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Superviseuse musicale par Varda Kakon

Quel est le lien entre Mon cousin de Jan Kounen, la saison 4 de Dix pour cent,  Bac Nord de Cédric Jimenez et Mandibules de Quentin Dupieux ? Varda Kakon, bien sûr ! Superviseuse musicale et secrétaire générale de l’Association des Superviseurs Musicaux, elle a su imposer sa patte depuis 2005 grâce à JCVD de Mabrouk El Mechri. Pour Sœurs Jumelles, elle raconte son métier.

Quel est le rôle d’un superviseur musical ?

C’est en quelque sorte un producteur délégué de la musique, qu’il s’agisse de télévision, de cinéma, de publicité, de documentaire… Je travaille personnellement pour la télé et le cinéma et je m’occupe de la partie artistique, juridique et financière de la production d’une musique d’un film qui se compose de trois pôles.

La première, c’est l’achat de droits sur tous les morceaux existants que l’on peut avoir envie d’utiliser comme bande son, tels quels ou pour les faire interpréter par d’autres artistes dans le film, ou encore pour les monter à partir d’extraits précis explicités dans le scénario. C’est ce qu’on appelle le droit de synchro : il concerne tout ce qu’on a besoin d’acheter en amont du tournage.

Une fois le film tourné, on travaille davantage sur la musique à l’image qui vient renforcer les émotions de la scène, appuyer une tension ou un moment de panique, par exemple. C’est la production de score original. On fait alors appel à un compositeur : il travaille avec le réalisateur qui, de son côté, choisit de poser la musique à tel ou tel endroit. Nous accompagnons cette production en les aidant d’abord à communiquer, puis à fabriquer. Autrement dit à engager des musiciens, à choisir les studios, les ingénieurs et la façon dont on mettra tout ça en œuvre…

Pour ces deux parties, il faudra établir des contrats pour tous les intervenants : compositeurs, musiciens, ingénieurs, etc. S’ajoute ensuite la gestion du budget alloué à ces tâches.

La troisième partie du travail, c’est l’artistique. Le compositeur a parfois besoin de notre regard avant de présenter ses créations au réalisateur. Quand le cinéaste désire un morceau que le budget ne permet pas d’acquérir, le superviseur musical lui propose aussi d’autres musiques en essayant de rester conforme à ses attentes.

A quel moment le superviseur musical intervient-il sur une œuvre?

Chaque film a son karma, son histoire, ses avantages et ses contraintes. Sur certaines productions, on me donne le scénario à lire bien avant le tournage. J’ai ainsi le temps de parler avec le producteur et le réalisateur sur l’achat de droits des titres déjà envisagés. Mais il arrive qu’on  m’appelle pour un projet déjà tourné. Il n’y a aucune règle. Certains réalisateurs savent exactement ce qu’ils veulent, d’autres ont besoin d’être très accompagnés. J’ai l’habitude de dire à mes clients que je prends la place que l’on me donne. Si un réalisateur a besoin d’échanger souvent, je suis à sa disposition. S’il a déjà une certaine complicité avec un compositeur, je les laisse communiquer entre eux. Mon degré d’intervention dépend aussi de l’ampleur de la tâche : de la quantité d’achats de droits, de l’importance du score, de l’emploi d’un orchestre dans le score…

“Chaque film a son karma, son histoire, ses avantages et ses contraintes”

Quelles sont les qualités à avoir pour devenir superviseur musical?

Il faut savoir se mettre au service de l’autre, oublier ses goûts personnels pour essayer d’accompagner le réalisateur et le compositeur dans leur façon de voir le projet, même si parfois nous ne sommes pas d’accord artistiquement. Il  faut aussi de la rigueur car le métier requiert un encadrement juridique et financier strict. Enfin, il faut être à l’écoute, humainement. Les processus de création mettent parfois à mal la sensibilité des uns et des autres, et certains vivent des moments de doute, voire de douleur. Il faut essayer de les aider, de les écouter, de les comprendre. Cette part psychologique n’est pas négligeable.

Vous travaillez sur des séries et des films. Y a-t-il des différences fondamentales dans votre manière d’officier entre ces deux univers?

Les moyens ne sont pas les mêmes, forcément. Mais c’est le même métier, toujours avec l’aspect artistique, juridique et financier de la musique. Cela dit,  sur une série, sur une première saison, nous définissons un style avec le compositeur et le réalisateur : ce sera le “code couleurs” du projet. S’il y a une nouvelle saison, on reprend le générique, les thèmes principaux, dans notre banque de données qui s’enrichit à mesure que la série perdure. Un gain de temps énorme par rapport au cinéma.

Quel est le premier film sur lequel vous avez travaillé ?

JCVD de Mabrouk El Mechri. Un souvenir et une expérience vraiment incroyables qui m’ont mis le pied à l’étrier. J’ai aimé tous les projets pour l’aventure humaine passionnante qu’ils représentent. Je me souviens notamment de La Belle et la Bête de Christophe Gans : avec le compositeur Pierre Adenot, nous avions pu enregistrer à Abbey Road avec un grand orchestre. C’était émouvant, comme souvent dans ce métier d’ailleurs. C’est pour ça qu’il est si beau.

Depuis 2005, Varda Kakon a supervisé plus de 100 films parmi lesquels La promesse de l’aube (Eric Barbier), Django (Étienne Comar), Alibi.com (Philippe Lacheau), Chocolat (Roschdy Zem), Floride (Philippe Le Guay), La glace et le ciel (Luc Jacquet), La famille Bélier (Éric Lartigau), La belle et la bête (Christophe Gans), Les herbes folles (Alain Resnais). Du côté des séries, elle a travaillé sur Chefs (Marion Festraëts, Arnaud Malherbe), Baron noir (Ziad Doueiri, Antoine Chevrollier), Trepalium (Antarès Bassis, Sophie Hiet), Kaboul Kitchen (Allan Mauduit, Jean-Patrick Benes) et Dix pour cent.

Par Perrine Quennesson

Photo de couverture : © Benoit Billard 

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