Pinhas est Eliahou. Par Rav Itshak Peretz
Il est dit que Pinhas n’est autre que Eliahou Hanavi. Qu’entend-on par là? Puisque d’un point de vue chronologique, Pinhas a vécu avant Eliahou, il aurait donc fallu dire l’inverse: que Eliahou n’est autre que Pinhas.
Eliahou et Pinhas ne font qu’un, personnalisant l’homme qui n’est pas soumis aux aléas du temps, pour preuve, Pinhas remontera le temps et deviendra Cohen après le décret de D-ieu; quant à Eliahou, il est présent dans trois cérémonies: chaque Brith mila, lors de la havdalah motsé chabbat, et au seder de Pessa’h.
Le mot verre en hébreu se dit cos (כוס), sa valeur numérique, de 86, est identique à celle du nom Elokim אלהי”ם, qui correspond à la gvoura, celle là même dont Pin’has fit preuve.
Or, trois fois le mot cos כוס a une valeur numérique de 258 (86 * 3 = 258). Zimri זמרי, a lui aussi, une valeur numérique de 258 en comptant le nom lui-même. En effet, lorsque l’on ajoute, lors de l’établissement de la valeur numérique d’un mot, le mot lui-même, on l’adoucit; avec “un” en plus, la valeur numérique de Zimri devient 258 comme trois fois le mot cos!
Pin’has a réussi à “adoucir” la colère d’Elokim, évitant que le peuple tout entier disparaisse dans l’épidémie qui s’abattit sur la tribu de Shimon. En tuant Zimri, il lui permit de sortir de la faute première d’Adam et ‘Hava qui, selon la kabbalah, ne purent attendre le chabbat pour s’unir, le fruit devenant alors le symbole de cet acte empressé. La mort est réparatrice pour Zimri, du fait que l’âme est éternelle et le corps qui a fauté, se doit de disparaître.
Nous voilà donc face à un homme: Pinhas-Elihaou, immortel, contrairement à Adam qui a reçu la vie éternelle dans le Gan Eden et en fut chassé, Eliahou Hanavi va contrer la malédiction et monter vivant au Gan Eden avec son corps, signe par là même, d’un lien avec le passé le plus ancien, l’aube du monde. Mais Eliahou annoncera la Gueoula, signe de son rapport avec le futur éternel, en étant tout à la fois présent entre ces périodes, dans les trois cérémonies célébrées avec un verre de vin, le verre et le vin, étant ici, symboles de gvoura maîtrisée, adoucie.
Suite à sa faute, Adam perd son statut d’homme Éternel et bascule dans l’obscurité: la mort, car incapable de se retenir de manger d’un fruit, qui selon le Zohar, était la vigne, il alluma d’ailleurs dès son renvoi du Gan Eden, Motsé chabbat un feu, et il ne lui resta de sa spiritualité première que le sens de l’odorat, cela ne vous rappelle rien? La havdala que nous célébrons est le fait d’Adam Harishon dans son intégralité, mais aussi, vous l’aviez compris, celle de Eliahou Hanavi, avec un verre de vin, de braha, réparant la chute due au serpent, appelé maudit ארור.
Noa’h, le seul à être appelé Tsadik par la Torah, car gardant le brith, alors que toute l’humanité est débauchée, va à son tour, commettre une erreur grave à sa sortie de l’arche, en plantant … une vigne, là tout va se dégrader. “Noah, d’abord cultivateur commença à planter une vigne” et Rachi de préciser que le mot וַיָּחֶל Waya‘hèl: commença, est à rapprocher de ‘houlin (profane), il s’est lui-même profané, car il aurait dû commencer par planter autre chose (Beréchith raba 36). Eliahou se présente dans chaque cérémonie de Brith mila, comme il est écrit “et ton peuple est composé de tsadikim” car ils ont tous la Brith mila, et pour s’assurer que l’enfant sera Saint, il se présentera, et nous le célébrons avec un cos, un verre de… vin! Le verre de la braha כוס של ברכה, par opposition à celui qui fit tomber Noah, son fils ‘Ham appelé par son père Maudit ארור.
Concernant Avraham, il est écrit:
“Le soleil étant sur son déclin, une torpeur s’empara d’Avraham: tandis qu’une angoisse sombre profonde pesait sur lui.”
Rachi – Tandis qu’une angoisse: Allusion aux angoisses et aux ténèbres de l’exil (Beréchith raba 44, 17).
D-ieu dit à Avraham: « Sache-le bien, ta postérité séjournera sur une terre étrangère, où elle sera asservie et opprimée, durant quatre cents ans.”
Rachi – Ta descendance sera étrangère: Quatre cents ans se sont écoulés entre la naissance de Its‘hak et la sortie d’Israël d’Egypte […] Eliezer propose de marier son fils, Its’hak, à sa fille, et Avraham de répondre: Tu es Maudit et mon fils est béni, et un maudit ne peut s’attacher au béni !! Its’hak a pour valeur numérique 208 comme … Pinhas !
Rachi précise que le décompte des années se fait à partir de la naissance de Its’hak. Or lorsque les anges visitent Avraham pour lui annoncer, entre autres, la naissance d’Its’hak, il va leur servir des galettes, Rachi précise, que ce jour-là était celui de Pessah, avant même que ses descendants ne descendent en Egypte.
Or nous servons à la fin du seder de Pessah, un cinquième verre de vin, appelé le verre… de Eliahou Hanavi, voilà donc le dernier pont établi entre le troisième grand homme du début de notre Torah et Eliahou Hanavi, là encore avec un verre de braha.
Il est à noter que dans les trois cas, Adam Noah et Avraham perdent conscience, ils s’endorment:
Adam, lorsque D-ieu sorti de lui une côte pour “fabriquer” la femme.
Noa’h va s’enivrer, dormir et perdre de sa dignité.
Avraham, tombera lui aussi dans un sommeil très profond et verra ses enfants descendre en Egypte. La célébration de sa sortie se fait lors du seder de Pessah avec quatre verres de vin, puis avec un cinquième, versé pour le prophète Eliahou, celui-là même qui fut, une fois appelé Pinhas, et fut en éveil plus que tous autour de lui, surtout pour entendre et ressentir ce que D-ieu Lui-même demandait que l’on accomplisse, parce que Pinhas c’est Eliahou!! Celui qui nous fera basculer dans la vie éternelle, du fait qu’il y est déjà lui-même, la fin étant reliée au début et le début à la fin.
Rav Itshak Peretz