LE FRANÇAIS JUIF, ERIC ZEMMOUR – Par Gabriel Banon
Pour BHL, Zemmour est un traître à l’identité juive, pour Zemmour, BHL est un traître à la nation française. On regrettera que, dans cette montée aux extrêmes, ils ne parviennent pas vraiment à faire de leur conflit la source d’une recherche fructueuse sur ce que doit être aujourd’hui un citoyen français.
Par Gabriel BANON
Jusqu’à aujourd’hui, je me refusais à participer à un débat, débat tronqué, sur celui qui fut presque candidat, et aujourd’hui candidat à la magistrature suprême de la France, Eric Zemmour. Et ce jusqu’au jour où Bernard-Henri Levy posa le problème dans un domaine où, jusque-là, personne ne s’y était aventuré : la judaïté d’Eric Zemmour.
En attaquant le candidat, BHL développe une idée du juif, loin de celle défendue par Eric Zemmour, deux visions diamétralement opposées. Pour BHL, la priorité semble être le statut religieux, pour Eric Zemmour, l’appartenance nationale prime. En réalité BHL revient à un débat que je croyais clos il y a belle lurette, l’assimilation, jusqu’où ? Juif, c’est une religion ou une appartenance à un peuple ? Fondamentale question qui a divisé il y a des décennies nombre de communautés, dites israélites.
Non, Eric Zemmour n’est pas un traitre à l’identité juive (dixit BHL) il est un débateur qui pousse le raisonnement jusqu’à l’absurde. Pour la majorité des juifs de la « diaspora », juif est une religion qui suit les préceptes édictés par Moïse. Ils sont français de France, canadiens du canada, marocains du Maroc etc. Ils assument les devoirs et droits que leur concède la Patrie. On peut dire, sans risque de se tromper, ils sont juifs français autant que les catholiques français, ou juifs marocains autant que les musulmans marocains.
Pour Eric Zemmour, donner la priorité à sa judaïté, c’est être traite à la Nation. BHL l’est-il vraiment ? Je ne le pense pas. Mais comme les catholiques, ou les musulmans, il reste attaché à son « Église ». Éric Zemmour est juif, personne, à commencer par le principal concerné, ne prétendra le contraire.
Le problème avec Eric Zemmour est qu’il traite des véritables problèmes avec une radicalité qui devient criminelle. Mais que penser de cette évidence factuelle ? Je suis d’accord avec Eric Zemmour lorsqu’il déclare qu’il ne veut pas que l’on « l’assigne à résidence ethnique et religieuse ». Son approche est partagée par la majorité des juifs : on est citoyen français, avant d’être juif. Mais là où il déraille, c’est quand il prétend vouloir sauver la nation française « en danger de mort », en rejetant une partie de cette Nation. C’est du racisme ethnique et religieux.
Bernard-Henri Lévy appelle les juifs français à ne pas trahir leur ADN culturel, mais, à ma connaissance, un français est d’abord de culture française, tout comme BHL lui-même. Au nom de cette idée, Lévy implore les juifs français de résister à la tentation Zemmour qu’il décrit comme un hubris nationaliste et raciste, fait de cruauté et de renoncement à l’humanité et à la générosité juives. BHL sait-il qu’il n’existe pas un vote juif, les juifs de France sont multiples dans leurs options politiques.
Éric Zemmour place le débat ailleurs. Il se refuse à parler de ce qui est juif et de ce qui ne l’est pas. Or, poursuit le candidat déclaré, avant d’être juif, il se « considère comme un citoyen français » et en tant que tel, « juif ou non », il entend « sauver le peuple français qui est en danger de mort ». Cet échange est fascinant car les deux protagonistes sont irréconciliablement et paradoxalement divisés par leurs appartenances communes – juifs et français. Pour BHL, Zemmour est un traître à l’identité juive, pour Zemmour, BHL est un traître à la nation française. On regrettera que, dans cette montée aux extrêmes, ils ne parviennent pas vraiment à faire de leur conflit la source d’une recherche fructueuse sur ce que doit être aujourd’hui un citoyen français.
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