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Le boycott des universités israéliennes : une victoire pour le sectarisme, par Alan Dershowitz

 

L’American Studies Association vient de publier son premier appel au boycott universitaire. Non, ce n’est pas contre la Chine, qui emprisonne les dissidents universitaires. Ce n’est pas contre l’Iran qui exécute les dissidents universitaires. Ce n’est pas contre la Russie qui renvoie les dissidents universitaires. Ce n’est pas contre Cuba, où il n’y a pas de dissidents universitaires. Ce n’est pas contre l’Arabie Saoudite, dont les institutions académiques n’embauchent ni femmes, ni homosexuels ni universitaires chrétiens. Et ce n’était pas contre l’Autorité palestinienne, dont les universités refusent toute discussion libre concernant le conflit israélo-palestinien. Non, c’est seulement contre les institutions universitaires de l’État juif d’Israël, dont les universités ont des programmes d’action positive pour les étudiants palestiniens et qui peut se targuer d’un niveau de liberté académique plus élevé que presque tous les pays du monde. 

Lorsque l’association a envisagé ce boycott j’ai lancé un défi à ses membres, dont beaucoup sont des historiens. Je leur ai demandé de trouver un seul pays dans l’histoire du monde, qui, face à des menaces comparables à celles qui accablent  Israël, a eu un meilleur comportement en matière de droits de l’homme, un degré plus élevé de respect de la règle de droit, un système judiciaire plus exigeant, plus d’inquiétude pour la vie des civils ennemis, ou plus de liberté pour critiquer le gouvernement, que l’Etat d’Israël.

Pas un seul membre de l’association ne m’a présenté le nom d’un seul pays. C’est parce qu’il n’y en a pas. Israël n’est pas parfait, mais aucun autre pays ne l’est, et Israël se comporte beaucoup mieux que la plupart d’entre eux. Si un groupe académique choisit de s’engager dans l’exercice peu académique du boycott des institutions universitaires d’un autre pays, il doit le faire dans l’ordre de la gravité des violations des droits de l’homme et de l’incapacité de ceux qui, à l’intérieur du pays, demandent réparation pour ces violations.

Au nom de ces normes, les institutions universitaires israéliennes devraient être parmi les dernières à être boycottées.

Je suis en désaccord avec la politique de colonisation d’Israël et je demande depuis longtemps la fin de l’occupation. Mais Israël a proposé de mettre fin à l’occupation par deux fois au cours des 13 dernières années. Cela a été fait en 2000-2001, lorsque le Premier ministre Ehud Barak a offert aux Palestiniens un Etat sur environ 95 % des territoires occupés. Puis à nouveau en 2008, lorsque l’ancien Premier ministre Ehud Olmert a proposé un accord encore plus généreux. Les Palestiniens n’ont accepté ni l’offre ni encore moins la responsabilité de la poursuite de l’occupation. Apparemment, alors que les pourparlers de paix se poursuivent, des efforts sont en cours une fois de plus pour essayer de mettre fin à l’occupation. Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas lui-même s’oppose au boycott académique des institutions israéliennes.

La Chine occupe le Tibet, la Russie occupe la Tchétchénie et plusieurs autres pays occupent les terres kurdes. Dans ces cas, aucune proposition n’a été faite pour mettre fin à l’occupation. Pourtant, aucun boycott n’a été dirigé contre les institutions universitaires de ces pays occupants.

Lorsque le président de l’American Studies Association, Curtis Marez, professeur agrégé d’études ethniques à l’Université de Californie, a été informé que de nombreux pays, y compris tous les voisins d’Israël, se comportent d’une manière bien pire que celle d’Israël, il a répondu : «Il faut commencer quelque part. » Ce boycott, cependant, n’a pas seulement commencé avec Israël. Il se terminera par Israël. Le commentaire absurde de Marez me rappelle la réponse faite par président antisémite de Harvard, sectaire notoire, A. Laurence Lowell, qui avait imposé des quotas anti-juifs au début du XXe siècle. Lorsqu’on lui avait demandé pourquoi il avait singularisé les Juifs par ces quotas, il avait répondu, « Les juifs trichent. » Quand le fameux juge Learned Hand lui avait rappelé que les chrétiens trichent aussi, Lowell avait répondu, « Tu changes de sujet. Nous parlons des Juifs maintenant « .

On pourrait penser que les historiens et tous ceux qui appartiennent à l’American Studies Association comprendraient qu’à la lumière de l’histoire de la discrimination contre les Juifs, on ne peut pas prendre l’État juif et les universités juives comme point de départ et point final.

L’ American Studies Association affirme qu’il ne s’agit pas de boycotter les professeurs israéliens en tant qu’individus, mais seulement les universités où ils enseignent. C’est jouer sur les mots d’une façon absurde, car aucun professeur israélien qui se respecte ne prendrait fait et cause pour le boycott fait par une association distinguant les établissements académiques israéliens de leurs enseignants. Et aucun professeur américain qui se respecte ne devrait en aucune façon soutenir les actions fanatiques de cette association.

Il ya plusieurs années, quand un boycott similaire était à l’étude, un groupe d’universitaires américains a fait circuler une pétition s’y opposant- rédigée par le prix Nobel de physique Steven Weinberg et moi-même. Voici ce qu’elle disait :

«Nous sommes des universitaires, des académiciens, des chercheurs et des professionnels de différents horizons politiques et religieux. Nous convenons tous que singulariser les Israéliens par un boycott universitaire est une erreur. Pour montrer notre solidarité avec les universitaires israéliens sur ce sujet, nous, soussignés, déclarons par la présente, être des universitaires israéliens à toutes fins de boycott universitaire. Nous allons nous considérer comme des universitaires israéliens et refuser de participer à toute activité dont sont exclus les universitaires israéliens ».

Plus de 10 000 universitaires ont signé cette pétition dont de nombreux lauréats du prix Nobel, des présidents d’universités et de grands académiciens du monde entier.

Honte aux membres de l’American Studies Association de singulariser le Juif parmi les nations. Honte à eux pour l’application d’un double standard aux universités juives. Les institutions universitaires israéliennes sont assez fortes pour survivre à ce sectarisme. La vraie question est : est-ce que sera cette association survivra à sa complicité avec le préjugé le plus ancien et le plus persistant?

Alan M. Dershowitz - http://www.haaretz.com/opinion/.premium-1.563920

Adapté par Line Tubiana.

Alan M. Dershowitz , est un avocat et universitaire américain, professeur de droit à Harvard. Il est également essayiste et romancier. Il écrit aussi pour le Huffington Post. http://fr.wikipedia.org/wiki/Alan_Dershowitz

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