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Le voile n’est ni arabe ni islamique !

 

Par Hannibal GENSERIC

 

 

La dénomination « voile islamique » suggère explicitement que le port du voile est une prescription de la religion musulmane, alors que, d’une part, il ne semble pas s’imposer dans toutes les communautés musulmanes, et que, d’autre part, il a existé et il existe encore dans des communautés non musulmanes. Le voile féminin a une longue histoire qui date de plusieurs millénaires avant l’Islam.

La première preuve textuelle du port du voile vient de la Mésopotamie, où le culte de la déesse Ishtar était associé avec la prostitution sacrée. Ishtar est représentée voilée. Dans un hymne, l’Exaltation d’Inanna(nom sumérien donné à Ishtar), écrit vers 2300 avant J.C. par le grand prêtre du dieu de la Lune à Ur, cette déesse est appelée hiérodule (prostituée sacrée) d’An, An étant le plus ancien dieu des Sumériens.

Le premier document légal qui mentionne les prostituées sacrées, ou hiérodules, est le Code d’Hammourabi, qui date de 1730 av. J.-C. Le code mentionne les fonctionnaires du culte. À Sumer, la hiérodule à la tête des servantes du culte, est appelée l’épouse ou la sœur du dieu. Elle avait sa maison attitrée et elle était protégée contre les atteintes aux mœurs de la même manière que les femmes mariées, en se couvrant d’un voile. Par la prostitution sacrée, la puissance de la fertilité de la déesse est transférée au roi. Celui-ci était regardé en Mésopotamie comme garant de la fertilité du pays et de son peuple, et en général de la prospérité et du bien-être du royaume. Chaque année au nouvel an, le souverain était tenu « d’épouser » l’une des prêtresses d’Inanna, afin d’assurer la fertilité des terres et la fécondité des femelles.

Chez les anciens sémites, ancêtres des Cananéens, des Phéniciens, des Hébreux et des Arabes, des milliers d’années avant l’Islam, on avait déjà imposé le voile aux femmes pour se couvrir les cheveux. En effet, les anciens sémites considéraient la chevelure de la femme comme le reflet de la toison du pubis.

Si le voile des courtisanes et des danseuses est attesté au Proche-Orient ancien, il est cependant principalement un attribut de l’épousée et, à certaines époques, de la femme mariée. La documentation du IIe millénaire av. J.-C. montre que dans les familles royales syriennes du xviie s. avant J.C, il est d’usage de poser un voile sur la tête de la « fiancée ». La même pratique est décrite à Emar (une cité mésopotamienne située sur la rive de l’Euphrate dans le nord-ouest de l’actuelle Syrie), dans le rituel d’installation de la grande prêtresse au temple de Ba’al, dieu phénicien, qui constitue symboliquement un mariage avec la divinité : la femme sort de chez elle et « on couvre sa tête comme une épousée avec une écharpe bariolée provenant de la maison de son père » (D. Arnaud, Recherches au pays d’Aštata Emar VI.3, no 369 l. 63-64).

Dans la seconde moitié du IIe millénaire, le voile devient, en Assyrie, un signe distinctif des femmes mariées et plus largement des femmes honorables. Le § 40 des Lois assyriennes décrit longuement les femmes qui peuvent se voiler en public (épouses, veuves, Assyriennes, filles de famille, concubines accompagnant leur maîtresse et prêtresses - qadištu mariées), et celles auxquelles ce privilège est interdit (célibataires, prostituées, esclaves). Le port du voile est un devoir pour les premières mais non une obligation : aucune sanction n’est prévue contre elles si elles sortent nu-tête ; au contraire, les secondes sont punies de peines corporelles (bastonnade, essorillement c’est-à-dire action de leur couper les oreilles) et humiliantes (effusion de poix sur la tête de la prostituée). La non dénonciation du port illicite du voile est passible de châtiments corporels semblables.

Le voile est ainsi, au moins dans les « statuts urbains » d’Assour, l’expression d’une discrimination juridique qui sert de base à un discours moralisant.

Le voile dans la tradition juive 

La tradition du voile s’observe aussi dans la Bible, comme en témoigne l’histoire de Rebecca (Genèse 24), qui, mariée à distance à Isaac par un serviteur d’Abraham mandaté pour cela, se couvre de son voile dès qu’elle aperçoit son mari. La tradition juive a longtemps considéré qu’une femme devait se couvrir les cheveux en signe de modestie devant les hommes.

Selon Dr Menahem M. Brayer (Professeur de Littérature Biblique à l’Université Yeshiva de New York) dans son livre  »The Jewish woman in Rabbinic literature’‘, plusieurs siècles avant J.C., les femmes juives avaient pour habitude de sortir en public avec une couverture sur la tête et, souvent, ne laissaient paraître qu’un œil libre pour pouvoir marcher dans la rue. Il rapporte quelques citations d’anciens rabbins réputés, “ce n’est pas bien pour les filles d »Israël de sortir avec les têtes dévoilées” et “Maudit soit l’homme qui laisse les cheveux de son épouse être vus, une femme qui expose ses cheveux apporte la pauvreté.”

La loi rabbinique interdit la récitation de bénédictions ou les prières en présence d’une femme mariée tête nue ; car le dévoilement des cheveux de la femme est assimilé à la nudité. Aujourd’hui, la plupart des femmes juives pieuses ne se couvrent pas les cheveux, sauf dans la synagogue. Chez les intégristes juifs, comme la secte hassidique, les femmes continuent à se voiler les cheveux ou à porter une perruque pour cacher leurs cheveux.

Aujourd’hui, des femmes juives sont voilées à Tel-Aviv

La « frumka » est une tenue vestimentaire adoptée ou imposée à certaines femmes juives par des groupes ultra-orthodoxes regroupé sous le terme de « Haredim ». Elles ont l’obligation de porter un voile et un large manteau masquant tout leur corps et sont interdites de maquillage ainsi que de téléphone cellulaire… en public. Ceci afin de préserver le statut et le respect des femmes pour elles-mêmes en application des enseignements de la religion juive, qui appelle au respect de la moralité et à la décence….

Le voile dans la tradition chrétienne

Chez les chrétiens, c’est Saint Paul qui, le premier, a imposé le voile aux femmes. Dans l’épître aux Corinthiens, il écrit « Toute femme qui prie ou parle sous l’inspiration de Dieu sans voile sur la tête commet une faute comme si elle avait la tête rasée. Si donc une femme ne porte pas de voile, qu’elle se tonde ou plutôt qu’elle mette un voile, puisque c’est une faute pour une femme d’avoir les cheveux tondus ou rasés…L’homme ne doit pas se voiler la tête, il est l’image et la gloire de Dieu mais la femme est la gloire de l’homme car ce n’est pas l’homme qui a été tiré de la femme, mais la femme de l’homme et l’homme n’a pas été créé pour la femme, mais la femme pour l’homme. Voilà pourquoi la femme doit porter la marque de sa dépendance ».

Saint Tertullien, dans son traité réputé « Sur le fait de Voiler de Vierges », a écrit : “Jeunes femmes, vous portez vos voiles dans les rues, donc vous devriez les porter dans l’église, vous les portez quand vous êtes parmi les étrangers, portez- les aussi parmi vos frères”. Dans le droit canon de l’Église catholique aujourd’hui, il y a une loi qui exige des femmes de couvrir leurs têtes dans l’église. La raison pour le voile, pour les chefs de l’Église, est que “la couverture de la tête est un symbole de la soumission de la femme à l’homme et à Dieu” : la même logique présentée par Saint Paul dans le Nouveau Testament.

Certaines sectes chrétiennes, comme les Amish et les Mennonites, gardent leurs femmes voilées de nos jours.

Que dit le Coran sur le voile

« Que dit le Coran sur le voile ? Rien. Mais strictement rien. Nulle part, il n’est question de la tête de la femme. Le mot « cheveux » (sha’ar, شعر) n’y existe tout simplement pas. Dieu ne dit ni de les couvrir ni de les découvrir. Ce n’est pas Sa préoccupation principale, et Il ne fit pas descendre le Coran pour apprendre aux gens comment se vêtir. Le terme ash’âr, اشعار  pluriel de sha’ar, n’y intervient qu’une seule fois (XVI : 80) pour désigner le poil de certains animaux domestiques. Rien, donc, dans le Coran, ne dit aux femmes explicitement de se couvrir les cheveux« . Mohamed Talbi (*)

Rappelons ici que c’est le Calife Omar Ibn Al Khattab, qui avait imposé le port du voile à toutes les femmes musulmanes de son époque et en avait interdit le port aux esclaves. Ce Calife « bien guidé » faisait fouetter toutes les esclaves qui « osaient » arborer le voile ou se « permettaient » de se couvrir la tête. En agissant ainsi, ce calife ne fait donc qu’imposer une tradition non seulement païenne mais, en plus, anté islamique : c’était celle des Assyriens, datant de 2.000 ans avant l’Islam ! Il nous rappelle le Mollah Omar, grand chef des Talibans afghans de triste réputation.

Conclusions

La burqa, selon le spécialiste de l’Islam et politologue français Olivier Roy, est une invention récente du mouvement intégriste wahhabiste dans les pays du Golfe et au Pakistan. Le niqab et la burqa, , ces deux « linceuls pour femmes vivantes », n’ont jamais existé au Maghreb, jusqu’à une époque récente.

Niqab et burqa sont les archétypes de ce qu’il y a de pire honte imposée aux femmes.

En effet,

  • quiconque accepte qu’un visage soit couvert nie l’humanité de l’autre.

  • Quiconque accepte de côtoyer un être vivant, entièrement recouvert, emballé comme un sac, intégralement masqué, et donc sans aucune identité visible, se fait, qu’il le veuille ou non, le collaborateur de cette vile et insupportable négation.

Qui, en effet, se cache depuis toujours le visage ?

  • Les bourreaux, et les égorgeurs accomplissant leurs crimes.

  • Les kamikazes islamistes qui se dissimulent dans la foule pour accomplir leur forfait ;

  • Les racistes du Ku Klux Klan.

  • Les esclaves perdus des tristes comédies sadomasochistes.

  • Les pénitents de rituels médiévaux,

  • Les voleurs, braqueurs, et autres hors-la-loi, pour qui l’anonymat est une seconde nature.

  • Sans parler des pédophiles et autres crapules sexuelles.

Il apparait donc clairement que :

  • Les premières apparitions du voile avaient pour but de cacher les prostituées aux yeux de la population, et de discriminer ainsi les prostituées des autres femmes. Les femmes « respectables » étaient celles qui n’étaient pas voilées.

  • Dans les traditions sémitiques et moyen orientales archaïques, bien avant l’apparition de l’Islam, le voile avait pour but de signifier l’appartenance et la soumission de la femme à l’homme : en premier lieu le mari (si elle est mariée), sinon son père, son frère, voire son oncle (si les autres sont décédés).

  • De tout temps et en tout lieu, les sectes intégristes de toutes les religions ont perpétué cette tradition archaïque.

  • Aujourd’hui, le voile a une signification politique et sectaire, il n’a rien à voir avec la religion musulmane. Il est assez incroyable que les pays réputés démocratiques, comme la France, autorisent le voile (burqa, hijab, …) et interdisent le port de la croix gammée.

Mustapha Kemal Ataturk, président de la Turquie de 1923 à 1938, avait trouvé la bonne astuce en faisant voter une loi qui contredit tout simplement celle des Assyriens, du calife Omar et du mollah Omar : « Avec effet immédiat, toutes les femmes turques ont le droit de se vêtir comme elles le désirent. Toutefois toutes les prostituées doivent porter la burqa. » Dès le lendemain, on ne voyait plus de burqa en Turquie.

Mais le monde musulman n’a pas tous les jours un Kemal Ataturk ou un Habib Bourguiba.

Aujourd’hui que la Turquie et la Tunisie, qui étaient socialement les pays les plus modernes du monde musulman, vivent sous des dictatures islamistes avec tout ce que cela comporte comme assassinats politiques et de procès d’inquisition, le monde musulman fait un formidable bond en arrière, encouragé en cela par un Occident obnubilé par l’odeur nauséabonde du gaz et du pétrole. Pour s’en convaincre, il n’y qu’à voir avec quel empressement les présidents américain ou français, toute honte bue, s’aplatissent devant les rois arabes, les pires despotes des temps modernes.

Par Hannibal GENSERIC

(*) Mohamed Talbi Agrégé d’arabe, docteur es-lettres, Spécialiste d’histoire médiévale et d’islamologie. Mohamed Talbi est un des membres fondateurs de l’Université de Tunis. ; Professeur honoraire, puis premier doyen de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines (1966-1970). ; Directeur des Cahiers de Tunisie (1969-1989), puis Président d’honneur. ; Membre de la Real Academia de la Historia (Madrid 1970). ; Directeur du dép. d’histoire au CERES (Tunis 1973- 1977). ; Membre associé du comité de Direction de l’Encyclopédie de l’Islam depuis 1978, ; Membre fondateur de I ‘Académie Tunisienne (Bayt-al-Hikma 1982), ; Président du Comité Culturel National (Tunisie 1983), ; Membre de I ‘Académie Universelle des Cultures (Paris 1994), ; Membre du Bureau du The Maghreb Review (Londres),

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