Le plan de paix de l’Administration Trump et l’affaire Khashoggi (info # 011111/18) [Analyse]
Par Guy Millière © Metula News Agency
J’entends revenir ici une fois encore sur le plan de l’administration Trump pour la paix au Proche-Orient. J’ai récemment expliqué que la "solution à deux Etats" à laquelle songe Donald Trump n’implique pas la création d’un Etat palestinien confié à l’Autorité Palestinienne, et que, de toute façon, Donald Trump n’entend pas imposer quoi que ce soit à Israël.
Des rumeurs continuant à courir, des phrases énoncées dans des interviews se trouvant citées, il importe de développer notre analyse. Un point essentiel doit être énoncé dans ce souci : quel que soit le plan qui sera proposé, il sera refusé par l’Autorité Palestinienne, et le pensionnaire de la Maison Blanche et son administration le savent assurément. Ce ne sera donc pas un plan destiné à être mis en œuvre, et il ne le sera pas. Ce sera un simulacre, sa présentation sera une présentation de pure forme.
Pour montrer sa bonne volonté le gouvernement israélien pourra affirmer qu’il l’accepte "en principe", cela ne lui coûtera strictement rien. L’Autorité Palestinienne, quant à elle, n’aura pas même l’opportunité d’afficher sa bonne volonté : elle a tellement excité la population qui est sous sa coupe, elle a tant martelé qu’elle ne transigerait pas et ne voulait rien entendre qui n’inclût Jérusalem et le retour de cinq millions de réfugiés, qu’elle est prisonnière de son discours. Elle restera une nuisance, ou elle disparaîtra. Il n’y a pas de troisième possibilité. Imaginer que l’AP puisse accepter un fragment de la Judée-Samarie, une capitale ailleurs qu’à Jérusalem et un abandon de ce qu’elle appelle le "droit au retour" est faire preuve de bien trop d’imagination. Imaginer qu’elle pourrait reconnaitre Israël en tant qu’Etat juif ou Etat du peuple juif ayant aussi sa capitale à Jérusalem est infiniment trop optimiste également.
Comme je l’ai déjà écrit, le plan présenté ne sera qu’une étape. Et ce qui importe est ce qui suivra cette étape. Les acteurs essentiels à ce moment seront Israël, l’Arabie Saoudite, l’Egypte et la Jordanie.
Ce qui prendra forme à l’issue de la publication du plan dépendra aussi de la situation d’autres pays : l’un de ces autres pays est l’Iran. L’asphyxie de l’Iran par les sanctions U.S. devrait priver d’oxygène les mouvements “palestiniens”, dont Téhéran est désormais l’une des principales sources de financement.
Deux autres de ces pays sont la Turquie et le Qatar, qui financent aussi les mouvements “palestiniens”. Ils subissent actuellement d’intenses pressions de l’administration Trump et de l’Arabie Saoudite, et ont intérêt à freiner leur enthousiasme. Turquie et Qatar sont, outre les mouvements “palestiniens”, des soutiens principaux des Frères Musulmans.
Dans le cadre de cette réflexion, il nous faut considérer ce qui a été ces derniers temps, et reste l’affaire Jamal Khashoggi. Celui-ci n’était pas, comme d’aucuns s’efforcent de le présenter, un simple journaliste, mais un membre important des Frères Musulmans s’activant à la déstabilisation de l’Arabie Saoudite en général, et du prince Mohamed ben Salman, en particulier.
Je doute que l’on sache un jour pleinement ce qui s’est passé dans le consulat saoudien d’Istanbul. Ce qui est certain est que Jamal Khashoggi a été éliminé physiquement. Il est douteux qu’il l’ait été sur ordre de Mohamed ben Salman, car il était loisible à MBS d’éliminer un agent de déstabilisation des Frères Musulmans de façon moins compromettante. Il est possible qu’il se soit agi d’une tentative d’enlever Jamal Khashoggi et de le ramener en Arabie Saoudite aux fins de le faire parler et de le neutraliser. Il est également possible qu’il se soit agi, à priori, d’une opération destinée à nuire à Mohamed ben Salman. Toutes les hypothèses sont envisageables et la vérité restera dans l’ombre et les ténèbres, même si des réponses apparemment probantes sont d’ores et déjà proposées.
Ce qui est certain, outre l’élimination physique de Jamal Khashoggi, est que le Qatar, la Turquie, l’Iran et tous ceux qui ne veulent ni l’asphyxie de l’Iran ni celle des mouvements “palestiniens” ont intérêt à donner un retentissement maximum à cette sordide affaire.
Affaiblir l’Arabie Saoudite, s’en prendre à Mohamed ben Salman, c’est s’en prendre au plan de paix régional authentique qui est en cours d’élaboration. Celui qui s’échafaude dans l’ombre du simulacre.
Donald Trump a été poussé à sanctionner l’Arabie Saoudite et Mohamed ben Salman ; ceux qui ont fait pression sur le Président n’ont naturellement que faire du sort de Jamal Khashoggi, et savent pertinemment que Khashoggi n’était pas le journaliste lambda qu’ils évoquent. Leur but est ailleurs.
Le gouvernement israélien est resté en retrait sur l’élimination de Khashoggi, soulignant l’essentialité de la stabilité à la tête de l’Arabie Saoudite pour l’intérêt du Moyen-Orient. C’est la meilleure attitude qu’il pouvait adopter.