Où en est le « jihad » en Turquie et en Iran ?
Par Albert Soued, écrivain http://symbole.chez.com pour www.nuitdorient.com  Dernier livre d'Albert Soued: Quand le Moyen-Orient verra-t-il la paix ? - Editions de l’Histoire, 2021
Le Coran comprend plusieurs passages relatifs au « jihad », incitant à la guerre, contre les polythéistes de l'Arabie ou les incroyants, notamment 5 versets dans les sourates 8/9/47 ; le verset le plus court est le verset 5 de la sourate 9: « [...] Tuez les incroyants où que vous les trouviez [...].
Depuis 14 siècles d’Islam dans le monde, le « jihad » signifie un effort, une lutte pour parvenir à ses fins. Cette lutte peut-être une lutte sur soi pour s’améliorer, selon les soufis ; mais plus généralement, c’est un combat pour vaincre un ennemi et/ou conquérir un territoire.
Notre analyse concerne la conception du jihad actuel mené par les dirigeants de 2 pays non arabes, la Turquie et l’Iran qui, chacun à sa manière, à travers leur psychisme spécifique, cherchent la prééminence et l’hégémonie.
1. Turquie
Idéologie
En Islam sunnite et selon le Coran, le « jihad », l’effort ou la lutte pour diffuser l’Islam, est permanent. La notion de « paix » ou « salam » n’est que provisoire, le temps de reprendre son souffle et obtenir la reddition de l’autre.
Pendant plusieurs siècles et jusqu’à la fin de la 1ère guerre mondiale, la Turquie était le centre de l’empire ottoman, couvrant le Moyen Orient et une partie de l’Afrique et de l’Europe et représentant le califat musulman sunnite. Ayant pris partie pour l’Allemagne, cet empire s’effondra avec elle et fut remplacé, pendant le demi-siècle qui suivit, par nombre de pays aux frontières artificielles. Kemal Ataturk a créé en Turquie un état laïc, séparant la religion de l’état et cherchant à se rapprocher de l’Occident. Cet état laïc dura près de 80 ans, grâce à la sauvegarde de l’armée, jusqu’à l’arrivée au pouvoir du parti AKP, Parti de la Justice et du Développement. La combinaison d’un vieux gauchisme et d’un nouvel islamisme a permis à l’AKP, de l’emporter aux élections de 2002, battant de vieux partis corrompus et moribonds ; et Recep Erdogan est devenu 1er ministre, après avoir été maire d’Istambul.
Responsable de l’AKP, Erdogan n’avait pas caché ses ambitions : "Grâce à D, je suis un serviteur de la Sharia'h (loi islamique) et nous transformerons nos écoles publiques en madrassas (école coranique)".
Erdogan vient d'une famille observant les rites de l'Islam. Quand il était étudiant, il s'est distingué comme un antisémite, mais aussi comme un anticommuniste. Il récitait publiquement des slogans tels que "les mosquées sont nos baraques, leurs dômes sont nos casques, les minarets nos baïonnettes", défiant l'ordre laïc qui prévalait à l'époque et la Constitution d'Ataturk qui considérait ces propos comme une offense incitant le fanatisme religieux et racial.
Dans leur ascension, l’AKP et Erdogan ont été aidés par un mouvement international né en Turquie, discret et puissant, appelé « Gülen ». Gülen a fondé son enseignement sur la notion soufie de"travail pour le bien commun de l’humanité", totalement opposée au "jihad" violent de la guerre sainte. Le véritable islam doit coopérer avec les autres religions en vue d’assurer la liberté, le progrès matériel et la justice sociale. Gülen Fethullah, le richissime fondateur de ce mouvement, préconise ainsi un Islam de compassion, sans effusion de sang, mais néanmoins dans lequel on a le droit de mentir : "Pour servir Allah, toute méthode, toute voie est acceptable, y compris de mentir au peuple"(1) - Voir www.nuitdorient.com/n1723.htm & www.nuitdorient.com/n1729.htm
Cette Confrérie de Gülen et l’AKP, le Parti de la Justice et du Développement d’Erdogan avaient des objectifs communs : islamiser lentement la Turquie, la débarrasser du kémalisme laïc et s’emparer progressivement de tous les rouages de l’état. Cette alliance a fonctionné pendant 8 ans malgré les excès et les colères, voire la paranoïa d’Erdogan.
Depuis près de 20 ans, Erdogan et l’AKP ont ainsi réussi progressivement à ré-islamiser près de l’ensemble des corps de l’état et à reprendre un « jihad », assimilé en Occident à des « velléités hégémoniques ».
En ce qui concerne les infidèles, la situation peut être résumée par ce dialogue. Erdogan : « La Turquie est musulmane à 99% et c'est avant tout notre religion qui nous relie les uns aux autres ».
Un opposant : « S'il est vrai que la religion de l'islam est le ciment de notre peuple, que sommes-nous censés faire de nos minorités non-musulmanes et des athées ? Va-t-on les exclure de la nation ? »
ErdoÄŸan tente de neutraliser les membres des religions minoritaires comme les « Alévis » en les empêchant de fonctionner, en leur refusant la liberté d'établir et de gérer en toute sécurité leurs propres institutions et lieux de culte. On estime à 15 millions le nombre des Alevis en Turquie. Les communautés juives et chrétiennes sont en voie de disparition.
Moyens politiques
Le mouvement Gülen a permis à Erdogan de gagner les élections législatives et aidé à moderniser le pays en vue de son entrée dans l’Union européenne.
Mais pour parvenir au pouvoir absolu, il fallait qu’Erdogan se débarrasse de son bienfaiteur Gülen et des derniers Kémalistes laïcs qui l’ont traîné dans la boue, dans une accusation d’énorme corruption de sa famille. Pour cela, il s’est assuré la loyauté d’une partie de l’armée par des prébendes et a réussi à accroître le revenu du peuple turc par divers moyens inflationnistes.
En 2016, Erdogan a provoqué un coup d’Etat, qu’il était sûr de faire avorter. Il a mis Gülen le dos au mur en préparant l’extradition de son chef, Fethulla, des Etats-Unis vers la Turquie et une rafle massive de ses militants dans l’armée, la police et les instances judiciaires de l’état. Pour s’en sortir, Gülen n’avait pas d’autre choix qu’un coup d’état, comptant sur la force et l’endoctrinement de ses adeptes. Mais n’ayant pas réussi à éliminer physiquement Erdogan, celui-ci rameuta la rue et le peuple qui lui était favorable et gagna la partie, comme il l’avait comploté.
Résultats sur le plan intérieur
Le gouvernement d’Erdogan est plus préoccupé à installer ses agents et à appliquer son programme religieuxqu’à neutraliser la corruption et relever l’économie !
Pendant plus de 40 ans, l’armée turque a été le fer de lance de l’Occident contre l’agressivité soviétique. En 2008, les généraux turcs ont démissionné en masse, renforçant encore plus le pouvoir de l'homme fort, Erdogan. Le général Kosaner a envoyé un message d'adieu explicite. Il démissionnait, "en protestation contre la longue détention sous caution de 250 généraux, amiraux et officiers, dont 173 sont encore en exercice de leurs fonctions, arrêtés en dehors de toute légalité et de toute justice ou conscience, et accusés de complot, ce qui est une affabulation"- Une nouvelle étape a été franchie par Erdogan vers le pouvoir absolu. Avec le président Abdallah Gul, il a nommé les nouveaux chefs de l'armée. C'était la 1ère fois que des civils nommaient des militaires.
En une vingtaine d'années, après avoir accaparé tous les pouvoirs de l'état successivement – police et services secrets, assemblée, présidence, justice, armée – Erdogan réussit à obtenir un pouvoir absolu. Il ne reste plus à Erdogan qu’à museler ses derniers opposants pour régner dans une sphère de « pré-califat » et obtenir un statut de « président à vie »
En 2012, 850 politiques et dirigeants kurdes, y compris 30 députés au Parlement turc, se sont réunis à Diyarbakir pour déclarer leur autonomie. Quand Erdogan fut au courant, il entra dans une grande fureur, sachant que cela pouvait être le prélude au démantèlement de la Turquie. Parallèlement en Syrie, un comité de liaison kurde a été établi pour réunir tous les partis kurdes du pays, en vue de "l'unité du peuple kurde". Ce comité demanda l'autonomie kurde au sein du régime d'Assad, sinon une fédération syro-kurde. D’une certaine façon, l’insurrection kurde aurait pu conduire à l’effondrement de la Turquie, si elle avait été soutenue de l’extérieur et si elle avait abouti.
La crise économique, la nouvelle crise avec les kurdes, la dérive islamiste et oligarchique de l'AKP, l’ouverture vers la shia’h ont érodé l'influence d’Erdogan notamment auprès des jeunes générations. Sa popularité est tombée de 47% en 2007 à moins du quart de la population aujourd'hui.Aux élections législatives de 2015, l’AKP a perdu la majorité absolue au Parlement.
Lors des élections municipales de mars 2019, l’opposition a remporté les trois plus grandes villes, Istanbul, Ankara et Izmir. Les islamistes turcs ont perdu Istanbul et Ankara pour la première fois depuis leur victoire il y a 25 ans. L'opposition a également remporté de grandes villes méditerranéennes comme Antalya, le premier pôle touristique de Turquie, Adana et Mersin, ainsi que Bolu et KırÅŸehir en Anatolie centrale, une autre première pour l'opposition, de même qu'Artvin à l’est de la mer Noire.
Après une longue période de silence, la contestation politique devant la dégradation des libertés s’est enfin déclenchée. Devant la crise économico-financière, les rassemblements sont devenus fréquents et se sont propagés dans toute la Turquie. Ils attirent de plus en plus de monde et l'on y tient un langage de plus en plus brutal, incitant ouvertement au jihad intérieur.
Résultats sur le plan extérieur
Tout en les insultant, le gouvernement islamiste turc veut tirer le maximum d’avantages de l’Amérique et d’Israël, avant de se retourner contre eux.
Après une trentaine d’années de relations amicales et fructueuses, voilà que le régime d’Erdogan durcit, d’année en année, ses positions anti-israéliennes, jusqu’à se comporter, en 2009, en ennemi déclaré de l’Etat juif. On se rappelle de l’attitude injurieuse d’ErdoÄŸan envers Shimon Peres lors d’un forum à Davos. Erdogan : « Nous, la Turquie et moi-même - tant que je serai aux commandes - ne pourrons jamais avoir une vision positive d'Israël …La réalité est qu'Israël est le pays qui menace la paix dans le monde et au Moyen-Orient »- Plus récemment, Erdogan a répété une insulte devenue habituelle, « comparant Israël aux nazis » ou «révélant qu’un complot mondial ourdi par les Juifs sionistes menaçait de prendre le contrôle de la planète ».
Aujourd’hui, l’armée turque forme, conseille et équipe 22 pays amis turcs et musulmans. Elle aide aussi les organisations jihadistes palestino-arabes ciblant Israël, notamment le Hamas. Erdogan est devenu le parrain diplomatique de la cause palestinienne et de la déclaration d'un état palestinien à l'Onu.
Le chef de l’Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas a été reçu avec tous les honneurs et le tapis rouge par Recep Erdogan, à Istanbul. Lors de leur entretien, Erdogan a assuré le chef terroriste que « la Turquie ne gardera pas le silence et accordera toujours son soutien à l’Autorité Palestinienne face aux horreurs commises par Israël »
Erdogan menace la stabilité régionale avec son comportement de voyou mégalomane. Grâce à lui, il y a déjà 2 entités au Moyen Orient contrôlées par les Frères Musulmans, le Hamas à Gaza et Erdogan à Ankara.
Mais c'est en 2011 au début du « Printemps arabe » que s'est révélée toute la mesure des ambitions d'Erdogan au Moyen-Orient.Alors que la région connaissait des soulèvements d'une certaine ampleur, les Turcs sont soudain devenus omniprésents, endossant de multiples rôles. Le pouvoir éphémère des islamistes en Tunisie et en Egypte, et leur chute sans gloire, privèrent Erdogan, lui qui rêvait de devenir le leader de l’islam sunnite au Moyen Orient, de ses bases arrière qu’il avait jugées, à tort, définitivement acquises.
La Turquie cherche aujourd’hui à étendre son influence au Moyen Orient d’où l’occupation militaire de 2 zones frontalières en zone kurde, au nord de la Syrie, le bombardement fréquent de la zone autonome kurde en Irak, l’aide au Hamas à Gaza et aux groupes islamistes de Syrie et d’Irak contre les kurdes.
Mais la Turquie étend aussi son influence vers le sud et vers l’est. Vers le sud et la mer Rouge, par la création de bases militaires au Qatar, au Soudan, avec la concession de l’île Suakin, et en Somalie. Vers le sud et l’est par la revendication d’îles grecques de la mer Egée, perdues, semble-t-il, après la chute de l’empire ottoman. YiÄŸit Bulut, principal conseiller d’Erdogan : « L’Anatolie marchera contre la Grèce et personne ne pourra l’en empêcher. La Grèce doit connaître sa place et sa géographie et ne pas nous violer, comme elle l’a fait il y a un siècle, avec l’aide des Occidentaux, car ce sera terrible pour elle… ! » .
Vers la Libye de Tripoli, en signant 2 accords, un protocole d’entente pour une coopération militaire, et un accord sur les frontières maritimes en Méditerranée, créant illégalement une zone économique exclusive (ZEE), pour profiter des réserves de gaz de la Méditerranée orientale. La Turquie pourrait être en mesure d'arrêter, d'inspecter et d'enquêter sur tout navire traversant la zone désignée, ce qui est inacceptable pour la Grèce, Chypre et l’Egypte, comme pour Israël (3).
Vers Jérusalem, en achetant et en aidant massivement des Arabes à acheter ou à réparer des résidences à Jérusalem-Est.
Il existe un sentiment turc national de détresse devant l'échec des dirigeants à définir leur position sur le plan diplomatique et à se raccrocher à l'un quelconque des trois blocs, l'Amérique, l'Europe ou le Moyen Orient.
Le rapprochement avec la Russie et la Chine, notamment sur le plan des armes, les éloigne de l’Otan et des Etats-Unis. Ce dernier pays ne maintient son lien que par la base aérienne I’Incerliq qui abrite 50 bombes nucléaires et 5000 soldats américains et qu’il tarde à délocaliser.
Pourtant, la Turquie était un membre important de l’Otan à l’époque des dissensions américano-soviétiques. Elle cherchait de plus à faire partie de l’Union européenne (UE). Mais devant son évolution idéologique, l'Europe a pris ses distances vis-à-vis d’une éventuelle entrée de la Turquie dans l'UE, invoquant le refus de la Turquie de reconnaître Chypre, un membre de l'UE, et également le génocide arménien
En Europe, les communautés turques ne sont pas assimilées et agissent en toute autonomie, comme une cinquième colonne, notamment en Allemagne. Les turcs utilisent les camps de réfugiés syriens qu’ils hébergent comme moyen de chantage vis-à-vis de l’Europe, la menaçant d’invasion de migrants et obtenant pour les garder une compensation de 3 milliards d’euros.
D’une manière générale le contentieux avec l’Occident ne cesse de s’amplifier. La Turquie n’a pas encore rendu compte du génocide arménien, du génocide assyrien, de l’expulsion des Grecs d’Ionie en 1923, du pogrom de 1934 contre les Juifs de Thrace, des lois racistes de 1942 contre les Juifs et les « döenmeh », descendants des adeptes du faux messie Shabetay Zvi, des pogromes antichrétiens de 1955, de l’invasion de Chypre en 1974, des excès de la répression permanente antikurde. L’Occident comptait sur une Turquie de plus en plus qui assumerait ce passé, et se rachèterait. Or on est abasourdi devant une Turquie qui republie Mein Kampf et diffuse des docudrames antisémites en prime time !
Et aujourd’hui la Turquie tend la main à l’Iran ! Là les intérêts convergent dès lors qu'il s'agit de s'opposer au nationalisme kurde et à la puissance américaine. Il y a là assurément deux velléités hégémoniques non arabes qui s'entrecroisent en Syrie, porte entrouverte vers les pays arabes.
La conclusion récente entre les gouvernements turc et iranien d'un accord à propos d'Idlib, une petite ville syrienne devenue le centre d'intérêts américains, remet en lumière les relations entre deux des États non arabes les plus grands et les plus influents du Moyen-Orient. Vieille d'un demi-millénaire et ponctuée de 11 guerres, la rivalité entre les deux pays représente aujourd'hui, selon les termes de Soner Cagaptaydu Washington Institute, « la plus ancienne lutte de pouvoir » de la région. Dès lors, que signifie l'accord signé récemment et de quelle manière la rivalité irano-turque va-t-elle influencer l'avenir de la région ? (Voir www.nuitdorient.com/n26102.htm - Iran et Turquie, deux pays du Moyen-Orient en rivalité perpétuelle).
Conclusion
Hikmet Bila, un éditorialiste du journal nationaliste turc Vatan : « Nous donnons désormais l’impression d’avoir abandonné notre approche pro-occidentale en politique étrangère, et de passer rapidement d’une politique équilibrée à un alignement sur l’axe Iran-Hamas. … Cette attitude suscite peut-être l’enthousiasme sur le plan intérieur. Mais à terme, elle peut se révéler désastreuse. »
Le président ErdoÄŸan est le seul chef d’État au monde à se revendiquer d’une idéologie suprémaciste ethnique, parfaitement comparable à l’aryanisme nazi. Il est également le seul chef d’État au monde à nier les crimes de son histoire, notamment les massacres des non-musulmans. N’étant soutenu que par moins d’un quart de la population, il gouverne seul son pays par la contrainte. N’a-t-il pas comparé la démocratie à un tram qu’on prend en marche: «On le prend jusqu’à notre destination ; une fois arrivé, on descend !»
Le voyage politique des Turcs vers l'Occident a commencé il y a un siècle et demi, mais la Turquie reste aujourd'hui aussi éloignée des valeurs démocratiques universelles que l'était l'Empire ottoman au moment de son effondrement.
Notes
(1) La taqiya est une réalité, en Turquie et ailleurs. Savoir la déjouer constitue aujourd’hui une priorité absolue pour les pays fidèles à la tradition démocratique occidentale. La taqiya ou « dissimulation » est une pratique couramment admise dans le monde islamique. Elle consiste à tromper l’adversaire non-musulman, quand celui-ci est en position de force, soit en lui cachant que l’on est musulman, soit en lui mentant sur les intentions qu’on nourrit à son égard.
(2) Dans le cadre des activités "culturelles" du parti islamiste MSP au sein duquel il était le responsable de la "Commission de la jeunesse du district de Beyoglu" (Istanbul), Erdogan a écrit et mis en scèneunepièce de théâtre antisémite intitulée Maskomya. Stigmatisant violemment les Juifs, les francs-maçons et les communistes - trois termes contenus dans la contraction Mas/kom/ya (Mason, communist, Yahoudi) – cette vulgate complotiste haineuse est commune à l’idéologie islamiste classique et à l’extrême-droite turque séculaire des Loups Gris, actuellement alliée à l’AKP et principal soutien externe à la dérive autoritaire « nationale-islamiste » d’Erdogan.
Mein Kampf, est en vente partout en Turquie. Cette vague d'antisémitisme a pu progresser sans rencontrer d'obstacles dans les canaux islamistes ainsi que dans les principaux médias, pour s'installer dans la vie et le discours quotidien des Turcs.
(3) Chypre et la Grèce sont en première ligne face à la Turquie, qui revendique le droit d'exploiter des gisements d'hydrocarbures dans une zone maritime qu'Athènes estime relever de sa souveraineté. Le déploiement d'un navire de prospection sismique turc, l'Oruc Reis, dans des eaux revendiquées par Athènes a mené à une escalade des tensions.
La Turquie avait aussi un autre projet : devenir l’interface sur la distribution du gaz entre la Russie, le Caucase et l’Europe, via le gazoduc Turk Stream. Il y avait beaucoup à gagner. La découverte de ces gisements en Méditerranée modifie complètement la donne et fait craindre à la Turquie d’avoir misé sur le mauvais cheval et d’être marginalisée avec son gazoduc, comparé à son concurrent le gazoduc « EastMed » Israel-Egypte-Chypre-Grèce-Europe.
2. Iran
Idéologie
Les ayatollahs d'un pays sur le point d'être nucléaire sont de fervents croyants, adeptes de l'Apocalypse. La doctrine shiite, adoptée par les dirigeants de la République islamique d'Iran, annonce l'arrivée d'une figure messianique connue sous le nom de 12ème Imam ou Imam caché, appelé « Mahdi ». Le Mahdi » est le restaurateur de la religion et de la justice, celui qui régnera avant la fin des temps. Sa réapparition apocalyptique sera précédée de violence, de chaos et de guerre. Il réapparaîtra au milieu d'un champ de bataille souillé du sang des infidèles.
Le culte de «l'imam caché», a pris une dimension politique. Le mahdi sortira du puits sacré à Jamkaran. On lui a déjà préparé un tapis rouge. Les dirigeants iraniens basent leur discours sur l'attente de l'imam Mahdi :« Pour que l'Imam Caché réapparaisse, nous devons combattre l'Occident." - Ils ont maintes fois déclaré publiquement qu'une guerre nucléaire, tuant des millions de Juifs et de Musulmans, était acceptable pour eux, parce qu'éliminant Israël, mais ne causant que quelques dommages à l'Islam. Suicidaires, ils ne se soucient pas de l'impact des sanctions économiques, ni de l'avenir de millions de jeunes Iraniens au chômage, ni de l'apparition de pandémies.
L'objectif ultime de l'Iran est "un gouvernement unifié du monde" sous la houlette du Mahdi. La mission de Téhéran est de créer un monde multipolaire où l'Iran a l’éminente place de guide de l'Islam. Et sa meilleure arme est la tromperie, et pas le jeu d’échecs, comme certains le croient.
Moyens politiques
A travers une série d’organes étatiques, signes extérieurs de démocratie exemplaire, l’Iran est en fait dirigée par un Guide Suprême qui décide seul en dernier ressort. L’Iran est une théocratie oligarchique.(1)
Le 1er Guide Khomeini a régné 10 ans et a ruiné le pays avec la guerre avec l’Irak qui a duré 8 ans, provoquant plus d’un million de morts. Ali Khamenei règne depuis 32 ans choisissant son président, généralement acquis à son idéologie d’apocalypse, de rigueur et de conservatisme dictatorial (Ahmedinejad), et à l’occasion « apparemment modéré » (Rouhani), lorsque les circonstances géopolitiques l’exigent.
Le dernier « élu » est un dur ultraconservateur, Ebrahim RaïssI, le chef du système judiciaire iranien, vice-président de l'Assemblée des experts et directeur de la richissime fondation philanthropique (ou Bonyad) Astan-e Qods-e Razavi. Une rumeur court à Téhéran, qu’il serait choisi pour devenir le successeur du guide suprême Ali Khamenei, à la mort de celui-ci.
Responsable du massacre de 30 000 prisonniers politiques à l'été 1988, Raïssi n’a été élu que par 12% des Iraniens seulement ! Vers la fin des années 1980, il fit exécuter des milliers d’Iraniens, opposants au régime, parfois dans des mises en scènes morbides, au point que même les petits-fils de l’ancien ayatollah se sont dressés contre lui. L’ONG Amnesty International, basée à Londres : « Le fait qu’Ebrahim Raïssi ait accédé à la présidence au lieu de faire l’objet d’une enquête pour crimes contre l’humanité, meurtres, disparitions forcées et tortures, est un rappel sinistre que l’impunité règne en maître en Iran ».(1)
Le pouvoir réel sur le terrain est entre les mains du « Corps des Gardiens de la Révolution Islamique » (CGRI), conçu à l'origine par le régime des Ayatollahs comme une milice à orientation idéologique qui compenserait le manque de zèle révolutionnaire de l'armée régulière. Il est devenu depuis la principale force militaire du pays, parallèle à l'armée régulière, et chargée de concrétiser l'impérialisme et l’esprit de conquête du régime en Iran, puis au Moyen Orient et partout dans le monde, avec « les brigades al Qods », véritable Légion étrangère.
Le CGRI est secondé localement par des « vigiles » formés et dévoués, les « basijis », une police de quartier cherchant et arrêtant tout contrevenant à la loi islamique, notamment vestimentaire.
Situation Intérieure
Malgré les sévices subis et une économie délabrée, la population fait preuve d’une exceptionnelle résilience d’autant plus méritoire que la répression est implacable. (Voir www.nuitdorient.com/n26122.htm - 40 ans d'Intolérance Iranienne)
- Avec les dissidents, les homosexuels, les membres de minorités religieuses, etc…, l’Iran est responsable de plus de la moitié des exécutions enregistrées dans le monde.
- Des milliers de policiers spécialisés dans la morale ont été recrutés pour contrôler l'application des codes de pudeur stricts imposés aux femmes,
Alors que l’oligarchie des pasdarans et des Gardiens de la Révolution accapare les principales ressources du pays et contrôle les principaux secteurs d’activité économique, l’Iranien de la rue assiste à l’effondrement du système bancaire et la généralisation de la corruption ; subit une inflation de plus de 50 %, un chômage de 25 %, une dépréciation de la monnaie et une explosion de la pauvreté qui atteint 40 % de la population. On note de plus une pandémie non maîtrisée, avec plus de 4 millions de personnes touchées, avec plus de 130 000 décès.
L'Ayatollah Ali Khamenei, a récemment qualifié le virus de "bénédiction" et le Dr Majid Rafizadeh, président du Conseil international américain sur le Moyen-Orient, a écrit sur le site web du Gatestone Institute : "Les mollahs au pouvoir tentent-ils délibérément de propager le coronavirus dans d'autres pays comme une forme de jihad mondial?"
L’Occident n’a pas su utiliser l'identité "perse", qui n'est pas forcément compatible avec l'islam, ou l'admiration des jeunes Iraniens pour le libéralisme américain. Le "soulèvement vert" des Iraniens en 2009, a été écrasé dans le sang, sans qu’aucun pays occidental n’intervienne. Une aide aux minorités ethniques les aurait débarrassés du joug iranien.
L’opposition iranienne de l’extérieur a été incapable de créer la moindre plate-forme démocratique commune…. alors que les Kurdes et les chiites d’Irak ont réussi à imposer une culture démocratique dans leur zone.
La jeunesse iranienne est consciente de la démesure idéologique de la génération de ses parents, mélange incohérent d'anti-impérialisme, anti-sionisme, islamisme, marxisme… qui n'a apporté que des déboires et aucun résultat sur le plan économique. Un des slogans les plus populaires lors des protestations d'étudiants est "oubliez la Palestine et pensez à nous!".
Situation Extérieure
L'Iran est le principal pays dans le monde qui parraine le terrorisme international, formant, armant et finançant des groupes qui ont comme but de détruire l'état d'Israël et semer le chaos en Occident.
L'Iran a élargi son réseau de la terreur en s'appuyant sur le Hezbollah, le Hamas, sur des milices dérivées du Hezbollah et des Gardiens de Révolution, et sur l’ethnie Houtie au Yémen, créant un dangereux axe shiite et recrutant des cellules dormantes à travers de nombreuses capitales dans le monde.
Fondé sur l’Iran, l’axe shiite est dangereux, car il relie la mer Caspienne à la Méditerranée et à l’océan indien. On parle ici d’une puissance régionale qui domine 25% des réserves naturelles de gaz du monde et 11% de ses réserves en pétrole, disposant d’un énorme capital humain, de hautes capacités en sciences, en technologie, en infrastructure et capacités opérationnelles en cyber-développement.
Les Menaces nucléaires
Ces menaces constituent un danger non seulement pour Israël, mais pour toute la région, car le tir d'une première fusée nucléaire iranienne ne peut être d'une grande précision, avec une grande probabilité de chute sur un territoire non visé, voire sur l'Iran. De même les missiles anti-missiles Arrow d’Israël peuvent aisément intercepter ou dévier toute fusée en vol, avec de grands risques pour l'Iran.
L’Iran n’a pas respecté les traités, accords et conventions qu’il a signés, notamment le JCPOA de 2015, lui interdisant de se doter d’un arsenal et l’obligeant à tenir l’AIEA régulièrement informée de tout ce qu’il entreprend dans ce domaine.
Le régime iranien a trompé à plusieurs reprises la communauté internationale. Quelques exemples :le réacteur de plutonium d'Arak non déclaré, la fausse Fatwa de Khamenei « interdisant la mise au point, la fabrication, la possession et l'emploi d'armes nucléaires », la dimension militaire du programme nucléaire iranien que l’AIEA ne peut pas inspecter (défaut du JCPOA), les sites secrets de Qom, Natanz, Fordow… .
L’Iran a acquis auprès d'Islamabad les plans de centrifugeuses beaucoup plus sophistiquées que celles qui avaient été déclarées et a repris le processus d'enrichissement de l'uranium, commencé plus tôt au site d'Ispahan, à un niveau plus élevé que celui permis par le JCPOA. L’Iran serait à moins d’un an d’une bombe nucléaire.
Par ailleurs, l’Iran menace aussi en permanence le détroit d'Ormuz, large de 45 km, la voie la plus importante pour l'acheminement du pétrole vers les marchés occidentaux et d'Extrême-Orient, soit ou 20% du pétrole commercialisé dans le monde.
En ce qui concerne Israël
L'Ayatollah Ali Khamenei a clairement exprimé aux étudiants ses intentions sur son site officiel : «Vous les jeunes vous devriez être assurés d'être témoins de la disparition des ennemis de l'humanité, c'est-à-dire de la civilisation américaine dégénérée, et de la disparition d'Israël ».
Lors de la parade des missiles intercontinentaux Shihab-3, ceux-ci sont drapés de l'emblème "Effacez Israël de la carte", et on exhorte les masses à hurler "Mort à Israël".
A propos de Jérusalem et des lieux saint, Khamenei a prédit: « Le retour de cette terre sainte [Israël] dans le monde de l'Islam n'est pas une question étrange et inaccessible…. L'objectif de Nasrallah de prier à la mosquée Al-Aqsa est une aspiration absolument pratique et réalisable pour nous ».
Pour Hossein Salami, le chef des Gardiens de la Révolution, « le sinistre régime doit être rayé de la surface de la terre, et ce n’est plus un rêve lointain, ….mais un but atteignable ». Son adjoint chargé des opérations, Abbas Nilforoushan, se vante dans le même esprit : « l’Iran a encerclé Israël de quatre cotés. Il ne restera rien d’Israël. »
A propos des efforts quotidiens pour renforcer les milices et les groupes terroristes dans les pays et zones qui entourent ou proches d’Israël (Liban, Syrie, Irak, Gaza, Cisjordanie, Jordanie, Yémen), Yaakov Amidror, l’un des meilleurs experts d’Israël : « L’Iran veut construire autour de l’État juif un cercle de feu» (2)
En ce qui concerne les États-Unis (voir www.nuitdorient.com/n26108.htm)
Pour neutraliser ces menaces, en dehors des sanctions, les Etats-Unis mènent en permanence des sabotages d’installations stratégiques, bombardent les milices shiites civiles et militaires, envoient des navires de guerre au détroit d'Hormouz pour interdire l'exportation du pétrole, envoient des virus, "missiles cybernétiques d'une précision militaire", pour paralyser les activités du pays, éliminent d’éminents responsables militaires comme Qassem Soleimani…. qui disait au Général Petraeus : "Général Petraeus ! Vous devez savoir que c’est bien moi, Qassem Suleimani, qui dirige la politique iranienne en Irak, au Liban, à Gaza et en Afghanistan"…"Toutes ces régions sont d’une manière ou d’une autre sous contrôle de la république islamique iranienne et suivent son idéologie".
Conclusion
Le Jihad de l’Iran est subversif, basé sur le chaos et la terreur. Il consiste à préparer secrètement les moyens de semer le désordre dans les zones à conquérir, à former et à armer des mandataires et supplétifs locaux qui agissent dans ces zones, à créer des cellules terroristes dormantes, partout où cela est possible dans le monde, en particulier dans les communautés shiites et sympathisantes d’Amérique latine.
De nombreux analystes occidentaux se demandent combien de temps encore le régime iranien pourra survivre sous le poids des sanctions. Ce qu’ils n’ont pas perçu, c’est que le régime a contourné les sanctions grâce à l’aide de collaborateurs de longue date à travers le monde. Il est fortement suggéré que les Frères musulmans sont le principal pilier parmi ces collaborateurs.
Aujourd'hui, quatre décennies après la prise du pouvoir par les khoménistes, l'Iran ne peut se comporter comme un État-nation alors que l'islam, dans sa version shiite iranienne, a subi un revers historique.(3)
Khamenei admet son échec à créer un véritable État-nation. Et le grand ayatollah Abdullah Jawadi Amoli, l'un des plus hauts dignitaires religieux shiites d'Iran, signale un échec tout aussi grand sur le plan religieux. "Au cours des 40 dernières années, le Séminaire de Qom n'a pas produit un seul livre qui puisse être considéré comme une référence", a-t-il déclaré lors d'une conférence de séminaristes seniors le mois dernier. "S'ils nous prennent le séminaire Najaf, il ne nous restera rien."
Le khoménisme a produit deux perdants : l'Iran en tant que nation et le shiisme en tant que foi.
Et ce « khoménisme-khaménisme » ne peut se distinguer et crier victoire que dans la trahison, la tromperie, la subversion et la terreur, en se cachant derrière de nombreux supplétifs et mandataires formés, armés et financés par lui.
Dr. Gil Feiler, expert en économie du Moyen-Orient et chercheur principal au Begin-Sadat Center for Strategic Studies de l'Université Bar-Ilan : « Si les sanctions de Trump étaient restées en place encore quatre à cinq ans, et si elles avaient été encore plus resserrées et si on avait surveillé la contrebande, le régime iranien se serait effondré… Ce que Biden va faire, c'est leur jeter une bouée de sauvetage ».
Notes
(1) Exécutions été 88
L'exécution de milliers de prisonniers d'opinion au cours de l'été 1988 sur ordre direct du fondateur de la République islamique, l'ayatollah Khomeini, a atteint son apogée.
Dans son discours, Khomeini a dit : «Ceux qui sont en prison dans tout le pays et qui restent attachés à leur soutien aux "Monafeqin"[Mojahedin, la MEK], font la guerre à Dieu et sont condamnés à être exécutés [...] ... Détruisez immédiatement les ennemis de l'Islam. En ce qui concerne les affaires, utilisez le critère qui accélère la mise en œuvre du verdict [d'exécution] ».
(2) Le Cercle de feu
. Le Liban est contrôlé par le Hezbollah shiite à la botte de Khamenei
. De la Syrie de leur subordonné Bashar al Assad, les Ayatollahs iraniens harcèlent en permanence le nord d’Israël directement ou à travers des milices du Hezbollah
. L’Irak avec les milices shiites armées par les Iraniens qui harcèlent les Américains
. Gaza avec un soutien actif au Hamas et au Djihad islamique.
. En Cisjordanie, où l’Iran prend ses quartiers, en créant le groupe terroriste « al Sabirine » –Voir à www.nuitdorient.com/n269.htmÂÂ
. La Jordanie ouvre un mausolée shiite à Kerak pour un million de touristes iraniens…celui d’un saint pour les Shiites Jaffar Ibn Abu Taleb cousin du prophète
. Le Yémen où l’Iran soutient les rebelles shiites Houtis prêts à tirer des missiles ou à envoyer des drones sur toute cible indiquée
(3) Etat voyou et états normaux
Les états normaux ne font pas cela:
- attaquer les ambassades et les installations militaires en temps de paix ;
- alimenter les groupes satellites et les milices terroristes ;
- servir de sanctuaire aux terroristes ;
- appeler à la destruction d'Israël et menacer d'autres pays ;
- aider les dictateurs brutaux tels que Bachar al-Assad en Syrie ;
- diffuser la technologie des missiles à de dangereuses entités satellites;
- procéder à des assassinats secrets dans d'autres pays ;
- et prendre en otage des citoyens de nations étrangères.
Les États normaux ne soutiennent pas le terrorisme au sein de leurs forces armées, comme l'Iran l'a fait avec le Corps des Gardiens de la Révolution Islamique (CGRI) et sa brigade al Qods.
Les États normaux ne répriment pas violemment les manifestations légitimes, n'emprisonnent pas leurs propres citoyens ou ceux d'autres pays pour des crimes spécieux, ne pratiquent pas la torture et n'imposent pas de sévères restrictions aux libertés fondamentales.
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