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Le grand avenir des gilets jaunes

Le grand avenir des gilets jaunes (info # 010812/18) [Analyse]

Par Claude Berger © Metula News Agency

 

Il a suffi d’une taxe sur les carburants glissée sous le masque d’une intention écologique pour que la coupe trop pleine déborde. Trop, c’était trop. Alors, la révolte spontanée des gilets jaunes contre l’arbitraire de cette décision a ouvert la voie à l’expression de multiples revendications, toutes nées du mal-être ressenti par une majorité de la population. La révolte populaire, soutenue par plus de 80% des Français, désigne la baisse du pouvoir d’achat, la fiscalité injuste, la marginalisation par abandon des zones rurales et périphériques, la non-représentativité de la classe politique aveugle sur la crise sociétale que connaît le pays et, également, l’arbitraire du pouvoir d’Etat qui s’exerce sur le peuple, la complaisance vis-à-vis des flux migratoires qui renforcent la dépense publique, et la concurrence des mains d’œuvre sur le marché du travail, sans jamais rencontrer d’opposition des grands employeurs ou des maîtres de la finance. Alors oui, il s’agit d’une révolte « contre le système » en crise et contre ses présidents récents de si peu d’envergure.

 

Mais de quel système s’agit-il ? Or là, force est de constater que droite et gauche entretiennent ensemble une omerta sur ce qui fait le fondement de nos sociétés, à savoir le salariat ; c’est-à-dire la transformation du travail en marchandise concurrentielle qui conditionne la recherche permanente de mains d’œuvre moins chères, le chacun pour soi des salariés et la citoyenneté désolidarisée, qui pérennise leur concurrence sur le plan sociétal au profit de l’Etat.

 

Or ce système, né selon Fernand Braudel au XIVème siècle et qui résulte de l’appropriation du travail par les marchands, ce système est à bout de souffle. La revendication contre l’exploitation a poussé le capital à rechercher des mains d’œuvre moins chères et la mondialisation du marché du travail qui suit verse des millions d’individus en surnombre sur ce marché.

 

Les autres recours face à la revendication, outre l’importation de mains d’œuvre concurrentielles, sont les suivants : l’exportation des fabriques, l’innovation permanente, la course à la croissance, l’automation, la course à la technologie et à la science pour diminuer la part du travail rémunéré dans le même temps où le capital se met en recherche de travail salarié ; et enfin, la marchandisation de toutes les activités humaines, culturelles, sexuelles, affectives, suivie d’une déperdition culturelle et de l’absence de chemin de vie rassurant pour le pays France en voie de dissolution par une Europe pas mieux lotie et exposée à l’islamisme…

 

Fin de parcours pour ce système, c’est la révolte populaire au grand jour et la découverte que droite et gauche ont entretenu la même omerta, et, pire que la gauche, par la réduction du rapport du capital au travail à la seule exploitation et par là, la réduction du rapport de la gauche à la droite à la seule revendication dans l’ignorance de la marchandisation du travail, est le meilleur agent de la fuite en avant du capitalisme. Droite et gauche même combat ?

 

Fin de parcours pour ce système, ladite crise migratoire n’est que l’un des signes de la crise du salariat.

 

Un certain Marx, lui aussi victime d’une omerta par la gauche lassalienne, une omerta qui l’emportera jusqu’à nos jours et qui commence à durer, le disait déjà en 1881 : « Tous ces « socialistes » ont un point commun, ils laissent subsister le travail salarié… Tout cela n’est qu’une tentative maquillée en socialisme pour sauver la domination capitaliste ». Ailleurs il déclarait : « Le capitalisme et le salariat sont liés l’un à l’autre et disparaitront ensemble, il est donc absurde de parler de capitalisme sans salariat ».

 

Cette gauche absurde dénoncée par Marx n’a été capable que de revendication et d’étatisation, donc de capitalisme d’Etat et de salariat d’Etat, pire que le salariat privé et assorti à l’Est de dictature et de répression de masse tout en se prétendant « marxiste ». On notera que Marx dénonçait déjà les « marxistes » tout en rendant hommage à Turgot, qui sous Louis XVI avait déjà compris l’essence du salariat. La même gauche obscurantiste avait aussi, décidément, censuré l’antisémitisme des pères fondateurs de la gauche, dont celui de Marx, et ses effets sur leurs propres théories.

 

Aujourd’hui la révolte gronde et ne se reconnaît pas dans les partis. Est-il possible de sortir de la marche folle d’une société fondée sur le salariat et le chacun pour soi ? L’invention d’une société non salariale solidaire et associative émanant du peuple reprenant pied dans les campagnes est-elle possible ?

 

Au niveau des structures, l’invention des kibboutz et leur pérennisation malgré la crise qui les a affectés a prouvé que des communautés non salariales étaient de l’ordre du possible. Les nouveaux kibboutz urbains, structures souples de communautés d’existence ou de production en ville, qui corrigent les défauts des kibboutz des campagnes et leur aspect « village clos » le prouvent à nouveau.

 

Ils peuvent être immédiatement réinventés en Afrique pour contrer l’intégration des pays du Sud-Sahara dans le moule du marché du travail et de la migration. Enfin, la révolution des œillets du 25 avril 1974 à Lisbonne a montré l’exemple d’un mouvement apartidaire, sans violence, en mesure de n’être pas seulement « contre » le système mais de manifester ce dont pourquoi il était « pour », avant d’être repris en mains par les idéologues de gauche, pressés d’en finir avec ce peuple qui osait !

 

Une société associative libérée du marché du travail et de la verticalité de l’Etat qui l’accompagne, tel peut être l’horizon d’un mouvement populaire et apartidaire aujourd’hui.

 

Quant à l’écologie, elle ne peut résulter d’une mesure d’Etat qui ne change rien au mode de développement d’une société reposant sur la marchandisation du travail et des productions avec toutes ses conséquences. Une société associative fondée sur la solidarité, l’entraide et le changement des mentalités au profit d’une éthique collective peut seule relever le défi. Les gilets jaunes ont donc un grand avenir.

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