Les Amours Modernes ou les Cyber-Lovers, par Henri Levy

Les Amours Modernes ou les Cyber-Lovers, par Henri Levy

Éros Dieu de l'amour
Qu'as-tu fait de nous ?
Où sont tes flèches tendresses
Décochées pour toujours
Dans nos cœurs de déesses
Et nos âmes d'amadou ?
Au nom de la modernité
Éros, t'as remplacé
L'amour antique
Par l'amour quantique
Tu as muté en 32 bits
Au nom du roi digit
Troqué l'amour rosé
Pour un amour zéro
Imposé le réseau
Les doigts et le clavier
Points d'entrées exclusifs
Vers des amours fictifs
Je dis non à c't époque
Au règne du drag-and-drop
Au sexe cliquer-glisser
Sans même l’apprécier
Jeté dans la corbeille
Sitôt que l'on s'éveille
Je dis non à l'aubaine
A l'amour qui dégaine
Plus vite qu'un shérif
Pour des amours furtifs
Aux rencontres double-clic
Qui se suivent à la clique
Non à l'amour fredaine
Qui mène à la géhenne
Non aux amours gangrène
Qui nous donnent la migraine
Non aux amours minute
Ni aux amours turlutte
Non à l'amour sans vie
A l'amour sans voir
A l'amour obscène
A l'amour en scène
A l'amour wi-fi
A l'amour défi
A l'amour antenne

A l'amour sans chaîne
A l'amour délétère
Pour les cœurs en jachère
Non à l'amour facile
A l'amour servile
A l'amour corsage
Et à l'amour message
Alors je pose la question
A tous les parangons
Nouvelle génération
SMS est-ce s'aimer ?
Suffit-il d'un clavier
D'un écran interposé
Pour trouver l'âme sœur
Pour traquer le bonheur ?
Quitte à être un vrai con
J'observe comme un faucon
Du haut de mon balcon
Cette new génération
Adepte du speed dating
Et des rencontres meeting
Souvent en vous voyant
Penchés sur vos écrans
Accros au virtuel
Pris dans vos citadelles
A la recherche en boucle
De l'autre pour faire un couple
Je me demande souvent
Où est le temps d'avant
Celui des prétendants
Au cœur tout palpitant
Celui des promenades
Celui des sérénades
Au coin du réverbère
Dans une douce lumière
Celui des primevères
Offertes à la bergère
Des amitiés sincères
Et non pas mensongères
Celui des vrais amours
Qui riment avec toujours
Celui gagnant-gagnant
Face-à-face sans écran
Celui que je préfère
C'est le temps de naguère