SOUS LES SIRÈNES EN ISRAËL
Alors qu’Israéliens et Palestiniens comptent leurs morts depuis mercredi et qu’une trêve semble toujours un souhait inaccessible, ParisMatch.com a recueilli le témoignage d’une habitante de Tel-Aviv.
Clémentine Rebillat - Parismatch.com
Mercredi, Israël tuait le chef militaire du Hamas, Ahmed al Djaabari, lors d’un raid aérien. Depuis, la violence se déchaîne, faisant déjà 85 morts à Gaza et 3 en Israël selon l'agence Reuters. En attendant de trouver – peut-être – un début d’accord ou une trêve des combats, les tirs de roquettes et de missiles se poursuivent. A Tel-Aviv, les journées sont entrecoupées par le bruit strident des sirènes qui préviennent d’un danger imminent. «Lorsqu’une sirène retentit on a 15 secondes pour se cacher dans un bunker», confie Marianne à ParisMatch.com. Et pour la jeune femme de 24 ans qui n’a pas toujours vécu en Israël, la situation est parfois difficile à supporter. «C’est toujours beaucoup d’inquiétude quand tu es seule, que l’alarme se met à sonner et que deux minutes après, tu entends un énorme "Boum", raconte-t-elle. Dans ces moments-là, tu préfères être avec ta famille ou ton mari, mais pas seule». Elle l’avoue d’ailleurs, elle ne se «sépare jamais de [son] mari», elle n’y «arrive pas».
Et dans la ville, si la plupart des habitants continuent à sortir, certains – «des enfants et des jeunes qui n’ont jamais connu ça» - sont «choqués et perturbés et n’osent même pas aller dans la rue pour se rendre à l’école». A force d’alertes, malgré le son strident des sirènes, la population s’est malgré tout habituée à cette vie instable. «On a des bunkers partout, même parfois dans les nouveaux appartements ou les immeubles. Les gens sont solidaires et le bunker est souvent un endroit où ils discutent entre eux», commente Marianne. Et malgré l’angoisse perpétuelle d’une possible attaque sur la ville, les citoyens continuent plus que jamais à soutenir les décisions du Premier ministre, Benjamin Netanyahou. «On a une totale confiance en notre armée», assure la jeune femme.
«NOUS DÉPLORONS TOUS LESMORTS, Y COMPRIS CEUX D’ISRAËL»
Pour beaucoup dans le pays, les attaques contre la Palestine sont en effet inévitables. «Ici, en Israël, on n’était plus en sécurité depuis plusieurs mois… on avait tous les jours la menace de roquettes, se souvient-elle. Le peuple attendait que le gouvernement nous défende et agisse». Selon elle, l’opération «Pilier de Défense» débutée mercredi «était plus que nécessaire». «Il faut bien comprendre que la priorité des groupes islamistes est non pas de vivre ensemble en paix, mais de rayer Israël de la carte», affirme cette directrice en marketing et communication.
Mais alors qu’Israël affirme n’avoir pas eu d’autre choix que d’attaquer, pour les Palestiniens, la version est évidemment toute autre. D’après Jean-Claude Lefort, président de l’association France-Palestine, «il est impossible de parler de légitime défense». «Il y avait une trêve qui avait été acceptée entre les deux pays, et cette trêve a été brisée». Selon lui, si Benjamin Netanyahou a décidé d’attaquer Gaza, c’est d’abord pour une question électorale. «Comme en 2009, il veut être réélu et ancrer son gouvernement encore plus à droite avec Avigdor Liberman (fondateur et dirigeant du parti d'extrême-droite Israel Beytenou, actuel ministre des affaires étrangères et vice-premier-ministre d'Israël, ndlr)». Une attitude que Jean-Claude Lefort dénonce. «C’est insupportable que pour des questions électorales il y ait autant de morts, commente-t-il. Nous déplorons tous les morts, y compris ceux d’Israël».
«JE ME SENS PLUS ENSÉCURITÉ EN ISRAËL QU’AILLEURS»
Mais il y aurait aussi une autre raison à ces attaques récentes. «Le 29 novembre prochain, la Palestine, à l’initiative de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) a décidé de soumettre au vote la reconnaissance du pays en tant qu’Etat non-membre de l’ONU», explique le président de France-Palestine. Si l’ONU accède à cette demande, «la Palestine aura alors le droit de saisir la justice internationale, notamment pour dénoncer des crimes contre l’Humanité, et cela fait trembler Netanyahou», poursuit-il.
Si du côté israélien, l'opinion publique semble plutôt soutenir les récentes attaques, en Palestine, les sentiments sont en revanche plus mitigés. «Il n’y a pas d’harmonie entre le peuple et le jihad islamique», affirme Jean-Claude Lefort, ajoutant que les habitants de la Bande de Gaza, qui ne soutiennent ni le Hamas ni le Fatah «se sentent pris en otage» par ces conflits. «Il sont terrorisés évidemment, mais en même temps, ils estiment qu’ils doivent résister. Pas avec les armes mais en ne fuyant pas la zone». Ne pas fuir, c’est également le plus important pour Marianne: «Je me sens plus en sécurité en Israël qu’en étant juive dans un autre pays ou personne ne nous défend… Je crois en mon pays et en mon armée ainsi qu’à notre gouvernement plus que je ne crains le Hamas», soutient-elle. Le chef du bureau politique du Hamas en exil, Khaled Mechaal, a déclaré ce lundi après-midi que Benjamin Netanyahou avait finalement demandé une trêve à Gaza mais a affirmé que c’était à lui de cesser le premier le feu. «Celui qui a commencé la guerre doit la cesser», a-t-il indiqué. Reste à savoir si le Premier ministre israélien écoutera jusqu’au bout la voix de la sagesse.