Trump : Il n’a « jamais été plus dangereux depuis la Shoah » d’être Juif aux États-Unis
Dans un discours antérieur, le nominé républicain avait évoqué "une épidémie vicieuse d'antisémitisme militant", tout en blâmant Kamala Harris
Par Ben Sales et Ron Kampeas
L’ancien président américain Donald Trump a déclaré à l’occasion d’un rassemblement de campagne, en Pennsylvanie, « qu’il n’a jamais été plus dangereux depuis la Shoah » d’être Juif aux États-Unis.
S’exprimant à Wilkes-Barre, le candidat républicain à la présidentielle a affirmé que le gouverneur de l’état de Pennsylvanie, Josh Shapiro, n’avait pas été choisi comme colistier à la vice-présidence par son adversaire, la démocrate Kamala Harris, parce qu’il était juif.
« Ils n’ont pas voulu de lui », a établi Trump, reprenant une accusation qui avait initialement été lancée par JD Vance, qui se présente aux élections à ses côtés. Une affirmation qui a été rejetée par le parti Démocrate et par Shapiro lui-même qui a déclaré que « l’antisémitisme n’a eu aucun impact » sur le processus de prise de décision.
« Ils n’ont pas voulu de lui pour d’autres raisons mais la principale raison, c’est parce que c’est un Juif », a poursuivi Trump qui a dit à la foule que « tous les Juifs qui vont voter pour elle [Harris] ou pour un Démocrate devraient prendre rendez-vous chez un psychiatre ».
« Si vous regardez quelle est la situation avec Israël et avec le peuple juif, il n’a jamais été aussi dangereux, depuis la Shoah, d’être Juif en Amérique », a continué Trump.
Une allocution qui est venue faire écho à une autre, qu’il avait prononcée jeudi dans la soirée depuis son club de golf de Bedminster, dans le New Jersey, discours auquel ses soutiens juifs de premier plan avaient assisté. Donald Trump avait alors expliqué que les Juifs vivaient actuellement dans un climat similaire à celui qui avait précédé la Shoah en raison des actions lancées par les forces anti-israéliennes – et il en avait attribué la seule responsabilité à sa rivale, en évitant soigneusement toute mention de la haine anti-juive qui émane de l’extrême-droite.
« Ce qui se passe aujourd’hui, c’est très exactement ce qui se passait avant la Shoah », avait affirmé Trump.
Une allocution qui avait été faite alors que Trump, de son propre aveu, tente de « cerner » Harris, vice-présidente des États-Unis qui est aussi son adversaire issue du parti Démocrate dans la course à la Maison Blanche. La candidate a commencé à le dépasser dans les sondages, que ce soit au niveau national ou dans les états pivots, qui seront déterminants lors du scrutin.
Le discours avait également été l’occasion de répliquer à de longues années d’accusation lancées à l’encontre de l’ancien président – qui a été mis en cause de manière répétée pour avoir accepté le soutien de personnalités d’extrême-droite au sein de son parti et qui rappellerait, par la conduite qui est la sienne, la période qui avait précédé la prise de pouvoir de Hitler, avaient affirmé des Juifs Démocrates lors de sa dernière campagne.
Dans son discours, Trump avait aussi repris des propos qu’il a souvent tenus – passant notamment en revue les mesures qu’il avait prises en tant que président à l’égard d’Israël, comme le retrait des États-Unis du JCPOA, l’accord consacré au programme nucléaire iranien et la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël. Il avait une nouvelle fois déploré le vote de la majorité des Juifs américains qui restent fidèles au parti Démocrate.
Trump avait également réaffirmé que le pogrom commis par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre, n’aurait jamais eu lieu s’il avait été président – une affirmation qu’il a fréquemment faite. Il s’était, en outre, engagé à donner à Israël les ressources nécessaires pour que le pays puisse gagner la guerre et il avait ajouté à plusieurs reprises qu’il pensait que peu d’otages israéliens étaient encore en vie.
Il avait également promis de mettre les présidents d’université « en demeure » face à la problématique de l’antisémitisme sur les campus et il avait menacé de retirer à ces derniers leurs financements fédéraux et leurs accréditations si la haine antijuive devait encore s’y exprimer.
« Le poison toxique de l’antisémitisme coule désormais dans les veines du parti Démocrate radical », avait-il asséné. « Nous sommes ici, ce soir, parce que nous pensons que cette épidémie vicieuse d’antisémitisme militant est très active, qu’elle ne doit faire l’objet d’aucune tolérance, qu’elle ne doit avoir aucun refuge, qu’elle n’a pas sa place dans une société civilisée. Nous devons la rejeter dans nos écoles, dans notre politique étrangère, dans notre système d’immigration et dans les urnes en novembre prochain ».
Jeudi également, la campagne de Trump avait lancé une campagne juive officielle, « Jewish Voices for Trump », qui fait la liste de ses actions pro-israéliennes et des soutiens qui lui sont apportés par des Républicains juifs. Certains ont d’ailleurs travaillé pour lui.
« Il veillera à ce qu’Israël et le peuple juif disposent d’un foyer sûr et il achèvera enfin notre guerre contre le terrorisme », est-il écrit sur le site de cette campagne communautaire. « En réaffirmant notre soutien au président Trump, les voix juives à travers tout le pays s’efforcent d’offrir un second mandat au président Trump et de mettre un terme à l’antisémitisme radical. »
L’ancien ambassadeur de Trump en Israël, David Friedman, figure parmi ces soutiens cités. « Les campus ont été le théâtre de manifestations antisémites et les proxies soutenus par l’Iran représentent une menace existentielle pour l’État d’Israël, tout cela à cause de l’échec des politiques de l’administration Harris-Biden », a déclaré Friedman dans un communiqué.
Au début du discours prononcé dans le New Jersey, Trump avait dénigré le physique de vétérans militaires décorés tout en faisant l’éloge de Miriam Adelson, la donatrice républicaine qui l’avait présenté lors de l’événement et qui s’est par ailleurs engagée à verser jusqu’à 90 millions de dollars en faveur de sa réélection. Mentionnant qu’il lui avait remis la médaille présidentielle de la liberté, Trump avait déclaré qu’Adelson était plus belle que certains anciens combattants blessés qui ont reçu la médaille d’honneur du Congrès.
« Tous ceux qui reçoivent la médaille d’honneur du Congrès, les soldats, ils sont en très mauvais état parce qu’ils ont été blessés par balle à de nombreuses reprises, ils peuvent être morts aussi, » avait-il commenté. « Elle a obtenu cette médaille et c’est une belle femme, elle est en bonne santé ».
Il avait fait plusieurs autres affirmations infondées tout au long de son discours, disant notamment que Harris avait envisagé d’imposer un embargo sur les armes à Israël (les militants pro-palestiniens ont déclaré qu’elle était ouverte à une rencontre pour discuter d’un embargo, mais son équipe de campagne a annoncé qu’elle s’opposait à une telle mesure) et qu’elle avait voulu écourter au maximum son entretien avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu (ils ont échangé pendant 40 minutes). Il avait également fait allusion au fait qu’il avait remporté les élections de 2020 – une affirmation mensongère – en soulignant qu’il avait obtenu plus de voix en 2020 qu’en 2016.
Il avait également écorné le prénom de Harris et il avait ajouté qu’il ne la reconnaîtrait pas si elle était désignée par son nom de famille. « Je ne l’appelle pas Harris parce que personne ne sait qui est Harris », a-t-il dit. « Vous dites aux gens ‘Harris’ : mais qui est Harris ? », s’était-il interrogé.
Il avait accusé l’administration Biden de « trahir » Israël, notant qu’il apporterait tout son soutien au pays.
« Je donnerai à Israël le soutien dont il a besoin pour gagner, mais je veux qu’il gagne rapidement, est-ce que ce ne serait pas une bonne chose s’il pouvait gagner rapidement ?… Et nous devons les laisser gagner rapidement. Nous rétablirons le civisme et la paix au Moyen-Orient ».
Mais il s’était dit pessimiste concernant le nombre d’otages encore en vie. « Je pense qu’il ne restera que très peu de personnes. Beaucoup de personnes qu’ils pensent être en vie ne le seront pas », avait-il indiqué.
L’événement n’avait pas été l’occasion, cependant, d’aborder le sujet des violences antisémites de l’extrême-droite – des violences qui, selon le FBI et l’Anti-Defamation League, continuent de proliférer, faisant peser une grave menace. La « théorie du grand remplacement » – une théorie du complot sans fondement laissant penser que les Juifs chercheraient à remplacer les populations blanches par des migrants de couleur – a alimenté certaines des violences antisémites les plus graves de ces dernières années, y-compris l’attaque antijuive la plus meurtrière de toute l’Histoire des États-Unis, avec le massacre qui avait été commis dans une synagogue de Pittsburgh en 2018. Trump et de hauts responsables républicains ont aidé à propager différentes versions de cette théorie.
Trump avait également fait l’éloge du dirigeant hongrois Viktor Orban, qui a fait l’objet d’accusations d’antisémitisme de la part des Juifs hongrois, en le qualifiant de « personnalité très forte ».
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