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MON MEILLEUR AMI, par Jacques Hadida

J'imagine que vous pensez que je vais vous parler de cet ami que j'ai depuis plus de vingt et avec qui je passe le meilleur de mon temps. Ou que je vais parler de cet ami d'enfance , avec qui j'ai grandi. Ou de ce collègue du bureau qui ne cesse de m'inviter chez lui pour prendre un verre.

 Eh bien non.
 Il s'agit de mon ami LE LIVRE.

 Eh oui, c'est de lui qu'il s'agit. Car qui de plus honnête, fiable, respectueux qu'un livre. Il faut dire qu'un ami parfois vous laisse tomber mais pas le livre.
Et je peux confirmer cela avec ce mot d'Amos Oz qui a dit à sa façon qu'avec le temps les livres peuvent changer au moins autant que les humains, avec cette différence que les hommes te plaquent tôt ou tard, dès qu'ils ne trouvent plus en toi de profit, de plaisir, d'intérêt ou de sentiment, tandis que les livres ne te laissent jamais tomber.

Il reste que comme Oz, j'ai  grandi entre les livres en me faisant des amis invisibles dans les pages qui tombaient en poussière et dont  je porte encore l'odeur sur les mains. Aussi quand nous sommes dans le noir, quoi de mieux que de lire un livre pour voir un autre monde, pour échapper au quotidien parfois si cruel? Et dire que j'avais appris dans les livres que l'amour, comme la maladie, empêche de manger et de dormir.

Au fait, qu'est-ce qu'un livre sinon un assemblage de feuilles imprimées formant un volume. Oui, il y a de bons livres et de mauvais livres. Il y a des livres d'images, de poésie, de grammaire. Il a un livre de messe ainsi qu'un livre saint. S'il n'y avait pas de livres, comment aurions nous connu La Fontaine et ses fables?

Et dire qu'à travers les âges, des livres ont été brûlés car ils offensaient une certaine classe d'individus. C'était le cas plus précisément du Talmud, ce livre plein de sagesse que la religion juive a produit. Le livre devient ainsi le lieu on l'on consigne des renseignements, qu'ils soient légaux ou commerciaux. On dit bien que tout ce qui vient des livres est un savoir livresque. Enfin, chaque musée à son livre d'or, n'est-ce pas?

Pour nommer Platon, les livres donnent une âme à l'univers, des ailes à l'esprit, un vol vers l'imagination et enfin une vie à tout. Et l' Ecclésiaste  a confirmé qu'à faire plusieurs livres, il n'y a pas de fin et que beaucoup d'études est une lassitude de la chair.
Un mot fameux de ce cher Umberto Éco me revient : Un livre est comme une cuillère, des ciseaux, un marteau, la roue. Une fois inventé, il ne peut être amélioré.

Ce livre donc, je le promène avec moi où que j'aille, il est fidèle et me suis partout. J'ai cette drôle habitude de souligner les passages qui me plaisent, d'écrire sur les côtés mes réflexions, d'encercler le mot que je ne connais pas pour aller plus tard découvrir sa signification. Ce livre parfois devient mon confident, car, oui, j'y insère mes propres sentiments. Il les conserve et les protège. Il arrive même que quand tout va mal, le livre devient mon exutoire.

Enfin, le livre n'est pas jaloux. Et souvent avant de l'avoir fini, je le nets de côté et en prend un autre et un peu plus tard un autre encore . Oui, je lis plusieurs livres à la fois, des fois en fonction de l'humeur, je préfère l'un à l'autre. Et vu que je les respecte tous, je reviens à eux et ne les abandonne pas.

Il me reste comme à plusieurs d'entre nous ce souvenir d'enfance, quand nos parents venaient nous lire avant de nous endormir. Nous ne comprenions pas tout, mais le fait de voir ce livre dans les mains de notre parent qui faisait de son mieux pour nous satisfaire, eh bien, ce livre était déjà mon ami.

Jacques HADIDA

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