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Hymne à l’Europe de Bernard-Henri Lévy

Hymne à l’Europe de Bernard-Henri Lévy

 

 

 

 

Par Michaël de Saint-Cheron

Servi par un époustouflant Jacques Weber, Bernard-Henri Lévy peut se sentir heureux et soulagé après la première de sa pièce « Hôtel Europe », au théâtre de l’Atelier, à Montmartre. La salle a salué debout la performance de l’acteur et le texte du philosophe-écrivain-homme -d’action. L’histoire : celui-là même qui écrit, se retrouve dans une chambre d’hôtel à Sarajevo, seul, deux heures avant de prononcer un discours sur l’Europe. Jacques Weber, dans ce huis-clos, ce monologue qui fait danser les siècles, à la Hugo, à la Malraux, à la Byron, en appelle aux plus grands de la culture, ceux qui firent l’Europe de l’intelligence, de l’art, de la création, pour mieux répondre à tous ceux qui de Bruxelles ou d’ailleurs n’en font plus qu’une im-puissance financière, incapable de se retrouver sur des valeurs et des combats communs.

Grasset, qui publie le livre, où la pièce est suivie de Réflexions sur un nouvel âge sombre, doit activer ses agents partout en Europe – et dans le monde – pour la faire traduire aux quatre coins de notre continent et bien au-delà. Qu’elle soit déjà traduite en grec et en croate, l’ancien serbo-croate devenu trois langues distinctes sur combien de morts – mais aussi en russe et bien sûr en allemand ?

Il a du souffle Bernard-Henri Lévy, de la grandeur, de l’utopie, dans son dialogue intérieur où l’on rencontre Goethe, Hegel, Hérodote, Aristote, Byron, Baudelaire, Malraux, Levinas, Semprun  et combien d’autres géants mais aussi Mitterrand, Kadhafi, M. Soral mais aussi le Pape François, les naufragés de Lampedusa…. Benny Lévy aussi, l’ami français, sartrien, devenu talmudiste et Israélien.

Coup de gueule sur la manière d’avoir voulu redresser la Grèce d’une manière si tyrannique selon le plan du banquier Gerhardt, coup de gueule à l’encontre du clan Le Pen et de tous ceux qui laminent l’Europe et ses valeurs spirituelles millénaires, qui sont bibliques et donc juives autant que chrétiennes et grecques. Mais Bernard-Henri Lévy va plus loin encore dans ses « Réflexions » qui commencent encore à Sarajevo, où il aborde Sabra et Chatila mais aussi l’affaire Merah ou Nemmouche aujourd’hui, avant d’aborder Sartre, Nietzsche et Brecht et la question « La Bible ou Dante ? » mais encore le cas Wagner.

L’un des chapitres les plus importants pour l’auteur est le court chapitre 7 « Être Juif en Europe ». On ne savait pas Bernard-Henri Lévy si féru de Torah, de Talmud, de Midrash, citant non seulement le célèbre rabbi Akiba et aussi Bar Kokhba (que Malraux cita enssemble dans son admirable discours pour le centenaire de l’Alliance Israélite universelle en 1960), mais encore R. Chimon bar Yohaï, qui subsuma si l’on peut dire le baiser de deux frères y voyant « un moment messianique illustrant la rencontre de ces deux peuples qui s’enorgueillissent, l’un (Esaü) de son « royaume », l’autre (Jacob) du « monde »…. »

Bernard-Henri Lévy montre que c’est en Europe que treize ou quatorze siècles durant le génie juif se développa comme nulle part ailleurs depuis l’exil de Jérusalem et de sion. Il cherche à convaincre les Juifs d’Europe et d’abord de France que ces bouffées tyranniques d’antisémitisme mêlées d’antisionisme, ne peuvent pas, ne doivent pas marquer la fin du judaïsme européen. Il relit Milner, Les penchants criminels de l’Europe et écrit :

« Je suis ce Juif d’Europe qui ne se fait guère d’illusion sur les penchants criminels de l’Europe grecque, romaine, chrétienne, ou des Lumières. Je suis ce Juif français qui voit avec effroi Amalek, en plein Paris, revenir dans les habits d’un nouveau discours de la haine qui laisse trop souvent mes concitoyens de marbre. Mais je sais que je n’échapperai pas pour autant, à ma vocation d’Européen. Je sais que c’est en Europe que j’aurai à accomplir, ou non, mon destin de Juif et d’homme. Et je sais que si le messianisme a un sens, si ce lent et douloureux travail par quoi le messianisme accompagne l’histoire du monde doit être, encore, l’affaire des Juifs modernes, c’est à tout moment et en tout lieu que, naturellement, il s’accomplira – mais que la scène principale restera, pour eux, celle de l’Europe. Jérusalem, bien sûr – comment en irait-il autrement ? »

Bernard-Henri Lévy - comme Rosenzweig avant guerre, mais surtout comme Levinas, Wiesel (qui vit dans la ville la plus européenne des Etats-Unis, New- York), Celan, Jabès après la Shoah, parmi tant d’autres juifs épris à un degré ou un autre des valeurs universelles du judaïsme – ne pouvait choisir de vivre qu’en Europe. Le choix de Benny Lévi, même s’il le respecte naturellement, est inconciliable avec ses propres valeurs.

Le dernier mot de la pièce de théâtre comme du livre est un appel ou plus précisément un APPEL aux grands hommes, aux grandes femmes du passé mais aussi de l’à-venir, pour qu’ils et elles viennent sauver l’Europe de ses penchants criminels.

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