On a retrouvé les fils du roi David. Sur la Tamise.(info # 010706/13) [Culture]
Par Sandra Ores ©Metula News Agency
Les rois d’Angleterre seraient-ils les descendants d’une des légendaires dix tribus perdues d’Israël dont le destin aurait exceptionnellement bien tourné ? Croyance populaire plus ou moins répandue chez les Britanniques, la légende selon laquelle la couronne d’Angleterre appartiendrait à la lignée davidique, c’est-à-dire celle du roi David, s’appuie sur des théories aussi improbables que fragiles.
Pourtant, au sein de la famille royale, cette idée est visiblement prise très au sérieux, même si de manière discrète. Tant Edouard VII, Georges V, que le prince Charles, portent (ou portaient de leur vivant) sur eux le signe distinctif des fils d’Israël : ils sont circoncis.
Une longue liste d’autres raisons pourraient toutefois se substituer à celle de l’ascendance davidique : ascendance musulmane, mesure d’hygiène, snobisme social, etc.
Pourtant, écartant le médecin de service de la couronne, Elisabeth II (la présente reine) avait choisi un mohel afin de réaliser la circoncision sur son fils, le prince Charles; un mohel, c’est-à-dire un rabbin préposé à réaliser sur les nouveaux nés mâles l’ablation physique du prépuce, prescrite, selon la Torah, par Dieu à Abraham.
Le prince de Galles s’est ainsi vu lié par la chair aux "coreligionnaires" israélites de sa génération, partageant avec eux le coup de lame exécuté par le spécialiste officiel de la communauté juive londonienne de l’époque, le rabbin Jacob Snowman, quelques jours après sa naissance (nous étions en 1948).
Cette tradition de la circoncision dans la maison de Windsor n’est néanmoins pas si ancienne. Elle remonte au règne de la reine Victoria, qui débuta en 1840. La souveraine de Grande-Bretagne et d’Irlande, sans oublier son titre d’impératrice des Indes, était absolument convaincue de son ascendance directe avec la dynastie biblique.
Elle tint à faire circoncire ses quatre garçons (elle eut en outre cinq filles, avec son époux Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, duquel elle était fortement éprise jusqu’à la mort précoce de ce dernier, qui la laissa bouleversée).
Andrew d’York et Edward de Wessex, les deux frères de Charles de Galles, ont également effectué leur alliance avec Dieu (sans donner leur assentiment préalable).
Sans vouloir se mêler de la vie intime des gens, quoique cela soit souvent passionnant… et si l’on s’en réfère aux commentateurs de la famille royale, la femme du prince Charles, la princesse Lady Diana, aurait interrompu la royale coutume vieille de près de 150 ans.
Opposée à cette pratique, elle refusa de faire circoncire ses deux enfants, les princes William et Harry, en dépit des objections de la reine Elisabeth II, de Phillip Mountbatten (le mari d’Elisabeth II, duc d’Edimbourg, né prince Philippe de Grèce et de Danemark) et de la reine mère (Elisabeth Bowes-Lyon, mère d’Elisabeth II).
Soit dit en passant, si vous avez l’occasion de vous rendre à Londres, ne manquez pas, à la National Portrait Gallery (le musée national des portraits), les longs couloirs réservés aux effigies royales. Vous marcherez, certainement seul, sur un parquet grinçant, en proie à tous ces nobles regards peints ou sculptés, et ferez l’expérience d’un frisson, je vous le garantis, assez particulier.
Pour en revenir au présent, des rumeurs, ventilées notamment par la biographe de William et Harry, Ingrid Seward, écrivain et rédactrice en chef de Majesty Magazine (un magazine de cancans se nourrissant des avatars de la maison de Windsor) nous apportent un autre éclairage.
La mythique princesse de Galles aurait, quelques années plus tard, finalement donné son accord pour la circoncision chirurgicale du premier, puis du second de ses fils. Dans les couloirs des tabloïds anglais, il se murmure en effet que le duc de Cambridge, à l’adolescence, alors qu’il était hospitalisé au motif officiel d’une hernie, avait en fait subi la circoncision.
Tous ces précis détails contrastent cependant avec le flou qui domine dans la définition du lien entre le roi David et ses "descendants" britanniques. Au XIXème siècle, coïncidant avec le règne de la reine Victoria, la doctrine de l’anglo-israélisme se développa et gagna en popularité au Royaume-Uni.
Il s’agit d’un courant religieux chrétien, prétendant que les Anglo-Saxons contemporains, vivant en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, descendent directement des dix tribus perdues, et sont unis par une alliance spéciale au trône de David. Cette croyance est issue du restaurationnisme chrétien, un ensemble de mouvements se targuant de restaurer l’Eglise antique des apôtres parmi une certaine apostasie qui aurait alors frappé le monde chrétien.
Selon les croyances de l’anglo-israélisme, les Anglo-Saxons descendraient des tribus Scythes, ces dernières procédant des tribus perdues.
Les Scythes forment un peuple des steppes eurasiennes ayant vécu entre le VIIème et le IIIème avant J.-C. et parlaient une langue iranienne. Les récits d’Hérodote (circa 484-420 avant J.-C.) constituent la principale source de renseignements à leur sujet. Selon l’historien grec, les Scythes auraient contribué à la chute des Assyriens au VIIème siècle avant notre ère, pillant en outre la Mésopotamie et la Terre promise. A la période hellénistique, ils donnèrent probablement leur nom à la cité actuelle de Beït-Shéan, une ville israélienne située à l’est du Jourdain, alors baptisée Scythopolis, "la ville des Scythes", en grec.
Les arbres généalogiques liés à cette théorie tracent une ligne droite entre le trône du roi David, qui transite par l’un de ses successeurs, Zedekiah (le dernier roi supposé de Judée avant la destruction du Temple de Jérusalem par les Babyloniens en -587), puis par le trône d’Irlande, puis celui d’Ecosse, avant d’aboutir finalement à la personne de Victoria.
Ces croyances ne sont pas l’apanage unique de prédicateurs, puisque la "Déclaration d’Arbroath", une déclaration d’indépendance écossaise écrite en 1320 sous forme d’une lettre officielle à l’attention du Pape Jean XXII, indique une destinée concordante. Le document, signé par les principaux nobles d’Ecosse de l’époque, mentionne le fait que les aïeux des Ecossais parvinrent de Scythie, traversèrent l’Espagne avant de gagner leur demeure "douze cents ans après que le peuple d’Israël ait traversé la mer Rouge".
Le Professeur émérite des Etudes juives modernes de l’université des Etudes Orientales et Africaines de Londres, Tudor Parfitt, spécialiste de la démonstration de l’existence de liens génétiques entre aspirants descendants de tribus perdues et le peuple élu, a toutefois conclu à la faiblesse des prétentions israélisantes des Anglo-Saxons ("en dépit des bas standards exigés dans ce type de recherches", dixit le scientifique à mon oreille).
Reste une question cruciale qu’ont déjà abordée les tabloïds anglais. D’ici un petit mois, Son Altesse royale la duchesse de Cambridge (autrement comtesse de Strathearn - province d’Ecosse - et baronne Carrickfergus - ville d’Irlande du Nord) mettra au monde un nouveau né. Si c’est un garçon, se fera-t-il circoncire ?
Dans l’attente d’une réponse qui restera peut-être étrangère aux oreilles (et aux yeux assurément) du grand public, nous nous permettons la fantaisie de nous demander si le mot British ne dériverait pas, par hasard, de Brit - Brit milah, la circoncision, littéralement l’ "alliance par le verbe" ? Le suffixe "ish", pouvant se traduire quant à lui en anglais par "à peu près", lorsqu’il est accolé à la fin d’un mot. En hébreu, "ish", c’est l’ "homme" : British signifiant littéralement l’ "homme de l’alliance". A la famille royale de savoir ce qu’il reste de cette mystérieuse alliance biblico-mystico-divine. Moi, tant que les Windsor ne réclament pas le trône d’Israël, je nourris ma curiosité et je souris.
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