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Israël : la conscription des ultra-orthodoxes se réinvite dans le débat politique

 

 

Nathalie Hamou

Le 2 mars, près d'un demi-million de juifs ultra-orthodoxes ont défilé à l'entrée de Jérusalem contre la fin de l'exemption militaire dont bénéficient les étudiants des yeshivot, les écoles talmudiques. Cette manifestation monstre a fait office de démonstration de force vis-à-vis des membres de la Knesset, le parlement israélien, qui s'apprête ce mois-ci à voter un projet de réforme du service militaire. Elle a aussi relancé le débat autour d'une question sensible qui divise profondément la société israélienne, au-delà du clivage laïcs-religieux.

Ciment de la coalition du gouvernement de Benjamin Netanyahou, le projet de loi concocté par le parti centriste laïc Yesh Atid (« Il y a un futur ») dirigé par Yaïr Lapid, et soutenu par la formation nationaliste religieuse Foyer Juif, fixe un quota pour les hommes ultra-orthodoxes devant rejoindre l'armée ou un service civil d'intérêt général à compter de 2017. Le texte en cours d'élaboration prévoit aussi des sanctions pénales, y compris des peines d'emprisonnement, contre les haredim - les ultrareligieux - qui tenteraient de se soustraire à l'incorporation.

A priori, une majorité d'Israéliens est plutôt favorable à une réforme visant à corriger une disposition jugée anachronique. Lorsque l'exemption militaire a été accordée aux haredim au lendemain de la création de l'Etat hébreu, ces derniers ne représentaient qu'une petite fraction de la société israélienne, contre 10% de la population aujourd'hui. Pour autant, l'actuel projet de loi compte de nombreux détracteurs. Selon un sondage publié ce week-end par le quotidien Haaretz, 47% des sondés estiment que le texte en cours d'élaboration ne sera pas en mesure de créer une situation « plus égalitaire » entre les ultra-orthodoxes et le reste de la population.

« Tous les spécialistes du secteur haredi s'accordent à dire que cette loi souffre d'un double handicap. Non seulement, elle est ineffective sur le plan pratique, mais sur le plan symbolique, ce projet de loi est offensant. Il nous entraîne dans une guerre entre frères », observe dans une tribune publiée dans le journal Yediot Ahronot, Yedidia Stern, vice-président de l'Institut israélien pour la démocratie. Par ailleurs professeur de droit à l'Université Bar Ilan, il estime notamment que les sanctions pénales prévues contre les ultra-orthodoxes récalcitrants risquent de pousser une « majorité pragmatique dans les bras d'une minorité fanatique ».

Au sein de la classe politique, certains partis ne se sont pas privés d'utiliser la manifestation géante pour critiquer la coalition en place. « Le demi-million d'ultra-orthodoxes ayant défilé à Jérusalem et le demi-million de manifestants descendu dans la rue lors du mouvement social de l'été 2011, ont un point commun : Yaïr Lapid [l'actuel ministre des finances] a profité d'eux », dénonce l'élu travailliste Itzik Shmuli. La députée du parti de gauche radicale Meretz, Michal Rosin, a pour sa part suggéré au chef de file de Yesh Atid, de s'occuper « d'intégrer les hommes et les femmes de la communauté haredi au marché du travail pour les sortir du cercle vicieux de la pauvreté ». « Ce projet de loi autour de la conscription des haredim, pointe-t-elle, nuit davantage au principe d'égalité qu'il ne le renforce ».

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