Le Mgoun, le Dadès et le Todgha
Tiilit. Mgoun et Dadès
Dans cette région, Berbères et Juifs entretenaient en général des relations amicales. Les femmes juives comme berbères, portaient l’izar blanc tombant jusqu’aux pieds. Le pan arrière était parfois attaché sur le devant des épaules, d’autres fois le drapé était croisé comme dans le Todgha.
L’originalité du costume des femmes juives résidait encore dans la coiffure. Sur la petite perruque semblable à celle en usage dans le Todgha était nouée une écharpe, sebniyya, faire de soie d’importations rayée de couleurs vives autrefois tissée et teintée sur place. Les femmes berbères la portaient en turban, tandis que les Juives la laissaient retomber sur les épaules et le dos. La partie la plus intéressante de la coiffure était constituée par une belle et précieuse couronne posée par-dessus les écharpes.
L’origine de cette parure exceptionnelle semble très ancienne; elle évoque la couronne des princesses byzantines. Nommé tasfift, ce diadème est fait de nombreuses petites plaques d’argent, parfois repousses et gravées, parfois ressemblant à des clous ronds en relief, alternant avec de longues perles de corail.
Ces éléments, étroitement imbriqués, sont cousus sur une monture d’étoffe rouge. De petites pendeloques d’argent garnissent le front. Ce type de parure était également répandu dans la vallée du Drâa où les plaquettes étaient remplacées par des pièces de monnaie d’argent, et le décor de perles de corail différait. Sur les photos prises dans ces régions on voit souvent le tasfift porté légèrement incliné sur le côté.
Parmi les bijoux, il y a lieu de mentionner spécialement les colliers de grosses boules d’ambre, agrémentés de pendentifs d’argent aux formes très variées. C’est dans cette région qu’étaient répandus les bijoux d’argent niellé. Les femmes juives incorporaient à leurs colliers des pendentifs de provenance diverse, parfois des éléments empruntés à des bijoux berbères démantibulés.
Juives du Todgha
Dans la vallée du Todgha, région d’oasis, il semble que la pauvreté commune y ait amené les Berbères et les Juifs à vivre ensemble dans une relative harmonie.
Les femmes du Todgha se drapaient dans l’izar de façon particulière. Combiné de façon à croiser aussi bien devant que derrière, il conférait à la femme une allure gracieuse que ne démentait pas la simplicité du tissu, parfois même usé et déchiré.
L’izar des femmes berbères était souvent porté sans ceinture, les pans flottant librement. Les femmes juives l’attachaient en se servant comme ceinture du même mouchoir de coton bleu à pois dont les hommes avaient coutume de s’envelopper la tête.
Les juives portaient une perruque particulière composée autrefois de deux parties. La première, nommée swalf, était posée sur la tête afin de cacher les cheveux. Volumineuse et pesante, elle était formée de nombreuses queues de vaches entrecroisées (parfois jusqu’à une trentaine). La seconde partie consistait en deux énormes écheveaux de laine brune, pendant de part et d’autre de la tête, reposant sur les épaules. Ces “cornes” tombantes, appelées tachqin, étaient enveloppées dans un tissu rouge ou marron. La raie au milieu de la perruque était ornée d’une enfilade de perles de corail et de cornaline et d’une pendeloque d’argent. Les plus coquettes y ajoutaient encore une garniture de monnaies d’argent cousues sur un ruban noir sfifa et portée en travers.
En 1883, Charles de Foucauld dessina une femme portant une perruque de ce genre. Vers 1930, un médecin, ami de Jean Besancenot, put encore photographier un groupe de femmes dont plusieurs portaient l’antique perruque. Mais la plupart des femmes juives n’avaient déjà plus à cette époque que la petite perruque ne comportant que deux ou trois queues de bovidés. Cette modeste perruque était répandue dans les vallée du Todgha et du Dadès et jusqu’à Ouarzazate, en rejoignant la route de Marrakech.
Les femmes juives de la vallée du Todgha se peignaient le visage au kherqos comme le font les femmes berbères de cette région, surtout pour les fêtes. En dépit de leur grande pauvreté, elles portaient de très lourds bracelets d’argent massif à protubérances, qui dans le passé pouvaient être utilisés pour la défense.
Source : La vie juive au Maroc, arts et traditions. Musée d’Israël, éd. Stavit