Au fait, où sont passés les réfugiés juifs des pays arabes ?
Par Michèle Mazel
C’est une bien vieille histoire et beaucoup l’ont oubliée : c’est arrivé il y a près de trois quarts de siècle, pensez-donc ! Le 14 mai 1948, David Ben Gourion, déclarant « Le peuple juif a le droit d’avoir son propre pays », proclamait l’indépendance d’Israël. Les Etats Unis reconnurent le nouvel état le soir même, bientôt suivis par de nombreux pays dont l’Iran, celle du Shah bien sûr.
Quelques jours plus tard, les armées de l’Egypte, la Transjordanie, la Syrie, le Liban et même l’Irak envahissaient le jeune état pour le détruire, encourageant les populations arabes locales à fuir pour leur laisser le champ libre et leur promettant qu’elles pourraient revenir une fois la victoire acquise. La victoire n’étant pas au rendez-vous, lorsque les accords de cessez-le-feu furent signés en juillet 1949, près de 700 000 arabes avaient quitté leur foyer pour se réfugier dans les pays voisins, lesquels s’empressèrent de les cantonner dans des camps.
Frustrés et humiliés de l’échec infligé par un état juif, les pays arabes se vengèrent sur leurs citoyens juifs, pourtant installés sur leur sol depuis des siècles. Pogroms, massacres, torture, emprisonnement et spoliation suivirent, forçant quelques 850 000 juifs à prendre le chemin de l’exil, n’emportant souvent que les vêtements qu’ils avaient sur leur dos.
Certains sont venus chercher refuge en Israël, qui ployait déjà sous l’afflux des rescapés de la Shoah des Juifs d’Europe. D’autres partirent chercher leur chance sous d’autres cieux. Qui s’en souvient ? Aujourd’hui, c’est en vain qu’on les chercherait dans quelque camp de réfugiés. Contraints d’apprendre des langues nouvelles et de s’adapter à de nouvelles sociétés, ils se sont reconstruits avec l’aide de l’Etat d’Israël pour ceux qui étaient venus s’y établir, ou des communautés juives locales dans leurs pays d’accueil, gardant au cœur le douloureux souvenir du pays qui les avait rejetés et qui les avait dépouillés de leurs biens.
Et les Palestiniens, direz-vous ? Eux qui avaient cherché secours chez des voisins dont ils partagent la langue, l’histoire, la religion et souvent des liens familiaux ?
Ceux-là ils sont bien visibles. Ils ont bénéficié de la sollicitude des Nations Unies, qui a créé pour eux L’UNWRA, Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, en 1950. Grâce aux soins qui leur ont été prodigués, et aux centaines de milliards de dollars versés par la communauté internationale, ils seraient aujourd’hui plus de cinq millions. Il faut dire que le terme de réfugiés palestiniens a été étendu aux enfants et petits-enfants des réfugiés d’origine ainsi que, nous dit l’organisation sur son site, à ceux qui ont été adoptés par ces derniers. Paradoxalement ce chiffre étonnant et qui prête à forte caution montre l’étendue de l’échec de l’UNWRA. Soixante-dix ans après sa création, et en dépit des sommes fabuleuses destinées à leur réhabilitation et insertion, plus d’un tiers des réfugiés vivraient toujours dans des camps situés dans les pays arabes frères et limitrophes qui n’ont pas su, pu ou voulu les intégrer. Les autres sont toujours dépendants de cet organisme.
Quant aux réfugiés Juifs des pays arabes, c’est en vain qu’ils réclament reconnaissance et compensation. Cette année, Israël s’adresse une nouvelle fois aux Nations Unies pour que leur voix soit entendue. On voudrait croire que l’Assemblée Générale de cette auguste institution leur rendra enfin justice.
Par ©Michèle Mazel