Nicolas Sarkozy : ira-t-il en prison ?
Nicolas Sarkozy a fait l'objet d'une garde à vue le 20/03/2018, dans le cadre de l'affaire du possible financement libyen de sa campagne de 2007. Guillaume Jeanson, avocat au bareau de Paris et porte parole de l'Institut pour la Justice présente les risques qu'il court.
Entendu ce mardi 20 mars 2018 par la police judiciaire à Nanterre, Nicolas Sarkozy fait l'objet d'une garde à vue dans le cadre du potentiel financement libyen de sa campagne victorieuse, en 2007. C'est la première fois qu'il est entendu sur le sujet depuis l'ouverture d'une information en judiciaire, en 2013.
L'ancien président de la République, soupçonné d'avoir financé sa campagne avec l'argent de Mouammar Kadhafi pourrait risquer gros. "En droit électoral, il existe en effet un article susceptible d'inquiéter Nicolas Sarkozy s'il est reconnu coupable et condamné. Il s'agit de l'article L.113-1 du code électoral", indique Guillaume Jeanson, avocat au barreau de Paris et porte-parole de l'Institut pour la Justice un think-tank fondé en 2007 souvent rangé à droite. Dans l'écriture en vigueur, l'article L.113-1 du code électoral permet de sanctionner le financement illicite d'une campagne à hauteur de 3 ans d'emprisonnement et 4500 euros d'amende. Cependant cette version du texte date de 2017 et ne s'appliquerait en théorie pas à l'ancien chef de l'Etat. "La version en vigueur pour la période qui fait l'objet de l'enquête fait état d'une peine de prison d'un an et dune amende de 3500 euros" précise Me Jeanson.
Outre les suspicions de financement illicite de sa campagne de 2007, Nicolas Sarkozy est également concerné par d'autres affaires. Pour l'avocat, il n'est pas impossible que c'est autre cas puissent faire grimper l'addition. " Si Nicolas Sarkozy n'est pas poursuivi uniquement sur le fondement de règlements spéciaux électoraux mais également sur celui du droit commun, d'autres articles pourraient l'inquiéter. L'article 432-11 du code pénal sanctionne la corrpution passive et le trafic d'influence à hauteur de 10 ans d'emprisonnement et jusqu'à 150 000 euros d'amende." Guillaume Jeanson estime que le pire scénario pour l'ancien président serait celui d'une saga judiciaire, à la Charles Pasqua, susceptible de provoquer un cumul des affaires.
Une peine de prison possible, mais improbable
Toutefois, l'avocat tient à nuancer la situation. "Nous n'en sommes qu'à la phase d'instruction. C'est le début d'un long marathon judiciaire qui ne débouchera pas nécessairement sur une condamnation", rappelle-t-il avant d'ajouter qu'il serait" surprennant que Nicolas Sarkozy fasse de la prison ferme, sans aménagement de peine".
Quid de l'impact politique ?
La mise en garde-à-vue de Nicolas Sarkozy intervient dans un contexte où l'ancien président apparait de plus en plus dans les médias. Pour plusieurs commentateurs, il est évident qu'il nourrit des projets de retour à la vie politique. Pourtant, pour le politologue Jean Petaux, ce nouveau rebondissement judiciaire n'est pas susceptible d'éroder son capital politique... et pour cause. "Nicolas Sarkozy n'a plus de capital politique. Il est dans la même situation que Dominique Strauss-Kahn : il n'a plus aucune base."
Aux yeux du politologue, c'est une quasi certitude : Nicolas Sarkozy est fini en politique, quoi qu'il fasse. "On ne se remet pas d'une défaite à la présidentielle, à plus forte raison quand celle-ci est couronnée d'une élimination à la primaire de la droite et du centre dès le premier tour" explique Jean Petaux, qui juge les circonstances de la défaite de Nicolas Sarkozy face à François Fillon et Alain Juppé "humiliantes". Pour lui, l'ancien président de la République souffre d'une véritable démonétisation politique. "C'est parce qu'il n'y a plus d'enjeu poltique que les affaires ne représentent pas un risque politique pour Nicolas Sarkozy. Bien sûr, il reste un noyau dur de nostalgiques mais on pourrait en dire autant des bonapartistes ou des royalistes" estime l'analyste qui souligne également la chute du nombre de militants dans les grands partis traditionnels. "LR ne fait pas exception. La popularité de Nicolas Sarkozy est peut-être forte chez les militants, quoique le résultat des élections à la primaire laisse entendre l'inverse. Dans tous les cas, ils sont loin d'être aussi nombreux qu'ils l'ont été."