La vérité sur l’affaire Ilan Halimi?
24 jours de calvaire mis en scène par Alexandre Arcady
par Maya Nahum
Un soir de janvier 2006 un jeune homme de 23 ans, Ilan Halimi, est séduit par une jeune fille sexy, qui l’invite à la raccompagner chez elle à Sceaux. C’est là que les ravisseurs d’Ilan l’attendent. L’appât a fait son boulot et s’enfuit. Le calvaire d’Ilan commence. Il va durer 24 jours jusqu’à sa mort, le 13 février, peu après qu’une automobiliste le retrouve agonisant, mais encore vivant, le long d’une voie ferrée à Sainte-Geneviève-des-Bois.
24 jours de séquestration, de torture. Insultes, coups, le gang des barbares refusait de lui donner à manger ou à boire pour ne pas qu’il urine ni défèque. A la fin, ils l’ont brûlé vif en pleine nature. Ilan va se relever, ramper, puis s’effondrer, contre la barrière de la voie ferrée.
Ce sont ces 24 jours que le film raconte.
Arcady a suivi le récit de la mère d’Ilan, Ruth, ainsi que celui d’Emilie Frèche (co-scénariste du film). L’enlèvement et l’assassinat d’Ilan n’ont été dévoilés au pays qu’après sa mort. Pendant 24 jours, nous ne savions rien. La stratégie de la police fut d’agir dans le plus grand secret et elle avait convaincu la famille Halimi de garder le silence.
Malgré les doutes, les questionnements angoissés des parents face à une stratégie qui ne donnait aucun résultat, la police restait convaincue qu’elle allait retrouver Ilan. Une soixantaine de policiers pourtant à l’œuvre jour et nuit ont échoué. Le film montre leur traque dans les moindres détails. Sans juger. Juste les faits. Il montre des citoyens complices de la séquestration d’Ilan, là une jeune vendeuse écervelée, là un gardien d’immeuble avide des 1500 euros pour prix de son silence, 22 personnes en tout. Il montre le gang des barbares : des filles et des garçons « des cités », incultes, quasi débiles et fascinés par leur chef, Fofana, un hystérique sanguinaire originaire de la Cote d’Ivoire et mu par sa haine des Juifs. Enfin il montre les parents d’Ilan, Ruth et Didier Halimi, dans une souffrance indicible. (Zabou Breitman et Pascal Elbé, bouleversants). La caméra d’Arcady n’est jamais voyeuse. Elle respecte. Elle se fait toute petite. Elle ne veut pas les déranger.
Ruth a compris dès la première demande de rançon, dès les premiers indices : Ilan a été enlevé parce qu’il est juif. La police ne la croit pas, trouve sa conviction absurde, c’est sa douleur qui l’égare sans doute. Jusqu’au procureur qui nie cette réalité criante. Il y a pourtant des preuves : d’autres « appâts » ont tenté de séduire d’autres jeunes juifs et il y a les insultes antisémites de Fofana au téléphone, mais rien n’y fait. Pourtant les Barbares affirment qu’ils ont enlevé le jeune Juif parce que les juifs sont riches et solidaires, donc ils vont payer. La police ne veut pas croire à un crime antisémite. Pourquoi ? Ca ferait désordre à l’ordre public ? Ca dérangerait ? Mais qui ? Que se passe-t-il en France pour qu’Alexandre Arcady n’ait trouvé aucun financement auprès des chaînes de télévisions ? Son film raconte pourtant une histoire qui s’est passée chez nous. 22 citoyens ont participé à ce crime même si la plupart n’ont pas tué.
Ce film pourra servir d’outil pédagogique pour étudier les mécanismes de l’antisémitisme, les disséquer et les combattre haut et fort dans les écoles. Espérons en effet que les éducateurs utilisent 24 jours pour ouvrir les esprits et appeler un antisémite un antisémite, comme un raciste un raciste.
La rumeur a commencé à propager l’idée que 24 jours est un film trop dur. C’est faux. Il y a très peu d’images du calvaire que subit Ilan. Arcady n’en a pas eu besoin. C’est là une des forces de son film. Et si l’on en sort sonné, c’est aussi par la honte d’avoir peut-être, au cours de ces huit dernières années, oublié Ilan.
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