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Shalom Montréal: À la découverte du Montréal juif

Par Benoit Valois Nadeau - Métro

 

 

 

 

 

 

De Leonard Cohen à Socalled, des boutiques du boulevard Saint-Laurent aux rues d’Outremont, l’exposition Shalom Montréal, présentée au Musée McCord, veut souligner l’apport inestimable de la communauté juive au développement de la ville et à son identité.

Centrée sur le XXe siècle, l’expo utilise artefacts, photos d’archives et témoignages vidéo pour retracer le parcours de ces immigrants qui ont choisi Mont­réal et mettre en lumière leur apport inestimable dans cinq grands domaines: architecture, santé, droits sociaux, commerce et culture.

«Pour eux, c’était très difficile de venir ici. Ils ne parlaient pas la langue, n’avaient pas l’expertise nécessaire pour travailler, a raconté la photographe Heidi Hollinger, ambassadrice de l’exposition et descendante d’une famille juive d’origine roumaine installée à Montréal depuis cinq générations. Mais avec un peu d’humour et beaucoup de travail, sans jamais désespérer, ils ont pu surmonter les obstacles et faire une bonne vie.»

Une bonne vie et encore plus! Leur arrivée a souvent eu des répercussions sur l’ensemble de la
communauté montréalaise, voire sur le Québec tout entier.

Qu’on pense au Dr Henry Morgentaler, pionnier de l’accès à l’avortement, ou à Léa Roback, militante pour les droits des ouvrières, les immigrants juifs ont amené avec eux une conscience sociale qui allait bien au-delà de leurs coreligionnaires.

«On peut parler d’une intégration réussie, notamment parce que la communauté juive a dans ses valeurs l’aide et le partage. elle en a fait bénéficier tous les Montréalais.» – Suzanne Sauvage, présidente du Musée McCord

«Les communautés juives ont majoritairement immigré après de grands conflits mondiaux (la révolution russe avortée de 1905, les deux guerres mondiales, les diverses déclarations d’indépendance en Afrique du Nord). Ils étaient souvent déjà politisés et amenaient ce bagage avec eux. Ici, ils ont toujours été mobilisés pour de grandes causes sociales comme les droits des femmes, les droits des travailleurs, la lutte contre le nucléaire», énumère Suzanne Sauvage, présidente et chef de la direction du Musée McCord.

«Pendant des centaines d’années, en Europe, les juifs ont eu une autonomie sociale. Ils géraient leur communauté de manière autonome et avaient déjà des organismes sociaux, d’entraide, de bienfaisance, de chômage, avance Steven Lapidus, chercheur associé à l’Institut d’études juives canadiennes de l’Université Concordia et membre du comité scientifique de l’exposition. C’est une communauté qui a subi plusieurs abus au fil du temps. La très grande majorité d’entre eux était très contents de venir ici, dans un pays libre où les possibilités sociales, politiques, religieuses, financières, professionnelles étaient grandes. Ils étaient enthousiastes à l’idée de pouvoir faire finalement ce qu’ils voulaient.»

Certains ont pu faire fructifier leurs talents dans le commerce en créant des marques et des produits qui se sont implantés durablement dans le paysage québécois, comme Steinberg, Le Château ou Aldo. L’exposition fait d’ailleurs une belle place aux artisans du vêtement, de la simple couturière au designer de renommée mondiale.

Les juifs ont aussi fait leur marque en architecture, en premier lieu Moshe Safdie, créateur d’Habitat 67, l’un des immeubles les plus connus de Montréal. Shalom Montréal permet d’ailleurs d’admirer les croquis et maquettes de celui qui a obtenu son diplôme de l’Université McGill.

Montréal doit aussi une fière chandelle à Phyllis Lambert, l’une des héritières de la puissante famille Bronfman, qui a fondé le Centre canadien d’architecture et sauvé des dizaines de bâtiments patrimoniaux des pics des démolisseurs.

Mais c’est peut-être dans le domaine culturel que l’empreinte juive est la plus marquée, notamment grâce à Leonard Cohen et Mordecai Richler – dont on peut observer la machine à écrire –, deux artistes de renommée mondiale qui ont toujours revendiqué leurs racines montréalaises.

«On a choisi de se concentrer sur la littérature, la peinture et la musique. On aurait pu parler du théâtre juif et de plein d’autres choses, tellement c’est une culture riche, illustre Suzanne Sauvage. Malheureusement, il a fallu faire des choix stratégiques.»

Une place importante est donc accordée aux peintres juifs de Montréal, une école artistique foisonnante dans l’entre-deux-guerres. Les Alexandre Bercovitch, Sam Borenstein, Louis Muhlstock et Ernst Neumann ont peint la ville et ses habitants avec une grande sensibilité, à une époque où les peintres des deux autres «solitudes» se concentraient le paysage.

Si les années où le yiddish était la troisième langue la plus parlée à Montréal (derrière le français et l’anglais) sont révolues, la communauté juive demeure forte de 90 000 personnes dont l’identité est profondément montréalaise.

Shalom Montréal se termine d’ailleurs avec une installation dans laquelle 14 jeunes juifs montréalais témoignent de leur attachement pour Montréal et leur communauté.

«Ça boucle la boucle, en quelque sorte, note Suzanne Sauvage. Ce sont des jeunes complètement intégrés, heureux de vivre ici. Il n’y a pas de doute que, pour eux, c’est leur ville.»

 

 

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