C’est un des fleurons de l’Etat hébreu. Deux photographes ont exploré cette industrie qui a pris une importance considérable dans les nouvelles formes de guerre.
Parfois, la générosité produit des bourdes redoutables. Début novembre 2016, le ministre de l’agriculture israélien, Uri Ariel, a fait les honneurs de l’institut de recherche Volcani, au centre du pays, à Dmitri Medvedev. Tout à sa joie après la signature d’un accord de coopération, il a offert au premier ministre russe un bijou de technologie à 50 000 dollars, un petit hélicoptère sans pilote, qui se trouvait sur place. Un drone. La caméra thermique et l’équipement de commande à distance n’étaient pas compris dans le cadeau, mais l’affaire a fait scandale.
Des engins mis à l’épreuve du combat
En Israël, on ne plaisante pas avec l’un des joyaux technologiques du pays, dont l’exportation est soigneusement encadrée et l’usage militaire nimbé de secrets. L’État hébreu fait figure de pionnier dans ce secteur, qui a pris une importance considérable ces dernières années dans les nouvelles formes de la guerre. Les drones sont aussi utilisés à des fins civiles. L’un des projets actuels en Israël consiste à créer un drone-ambulance destiné à l’évacuation des blessés.
Les photographes Daniel Tepper et Vittoria Mentasti ont séjourné pendant plusieurs semaines, l’an passé, dans la bande de Gaza, afin d’interroger des survivants d’attaques de drones. Une arme sans pilote, furtive, qui nourrit les fantasmes… Ici, une capture d’écran du logiciel permettant au drone de détecter les mouvements et les silhouettes humaines.
VITTORIA MENTASTI ET DANIEL TEPPER
Mais ce n’est pas cet aspect-là qui a retenu l’attention des photographes Daniel Tepper, 33 ans, et Vittoria Mentasti, 30 ans. Après l’opération « Bordure protectrice » dans la bande de Gaza, à l’été 2014, qui a fait près de 2 200 victimes chez les Palestiniens, les deux journalistes ont voulu se pencher sur l’aspect technologique de cette arme moderne. En octobre 2014, ils se sont rendus à un salon du secteur, y ont rencontré les représentants de plusieurs sociétés privées spécialisées. « Israël a la réputation d’être une force innovante pour les drones, aussi bien pour la surveillance électronique que les assassinats ciblés. Les engins israéliens sont réputés car ils ont été mis à l’épreuve du combat, depuis la première guerre au Liban au début des années 1980, explique Daniel Tepper. Mais en se concentrant seulement sur la technologie, on a compris qu’on n’avait que la moitié de l’histoire. »
« LES GENS PENSENT QUE CETTE ARME EST TRÈS PRÉCISE. C’EST VRAI, MAIS ELLE PEUT AUSSI DÉPASSER SA CIBLE. » DANIEL TEPPER
En 2016, Daniel Tepper et Vittoria Mentasti ont alors décidé de séjourner pendant plusieurs semaines dans la bande de Gaza, afin d’interroger des survivants d’attaques de drones. « Les gens pensent que cette arme est très précise. C’est vrai, dit Daniel Tepper, mais elle peut aussi dépasser sa cible. Les Palestiniens la perçoivent comme un instrument de la terreur israélienne, de la même façon que les Israéliens perçoivent les roquettes du Hamas. »
On ne peut pas toujours certifier à 100 % si une frappe a été causée par un drone ou pas. Et cela nourrit les fantasmes sur cette arme sans pilote, furtive, parfois repérée dans le ciel. Pour illustrer ces propos, les photographes ont demandé à des Palestiniens ayant réchappé aux attaques de drones de reproduire une scène ou une émotion qu’ils ont vécue à cet instant. On voit ainsi, sur l’un des clichés, un père enlacer son fils dans un geste de protection dérisoire. Depuis des années, le Hamas développe lui aussi un programme clandestin de drones. Mais, dans ce domaine, leur goût du secret rivalise avec celui de l’armée israélienne.
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