Casablanca : Le piano à 3 millions de dollars
L’accessoire du film « Casablanca » a été cédé lors d’une vente aux enchères à New York. Un prix exorbitant pour un instrument entré dans la légende.
« Play it, Sam. Play “As Time Goes By ” ». Cette supplique adressée à Dooley Wilson par Ingrid Bergman dans Casablanca est une réplique mythique du cinéma hollywoodien. Au centre de la scène, un piano. Le fameux Sam, à son corps défendant, y joue la chanson, sur laquelle l’héroïne, Ilsa Lund (Ingrid Bergman, donc), et Rick (Humphrey Bogart) se sont aimés. L’accessoire fait, lui aussi, désormais définitivement partie de la légende : il a atteint, lundi 24 novembre, le prix astronomique de 2,9 millions de dollars (2,3 millions d’euros, hors frais), lors d’une vente aux enchères à New York. Quelques centaines de milliers de dollars de plus qu’une autre pièce mythique : le costume du lion porté par Bert Lahr dans Le Magicien d’Oz, vendu, lui, 2,6 millions de dollars.
Ce piano, qu’on découvre – le film étant en noir et blanc – peint avec des motifs marocains verts sur un fond orangé était cédé par un dentiste de Los Angeles, Gary Milan. Le collectionneur a même possédé un temps l’autre piano du film, qui apparaît dans une scène de flash-back censée se situer à Paris au café « La Belle Aurore », lorsque les deux amoureux se rencontrent. Mais il avait préféré le revendre en 1988 pour 154 000 dollars. « Je me sens égoïste, personne ne devrait avoir les deux pianos de Casablanca », avait-il expliqué à l’époque auLos Angeles Times. Celui-ci avait été ensuite revendu en 2012 pour un peu plus de 600 000 dollars.
Mais contrairement à l’instrument qu’on aperçoit dans le flash-back, celui qui était proposé à New York par la maison de ventes aux enchères Bonhams, occupe une place particulière dans le film. C’est à l’intérieur que Rick cache les laissez-passer, qui permettront à l’héroïne ainsi qu’à son mari, Victor Laszlo (Paul Henreid) d’échapper aux nazis.
Pas joué dans le film
Le piano a probablement été fabriqué en 1927 par First National Pictures. Ce studio a fusionné cette année-là avec Warner Brothers, la société de production de Casablanca, qui obtint en 1944, deux après son avant-première à New York, l’Oscar du meilleur film, du meilleur réalisateur et du meilleur scénario. Ce « piano café », qui est composé d’un clavier raccourci à 58 touches (au lieu de 88), avait été transformé pour les besoins du film : une charnière fut incluse pour permettre de soulever le dessus par l’arrière et d’y cacher les documents, symboles de liberté. Eux aussi étaient proposés à la vente et sont partis à plus de 118 000 dollars.
Le prix atteint par le piano tient d’autant plus de l’irrationnel qu’il n’est pas joué dans le film. Dans les quelques scènes où il apparaît, Dooley Wilson, qui était batteur, fait semblant de pianoter. Quelqu’un d’autre interprète le célèbre air composé par Herman Hupfeld, alors que le jazzman se met à chanter : « You must remember this, a kiss is just a kiss. A sigh is just a sigh » (tu dois te souvenir de cela, un baiser est juste un baiser. Un soupir est juste un soupir). Mais ce piano-là n’est pas juste un piano.
Stéphane Lauer (New York, correspondant)
Correspondant à New York
La séquence où on voit le piano en noir et blanc (pendant les 5 premières secondes).
https://www.youtube.com/watch?v=kc02Y4xHWys
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