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Algérie, Tunisie, Maroc : la vraie histoire de l’Alyah des juifs d'Afrique du Nord - Par Felix Perez

 

 

 

 

Algérie, Tunisie, Maroc : la vraie histoire de l’Alyah des juifs d'Afrique du Nord

Par Felix Perez

 

L’ayah des juifs d’Afrique du Nord, un sujet aussi vaste que les étendues du Sahara. Difficile de l’explorer sans guide. Avec la rigueur du  scientifique et la patience du Bédoin, Félix Perez, auteur d’ouvrages historiques et religieux, s’est attelé à explorer ce sujet, à démonter les a priori, à rétablir certaines vérités afin de nous le rendre accessible. A l’occasion de sa conférence exceptionnelle – Dimanche 18 Novembre à Jérusalem – il a bien voulu répondre à nos questions et nous donner un aperçu de la véritable histoire des Juifs d’Afrique du Nord. A lire sans modération !

Combien compte-t-on de juifs d’ascendance d’Afrique du Nord en Israël ?

On en compte plus de 1.1 millions, dont plus de 850000 issus du Maroc, 200000 de Tunisie, 50000 d’Algérie.
A noter que, fin des années 40, vivaient environ 250000 juifs au Maroc, 120000 en Tunisie, 150000 en Algérie.

Que dire des premières vagues d’Alyahs ?

Elles démarrent massivement au Maroc et en Tunisie, avant même leur indépendance et dès après la création d’Israël en 1948, avec déjà 20% d’Alyahs. Ceci est surtout dû aux efforts des envoyés israéliens, des mouvements sionistes locaux et à la pauvreté régionale dans bien des cas. Sans oublier pour le Maroc, la grande importance de la dimension religieuse. Ces départs ont lieu en grande partie vers Israël.

  • De 1948 à 1951 : du Maroc 28000 juifs (11% d’entre eux), de Tunisie 13000 (aussi 11%) et d’Algérie 4000 (moins de 3%).
  • De 1951 à 1956 : du Maroc 25000 (10%) et de Tunisie 12000 (aussi 10%).
  • De 1951 à 1961 : d’Algérie 3500 (moins de 2%). L’intégration nationale y est si forte que la proportion d’Alyah y est 4 fois moins importante, malgré des mouvements sionistes localement très présents.

A quelles périodes eurent lieu les grandes vagues d’Alyah de ces 3 pays ?

Ces vagues vont s’intensifier après leur indépendance. A noter que la plupart des migrations du Maroc eurent, là encore, directement lieu vers Israël.

  • De 1956 à 1961 : du Maroc 70000 juifs (28% d’entre eux) et de Tunisie 12000 (10%).
  • De 1961 à 1971 : du Maroc 131000 (52%) et de Tunisie 11000 (9%).
  • De 1961 à 1971 : d’Algérie : 13000 (9%), puis 7600 ensuite (5%)

Au total et depuis 1948, les Alyahs en provenance directe de Tunisie furent donc en proportion 2 fois moins nombreuses que celles du Maroc et celles d’Algérie 5 fois moins nombreuses.

Quel était le profil de ces Olim ?

  • Les premières vagues d’Alyahs d’Afrique du Nord correspondent à des populations plutôt jeunes et peu aisées ; beaucoup des Olim marocains étaient religieux. Les immigrants furent touchés par les efforts d’Israël qui avait besoin de main d’œuvre et qui voulait les aider ainsi que par les perspectives économiques d’une nation où tout semblait à bâtir.
  • Les vagues ultérieures d’Alyahs furent la conséquence des difficultés à rester en pays musulmans en l’absence de protectorat et touchèrent donc tous les publics. Néanmoins, ceux qui choisissaient Israël plutôt que la France étaient des personnes touchées par le discours sioniste et/ou religieux.

Existe-t-il des spécificités de l’accueil en Israël de de ces populations immigrées en fonction de leur pays d’origine ?

Si une différence existe entre eux, elle provient davantage de leur richesse économique ou éducative que de leur pays de provenance. Les mieux lotis sur ces plans se sont le plus vite intégrés.

Comme pour tous les immigrés non ashkénazes, les arrivants en provenance du Maroc, de Tunisie et d’Algérie n’eurent pas la tâche facile et furent souvent ostracisés. Préposés aux tâches ingrates ou à de « petits boulots », on les cantonna dans des quartiers difficiles de zones pauvres en développement ou en banlieues naissantes de grandes villes et on les dissémina dans tout le pays.

Cependant, en moins de deux générations, la plupart d’entre eux se sont pleinement intégrés dans tous les domaines, sans le plus souvent délaisser leurs spécificités.

Subsiste-t-il des spécificités du mode de vie des descendants de ces populations ?

Les Juifs algériens en Israël

Les juifs algériens furent de tout temps très intégrés à la culture française qui subsiste encore chez eux.

A noter parmi tant d’autres, les apports essentiels de Manitou, des Grands Rabbins Naouri, Sirat, Hazan, Zini, Cherqui, Haïk… ou, en matière de missile balistique, de Charley Attali.

Avec moins de spécificités culturelles propres, ils s’intègrent plus facilement.

Un site internet préserve leurs apports : www.Zlabia.com

Les juifs marocains en Israël

Les juifs marocains ont pour la plupart gardé musiques, plats, coutumes ou héritages culturels et religieux. On ne compte pas les chanteurs, hommes politiques, grands Rabbins, acteurs, scientifiques israéliens… d’ascendances marocaines. Ils gardèrent longtemps un attachement envers le Roi du Maroc qui avait fini par autoriser leurs massives Alyahs.

Ces fortes spécificités entraînent leurs descendants à davantage se marier entre eux que ceux d’Algérie ou de Tunisie.

Dafina.net est le site de référence des juifs marocains.

Les juifs tunisiens en Israël

Les juifs tunisiens se situent à mi-chemin avec, au départ, une assez bonne intégration, soit israélienne pour les premiers arrivants, soit française pour les immigrés d’après 1962. De ce fait, leur attachement « tune » existe, mais sans être aussi prégnant que le marocain.

On notera parmi bien des noms ceux du Rabbin du Kotel entre 1968 et 1995 (Rav Guets ou Guez), de nombreux scientifiques, hommes politiques (Nissim Zvili, Sylvan Chalom, Eli Yshai…), artistes (Kobi Oz, Eti Enkry, Corinne Hallal…) et des gardiens de la Mémoire comme Claude Sitbon.

Harissa.com reste le site de base des juifs « tunes ».

Quel est l’apport économique et militaire de ces juifs d’Afrique du Nord à Israël ?

On compte plus de 1.1 millions d’entre eux en Israël, avec une démographie supérieure à la moyenne nationale. Ces citoyens sont plutôt jeunes, dynamiques et diplômés. En proportion des vrais actifs israéliens (hors personne hors circuit économique ou militaire de leur propre fait), ils représentent plus de 20% des forces vives du pays.

Comme sans le million de juifs d’origine ex-URSS, Israël ne pourrait pas se concevoir aussi fort qu’il ne l’est aujourd’hui sans ces populations.

Comment jugez-vous l’alyah actuelle de France ?

Depuis 2000, plus de 40000 juifs ont au total immigré de France ; c’est à la fois peu et beaucoup.
Cela ne représente hélas que 10% d’entre eux qui laissent les autres avec des taux de mariages mixtes de 50% : les jeunes juifs de France doivent absolument faire leur Alyah. Ces personnes sont soit jeunes et pleins de projets, soit âgés et avec un potentiel économique à ne pas négliger.

Culturellement, l’apport de la culture française est fondamental. Regardons l’exemple de Levinas, l’un de grands philosophes du 20è siècle, dont l’œuvre est traduite en hébreu grâce à ses descendants immigrés en Israël.

Quels conseils donnez-vous aux Olim de France / ou institutions israéliennes pour faire de l’Alyah une réussite ?

Les Olim et les institutions qui les aident passent leur temps à vouloir vivre en assistés. Il faut que les immigrants apprennent l’hébreu et se prennent en main. A l’instar de ces juifs russes qui n’ont pas hésité à bosser en se dégradant, tels leurs ex chefs d’orchestre qui jouaient dans la rue ; leurs descendants occupent bien souvent des jobs de premier plan !

Certes il subsiste des problèmes d’équivalence de diplômes en Israël : certains doivent encore hélas être résolus par Israël, et au plus tôt ! Mais bien d’autres ne sont pas solubles : ce n’est la faute à personne si les règles de comptabilité ou de droit sont ici absolument différentes d’en France…

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