Retour de mission: Israël, la Startup Nation aux riches enseignements
par Startup Montréal
Retour de mission: Israël, la Startup Nation aux riches enseignements
Du 13 au 17 février 2023, Naouel Hanani et moi (Liette Lamonde) avons rejoint une mission commerciale organisée par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain afin de découvrir la Startup Nation, Israël. Nous rapportons ici nos impressions et apprentissages.
Une semaine en Israël, c’est bien court pour prétendre à une compréhension véritable de cet écosystème d’innovation reconnu internationalement.
Mais il arrive que s’alignent, un peu à la manière des astres, des rencontres humaines qui, en plus de faire du bien à l’âme, nous apportent quelques apprentissages et convictions.
Ah! La Méditerranée!
D’abord, les lieux. Tel Aviv est bordée de la Méditerranée. 14 km d’une plage parfaite faite de sable blond extra fin, la mer à perte de vue. On s’y retrouve en famille, entre amis, en amoureux, en musique, en se traînant les pieds ou en courant le long de la promenade aménagée. Et le moment venu, on se laisse envelopper de la lumière unique d’un coucher de soleil éblouissant découpant, à gauche, les fortifications de la ville millénaire de Jaffa, à droite, les tours modernes de Tel Aviv. Vous avez dit contrastes?
Les deux premières journées de la mission, nous avons assisté à plusieurs présentations, passant de salles de réunion sans lumière naturelle à des espaces événementiels aux immenses murs fenestrés donnant sur la mer. De nombreux intervenants (chambre de commerce, agences gouvernementales, investisseurs) nous ont alimentés autant de statistiques démontrant le formidable succès d’Israël, que de quantité de fruits frais, dattes, noix et pâtisseries irrésistibles…
Ces présentations nous ont instruites sur le positionnement d’Israël, la Startup Nation :
7e rang au classement mondial des écosystèmes startups
97 licornes y sont nées
Le secteur haute technologie génère 54% des exportations
Il y aurait entre 6 500 à 9 000 startups israéliennes (selon les interlocuteurs)
Les éléments de succès de l’écosystème
Le « chutzpah » : une audace et une confiance extrême en soi des Israéliens
L’échec est ici bien accepté et même valorisé
Le parcours de vie des jeunes Israéliens et Israéliennes passe par le service militaire où on apprend très jeune le leadership et à avoir de grandes responsabilités. L’armée est aussi là où on se crée un réseau pour la vie et on développe des connaissances de pointe dans les unités d’élite, ou les unités technologiques et de cyber-sécurité.
L’apport d’immigrants, en particulier des ingénieurs et mathématiciens russes arrivés en grand nombre lors de l’effondrement de l’URSS
Les quelques 500 multinationales qui y ont ouvert un centre de recherche
Un accès privilégié au marché américain grâce aux relations avec l’importante communauté juive
Un sentiment de n’avoir rien à perdre et la nécessité d’innover pour la sécurité géopolitique et alimentaire.
Notre mission en parallèle
On retire beaucoup plus d’une mission commerciale en groupe lorsqu’on prévoit y ajouter soi-même des rencontres individuelles en parallèle. Le FOMO aidant, nous avons profité de la convergence des acteurs de l’écosystème startup à l’événement « Our crowd Global Investor Summit » à Jérusalem pour confirmer un ambitieux agenda de rencontres. Our crowd est une formidable plateforme de financement participatif investissant dans les startups avec une prise de participation, lancée il y a 10 ans en Israël. Elle a maintenant 200 000 membres qui investissent de 10 000$ à 50 000$ minimum. Au total, 2 milliards de dollars américain ont ainsi été confirmés. L’événement rassemble plusieurs de ces investisseurs et met en lumière des startups à la recherche de financement. Sur le coin d’une table située stratégiquement à deux pas d’un buffet qu’une équipe regarnissait infatigablement, nous avons tenu salon en plein cœur d’une foule changeante d’affamés. Ironiquement, nous n’avons jamais eu le temps de manger.
Dans ce chaos et cette énergie électrisante, nous avons appris les choses suivantes :
L’ADN de la population et la culture locale déterminent en grande partie sa force et sa différenciation
Comme organisation d’appui aux startups au Québec, nous pouvons nous inspirer d’elles et prévoir notre propre exit dès la conception d’un nouveau programme en tenant compte de l’évolution et de la maturité de l’écosystème
Il y a 190 accélérateurs, incubateurs et hubs technologiques
Ceux-ci se sont progressivement intéressés à des startups plus avancées, ayant déjà levé jusqu’à 1 M$
La Ville de Tel Aviv lance de nouveaux programmes et services positionnés au pré-démarrage puisque le début du pipeline de projets est délaissé
Les secteurs phare sont la cyber-sécurité, fintech, agri-tech et sciences de la santé
Les forces sont en B2B
Les secteurs priorisés par le gouvernement sont le climate-tech et la mobilité
L’entraide entre entrepreneurs est une des plus grandes forces de l’écosystème, bien avant la collaboration entre les joueurs de l’écosystème
La mesure du succès n’est pas le nombre d’emplois créés ou les exportations, mais l’innovation créée et l’expérience gagnée par les cofondateurs
Le jeudi en après-midi, un guide nous a fait survoler des milliers d’années d’histoire dans la vieille ville de Jérusalem. Ici, sur les toits, alors que nous contemplions le Mont des oliviers, est monté l’appel à la prière d’un minaret voisin. Un passage dans le labyrinthe de la vieille ville mène à la mosquée al-Aqsa, un autre à l’église du St-Sépulcre. Nous nous retrouvons tous quelques pas plus loin, au Mur occidental (qu’on nomme souvent à tort le Mur des lamentations). Difficile de rendre concret à qui ne l’a pas vécu cet enchevêtrement de ruelles à l’intérieur des fortifications, où se côtoient, ou plutôt s’imbriquent et s’enchevêtrent toutes ces religions.
Anatomie d’une rencontre concluante
La mission se terminant le jeudi soir, Naouel et moi avons prolongé notre séjour pour faire d’autres rencontres et visiter un peu. L’information que nous avions est que Shabbat commence au coucher du soleil le vendredi et se termine au coucher du soleil le samedi. Mais qu’il n’était pas suivi de manière stricte à Tel Aviv. Ce qu’on ne nous avait pas dit avant qu’on envoie des courriels de demandes de rencontres en préparation à la mission et qu’on confirme nos vols, c’est que le vendredi et samedi sont congé et qu’on travaille le dimanche. Pas étonnant alors qu’une seule personne ait accepté de nous rencontrer le vendredi, pour le lunch.
Cette toute dernière rencontre de travail n’aurait pas pu être plus parfaite. Notre contact était un professeur d’université qui nous a donné rendez-vous dans un café situé au 2e étage dans une rue commerçante où se tenait un marché d’artisans. Nous avons un peu hésité dans l’entrée décrépie couverte de graffitis avant de gravir l’escalier menant à la source de la musique qui résonnait dans l’immeuble. Arrivées au haut des marches, un café bohème aux meubles dépareillés et une terrasse baignée de soleil ont immédiatement fait apparaître un large sourire sur nos visages et créer un sentiment de bien-être instantané. Une autre table était mise pour une formidable rencontre humaine.
Notre professeur nous a confié que tout n’était pas parfait:
90% des startups ne réussissent pas
On est très fort à innover, mais moins à faire croître une entreprise
Le marché local et ceux des pays avoisinants sont insuffisants, forçant une exportation qui n’est pas de proximité
Les startups se délocalisent rapidement vers les États-Unis et se font acheter trop tôt
On attend encore le succès d’une très grande entreprise technologique née en Israël
Les femmes sont à la tête de seulement 10% des startups
L’accès au talent est un combat constant étant donné la forte présence des services de R&D d’entreprises étrangères
Le financement n’est pas facilement accessible à tous les stades de développement d’une startup d’où la délocalisation, dans certains cas, de certaines startups vers les États-Unis
Si la table est importante dans la culture locale, c’est que le repas partagé nous donne du temps pour discuter. Et dire que nous choisissons souvent nos restos le midi au centre-ville de Montréal pour leur capacité à servir rapidement les plats. Dimanche matin, dans le vol Tel Aviv-Toronto, après avoir arpenté la ville à pied la veille, photographiant les immeubles Bauhaus et nous saoulant de jus de fruits fraîchement pressés, nous avons comparé nos notes, nos impressions et nos nouveaux souvenirs.
De cette pile d’apprentissages, nous avons dégagé les leçons suivantes:
Un écosystème startup est d’abord et avant tout composé d’êtres humains et l’entraide est à sa base
Si on veut être une société d’innovateurs, il faut valoriser la prise de risque, accepter l’échec et mesurer le succès différemment de ce que nous le faisons
Un discours commun des acteurs lorsqu’on parle de notre écosystème startup et de ses forces est essentiel à un positionnement fort.
Des échanges directs et généreux… la bouche pleine!
Ces rencontres, généralement la bouche pleine, ont été primordiales au succès de notre mission. L’espace d’une semaine, nous avons goûté et vécu l’écosystème israélien.
Chacun nous a transmis sa fierté de faire partie et d’avoir bâti la Startup Nation. Chacun a généreusement partagé avec nous le meilleur de cet écosystème.
Nous en sommes revenus avec l’impression d’avoir grandi et d’avoir compris quelque chose.
D’abord, que chaque écosystème s’ancre dans l’histoire de son pays et la personnalité de son peuple.
Ensuite, que ce sont ses caractéristiques propres qui lui servent de fondation.
Enfin, que l’entraide et les relations tissées sur cette base sont un liant puissant qui nous porte bien au-delà des frontières.
Startup Montréal travaille avec une taskforce à notre stratégie de positionnement à l’international. Nous vous invitons à contribuer à la réflexion. Avez-vous eu l’occasion de parler de notre écosystème startup à l’international? Si oui, partagez-nous ici les caractéristiques que vous mettez de l’avant et qui vous semblent avoir le plus de portée.
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