Conflit israélo-palestinien - Incompréhension ou mauvaise foi ?
Dans son texte d’opinion intitulé « Stupidité ou lâcheté ? L’Europe refuse de reconnaître l’apartheid envers les Palestiniens » 1, Ferry de Kerckhove reconnaît qu’« un raccourci historique ne rend jamais justice aux faits », mais procède tout de même à faire de dangereux raccourcis.
Martin Rosenthal Président du Conseil des partenaires locaux du Québec, Centre consultatif des relations juives et israéliennes
Emmanuelle Amar Directrice de recherche et politiques publiques (Québec), Centre consultatif des relations juives et israéliennes
Ainsi, il affirme qu’Israël se serait approprié la totalité de la Palestine, or la réalité est tout autre. Nous mentionnerons notamment qu’Israël a accepté le plan de partage du territoire créant un État juif et un État arabe à la suite de l’adoption par l’Assemblée générale de l’ONU de la résolution 181 le 29 novembre 1947. Les représentants du peuple palestinien avaient pour leur part persisté dans leur refus de créer un État arabe indépendant aux côtés d’Israël. Par ailleurs, cette affirmation selon laquelle Israël se serait approprié la totalité de la Palestine présente une vision réductrice du droit à l’autodétermination du peuple juif, faisant fi du fait qu’Israël est à la fois le foyer ancestral et contemporain du peuple juif. Les Juifs sont originaires de la région, où ils ont maintenu une présence continue depuis plus de 3000 ans.
La diaspora juive, y compris celle du Canada, est constituée des descendants des Juifs dispersés de force du Moyen-Orient. D’ailleurs cette semaine débutera la fête de Pessah, la Pâque juive, fête qui célèbre l’Exode biblique des israélites de l’esclavage imposé par les Égyptiens vers la liberté en Israël. Lors de leurs prières de Pessah, les Juifs du monde entier souhaiteront avec émotion « l’an prochain à Jérusalem », comme ils le font depuis des siècles.
Le fait d’affirmer le droit à l’autodétermination du peuple juif ne s’oppose en rien au même droit pour les Palestiniens à travers une solution à deux États.
À quoi fait donc référence Ferry de Kerckhove lorsqu’il affirme « qu’Israël ne s’est jamais vraiment rallié, à une exception près, à l’idée d’un État palestinien » ? Nous imaginons qu’il ne parle pas du fait qu’Israël a formellement reconnu le peuple palestinien et le droit à l’autodétermination de ce dernier dans la Déclaration de principes de 19932. Non plus que dans les années qui ont suivi Oslo, à Camp David en 20003 puis lors du sommet de Taba en 20014, Israël a proposé plusieurs concessions territoriales. Et qu’en est-il de la proposition de 20085 dans laquelle le premier ministre israélien de l’époque Ehoud Olmert a offert l’équivalent de toute la Cisjordanie dans le cadre de propositions de paix sous l’égide des États-Unis qui auraient permis l’établissement d’un État palestinien ? Se peut-il que M. de Kerckhove ne soit pas au courant ?
Un État de droit
Selon Ferry de Kerckhove, accuser Israël d’apartheid est hautement justifié et il cite en soutien à cette affirmation un rapport d’Amnistie internationale. En appliquant délibérément de manière erronée les principes internationaux en matière de droits de la personne, le rapport en question diminue la gravité des crimes les plus odieux commis contre l’humanité. Le rapport ignore aussi le fait qu’à l’instar de celles du Canada, les institutions démocratiques d’Israël sont fondées sur l’État de droit ainsi que sur la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Quelle que soit leur origine ethnique ou religieuse, les citoyens d’Israël sont assurés d’une égalité devant la loi. Bien que solide, la démocratie israélienne n’est pas parfaite et la dynamique majorité-minorité laisse place à l’amélioration, à l’instar de notre propre expérience au Canada.
Par ailleurs, le fameux rapport nie au peuple juif son droit à l’autodétermination, exige d’Israël un comportement que l’on n’attend pas ou que l’on n’exige pas d’une autre nation démocratique, et s’oppose notamment à toute politique visant à renforcer le caractère juif d’Israël tout en ne s’opposant à aucun des 80 pays du monde qui disposent d’une religion d’État. Étrange coïncidence que ces accusations d’apartheid visent le seul État juif au monde.
À en croire ce texte et plusieurs autres, qui semble être le pire État lorsqu’il est question de racisme et de discrimination ? La nation juive, l’État d’Israël. La seule et unique véritable démocratie au Moyen-Orient. Un endroit où tous sont égaux devant la loi. Les accusations incendiaires qui circulent sur le seul État juif au monde font preuve d’un deux poids, deux mesures inquiétant. S’agit-il d’incompréhension ou plutôt de mauvaise foi ? La question se pose…