UN JEUNE ENTREPRENEUR
Lorsque mon fils avait 7-8 ans, il vint me voir une fois au travail.
Apres quelques minutes assis dans mon bureau, il me demande s’il peut aller a l’entrepôt.
Il y va et se met à fouiner. Il trouve dans un coin une vingtaine de caisses, le restant d’une promotion de chewing gum et que nous avions l’intention de jeter aux ordures vu que le produit était périmé donc inutilisable.
Il demande au gérant de l’entrepôt ce que c’est. Il lui explique que dans chaque caisse il y a 10 paquets et que dans chaque paquet il y a 100 chewing gum. Il demande de prendre un paquet et qu’il allait les montrer a son père. Il vient me voir et me demande s’il peut prendre ce paquet. Je lui dit que le produit est périmé et donc n’est plus bon a consommer. Il insiste pour l’avoir et j’accepte.
Un peu plus tard nous rentrons ensemble a la maison et je n’avais aucune idée de ce qu’il voulait en faire.
Le lendemain, il s’organise pour prendre ce butin avec lui a l’école.
En fin d’après midi. Il retourne a la maison et me téléphone et me demande si je peux lui apporter un autre paquet.
-Pourquoi ? je demande
-Je te dirai quand tu viendras, répond-il
Le même soir, je rentre a la maison avec un second paquet en main et lui demande des explications. Il me dit qu’il les vend a ses copains de classe a 10 cents pièce, mais s’ils achètent 3 unités, il leur fait un prix spécial de 25 cents. Et ca marche. Il a vendu tout le premier paquet et a gagne $8.25.
A ce moment, je lui explique que s’il veut faire du commerce, il doit les acheter, ajouter un profit et les vendre. Donc il doit me payer une partie. A quoi, il répond :
- Non papa. Tu avais l’intention de les jeter, donc ils n’ont pas de valeur a tes yeux.
_ C’es vrai, lui dis-je, donc si tu ne paie rien pour les avoir, tu ne vas faire que du profit.
Et je te félicite pour l’idée de 3 pour 25 cents. Il me dit :
J’ai d’autres idées
Le lendemain, il me rappelle de nouveau au bureau vers la fin de l’après-midi et me dit :
- Papa, j’ai tout vendu. Est-ce-que tu peux m’apporter deux paquets/
Quelques jours passent et il m’annonce qu’il ne veut plus les vendre un par un, ni trois a la fois mais préfère vendre dix ou vingt a la fois en utilisant certains garçons gourmands comme grossistes. Il leur fera un meilleur prix.
A ce moment, je lui dis :
- C’est une bonne nouvelle.
Il me dit qu’il a réalisé qu’il y a beaucoup de papier que les enfants jettent partout et qu’il risque d’avoir des problèmes avec la direction. Il a donc pense embaucher des garçons nettoyeurs qu’il paiera en chewing gum.
Trois semaines après le début de l’opération, je reçois un coup de fil du directeur de l’école voulant me voir. Je m’y attendais.
Il m’explique que mon fils est en train de faire du commerce dans son établissement et que par sa faute il y a des détritus un peu partout.
Je l’entends et lui dit :
-Que voulez-vous monsieur le Directeur ? Il semble que mon fils ait un don d’entrepreneur. A tel point qu’il a des grossistes et des nettoyeurs et je ne peux l’empêcher de se manifester de cette façon la. De plus ses devoirs n’en souffrent pas. Cependant, je reconnais qu’il devra cesser ses opérations.
Ce même soir, a la maison, en tête a tête, je lui annonce que l’opération doit cesser.
Il comprend et me dit :
--Tu as raison papa. D’ailleurs certains garçons m’ont dit que le chewing gum n’était pas très bon. J’ai vendu en tout cinq caisses et me suis fait $133.85.
--Et la je l’assomme avec la chose suivante :
Tu sais mon fils, tu as fait du bon travail mais a l’avenir qui sait si tu ne seras pas tenté, vu ton succès, a faire la même chose avec de la drogue. Et la c’est du sérieux, tu pourras faire de la prison.
Il me répond aussitôt :
- T’en fais pas papa, je ne ferai pas de la drogue.
Comme de fait, plusieurs années plus tard, certains de ses amis de l’époque ont succombe a cette tentation. Mais mon fils n’y a jamais touché. A ce jour.
JACQUES HADIDA