans le cas des deux djihadistes qui ont attaqué l’église de Saint-Étienne-du-Rouvray. Mais comment ? leur demandons-nous avec candeur, si la loi permet l’assassinat d’un prêtre, ne devons-nous pas estimer au contraire que la loi est inadaptée ? Juges et procureurs sont externes au débat. Ce ne sont pas eux qui font les lois, ils les appliquent. Ce qui est manifeste, c’est que notre système judiciaire, qui fonctionne peu ou prou pour les crimes et délits de droit commun, n’est pas adapté au djihad. Quand deux gosses de 19 ans, fichés « S », affirment qu’ils veulent se réinsérer dans la société, le juge ne doit pas les croire sur parole.
L’intention criminelle.
Le concept selon lequel il faut arrêter le criminel avant même qu’il passe à l’acte, alors qu’en droit français, on ne peut interpeller une personne sur la base de ses seules intentions, a donné lieu à quelques films cauchemardesques. Au bout d’un certain nombre d’attentats, nos concitoyens risquent d’être amenés à soupçonner à peu près tout le monde et à se méfier plus particulièrement des musulmans qu’ils rencontrent. Mais dans le cas de Nice et de Saint-Étienne-du-Rouvray, amis, parents et voisins ont assisté à la radicalisation des trois tueurs. Parmi ces personnes, aucune n’a donné l’alerte, alors qu’elles se sont exprimées après coup sans rien cacher de ce qu’elles ont vu et entendu.
La première chose à faire, c’est d’encourager les proches à signaler une personne dangereuse, même s’il leur en coûte. La délation est préférable à un malheur national. La deuxième consiste à reconstituer un système équivalent des Renseignements généraux (RG) malencontreusement dissous par Nicolas Sarkozy. Il faut vivre en permanence dans les milieux à risque pour déceler précocement les premiers signaux de radicalisation. La troisième consiste à prévoir l’incarcération des personnes fichées « S ». Il ne s’agit pas de créer en France un Guantanamo, dont chacun sait que les Américains ne savent pas comment s’en débarrasser. Il s’agit de faire comprendre à tous ceux qui nourrissent une haine mortelle contre la France qu’ils n’ont pas droit à la liberté. Un camp de concentration ? Des régimes iniques en ont bâti pour loger des innocents. Nous le construirions pour des gens qui veulent notre mort. Nous serons contraints de prévoir ceux qui pourraient être jugés et ceux qui pourraient retrouver leur liberté sous certaines conditions. Ce ne sera pas une tâche facile. Enfin, nous devons fermer les mosquées qui continuent à prêcher la guerre et la haine contre la France, poursuivre les expulsions d’imams étrangers et subversifs, inquiéter sans relâche les familles qui abritent des dhijadistes potentiels. Nous pouvons garder notre Constitution, former les juges au terrorisme, maintenir l’État de droit et lutter plus efficacement contre la menace terroriste.
RICHARD LISCIA
http://blog.richardliscia.lequotidiendumedecin.fr/2016/07/28/la-societe-...
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