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Sacré devoir de mémoire !

 

Couverture d'un livre produit en numérique, a propos de la peinture de Maxime Benhaim, peintre de la mémoire des Juifs du Maroc, encensé par le regretté Professeur Haïm Zafrani (ZL) dans une lettre adressée au peintre en 1998;

je consacre ma vie a penser et à écrire, à recréer le même monde que vous portez en vous, et exprimez dans votre propre langage de peintre.

Renseignements à propos du livre : maximebenhaim41@gmail.com

Finalement il faut être, pour prendre conscience du devoir de mémoire : Grand' père, parce que vous prenez de la “profondeur historique” au moment où vous parlez aux jeunes et qu'ils ne saisissent plus vos références à tel ou tel évênement qui fait partie de votre vécu et non celui de générations arrivées depuis à maturité.

Finalement, vous avez le monopole de leurs racines les plus récentes: 50 ans. Plus loin dans le temps, il leur faut le livre, la photo, l'objet de musée. Juif, parce que les juifs, religieux ou non, ont tous en commun une mémoire. Douloureuse, mais pas nécéssairement, et pas sans arrêt, heureusement. Marocain, ex-colonisé, parce que tout-à-coup un monde a remplacé l'autre. L'ancien devenait obsolète, à rejeter. Le nouveau
abolissait le vieux. Du coup on en détournait le regard avec gêne, parfois avec une certaine honte, de la grand' mère en foulard et abrigo. Combien de trésors n'ont-ils pas été jetés aux orties, coupables d'appartenir aux générations Mellah, remplacées par de la pacotille d'importation. Alors vive le grenier, vive le Musée...

Et puis on a trouvé mieux de se précipiter ailleurs, en détournant les yeux de ce passé, qui avait eu l'incongruité de se prolonger, de rester visible dans un Maroc des années cinquante. Le nouveau était ailleurs, on partit ailleurs, et là on découvrit le passé des autres. Moed tob devint Hag Sameyah: au lieu d'aller à la Sla, on allait à la School.
Dans la rage de n'être pas européen on s'intitulait Sépharades, espagnols, comme si 2000 ans d'histoire et de production rabbinique n'avaient pas suffi à faire de nous de bons juifs marocains. L'Espagne, qui avait expulsé certains de nos ancêtres, devenait tout à coup la mère de tous les juifs, à l'est et au sud de la Méditerranée, jusqu'aux juifs de l'Iraq et de la Perse.

Et finalement vint le sursaut, celui de la troisième génération, celle qui avait fait ses 40 ans de Sinaï, capable enfin de se retourner sur son passé sans torticolis. Elle decouvrit Haïm Zafrani, qui nous restituait, en français, un passé glorieux, une poesie juive en Occident Musulman, des littératures juives au Maghreb, une tradition rabbinique remontant à Harif, au rabbin Ishaq El Fassi.Bref, 1000 ans, puis 2000 ans de vie juive au Maroc, qu'il faisait découvrir en arabe aux Goyim.

Du coup il fallut réécrire l'histoire. Exercice fort salutaire à l'heure des exclusives et des replis identitaires. Oui, chacun se sent mieux lorsqu'il comprend son passé, son parcours, les éléments de sa culture si complèxe. Zikkaron, souvenir, oui, mais aussi découverte, reflexion pour mieux continuer, quelque soit la voie empruntée, choisie ou non, le droit de revendiquer avec fierté mais sans orgueil ce que nos ancêtres nous ont légué.

Au delà de la mode des généalogies, une vraie Histoire, avec ses zones d'ombres et de lumières, celle d'un judaïsme marocain qui fut un temps à la pointe de la lumière, quand ailleurs l'ombre du moyen âge sévissait.

Le premier devoir de mémoire ne serait-il pas finalement de restituer son nom au Judaïsme marocain? Une génération s'y consacre, et c'est tant mieux. Maxime Ben Haïm lui, fait mieux. Il l'illustre avec amour et grand talent.

Simon Lévy

Simon Lévy (ZL) Fut le Directeur et l'un des fondateurs du Musée du Judaïsme Marocain. Situé à Casablanca, cet étonnant musée financé par le Gouvernement Marocain, a été créé pour sauvegarder le riche patrimoine artistique et artisanal qui constitue une partie de la mémoire de la Communauté Juive du Maroc, deux fois millénaire, dispersée parvents de l'Histoire. En Mars 1999 Maxime Ben Haim a été invité à inaugurer l'ouverture de ce Musée par une exposition de ses peintures. L'exposition
était intitulée “La mémoire de Salomon” en souvenir de son propre grand-père du même nom, qui a été par une étrange rencontre au-delà du temps, le narrateur et l'inspirateur de ces peintures.

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