Gagner le cœur des hommes[Analyse]
Par Sandra Ores ©Metula News Agency
Je ne me plains pas. J’ai une vie trépidante, j’apprécie mon boulot de reporter-journaliste à la Ména et je sais que beaucoup de gens aimeraient être à ma place. Mais poser le pied en Syrie, le dos vouté sous les appareils de photo, pour prendre des images de bombardements, partager son temps entre mettre le nez à la fenêtre pour voir si le Hezbollah bouge et me renseigner tous azimuts pour savoir si la guerre d’Iran a commencé, ne me laisse pas beaucoup de temps pour penser à moi.
Dans ce monde qui a changé, qui s’est désinhibé, grâce notamment à Internet, dans lequel les femmes ont acquis l’audace amoureuse des garçons, les relations courtes se multiplient et les relations longues sont de plus en plus rares et de plus en plus courtes.
Je pense à mes amies dans leur petit studio d’une capitale européenne, qui se repassent en boucle, dans leur tête, les paroles de Patricia Kaas "Les hommes qui passent, maman, qu’est-ce que j’aimerais en voler un pour un mois pour un an".
L’activité intense à la frontière du Liban ne me laisse pas le loisir d’écouter des variétés, pas même in petto ; il n’empêche, qu’aujourd’hui, mon papier ne traitera ni de stratégie, ni des minorités passionnantes de la région, mais de la question que se posent une foultitude de jeunes femmes : comment retenir un homme ?
Cette approche intimiste différente des thèmes que j’aborde d’ordinaire intéressera les femmes, et, accessoirement, elle devrait également concerner les hommes. Car désormais, grâce à la facilité qu’il y a à faire des rencontres, on peut légitimement se demander si la vie en couple est bien l’avenir des êtres humains, comme faire des bébés, ou s’il est préférable, jusqu’à très tard, de considérer les relations à l’autre sexe comme un divertissement ?
Voilà, mes chères sœurs, je partage avec vous, ce lundi, les enseignements que j’ai réussi à mettre de côté jusqu’à présent.
***
Cet homme-là me plaît. Lorsqu’il parle, c’est autant ses paroles, que le mouvement de ses lèvres, qui séduisent mon esprit et mes sens.
La vie sachant parfois se montrer clémente, voici que j’ai de la chance. En effet, l’homme en question ne semble pas indifférent à mes charmes ; je ne le connais pas encore très bien, mais je l’ai décelé dans son regard…
Excitantes perspectives à l’horizon ! Aucun indice tangible ne me permet toutefois de saisir l’intensité de son attention à mon égard, non plus que la profondeur de son intérêt.
De mon côté, je suis mon propre agenda : j’aimerais accrocher son cœur ; et qu’il devienne, pour un temps, ou un peu plus, mon homme, mon ami, mon amour.
A moi donc de faire en sorte que cette étincelle devienne une jolie histoire et prenne la bonne direction - enfin, la direction que je souhaite, celle d’une relation romantique.
Si j’en décidais, tout pourrait se passer très vite, et, ce soir, nous pourrions déjà être unis dans une intimité nue. Mais… et après ? Pas sûr que je parviendrai à le retenir une autre nuit, sa curiosité de chasseur est susceptible de s’envoler avec les derniers soupirs matinaux.
Alors, cette rencontre de nos corps, le pendant de l’amour, et l’aventure qui le différencie de l’amitié - quand ?
A un moment situé quelque part entre maintenant et… pas maintenant ! Plus tard donc - lorsque nous serons raides amoureux ? Ou fous d’attirance l’un pour l’autre ? C’est quand on le sent ! Pas très précis comme réponse, j’en conviens. En possédez-vous une autre plus explicite ?
Cette question alimente autant les colonnes des magazines féminins nazes et les blogs Internet que les discussions informelles entre ami(e)s. Les conseils foisonnent ; pourtant, nombre de jeunes filles, et aussi de femmes mûres, ont l’impression de se tromper de timing lorsque leur Don Juan s’en repart gaiement, laissant derrière lui le téléphone muet encore fumant.
Je vais donc tenter, à mon tour, en me glissant dans la peau d’un vieux sage, une solution en deux volets.
Pour le bonheur des femmes ! Messieurs, c’est sans vous oublier non plus, car les femmes épanouies concourent à la félicité de l’humanité, donc à la vôtre également !
Premier élément clé : le désir.
Aux femmes de s’arranger afin de transformer l’envie, potentiellement éphémère et légère, en un vaste désir capable de déplacer les montagnes (entre autres). De l’entretenir, et, surtout, de le faire grandir, jusqu’au point où il devient assez fort pour persister au delà du stade de l’extase charnelle. Jusqu’à ce que le sentiment masculin s’attache à la personne féminine dans sa globalité, davantage qu’à son enveloppe superficielle.
Le désir, un état indéfini entre le oui et le non, un flottement d’excitation éveillant les sens. Un univers parsemé de trouble, celui de l’espérance non encore réalisée, et de certitudes, comme celle de vivre dans une perpétuelle aspiration.
En approchant l’inconnu, en l’imaginant avec de plus en plus de détails, happé dans une mélodie enivrante.
Paradoxalement, le maintien d’une distance impalpable – au moins cinquante centimètres - mène à l’édification d’un rapprochement durable, lorsque les deux acteurs s’appliquent à la réduire. Ce faisant, en chemin, en cherchant à s’apprivoiser, ils dévoilent leur personnalité, faisant appel à la créativité, la subtilité, l’imagination, l’humour - le plaisir de se découvrir, et de s’amuser. Ensemble.
Charmant, le baiser donné à la dérobée à la fin d’un premier rendez-vous galant, attisant la curiosité sur des échanges futurs. On se laisse, domestiqué par l’autre, dans une cadence partagée. N’est-ce pas excitant de suggérer, grâce à des regards et à des mots, la rencontre des passions ?
Déballer la "marchandise" avant l’heure, ça coupe le rythme… Quelqu’un a tapé trop fort sur le manche de la contrebasse, perdant la mesure, par une coupable impatience, de l’inflexible délai. Générant la résonance comme un violon grinçant, qui pourrait prendre des allures de glas !
Le deuxième élément clé de ma réponse réside dans l’estime que la femme possède d’elle-même, et qui doit être suffisante afin de concéder à l’homme ce dont il a besoin, lui et son esprit martial et son hérédité de bandit de grand chemin : la conquête.
En échange de cette reddition volontaire, on ressentira peut-être ce que chacune de nous adore : se sentir la personne élue, pour sa personnalité, sa valeur, sa bravoure. Choisie parmi la foule.
Certaines femmes commettent l’erreur de s’imaginer très vite se trouver éblouies face à l’amour, le grand, le vrai (évidemment). Cherchant trop ardemment à s’épancher sur l’épaule d’un mâle, ces minettes fragiles, et aussi naïves, s’offrent trop vite toutes entières, se rendant dépendantes de son affection. Ne rêvaient-elles pas juste d’un homme, et non de celui-ci en particulier ?
Par ailleurs, la conquête ne se limite certainement pas à l’aspect sexuel. De nos jours, une femme ne perd pas de sa respectabilité si elle couche avec un homme qu’elle connaît à peine, pour autant qu’elle l’ait décidé froidement pour assouvir son désir ; pour peu qu’elle parvienne à dissocier - usant de la capacité que l’on prête habituellement aux hommes -, le sexe des sentiments ! Car ce n’est sûrement pas en proposant sa fleur quand ils ne l’ont pas demandée que l’on gagne le cœur des hommes. Attention à ne pas confondre les ardeurs, à ne pas la jouer plus femme fatale que l’on est capable de l’assumer, car c’est là l’assurance la plus directe de lendemains qui déchantent !
Gagner le cœur d’un homme… Dans un désir et une élection mutuelle ? Le temps de jouir de plaisir est enfin avenu. Les femmes authentiques disposent de la réputation d’être dotées de finesse, voici l’occasion d’exercer cette qualité afin de guider la séduction jusqu’à ce moment. Un instant qui ne prévient pas, et qui comprend intrinsèquement le risque d’avoir mal évalué la situation.
Mais qu’importe ! La liberté et le plaisir ont un prix, et les hommes apprécient aussi celles qui savent s’exposer émotionnellement, aussi bien que les situations dans lesquelles tout n’est pas prévu d’avance.
Un moment qui ne représente pas une fin en soi, mais un début dans la relation. A ce stade, il n’est plus possible de se cacher sous un masque (ça se verrait), la personnalité éclate dans sa spontanéité.
Autant durant les préludes de la séduction que dans le coït, la femme ne peut plus se cantonner dans la passivité. A sa manière de femme, elle est active dans l’amour, participe, bouge, danse, donnant son plaisir comme elle le reçoit, sans mesurer, sans attendre et sans compter.
Car, au final, il s’agit d’une rencontre entre deux êtres humains, avec ce qu’elle comporte d’attention, de sensibilité et d’échange, et, si la chance se mêle de la partie, d’amour ! N’est-ce pas ce à quoi nous aspirons tous ? Ce dont nous désirions parler, non ?
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