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Jérusalem : la vive colère des Églises chrétiennes

Jérusalem : la vive colère des Églises chrétiennes

VIDÉO. Les chefs des 13 Églises de Terre sainte ont décidé de fermer le Saint-Sépulcre au public pour protester contre les taxes imposées par le maire de Jérusalem.

DE NOTRE CORRESPONDANTE À JÉRUSALEM, DANIÈLE KRIEGEL | Le Point.fr

Depuis dimanche, dans la vieille ville de Jérusalem, pèlerins et touristes trouvent porte close lorsqu'ils veulent visiter le principal lieu saint chrétien, le Saint-Sépulcre. Une décision prise par les chefs des 13 Églises de Terre sainte, et annoncée solennellement sur le parvis de la basilique par le patriarche grec orthodoxe Théophilos, le custode de Terre sainte, frère Francesco Patton et un représentant du patriarche arménien apostolique, Nourhan Manougnian.

À l'origine de leur colère, la décision du maire de Jérusalem d'imposer TVA et taxes municipales sur leurs biens, à l'exception des lieux de cultes et de prière. Le bras de fer dure depuis près d'un an. Déjà, à la mi-février, une déclaration commune avait été signée par les 13 responsables chrétiens qui qualifiaient la décision de Nir Barkat – le maire de Jérusalem – « contraire aux accords en vigueur depuis des siècles ». Une réaction qui n'a eu aucun effet, sinon de raidir encore un peu plus la position de la partie israélienne. Non seulement Nir Barkat n'a pas reculé, mais, pour mieux montrer sa détermination, il a fait geler plusieurs comptes en banque appartenant aux Églises. Ce qui, disent les leaders chrétiens, les empêche de facto de poursuivre leurs missions, de l'accueil des pèlerins au fonctionnement de leurs écoles.

La facture des mesures fiscales se monterait à 650 millions de shekels, soit près de 140 millions d'euros. Et les chefs des Églises chrétiennes n'ont pas l'intention de payer. Pour eux, « ces actions violent les accords existants et les obligations internationales qui garantissent les droits et les privilèges des Églises, dans ce qui semble être une tentative d'affaiblir la présence chrétienne à Jérusalem ». Et ils rappellent qu'Israël, lors de la conquête de la vieille ville de Jérusalem et de la Cisjordanie, en juin 1967, avait décidé de maintenir le statu quo en vigueur à l'époque où la région était sous souveraineté jordanienne.

« Projet discriminatoire et raciste »

Mais leur inquiétude et leur colère ne s'arrêtent pas là. Il y a aussi, et peut-être surtout, cette proposition de loi déposée à la Knesset, le Parlement israélien, par une députée appartenant à la coalition gouvernementale. Si elle était entérinée, cette loi autoriserait l'État à saisir des terres situées dans plusieurs quartiers de Jérusalem-Ouest. Des terrains que, depuis 2010, des églises avaient vendus à des promoteurs immobiliers israéliens, alors qu'à l'origine, ils avaient été loués au Fonds national juif par bail de 99 ans. Il s'agit de 450 hectares dans les quartiers les plus riches de la ville.

Certains des 1 500 propriétaires d'appartement ont découvert qu'ils vivaient sur des terrains vendus en secret à des sociétés immobilières privées, alors que de nombreux baux expirent dans 17 ans. Les habitants de ces appartements craignent d'être obligés de partir ou de racheter à des prix excessifs leurs logements. La députée instigatrice de la proposition de loi, qui a le soutien du ministère de la Justice, entend autoriser l'État à annuler les ventes déjà réalisées et à saisir ainsi les terrains concernés. « Inadmissible ! » s'écrient d'une seule voix les Églises, tout en expliquant : « Il s'agit d'un projet discriminatoire et raciste qui vise uniquement les propriétés chrétiennes en Terre sainte. » Et d'ajouter sans faire dans la nuance : « Cela nous rappelle toutes les lois de même nature qui ont été adoptées contre les juifs pendant les périodes sombres en Europe. »

Le ton devient donc de plus en plus vif. Et le Saint-Sépulcre sera fermé jusqu'à nouvel ordre. Ce qui n'est peut-être qu'un début. Il serait question de fermer également la basilique de l'Annonciation à Nazareth. Les premiers à pâtir de cette situation sont bien sûr les touristes et les pèlerins. Ce qui fait dire à Marie-Armelle Beaulieu, rédactrice en chef de Terre sainte Magazine : « À défaut de payer des taxes dont elles sont exemptées depuis des siècles, les Églises pèsent lourd en faveur de l'économie israélienne, puisque la moitié des pèlerins sont chrétiens. » Il y a peu, Israël a annoncé, en se frottant les mains, avoir franchi fin 2017 la barre des 3,5 millions de touristes.

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