Nationalité marocaine : L'inclusion des descendants des juifs marocains divise la communauté juive
Khadija KHETTOU - Hepress
Une partie de la communauté juive marocaine exprime son opposition à une proposition législative, débattue depuis plus d’un an, qui refait surface dans l’arène publique. Bien que toujours présente sur la plateforme nationale de la participation citoyenne, cette initiative vise à octroyer la nationalité marocaine aux descendants des Juifs marocains. Un groupe de Juifs résidant au Maroc, qui a suivi des processus d’attribution de nationalité, a fait savoir que « les procédures en vigueur, qui s’appliquent à tous les Marocains, sont efficaces ».
À ce sujet, Jacky Kadoch, président de la communauté juive marocaine de la région de Marrakech-Safi, a souligné que « les lois marocaines actuelles ne privent aucun Marocain, qu’il soit juif ou musulman, capable de prouver ses origines nationales, de l’accès à la nationalité ». Il a ajouté qu’ « une telle proposition législative est empreinte de sectarisme, et il n’est pas acceptable d’appeler à une discrimination législative sur la base de la religion ».
Dans des explications fournies à Hespress, Kadoch a précisé que « l’octroi de la nationalité relève des autorités marocaines, et nous savons la place qu’occupent les Juifs marocains dans leur pays ». Il a fait valoir que « réformer les lois relatives à l’octroi de la nationalité pourrait être général, mais pas spécifique aux Juifs. Les musulmans peuvent également être confrontés à ce type de situation, et le législateur a mis en place des mesures concrètes ». En outre, il a suggéré qu’« il est possible de créer un bureau pour alléger la charge sur les tribunaux », tout en garantissant l’universalité de la règle légale.
Kadoch a aussi insisté sur le fait que « les Juifs marocains dont les ancêtres ont émigré très tôt dans l’histoire contemporaine du Maroc ou avant, ont la possibilité de rechercher des liens susceptibles de leur permettre d’obtenir la nationalité marocaine, qui les relie à leur pays ».
« Nous avons accompagné de nombreux Marocains qui ont obtenu la nationalité, et nous ne voyons pas de problème à ce niveau, à moins qu’il ne s’agisse de cas isolés que nous pourrions contribuer à résoudre, mais sans loi spécifique », a-t-il expliqué.
De son côté, Houcine Benmessaoud, le dépositaire de la proposition, a réaffirmé ce qu’il a inscrit au cœur du document de collecte de signatures, qui a jusqu’à présent recueilli 18 signatures numériques et 270 signatures papier. Pour que la proposition soit examinée et tranchée par le parlement, il est nécessaire de rassembler 20.000 signatures dans un délai de soixante jours. Selon lui, « la proposition part d’une réalité et ne comporte aucun caractère sectaire ».
Benmessaoud a ajouté, dans ses clarifications à Hespress, que « des personnes sont parties en Australie en 1920, et n’ont jamais demandé de passeport marocain. Il est donc difficile pour leurs descendants d’obtenir la nationalité marocaine », considérant que « le texte législatif exprime une réelle volonté de renforcer les liens entre les descendants des Juifs marocains qui n’ont pas la nationalité et le roi Mohammed VI ».
Après le début de la guerre génocidaire menée par l’armée israélienne dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023, Benmessaoud a fait état de nombreux appels reçus, soulignant que « la situation au Moyen-Orient rend la proposition législative embarrassante, étant donné que les Marocains d’Israël sont considérés comme des tueurs et des soldats ». Il a insisté sur le fait qu’il « rejette cette approche, car tous les Marocains sont des Marocains, peu importe où ils se trouvent ou ce qu’ils font ».
Le texte de la proposition, adressé à Rachid Talbi Alami, président de la Chambre des représentants, et à Nadia Bouaida, présidente de la Commission des affaires étrangères, de la défense nationale, des affaires islamiques et des Marocains résidant à l’étranger, stipule l’octroi de la nationalité marocaine à tous les Juifs marocains qui l’ont précédemment renoncée, ainsi qu’à tous leurs enfants et petits-enfants. Les services extérieurs du ministère de l’Intérieur seront chargés de recevoir les demandes des intéressés, que ce soit au Maroc ou auprès des services consulaires pour ceux vivant à l’étranger.
De plus, le document propose que « les tribunaux de première instance examinent les demandes d’obtention de la nationalité en fonction du dernier domicile du père ou du grand-père, et que les décisions rendues à ce sujet puissent faire l’objet d’un recours devant des tribunaux supérieurs et devant la commission ministérielle qui pourrait être créée pour suivre et gérer les demandes d’obtention de la nationalité ». En outre, il est prévu que « l’État mette à disposition diverses facilités, ressources et moyens pour intégrer les enfants et petits-enfants des Juifs marocains dans la vie économique, politique, religieuse, culturelle et sociale ».