Pour André Azoulay mon ami, juif marocain, citoyen du monde, serviteur de la Monarchie
Par Hassan Alaoui
Diffamation, mensonges et attaques ad-hominem ! C’est ainsi que, par un malheureux raccourci, on peut résumer le stade auquel est désormais parvenue la presse algérienne. L’émission appelée « Hebdo Show » diffusée par « Algérie 24 », diffusée mardi 27 août nous en a donné de nouveau la preuve supplémentaire. La prise à partie ahurissante d’André Azoulay, Conseiller de Sa Majesté Hassan II d’abord, ensuite de Sa Majesté le Roi Mohammed VI est proprement abjecte. Elle traduit à la fois l’ignominieuse méconnaissance des dirigeants algériens, de leur presse et celle du soutien que le même André Azoulay apportait en son temps aux combattants du FLN pour la libération de leur pays, donc beaucoup lui rendraient hommage encore…
Car, outre les attaques contre le Royaume du Maroc, son peuple et ses institutions, elle avait cette particularité de verser dans la fange et la sentine, en prenant violemment à partie André Azoulay, Conseiller de Sa Majesté le Roi.
On n’a eu de cesse de dénoncer l’antisémitisme ambiant, plutôt viscéral, du régime algérien qui n’a jamais été autre chose que militaire, autrement dit dont l’armée a constitué la seule source nourricière et la cheville ouvrière du mépris et de la haine mondiale. L’antisémitisme est sa marque de fabrique, son idéologie nauséabonde qui a désormais pignon sur rue, y compris et surtout au sein de la presse, mais aussi de certains intellectuels transformés en Apparatchiks de la pensée et de l’illusionnisme ambiant. Des laudateurs aussi, payés à l’étranger rubis sur ongle, porte-voix devenus défenseurs en chaise longue, à Paris notamment…
L’armée qui s’est emparée du pouvoir depuis le coup d’Etat de Boumediene le 19 juin 1965 contre Ben Bella incarne la dérive, la corruption, la répression abominable avec son cortège d’injustices et de répression. Et cette confiscation de l’histoire et d’une révolution transformée en terreur. On aura beau défendre les idéaux – et le peuple marocain en aura été le tout premier – de cette révolution algérienne devenue autrefois un printemps des peuples, mais la junte militaire l’a écrasée dans l’œuf, réduite à un sanglant Thermidor algérien. Ni plus, ni moins….
L’émission a été condamnée à l’unanimité, son animateur dénoncé comme un « foutraque », son zèle de propagandiste également, ses invités désignés comme des loufoques…Mais le plus significatif est que l’homme d’affaires zélé, celui qui se présente comme un commentateur à ses heures perdues , entre deux activités qu’il se partage, de restaurateur et de chef de campagne de Tebboune, ce dénommé Mehdi Ghezzar, a été spectaculairement limogé par la chaine RMC et les Grandes Gueules où il sévissait en grande pompe.
Radio Monte Carlo (RMC), et Les Grandes Gueules n’ont pas seulement pris la décision de le congédier, mais – et c’est plus significatif – de rendre publiques et leur décision et le motif d’antisémitisme qui la motivent et la justifient. Avec son air de « Premier » , ce folliculaire a cru tout simplement pointer du doigt André Azoulay dont la marocanité n’a jamais suscité ni le moindre doute, ni même un sujet de discussion, tant il est vrai que le Maroc est son pays, son origine, sa culture, sa famille, sa citoyenneté défendue bec et ongles, sa terre natale , celle de ses parents, de ses ancêtres, de sa religion, multimillénaire, son ascendance multidimensionnelle, juive, berbère, arabe, chrétienne, musulmane et toute une cosmologie dont nous tous, marocains, avec André et nos frères juifs, installés au Maroc bien avant l’Islam et les Arabes …
L’ignorance bête et méchante, mais aussi la « vérité » la plus vraie et la plus triste comme dirait Péguy, est qu’André Azoulay aura été l’un des plus ardents défenseurs de la paix au Moyen Orient. Conseiller de feu Hassan II, un missi dominici, l’affabilité inscrite sur le fronton de l’internationalisme qu’il portait, il parcourait la planète, infatigable avocat pro-domo de la réconciliation arabo-israélienne à une époque où Abdelmajid Tebboune et ses stipendiés n’étaient pas encore nés et intéressés à cette sacrée cause…
On ne saurait décrire si aisément le parcours singulier de ce combattant de la paix, militant et nationaliste avéré et de la défense des Palestiniens, son approche constructive, courageuse pour l’instauration d’un règlement juste et durable qui lui vaut l’amitié des deux camps. Visionnaire à coup sûr, André Azoulay est parmi les tout premiers acteurs du processus de rapprochement il y a des décennies entre Israéliens et Palestiniens. Et pour cause : il était depuis… 1973 proche de Mahmoud Abbas, alias Abou Mazen, l’un des dirigeants de l’OLP et Président de l’Autorité palestinienne. André Azoulay était proche depuis 1975 de Yasser Arafat , la figure centrale de l’OLP ( Organisation de Libération de la Palestine) et négociateur des accords avec Israël en 1993 à Oslo sous l’égide de Bill Clinton, alors président des Etats-Unis… Aujourd’hui, nous revenons forcément à sa vision courageuse, défendue avec une conviction chevillée au corps, un engagement dont il ne s’est jamais départi, à cette solution de deux Etats qui est au réalisme politique ce que le Roi Hassan II et dans son sillage le Roi Mohammed VI ont préconisé avec courage et clairvoyance.
Fondateur de « Identité et dialogue »
Sans doute, en effet, faut-il rappeler qu’André Azoulay, la passion de la paix chevillée au corps, avait créé dès 1973 le groupe, déjà une sorte de Think-tank , Identité et dialogue, qui regroupait des intellectuels, des hommes politiques, des décideurs du monde entier, soucieux d’apporter leur pierre à la difficile construction de la paix, incarnant la diversité d’opinions et de positions, mais attachés à un dénominateur commun, à un seul principe : la paix ! André est le représentant même du courant internationaliste, avec une âme irréversible de marocanité en ce qu’elle a de tolérance et d’intense attachement à l’humanité. Sa ville de naissance, Essaouira-Mogador n’est-elle pas justement une « manière d’origine du monde », celle qui consolide le cosmopolitisme, la porte de l’Atlantique et de ce Sud global d’où partaient et où revenaient l’intense échange civilisationnel et culturel, mais aussi l’âme des peuples en quête de paix et de partage.
Une question n’a jamais cessé d’obséder André : comment faire la paix entre deux peuples frères, que sont les Israéliens et les Palestiniens, ses frères à lui aussi ? Comment dresser la digue contre l’incommensurable haine que d’aucuns, de part et d’autre, cultivent et nourrissent les âmes fragilisées de nos peuples ? Comment déconstruire dans nos mentalités le pire du pire qui nous arrive. Le jour du 11 septembre 2001, à l’annonce de l’attaque du World Center à New York, je l’avais appelé pour en deviser rapidement comme d’habitude avec lui, et la voix comme lasse, inquiète mais pas démobilisée pour un sou, il me répondit : « Sache que nous venons d’entrer dans un monde nouveau et désormais différent, tragique… » ! Un prophétisme à la Raymond Aron ? Plutôt une lucidité à la Camus…imprégnée de cette sagesse antique – pardonnez le peu – digne des présocratiques et des stoïciens
Tel est André, mon ami de cinquante-deux ans, qui vous invite à un déjeuner et qui, non pas régime – il n’en a pas besoin – mais ascétisme oblige, se contente d’une maigre sole sèche et une salade et quitte la table avec cette pensée non pas exprimée, mais devinée : « en rangeant mon assiette, il faut que j’aie encore faim » et qui participe d’un modèle d’existence enraciné dans une sorte de contentement messianique.
L’interrogation est posée constamment mezza voce, en elle-même comme un obsédant refrain, elle participe chez lui d’un questionnement philosophique qui ne l’a jamais quitté, à coup sûr depuis son enfance, sa jeunesse , son engagement d’homme de gauche, de cofondateur de « Maghreb Informations », conscience s’il en fut des militants d’une presse libre à un moment où un certain Mohamed Oufkir, général de son état, visage émacié, brutal ministre de l’Intérieur ne concevait la liberté de la presse qu’à travers la trique et la répression.
Son arme cachée, c’est au fond son imperturbable douceur, peut-être ses colères rentrées , son humeur intérieure joyeuse, son optimisme jamais violé…André Azoulay est un homme de paradoxes, et au fond un combattant solitaire, en marge des honneurs qui lui sont dus, fuyant de toute évidence les flonflons, habité par une joyeuse envie de vivre la beauté du monde, et presque hanté par ce besoin irrésistible de partager. Le mot est à peine juste, parce il éclaire une vie, un destin qui est en quelque sorte le nôtre. Et ce qui affecte cette vie nous affecte également. L’infamie dont les médiocres folliculaires algériens se sont fait les auteurs pour le traiter de tout ce qui n’a jamais été sa nature, n’a pas de nom… Comment pourrait-on imaginer que le Conseiller de Sa Majesté le Roi eût-il non pas seulement l’audace ou encore le pouvoir constitutionnel ou autre de décréter une loi interdisant aux Marocains de sortir dans la rue exprimer leur soutien au peuple palestinien ? Comment celui qui, dans ses frasques mensongères, disons son ahurissante ignorance, peut-il confondre un Etat démocratique avec une république bananière ? Comment l’antisémitisme d’un Etat voyou comme celui de la junte d’Alger, fourvoyant son peuple, peut-il cautionner une si dérision au motif qu’il s’agit d’un proche et très fidèle collaborateur du Roi, d’un juif porteur d’une mémoire et d’une histoire deux ou trois fois millénaire de ce Maroc immémorial ?
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