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Passions de Vie, par Randolph Benzaquen

Passions de Vie, par Randolph Benzaquen

Il n’y a pas de hasard, ce qui doit arriver arrive en son temps.
En ce mois de janvier 2020, je suis attablé dans un petit restaurant sans prétention à bavarder avec le propriétaire, un amoureux du surf, et voici qu’un jeune homme m’aborde avec délicatesse car il m’a entendu parler de surf et voudrait m’interviewer. Tout ce qui touche ce sport de roi m’enchante, j’accepte donc avec plaisir. Il me filme et de cette entrevue un joli petit documentaire lumineux sur la culture surf naîtra trois mois plus tard. Devant le succès de ce documentaire Riccardo me demande d’approfondir les sujets abordés qui semble t’ils l’ont charmé.

Alors reprenons les différents sujets qui ont rempli ma vie et qui m’ont rendu humble dans la perception de tout ce qui nous entoure. L’humilité me permet de garder un œil attentif et aimant pour toute vie, de l’insecte à la baleine en passant par les plantes. La vie d’un homme se dessine comme le lit d’une rivière et nous conte son parcours et surtout m’a enseigné à respecter le moment présent en toutes circonstances, même les plus dramatiques, c’est ce qui donne tout le piment de la vie.

Tout d’abord, l’Afrique, ce continent mystérieux m’a attiré depuis ma tendre enfance, je l’ai donc traversé de part en part en passant par le Sahara, la forêt équatoriale jusqu’à l’hémisphère sud pour rejoindre les savanes africaines peuplées d’animaux, tout en gardant un œil d’enfant émerveillé, comme disait l’écrivain Henry Miller : « L’essentiel est de devenir maître et faire dans son vieil âge, ce que font les enfants quand ils ne savent rien. » Ces voyages ont été entrepris dans des conditions difficiles en 1970, sans téléphone, ni GPS, uniquement par la piste qui est le titre du premier livre que j’ai écrit. Et c’est ce risque qui a fait tout le piment de l’aventure, nous ne croisions qu’un seul véhicule par jour mais comme disait le philosophe Friedrich Nietzsche : « Le secret pour retirer de l’existence la plus grande fécondité et la plus grande jouissance, c’est vivre dangereusement. »

Après avoir traversé de par le monde une multitude de pays, un seul remporte la palme : Le Sahara, surtout lorsqu’on le parcourt au rythme des caravanes à dos de dromadaires. On y découvre les valeurs essentielles. Notre monde va trop vite, le dromadaire remet les pendules à l’heure et tout ce qui nous entoure retrouve toute sa signification. En contemplant le ciel étoilé, on prend conscience que nous voyageons sur un grain de poussière qui est notre vaisseau La Terre parmi des milliards de galaxies. La photo qui m’a le plus marqué a été prise par le télescope Hubble, une image qui nous emmène loin, très loin, dans les profondeurs du cosmos. Cette image du champ profond d’une petite région du ciel complètement obscure, choisie pour son absence d’étoiles et surprise, dans ce noir total on découvre 265000 galaxies ! Chacune d’elles comporte entre cent et deux cents milliards de soleils, cela se passe de commentaires ! Nous ne sommes rien et tout à la fois et la vie telle qu’elle est apparue sur Terre prend tout son sens. Nous sommes constitués de la même matière que les étoiles. Chacun de nous est une parcelle d’univers.

Ma religion est le respect de toute vie.

Maintenant le surf, j’ai honte de le résumer en quelques lignes, ce qui me réconforte c’est que je lui ai consacré tout un livre que j’ai intitulé : ‘’Libre et Sauvage’’. J’ai toujours fait un rapprochement entre le Sahara l’océan de sable et l’océan liquide, la réunion de mes deux attirances qui me tenaient le plus à cœur. Deux paysages qui au premier abord semblent si différents, mais qui au fond se ressemblent par leur immensité dépeuplée et leur sauvagerie indomptable. Le surf, quelle leçon de vie, tout un art de vivre. Je suis excité comme un enfant à l’idée d’en parler.

Quand je l’ai découvert, ma vie a radicalement changé, je n’avais plus à me demander ce que j’allais faire de mon temps de libre, le surf m’avait envahi. J’ai même changé de véhicule pour acquérir une Land Rover spécialement adaptée pour sillonner les plages à la recherche des spots. Je vivais avec les pulsations de l’océan. Par la suite, les australiens et les américains m’ont appris que l’on pouvait parcourir la Terre à la recherche de la vague parfaite.

Il va s’en dire que le surfeur appartient à la vague, loin du monde extérieur où seul lui et la vague existent dans l’intimité d’un tube en mouvement. Le surf permet de faire une mise au point par rapport à tout un contexte environnant. Lors d’une session, on tombe, on remonte sur sa planche, on retombe, on remonte à nouveau sur sa planche et instinctivement on applique cette façon d’être dans les évènements de la vie ; on tombe, on se relève, c’est tout et on continue à vivre. Tout comme on attend la prochaine vague, on attend la prochaine occasion et peu à peu, on s’aguerrit, on raisonne différemment, on prend du recul par rapport aux circonstances. On apprend à surfer la vie.
La limite du surfeur moyen se situe autour de quatre mètres, c’est déjà une belle preuve de courage. Au-delà les surfeurs sont beaucoup plus rares. Le big-surf représente un attrait différent, précisément à cause de son flirt avec la mort.
Dans les années 70, lorsque nous partions à l’aventure via le Portugal et l’Espagne pour la France et la région d’Hossegor, il était fréquent que des appels code-phare captent notre attention, c’était des surfeurs anglo-saxons (anglais, australiens, américains…) qui nous saluaient.

Le surfeur fait partie d’une grande famille de voyageurs. Il vit sur les plages les plus sauvages possibles, en fonction des vents, des marées, du temps. Il fuit l’étau des grandes villes et pense à un départ proche vers d’autres rivages, car le surf est un formidable prétexte au voyage, il y a tant de vagues à découvrir sur les côtes encore sauvages. Pour cela, le surf devient un mode de vie qui engendre de nouvelles valeurs, et même une certaine marginalité, un désir de liberté, d’espace, de pureté qui se fait au détriment de notre société qui veut nous canaliser, surtout lorsque cette dernière va vers des valeurs qui se perdent.

Une belle vague dure trente secondes et on s’en souvient toute sa vie. On fait partie d’elle, on la caresse délicatement, on se love dans son ventre. On fait partie du tout. Il m’est arrivé de jouer une sonate de Bach avec mon violon pour glorifier l’océan.
Pendant l’année 2019, j’ai eu de graves problèmes de santé et bien entendu le surf, en fidèle compagnon m’a aidé à surmonter de terribles épreuves et à les vaincre.
Tout a une fin, à mon grand regret je dois clore cet article mais il y a tant à dire.
Le surfeur amoureux de nature et d’océan se doit de protéger cet environnement.
L’océan, sa faune et sa flore, font partie de notre vie, et même de notre survie. Ce message est un message de survie pour l’humanité et de profond respect pour cet être vivant qu’est l’Océan.

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